Essayons pour une fois d’échapper à cette « horreur médiatique » dont J.F. Kahn vient de faire un livre. Celle des effets d’annonce, des faits divers politiques, des guignols de l’info. Et consacrons nous un peu à la question de la relation entre le fait moral et le fait politique.
Une question fort bien illustrée par le problème du cumul des mandats, du refus d’en sortir énoncé par quelques grands noms de nos assemblées, (Les plus connus Jean-Pierre Bel, Président du sénat, André Santini, député, Président de l’UDI des Hauts-de-Seine), par la solidarité entre élus, que vient de mettre en lumière le Sénat dans son refus d’aider la justice à poursuivre Serge Dassault.
Ces problèmes font réellement violence aux citoyens. Il est donc important de montrer à ceux ci qu’on peut et qu’on doit dénoncer cet état de fait. Et dire que tout citoyen a un rôle à jouer pour que les choses changent.
En passant par le 92.
Les débuts de la fin de ces temps où l’erreur n’est pas sanctionnée a peut être d’ailleurs sonnée, avec les prochaines municipales.
Celles ci pourraient bien être l’occasion pour des électeurs informés qui ne souhaitent pas tomber dans les extrémismes des « Jours de colères » ou du FN, de faire tomber quelques barrons drogués au cumul, (durant 30 ans parfois), quand ce n’est pas à l’immoralité tardivement sanctionnée. Il y en a dans tous les partis et dans toutes les régions. Certains barons voient leurs jours comptés.
En faire la liste serait trop long. Arrêtons nous donc sur un des plus riches départements de France, s’il n’est pas le plus grand. Celui des Hauts-de-Seine, bastion de la sarkozie, des Pasqua, Ceccaldi-Raynaud, Balkani, Schuller, Santini, et autres affidés. Ils se serrent les coudes, sont solidaires dans l’assistance à « élu en danger », se lancent dans des alliances qui contredisent ici ce qu’on fait ailleurs, sans état d’âme. Mais l’horizon du trou d’air n’est pas loin.
Dissidences militantes, incidences judiciaires, batailles fratricides.
Car c’est bien au sein des partis que des militants contestataires combattent contre leur époque, contre barons et seigneurs locaux ou nationaux, et commencent à faire trembler la terre, quand ce n’est pas la justice qui le fait. Il y en a à droite comme au centre ou à gauche. Rajoutons à cela des guerres fratricides entre anciens compagnons d’écuries et on pourra se passer d’attendre indéfiniment celui qui a pu s’en prétendre le nettoyeur.
Voyons rapidement l’effet possible de la justice sur quelques uns.
Le plus menacé et plus connu est André Santini, maire UDI sortant d’Issy-les-Moulineaux, qui se représente en dépit d’un risque de confirmation en appel de la lourde condamnation récoltée en février dernier devant le tribunal de Versailles. (5 ans d’inéligibilité entre autre). Que sa condamnation soit confirmée et ce sera le boxon dans sa commune et sa circonscription. (Réélection pour la députation, quel maire prendra sa place ?). En attendant, Fabienne Gambiez, élue municipale du Modem n’a pu, on la comprend, rallier le Pt de l’UDI de son département et le défie en faisant alliance avec le PS, ce qui le met en rage.
Mais un autre se trouve de facto gêné aux entournures par Santini. C’est Bernard Gauducheau, l’actuel maire de Vanves, qui lui doit toute sa carrière et se comporte en zélé vassal.
C’est dans une salle de Vanves que Santini, à peine condamné en 2013, s’est fait élire Président de l’UDI des Hauts-de- Seine par des militants peu regardants sur le brouet qu’on leur servait.
Bernard Gauducheau soutient tout ce que souhaite Santini, notamment au sein de GPSO, l’intercommunalité, où ils sont tous deux Vice-président.
Ce qui explique l’opposition, fort gênante pour lui aux municipales, des militants du MoDem vanvéen, qui, alliés naturels sur le papier, sont restés fidèles aux valeurs et aux principes toujours énoncés par François Bayrou (Qui vient de dire par ailleurs apprécier les électrons libres) en répondant favorablement à la sollicitation de Antonio Dos Santos pour participer à sa bataille contre l’alliance locale UMP/UDI.
Issu du PS et soutenu par lui, Dos Santos a réuni autour de lui une liste très large comprenant des personnalités de la société civile, des écologistes, et ces militants démocrates vanvéens qui ont fait montre de caractère, à l’étonnement de Bernard Gauducheau et de quelques autres. A Vanves, la vraie alternative semble bien être l’opposition actuelle, forte avant tout de personnalités toutes éloignées des dogmes, des idéologies, des crispations de fin de règne. Après avoir longtemps servi Santini, Bernard Gauducheau pourrait peut très rapidement être desservi par sa chute prévisible.
Dissidences ou tensions fratricides
Boulogne, où l’UMP s’autoconcurrence.
Sèvres où deux personnes issues de l’UMP se réclament de l’ancien maire emblématique FKM, maire sortant qui ne se représente pas pour raisons de santé.
Levallois, où Arnaud de Courson se présente pour tenter d’éliminer l’ancien condamné (qui pourrait l’être encore), le sulfureux Balkany, dont il a déjà éliminé l’épouse aux cantonales.
Nanterre encore où l’UMP est accusé d’utiliser le logo de l’UDI qui ne soutiendrait pas. (Rappelons que Pierre Creuzet, Président du groupe Modem-PRG au conseil municipale de Nanterre, se présente et lance sa liste de rassemblement dans l’esprit prôné par François Bayrou a dit récemment: « les élections locales sont locales ». Ce qu’il faut comprendre ainsi : ‘’On vote pour des principes avant de voter pour des hommes et on ne peut imposer les règles qui valent pour le national’’.
On passe sur Clichy-la-Garenne où il semble ne plus y avoir à gauche comme à droite que des lapins à tirer.
Et on s’arrête à Bourg-la-Reine où les élus du Modem soutiendront le PS contre le maire UDI sortant, ancien ministre et partisan de Sarkozy.
Avant de finir par les cas les plus emblématiques.
Puteaux, où on a Ceccaldi-Raynaud, la femme aux millions (au Luxembourg), et maire sortante, dont les jours sont en danger, face à un Christophe Grébert, tenace comme un coureur de fond, que soutient François Bayrou. Grébert qui résume bien la situation, après le récent congrès du Modem: « Dans un certain nombre de communes, le rapprochement Modem-UDI s'est fait naturellement. Dans d'autres, cela n'a pas pu se faire. C'est le cas à Puteaux, où l'UDI semble vouloir soutenir le maire UMP sortant Joëlle Ceccaldi-Raynaud dans le cadre d'un accord départemental avec l'UMP ».
Comme c’est aussi le cas à Asnières où on peut voir l’UDI éclater, en soutenant d’un coté l’ancien maire UMP, plusieurs fois condamné qui se présente, alors qu’on voit de l’autre des militants UDI partis soutenir l’élue sortante du Modem ,Blanche Mühlmann.
Et enfin à Courbevoie, où les militants du Modem entendent s’opposer à l’UMP sortant, alors que l’UDI le soutiendra.
Une révolution ne se fait pas en une élection. Mais une dynamique libertaire semble se faire jour. La politique en a bien besoin.
Pour conclure, on voit donc un peu partout des militants, des contestataires, des dissidents, qui semblent préparer, par un engagement souvent à contre courant, la sanction des électeurs à venir, ou encore celle des tribunaux, dont plusieurs jugements en appel ou des instruction en cours sont attendus comme une participation à un assainissement de la politique qui ne peut plus se suffire d’homéopathie.