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Billet de blog 17 février 2015

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L'extradition de Sandoval devant la Cour de cassation

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Ce mercredi 18 février,  la chambre criminelle de la Cour de cassation (1) rendra sa décision sur l'extradition de Mario Sandoval. Poursuivi en Argentine pour privation illégale de liberté aggravée, tortures, faits constitutifs de crimes contre l’humanité commis au sein de l’École de mécanique de l´Armée (ESMA), l'un des principaux centres de torture et de disparition sous la dictature de Videla, Mario Sandoval fait l'objet d'une demande d'extradition de la part de Buenos Aires, requête fondée sur la responsabilité de ce dernier dans la disparition d'Hernàn Abriata, un jeune architecte enlevé au domicile familial dans la nuit du 30 octobre 1976. 

     La lecture de la délibération se déroulera en audience publique. Le Collectif argentin pour la mémoire a appelé le plus grand nombre à se rendre au Palais à 14 heures, afin de soutenir la position du collectif  d'ONG (2) lesquel demande aux juges constitutionnels "d'aller dans le sens de la jurisprudence française en matière de crimes contre l'humanité et des obligations internationales de la France." Autrement dit , elles attendent des conseillers de la haute juridiction dont le rôle est de juger en droit et non sur les faits,  qu'ils se démarquent des réquisitions contestables de l'avocat général et confirment l'avis de la chambre d’instruction de la Cour d’appel de Paris, laquelle avait rendu un avis favorable à l’extradition de Mario Sandoval vers la capitale fédérale le 28 mai 2014.

     Ayant acquis la nationalité française, le justiciable Sandoval avait saisi le Conseil constitutionnel le 9 septembre 2014, estimant que l'arrêt en appel portait atteinte à la  Constitution, le requérant se fondant sur le principe de non- extradition des nationaux . Dans une décision du 14 novembre 2014 (3), les Sages ont bien confirmé ce principe constitutionnel et celui selon lequel "la loi doit être la même pour tous" mais elle a rappelé  que l'article 696-4 du Code de procédure pénale  dispose "que cette nationalité est appréciée à l'époque de l'infraction pour laquelle l'extradition est requise." Le législateur ayant "entendu faire obstacle à l'utilisation des règles relatives à l'acquisition de la nationalité française pour échapper à l'extradition". l'arrêt de la cour d'appel de Paris contesté  n'ayant pas transgressé le principe d'égalité devant la loi, les juges du Palais royal avaient renvoyé l'affaire devant la Cour de cassation.

     Contre toute attente, ainsi que le rappelle un communiqué du collectif sus-cité, le représentant du ministère public de la Cour de cassation a estimé lors d'une audience du 21 janvier 2015, que les crimes contre l'humanité imputés à Sandoval n'étaient pas incriminés en droit argentin, au moment de la dictature! Une manière de balayer la Constitution argentine de 1994 et les décisions de la Cour Suprême selon lesquelles les atrocités perpétrées et les disparitions forcées commises dans les années 1970 constituaient des crimes contre l’humanité. Reprenant les arguments spécieux de l'avocat de Sandoval, l'avocat général a parallèlement demandé à la Cour de cassation de nier le caractère continu du crime de disparition forcée concernant Hernàn Abriata, le magistrat expliquant que « la dictature a pris fin en décembre 1983 et [qu'il] il est douteux que H. Abriata continue d’être séquestré depuis cette date ». Une façon de laisser accroire que la victime serait sortie indemne par miracle du centre de torture l'ESMA... puisqu'on ne l'a jamais retrouvée. Un disparu volontaire en quelque sorte, ce qu'infirme clairement le témoignage de sa mère présente lors de son arrestation brutale. Autrement dit, circulez, y'a rien à voir.

S'insurgeant contre cette position de l'avocat général, les organisations membres du collectif insistent sur la gravité que constituerait la remise en cause du caractère continu du crime de disparition forcée, la qualifiant de " grave violation des obligations internationales de la France".

C'est d'ailleurs sur la base de cette jurisprudence constante, tant au niveau français, argentin qu'au plan international, que la cour d'assises de Paris a condamné, le 17 décembre 2010, plusieurs responsables chiliens et argentin pour la disparition de citoyens franco-chiliens sous la dictature de Pinochet. Etayant leur argumentaire, la FIDH et les autres organisations françaises et argentines du collectif rappellent dans leur communiqué du 10 février dernier (3) que "la France a promu et ratifié la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, qui dans son article 8.1b rappelle le caractère nécessairement continu de ce crime, qui ne cesse que lorsque le sort réservé à la personne disparue est connu". Ce qui n'est pas le cas. Dont acte.

Témoignage de la mère d'Hernàn, 

Beatriz Rosa Gertrudis Cantarini de Abriata 

http://youtu.be/z6le43A-gvM

1) Palais de Justice de Paris -5, quai de l'Horloge, 

L’entrée du public du palais de justice s’effectue uniquement au 6 boulevard du Palais. Voir le plan d’accès.

Pour toute information relative à une procédure devant la Cour : 01-44-32-95-59/01-44-32-95-95

 Les transports publics qui peuvent être utilisés pour s’y rendre sont les suivants :

- métro : 

ligne 4, stations Cité ou Saint-Michel

ligne 10, station Saint-Michel

- RER B et C, station Saint-Michel

2) Fédération internationale des Droits de l'Homme (FIDH) et ses organisations membres en France, Ligue des Droits de l'Homme, LDH, Association des Chrétiens pour l'Abolition de la Torture (ACAT),  France-Amérique latine, CAJ (Comité de Acción Jurídica), LADH (Liga Argentina por los derechos del hombre), CELS (Centro de Estudios Legales y Sociales),

(3) décision n° 2014-427 QPC du 14 novembre 2014

(4) communiqué du collectif en espagnol: https://www.fidh.org/es/americas/argentina/16951-argentina-varias-ong-denuncian-la-postura-de-la-fiscalia-francesa-en-el

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