Par Louise Ferry, Grande Prêtresse du Temps Retrouvé et Clément Barailla, Sagnamaor du Nouveau Récit
Nous avons dit, face à la précipitation vaine et inefficace, « On a le temps », ce qui a déclenché un débat intéressant et passionné. La question est maintenant : on a le temps pour faire quoi ? Autrement dit, comment répondre à l’urgence ?
Nul doute que nous sommes face à des crises économique, environnementale et politique de grande ampleur. Chacune de ces crises peut être interprétée séparément, à travers une série de problèmes concrets qui sont chacun à des échelles différentes ressentis comme des urgences. Et ce sont des urgences.
Le chômage, par exemple, est un problème que tous les partis politiques s’accordent depuis quarante ans à qualifier de grave et d’urgent, sans pour autant apporter de véritable remède. Ce que nous disons aujourd’hui, c’est qu’il est temps de construire un nouveau partage du travail plutôt que de continuer à appliquer des solutions qui ne marchent pas. Mieux vaut faire émerger un nouveau modèle que de nous lamenter sur notre sort !
Prenons donc le temps de nous poser les bonnes questions : quelles alternatives proposer et comment les mettre en œuvre ? Car lorsque l’urgentiste panique, le patient est déjà mort.
Quel peut être notre rôle en tant qu’acteurs politiques ?
Construire un cadre politique et légal qui favorise l’émergence d’alternatives et un nouveau modèle de société. Pour une société de créativité, de justice sociale et de convivialité, où les humains sont acteurs et reprennent la main sur leur vie.
Ce sont des choses concrètes qui permettent cela : des garde-fous sur le plan politique, des réformes sur le plan économique, des transformations dans notre façon de produire et consommer l’énergie, de travailler, d’entreprendre. Ce sont des changements dans nos manières de faire de la politique, non en renonçant à exercer le pouvoir mais en s’appuyant sur des principes éthiques et une intelligence collective, pas sur des certitudes aveugles.
Nous ne sommes pas les seuls à avoir de bonnes intentions. Soyons de ceux qui arrivent à passer aux actes, parce que nous sommes efficaces et pragmatiques. Parce que nous sommes patients et méthodiques.
Quelle doit être notre méthode ?
Nous n’avons pas d’idées préconçues sur la méthode à mettre en œuvre pour remplir ce rôle, mais ce que nous constatons, c’est l’échec de tous les autres. Pourquoi ? Notamment parce que leur diagnostic est mauvais.
L’objectif, sur le plan économique, n’est pas de retrouver la croissance pour créer de l’emploi, mais de repenser complètement notre modèle économique en reprenant la main sur notre travail. L’objectif, sur le plan politique, n’est pas d’avoir un maximum d’élus qui pensent comme nous, mais que les citoyens reprennent la main sur la vie publique.
Il y a deux manières complémentaires de remplir notre rôle : prendre le pouvoir et gagner la bataille des idées. Dans le système actuel, l’un ne peut se faire sans l’autre, et les deux prennent du temps. L’important n’est pas de se précipiter, c’est d’agir.
Agir, ça peut être agir tout de suite, sur un certain nombre de sujets. Appuyer des actions sociales immédiates, soutenir des initiatives citoyennes en faveur de l’accès à la culture, porter des propositions qui peuvent être appliquées demain matin et qui portent en elles le germe d’une prise de conscience.
Agir, ça peut être aussi agir dans la durée, s’implanter localement, imprégner le débat d’idées nouvelles, appuyer les alternatives existantes et favoriser l’émergence d’un modèle de société désirable et cohérent.
Reprendre la main, sur tous les aspects de notre vie. Être porteurs d’une vision à long terme de transformation de la société et proposer des actions immédiates ou à court terme pour les mettre en œuvre.
Voilà pourquoi nous nous sommes engagés en politique. Pour porter un nouveau modèle de société, pour redonner espoir à ceux qui souffrent et ne peuvent voir plus loin que la fin du mois. Pour les aider à participer à la construction d’un avenir plus créatif, plus convivial, plus juste.
Voilà pourquoi il ne faut pas confondre urgence et précipitation.
Parce que « ce qui s’est fait sans le temps ne sera pas retenu » (André Malraux).
Voilà pourquoi on dit qu’on a le temps : parce que ce temps-là nous appartient.