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Billet de blog 8 juillet 2020

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La manufacture des cocus

La Macronie a trahi en trois ans un nombre record de Français Etat de lieux non exhaustif

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Billet d'humeur

 La manufacture des cocus

Note liminaire

 D'aucun sont étonnés de la dégradation de l'image de la police depuis les attentats de 2015.

La réflexion qui suit va essayer de démonter le scénario diabolique qui a généré cette dégringolade ... et d'autres.

Le scénario

La manufacture

En juillet 2017 la baisse uniforme des APL y compris pour les étudiants, suivie par la suppression de l'ISF en 2018  a été ressentie par la population "ordinaire" comme premier bouquet de mesures anti-pauvres du gouvernement Macron.

Ce malencontreux bouquet constitue le péché originel du quinquennat.<<

Première livraison de cocus.

Le mouvement de gilets jaunes débute en novembre 2018 sur la question du prix des carburants et s'élargit rapidement au sentiment de déclassement des Français modestes et moyens avec les ras-le-bol fiscal.

Le mouvement des ronds points est pacifique et regroupe pour la première fois des Français de tous horizons  dont  beaucoup de retraités et de femmes qui manifestent pour la première fois, ce qui est important.

Macron a tenté de le décrédibiliser par des paroles méprisantes ( « Ces gens qui ne sont rien » ) et le refus de tout dialogue, au prétexte que les GJ ne sont pas structurés.

Deuxième livraison de cocus

Devant l'autisme du pouvoir le mouvement de radicalise et s'installe alors  le sentiment du déclassement des territoires ruraux  et la marginalisation de élus locaux snobés par le Président, absent à la convention des maires de France.

S’étale également aux yeux des Français le mépris des corps intermédiaires -dont les syndicats- et des partis d'opposition, mal en point mais toujours présents.

Troisième livraison de cocus

Devant l'incompréhension de l'exécutif face à ce  mouvement de fond, la protestation s'étend grâce aux réseaux sociaux et se radicalise par le blocage généralisé des ronds-points.

Les manifestations massives commencent et sont parasitées par la présence de blacks blocks.

C'est à ce moment que les fautes politiques s'accumulent.

Les manifestants, violents ou pacifiques,  sont matraqués et gazés abondamment sans distinctions.

Certains notent que les black blocks sont souvent épargnés et que des provocateurs se manifestent de façon visible.

Un certain laxisme dans la protection des biens public et privés permet au pouvoir d'espérer que l'opinion publique va massivement se retourner contre les GJ (Saccage du Fouquet's et, peut-être, de l'arc de triomphe ?)

Au fur et à mesure du temps, il apparaît de façon évidente que les forces de l'ordre ont reçu des directives de répression dure pour renvoyer les "chiens jaunes" à la niche.

 De multiples bavures graves se produisent partout sur des manifestants non violents, attestée par des vidéos indiscutables, elles sont largement diffusées sur les réseaux sociaux.

L'affaire Benalla a été la cerise sur le gâteau.

C'est dans cette période que l'image de la police se dégrade considérablement.

C'est aussi dans cette période que s'installe dans la police un sentiment d'impunité libérant les mauvais instincts de certains fonctionnaires, vraisemblablement prédisposés.

L'image héroïque de la police de 2015 est complètement occultée au profit de l'image d'une police brutale, protectrice d'un pouvoir autoritaire hors-sol.

Quatrième livraison de cocus

En septembre 19 est organisée, sous l'impulsion internationale des jeunes, la marche pour le climat, manifestation festive avec beaucoup d'adolescents et de familles avec enfants.

Malgré son coté bon enfant, cette manifestation a été "nassée"* et abondamment gazée comme les autres**

Les jeunes, justement préoccupés par leur avenir, ont compris que cette question n'était pas la bienvenue.

Ils garderont un souvenir douloureux  de la réception, par le pouvoir, de leur message d'espoir.

Cinquième livraison de cocus

La question de l'hôpital public et des soignants, particulièrement des urgences, est méprisée par les pouvoirs publics depuis longtemps mais la situation se dégrade encore dans l'indifférence affichée du gouvernement.

Les grèves symboliques se multiplient mais, les soignants étant présents à leur poste, elles  sont ignorées. 

