Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, répond à la lettre ouverte qui lui a été récemment adressée sur Mediapart par Geneviève Azam et Amélie Cannone. « J’ai moi-même dénoncé à plusieurs reprises l’opacité des négociations en cours et continuerai de le faire autant que nécessaire », plaide la ministre, qui propose « avant la fin de l’année une rencontre aux organisations issues de la société civile ».
Le 13 novembre dernier, vous avez publié une lettre ouverte qui m’était adressée par Mesdames Cannone et Azam, respectivement présidente de l’AITEC-Ipam et porte-parole d’Attac France, à propos du partenariat de commerce et d’investissement entre l’Europe et les Etats-Unis.
Les deux auteures y réclament plus de transparence dans la négociation du traité transatlantique et manifestent leur inquiétude quant à plusieurs des clauses du mandat confié à la Commission européenne le 14 juin dernier par les Etats membres pour discuter les conditions de cet accord.
Comme la lettre a soin de le rappeler, j’ai moi-même dénoncé à plusieurs reprises l’opacité des négociations en cours et continuerai de le faire autant que nécessaire. Disposer d’une information suffisante sur toutes les questions qui tiennent à l’avenir économique de notre continent et de notre pays constitue un droit non-négociable. Les préoccupations des deux signataires sont sur ce point les miennes.
Elles oublient toutefois de mentionner que j’ai reçu les ONG intéressées à ce traité de libre-échange pour qu’elles puissent me faire part de leurs attentes et de leurs inquiétudes en amont du lancement de la négociation, et que mon cabinet demeure à la disposition de toute ONG qui souhaiterait m’exprimer ses doutes ou ses interrogations quant au projet lui-même. Je proposerai d’ailleurs avant la fin de l’année une rencontre aux organisations issues de la société civile, pour les informer du déroulement et de la nature des discussions en cours, après deux sessions de négociation.
Je constate également qu’un certain nombre des craintes formulées par les auteures sur le contenu des négociations recoupe les positions que j’ai moi-même pu faire valoir publiquement à diverses reprises. J’ai plusieurs fois eu l’occasion d’alerter les élus et l’opinion sur le fait que le traité UE-Canada constituait un test pour la négociation avec les Etats-Unis. J’ai également obtenu que le mandat de négociation avec les Etats-Unis, adopté le 14 juin 2013, soit précis sur la protection de l’environnement, des travailleurs et des consommateurs. Les grands principes de nos législations communautaires ne seront pas remis en cause par cet accord et nos standards alimentaires seront préservés. J’y veillerai, tout comme les Parlements européen et nationaux qui devront également ratifier l’accord. De même, j’ai œuvré à ce que le mécanisme de règlement des différends entre les investisseurs et les Etats soit encadré et que la décision finale sur l’inclusion même d’un tel mécanisme soit renvoyée ultérieurement.
Les auteures saluent ma défense ferme de l’exception culturelle, et je les en remercie. Qu’il me soit toutefois permis de préciser que, contrairement à ce que laisse entendre leur courrier, le mandat exclut toute négociation en matière d’investissement dans le domaine audiovisuel. Je serai particulièrement vigilante à ce que les termes du mandat soient strictement respectés.
Le traité auquel aboutiront les négociations devra ensuite être ratifié par le Parlement européen et les Parlements nationaux pour être adopté. En attendant, vous pouvez compter sur ma détermination pour mener à bien la mission qui a été confiée à mon ministère : contribuer à la croissance et à l’emploi par le développement des échanges et l’insertion réussie de la France dans l’économie internationale, tout en affirmant nos valeurs de justice sociale et de respect de l’environnement.
Je pense sincèrement que le traité transatlantique peut contribuer à ces objectifs en démultipliant les partenariats entre nos deux continents, et en facilitant le développement des PME et des entreprises de taille intermédiaire, au cœur de la stratégie pour l’emploi du gouvernement.
Dans la partie difficile qui se joue, chacun doit pouvoir faire valoir ses volontés et ses craintes. C’est ce qu’ont fait les auteures de la lettre ouverte. Je suis pour ma part à la fois confiante et vigilante.
Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur