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Billet de blog 28 avril 2016

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La force du groupe

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il y a une distance ente savoir et comprendre. Nous savons tous que l’union fait la force, même les Belges. Mais le ressentir comme   une gifle qui vous surprend en train de rêver, c’est plus rare.

J’étais donc à traîner devant mon écran de TV, à regarder une émission sur la nouvelle cuisine, et l’on parlait longuement de son émergence. Ça commence par la formation d’une bande de jeunes chez Jacques Pic, à Valence qui s’émancipe de la cuisine traditionnelle, codifiée depuis plus de soixante ans par Auguste Escoffier. Et puis dans le tumulte de cette révolution de fourneaux, une bande se forme autour de Michel Guérard, Alain Senderens, les frères Troisgros ou encore Alain Chapel, sans oublier, en meneur de revue, Paul Bocuse et le duo Gault et Millau en griots de cette belle tribu. Ce qui me frappait, dans les interviews et les documents présentés, c’était la bonne humeur, la gaîté, l’effervescence créative. Le dynamisme de l’un qui renforce la créativité de l’autre. Il y avait eu, là, au détour des années 70 une bulle de créativité, comme il en eut d’autres, en d’autres temps, en d’autres lieux, dans d’autres domaines.

Et je repensais à cette autre émission d’Arte sur Montparnasse. Une explosion partie du bateau-lavoir et le rôle de Picasso, en meneur, et de Gertrude Stein. D’ailleurs, ses intérêts embrassaient non seulement la peinture, mais aussi la littérature. Et tous les écrivains américains de passage en Europe, passaient dans ses salons.

Les salons : peut-on imaginer le développement des idées en Europe en négligeant le rôle des salons où pouvaient échanger les créateurs de tout poil ? Pas seulement dans le domaine artistique, mais également en sciences, en philosophie. Que l’on songe au rôle de l’abbé Martin Mersenne, de son académie, d’où sortira l’Académie des sciences.

D’autres exemples montrent l’importance de ces bulles créatives, qui ensemencent la vie intellectuelle. C’est le Cercle de Vienne, l’école de Copenhague, le groupe Bourbaki.

Bref, où que l’on se tourne, il n’y a certainement pas de création réelle hors d’un groupe, hors d’une famille de pensée, d’un questionnement en attente. Et le développement à venir sort d’une sorte de bouillonnement, d’une intensification des échanges. De la circulation de la parole.

C’est à un tel bouillonnement que peut se reconnaître la vigueur d’un mouvement en cours de constitution. Après, bien sûr viennent ceux qui codifient les acquis. Après Michel-Ange, il y aura toujours un Daniele da Volterra pour culotter les nus qui s’affichent aux plafonds de la chapelle Sixtine.

Question : Nuit Debout peut-il servir de marmite pour un tel bouillonnement ? Lordon se jette dedans, mais qui d’autre le suivra ?

PS : Le drame de Lacan, fut sans doute de n’avoir pas réussi à déclencher cette étincelle, malgré 20 ans de séminaire… D’où cette histoire de "passe" qui ne passe toujours pas…

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