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Billet de blog 26 août 2014

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Le dogme du zéro déficit public

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il est aujourd'hui un dogme absolu sur lequel s'accordent tous les hommes politiques, aussi bien de gauche que de droite, celui du zéro déficit des administrations publiques.

 Pour les hommes de gauche, ne pas faire de déficit est facile, il suffit d'augmenter les impôts des riches.

 Pour les hommes de droite, c'est également facile, il suffit de réduire les dépenses publiques.

 Du point de vue des déficits, François Hollande est incontestablement un homme de droite, puisque le « pacte de responsabilité » qu'il veut mettre en œuvre est une baisse des charges des entreprises compensée par une baisse des dépenses publiques.

 Mais que l'on soit de gauche ou de droite, de quoi parle-t-on ? Il faudrait commencer par définir le déficit public.

 Le déficit public est l'excès des dépenses sur les recettes des administrations publiques. Il est évident que cet excès ne peut être financé que par l'emprunt, donc ce que l'on condamne en condamnant le déficit public, c'est l'emprunt public, et le dogme du zéro déficit public est le dogme du zéro emprunt public que l'on peut encore appelé zéro dette publique

 Mais est-il possible de n'avoir aucune dette publique ?

 Qu'on le veuille ou non, depuis la disparition définitive de la monnaie-or, c'est-à-dire pour la France depuis 1936, notre système économique est fondée sur la dette. Aujourd'hui la monnaie est toujours une dette de la banque, que cette dette soit matérialisée dans un billet de la banque centrale ou qu'elle soit simplement inscrite dans un compte au passif d'une banque commerciale. Cette monnaie-dette est pour sa plus grande part créée par un échange d'une dette ordinaire d'un agent non bancaire contre une dette-monnaie de la banque. Autrement dit si nous considérons un pays fermé1 (c'est-à-dire n'ayant aucun échange avec l'étranger) la masse monétaire circulant dans ce pays sera égale aux emprunts faits aux banques par les agents non bancaires de ce pays c'est-à-dire par ses ménages, ses entreprises et ses administrations publiques2.

Donc s'il n'y a pas d'emprunt aux banques, il n'y a pas de monnaie, et limiter ou interdire les emprunts publics ne peut conduire à masse monétaire constante qu'à augmenter les emprunts privés des entreprises et des ménages ou qu'à diminuer simultanément la masse monétaire et les dépenses publiques. S'intéresser au seul emprunt public, comme le fait par exemple la Cour des Comptes, n'a donc aucun sens, on ne peut s'intéresser qu'à la répartition de l'emprunt total (égal à la masse monétaire) entre les administrations publiques, les entreprises et les ménages. Tout comme il est légitime que les ménages empruntent pour investir dans l'achat de logements, et qu'il est légitime que les entreprises empruntent pour financer l'investissement productif, il est légitime que les administrations publiques empruntent pour financer des équipements publics. Refuser l'emprunt public c'est refuser l'investissement public. Et comme on a tout de même besoin d'investissements, tels les écoles, les autoroutes, les chemins de fer..., et qu'il devient interdit de les financer par la dette publique, on privatise ces investissements, c'est-à-dire qu'on les fait faire par des entreprises privées (sociétés d'autoroutes, cliniques privées...) qui elles ont le droit de s'endetter pour investir. Dans les domaines régaliens, telle la justice, où on est bien obligé de garder des juges publics, on hésite pas à faire construire des bâtiments, tels les prisons ou la nouvelle cité judiciaire de Paris par des entreprises privées dans ce qu'il est convenu d'appeler les partenariats public-privé. Ces partenariats et ces privatisations ne font absolument pas diminuer l'endettement qui demeure nécessaire mais ne font que diminuer l'endettement public au profit de l'endettement privé.

 En conclusion tant qu'on ne considérera que l'endettement public sans considérer l'endettement des autres agents économiques on ne pourra pas construire de politique économique cohérente.

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