La CGT s'insurge de l'utilisation de fonds publics pour l'implantation au Tertreau de ce groupe prospère, qui « s'apprête à réduire ses effectifs à Tours-Nord ».
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Les conditions accordées à L'Oréal pour son Implantation sur le parc technologique du Tertreau suscitent l'indignation de la CGT qui y voit « une utilisation scandaleuse de fonds publics ». La décision prise par le conseil municipal de Notre-Dame-d'Oé, réuni le 7 novembre, est interprétée comme un « cadeau » injustifié envers le géant mondial du cosmétique.
Rappelons que la délibération municipale autorisait le maire à signer le protocole d'accord conclu avec la multinationale prévoyant la prise en charge, par les collectivités locales, d‘une partie des travaux d’aménagement et d’infrastructures ainsi que l’exonération de la taxe professionnelle pendant deux ans, ce qui représente pour la commune une somme évaluée à 350.000 F à laquelle s'ajoutent les parts du département (500.000 F) et de la Région (750.000 F).
Contre le « gaspillage »
La section syndicale CGT de Synthélabo (filiale pharmaceutique de L'Oréal installée à Tours-Nord) s'insurge contre cette utilisation des fonds publics, en faisant valoir que le groupe a augmenté de 20 % ses bénéfices imposables et de 17,5 % son chiffre d'affaires au cours du dernier exercice. Le syndicat considère au surplus que cette implantation ne s'imposait pas à Notre-Dame-d'Oé « alors que L'Oréal dispose de terrains sur le site voisin de Synthélabo ».
La CGT insiste sur la responsabilité du groupe dans la détérioration de l'emploi : « L'Oréal, c'est Chiminter devenu Eurofab avec 200 postes supprimés ; c'est aussi Synthélabo qui transfère des productions sur d'autres sites en France ; c'est encore un groupe qui délocalise à l’étranger et s’appète à réduire ses effectifs, notamment à Tours-Nord... »
Pour un contrôle des fonds
Dans ces conditions, le syndicat « condamne ce gaspillage alors que l'argent fait cruellement défaut par ailleurs, en particulier dans le domaine de la santé ». Et de conclure : « Il est urgent d'empêcher que les élus puissent financer n'importe quoi... »
A son tour, l’Union départementale CGT enfonce le clou en énumérant ses diverses interventions pour un contrôle de l'utilisation des fonds alloués aux entreprises par le biais d'une commission départementale, laquelle « n'a rien à voir avec celle, mise en place au conseil régional, qui n'est chargée que d'une évaluation ». Et de citer l'attribution par le département de 41,8 millions de francs au bénéfice des entreprises en 1994 (subventions, exonérations, etc.), « alors même qu'il réduit des dépenses sociales de sa compétence dans les secteurs de l'enfance ou des personnes âgées ». Sans compter le financement par l'État, au moyen du FNE (Fonds national pour l'emploi), des « plans sociaux » qui organisent les suppressions d'emplois.
« A Notre-Dame-d’Oé, conclut l’UD-CGT, on a fait appel aux contribuables pour 350.000 F. Avec les sommes versées par le département et la Région, ils sont sollicités trois fois : c'est la ponction publique ! Une telle opération pour la création de deux emplois de haut niveau qui peuvent se révéler précaires... »
Le « rapport qualité-prix » peut sembler bien maigre, en effet. Reste que, pour communes désireuses d'attirer les entreprises sur leur territoire, la pratique des exonérations de taxe professionnelle est devenue... monnaie courante.
Alain Nordet, La Nouvelle République, Jeudi 15 décembre 1994