La crise du COVID 19 a mis un moment le pays en léthargie, mais la gestion de la crise a été émaillée de fautes de gestion, de communications et de mensonges grossiers.

Les soignants gravement exposés sans protection sont furieux, de nombreuses plaintes sont déposées par les professionnels contre les ministres défaillants (au total 84).

Sixième  livraison de cocus

 A coté de ces évènements traumatisants viennent se greffer :

- la démission de Nicolas Hulot devant l'impossibilité de faire entendre la voix des défenseurs de la terre

- la dégradation du code du travail qui est ressentie comme une agression de plus envers les "travailleurs",

- le projet de réforme des retraites, mal préparé et destiné à l'évidence à faire des économises sur le dos desdits "travailleurs",

- Sans oublier les naïfs qui, par millions, ont voté en faveur de Macron et de son "ni gauche ni droite" qui se sentent trahis.

Autres livraisons de cocus, énumération non exhaustive....

La tentative de reconquête de la confiance

 La crise du Covid a profondément marqué les esprits et le gouvernement semble avoir pris  conscience d'une partie  de ses errements sur :

- l'importance des gens qui ne sont rien mais qui ont maintenu le pays en vie pendant l'épidémie (Soignants, élus locaux, paysans, personnels de la distribution, transporteurs, éboueurs.......)

- l'importance des élus locaux dans la gestion des territoires est apparue vitale  durant la crise du COVID et ceux-ci semblent avoir repris, dans la vie publique,  la place qu'ils n'auraient jamais dû quitter.

- la gestion laxiste, voire dévoyée, de la police.

Concernant « les gens qui ne sont rien », ils attendent des actes après les paroles dithyrambiques, dont ils ont été abreuvés.

Les soignants sont évidemment les plus concernés.

Il faut que le Ségur de la santé ne soit pas une nouvelle pantomime, sinon ......

 Il est évident que la gifle que vient de prendre LREM aux élections municipales est la conséquence directe de la "manufacture des cocus" décrite ci-dessus !

Quant à police, le phénomène est plus complexe.

Après avoir été celle de 2015, aimée des Français, elle a été dévoyée durant la répression de gilets jaunes dans un but évidemment politique, émaillée d'actes violents inexcusables pointés officiellement par Jacques Toubon, le défenseur des droits.

Contesté par une grande partie de la population, elle a fait l'objet de critiques et de manifestations de défiance significatives concernant ses violences réelles ou supposées.

Or, après l'avoir poussée à la brutalité et protégée via l'IGPN, le gouvernement a cru bon de mettre en cause frontalement sa rectitude morale  et le comportement raciste de certains des ses membres, tout en envisageant la restructuration de ladite IGPN.

Cette volte-face, inattendue et mal présentée, mise sur la place publique sans concertation, a été ressentie, par les policiers, comme une trahison dont les conséquences risquent d'être graves.

Dernière livraison de cocus

Conclusion

L'ensemble de ces faits, enfilés comme des perles, constitue la "manufacture des cocus" et explique en grande partie la fracturation majeure de la société française et sa défiance vis à vis du personnel politique et de la police.

La grogne de la ladite police a été le point de départ de ce billet d'humeur, elle en sera le point final.

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 Notes

 * Nassage =  technique policière consistant à bloquer un groupe de manifestants sur une rue en bloquant les rues adjacentes pour pouvoir les gazer en statique

 ** Témoignage d'une manifestante

J’ajoute, avoir vu personnellement des policiers vêtus en blacks blocks, sortir des fourgons de police et participer aux provocations lors de la « marche mondiale pour le climat », à Paris le samedi 21 septembre  2019, à la suite de quoi les manifestants pacifiques, festifs, avec déguisements, enfants  et chars ont été nassés et gazés

Pour la première fois de ma vie, j’ai vu des policiers entrer dans un café sur les boulevards et gazer les consommateurs tranquillement assis ainsi que les serveurs.

Je m’y trouvais après avoir quitté la manif, post nassage et gazage, j’en ai subi 3 ce jour-là.

J’y ai vu aussi des policiers issus d’autres Etats européens arrivés en renfort…curieuse conception de l’UE.

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