C’est Nabum
Abonné·e de Mediapart

4101 Billets

1 Éditions

Billet de blog 6 févr. 2023

C’est Nabum
Abonné·e de Mediapart

Le ballon rouge

La fin de l'enchantement.

C’est Nabum
Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Mais qui va trinquer ?

Illustration 1

Il y eut un court métrage magique qui fit rêver bien des enfants. Le nez en l'air, nous suivions les évolutions du petit ballon rouge avec émotion. Rien de bien méchant dans ce souvenir d'enfance, le plaisir de vaincre la gravité, celle de l'âge adulte à moins que ce ne fut l'héritage de Newton. Chacun sait que le ballon, au terme de son périple finira par éclater ou se dégonfler, c'est la règle pour celui qui finit par manquer d'air au bout de son périple.

Pour d'autres, le petit ballon quoique ayant souvent la même couleur, se contentait de se poser sur un seul pied, sur un comptoir, dans un troquet. L'enfant, pour suivre les mauvaises habitudes de son père, avait droit à la grenadine, illusion qui lui mettait le pied à l'étrier. Ce n'était certes pas glorieux, mais c'est ainsi, ce ballon ci, finissait immanquablement par se vider en réclamant souvent d'être remis à niveau.

Le ballon rouge avait malgré tout sa poésie, sa part de rêve, son désir d'évasion. Il ne mettait pas en jeu l'équilibre du monde, se laissant aller au gré des éléments ou de la rencontre des clients. Le second pouvait terminer sa route en la rendant incertaine, chaloupée, sinueuse et parfois tumultueuse. Mais là encore, pas d'autre risque que la gueule de bois pourvu que le buveur restât à pied.

Cette fois, le ballon rouge a pris de la hauteur et une importance qu'il convient de ne pas négliger. Il a souhaité regarder dans les yeux ceux qu'il entendait survoler en toute discrétion. Ne chinoisons pas, il jouait les espions avec une arrogance de mauvais aloi. Il allait mettre de l'eau dans le gaz à moins que la riposte fût plus spectaculaire.

Et elle le fut puisque le grand Satan, cette fois, n'a pas lésiné sur la réplique. Fini l'aiguille pour crever l’abcès ou les rayons du soleil pour qu'éclate la farce, c'est un avion de chasse qui fut envoyé pour mettre à bas l'intrus. Certains nomment escalade cette dégringolade céleste, les grands enfants qui nous gouvernent feraient mieux de boire de la grenadine et laisser les grenades tranquilles.

Le monde est désormais sur un baril de poudre, une poudre qui du reste chatouille grandement le nez de tous nos Pinocchio qui tirent les ficelles. Ils se sont vite lassés de s'envoyer des ballons par-dessus un rideau de fer qui a été fermé soi-disant pour ouvrir une aire de paix et de fraternité. Nous avons vu le résultat tandis que nos lascars ne rêvent que d'une chose, appuyer sur le champignon pour passer en troisième.

À moins que ce fameux champignon ne finisse par irradier la planète. Les jeux de ballon finissent souvent mal, le football l'a maintes fois démontré. Le ballon rouge, crevé, est désormais analysé, observé sous toutes les coutures tandis que le galopin de Pékin qui a perdu son jouet, a des envies de vengeance.

Les maîtres du monde perdent la tête. Ils sont désormais sur le pied de guerre. Il est vrai que d'après les experts de tous poils qui les conseillent utilement, une bonne conflagration mondiale pourrait très bien relancer la machine économique tout en régulant avantageusement la population. Nous devrions nous méfier de leurs jeux dans cette cour de récréation dans laquelle nous ne sommes que quantité négligeable.

Le petit ballon rouge préfigure-t-il la fin des haricots ? On peut se le demander au risque de passer pour un oiseau de mauvais augure, oiseau qui du reste, même avec un bec aiguisé, se serait bien gardé de crever cette maudite baudruche dérisoire. Il est bien loin le temps où les avions à réaction se contentaient de rattraper le bout du nez des facteurs.

À contre-feu.

1956 Le Ballon rouge d'Albert Lamorisse Film © Bulles Concept

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Bienvenue dans Le Club de Mediapart

Tout·e abonné·e à Mediapart dispose d’un blog et peut exercer sa liberté d’expression dans le respect de notre charte de participation.

Les textes ne sont ni validés, ni modérés en amont de leur publication.

Voir notre charte