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Billet de blog 4 décembre 2021

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L'horticulture, grande oubliée de la politique agricole ?

Ce matin, le ministre de l'agriculture Julien de Normandie annonçait sur France Inter la création d'un fonds d'indemnisation des dommages causés par les aléas climatiques (gel, grêle, sécheresse...) pour les agriculteurs.

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La création de ce fonds est l'objet d'un projet de loi qui sera présenté sans tarder au Parlement : les horticulteurs seront-ils comme souvent les grands oubliés des aides agricoles ?

Les horticulteurs ne bénéficient pas de la Politique agricole commune : créée pour soutenir le développement rural et pour garantir la sécurité des approvisionnement, la PAC ne s'applique qu'aux cultures alimentaires. Les aides à l'investissement sont quasi-inexistantes dans le secteur horticole, ralentissant sa modernisation, particulièrement en comparaison de certaines productions horticoles qui bénéficient d'investissements massifs (la production hollandaise pour ne pas la citer). L'exclusion de l'horticulture de la PAC a eu un effet de bord particulièrement dommageable pour la filière : contrairement aux cultures alimentaires qui ont dû se regrouper pour traiter la réception de cette aide et influer sur son évolution, la filière fleurs coupées n'a pas eu de motivation particulière à se structurer, échanger, tout simplement se parler. Les horticulteurs se sentent peu soutenus par les collectivités et rares sont ceux qui adhèrent volontiers aux interprofessions. Dans la seule région Ile-de-France, bassin de production historique de fleurs coupées, seuls deux producteurs de fleurs coupées parmi une quarantaine en activité adhèrent à la Chambre d'agriculture d'Ile-de-France. Peu de soutien donc, et peu d'envie de se regrouper, mais des contraintes imposées par le marché commun : les fleurs coupées font partie des marchés régis par l'Europe. L'organisation commune des marchés agricoles impose des règles de calibrage (hauteur de tiges notamment) et des normes de qualité pour l'export qui paraissent bien peu adaptées au marché français, qui peine déjà à assurer la pérennité de ses exploitations. 

Les enjeux sont pourtant nombreux : l'horticulture participe bien-sûr au développement rural, et c'est aujourd'hui un secteur qui attire de nombreuses reconversions. L'horticulture française, ce sont aussi des savoir-faire uniques, des variétés produites nulle-part ailleurs, et avec ça tout un pan de notre patrimoine qui risque de disparaître faute de soutien institutionnel. Enfin et surtout, l'horticulture souffre bien-sûr des mêmes aléas climatiques que l'agriculture alimentaire : cette année, le gel tardif a été fatal à la production francilienne de roses de jardin (arrivées en juillet pour les premières, au lieu d'avril) et les fleurettes annuelles que nous aimons tant ont été très fortement impactées.


On s'oriente donc vers une réaction politique contre-nature : nos dirigeants prennent des mesures franchement tièdes pour lutter contre le changement climatique, et créent des fonds pour compenser des catastrophes climatiques clairement causées par l'empreinte humaine sur notre planète. Parce qu'ils vont contre la nature au lieu de s'y soumettre, on a le vague sentiment que non seulement ça ne suffira pas, mais qu'en plus on reste désespérément coincés dans une logique purement fonctionnelle (je soutiens ce qui nourrit mon corps), où le beau, ce qui nourrit l'âme et remplit nos cœurs de joie, ce qui nous fait vivre et vibrer, n'est pas digne d'intérêt.

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