Si aujourd’hui Jadot ou Hidalgo était à 15 % d’intention de vote au premier tour, je n’hésiterais pas un seul instant, j’irais voter pour ce candidat. Je ne les aime pas pourtant, mais je prendrais mes responsabilités, comme je l’ai fait en 2017 après beaucoup d’hésitations et comme je l’ai fait jadis après le 21 avril 2002.
Si aujourd’hui j’étais un électeur de gauche (enfin de pas droite), enfin si je n’étais pas un … (Mes enfants m’ont interdit de prononcer des gros mots, car ils connaissent Le Misanthrope et savent que « La parfaite raison fuit toute extrémité, Et veut que l’on soit sage avec sobriété. »), je ne tergiverserais pas : j’irai voter Mélenchon.
Il y a une chance d’écarter l’extrême droite dès le premier tour, et les derniers sondages indiquent qu’un deuxième tour entre le président sortant et la présidente du R.N serait extrêmement serré. « Pesons le gain et la perte » donc.
Si il y un deuxième tour Macron Le Pen, je perds tout.
Mes idées ne sont pas représentées (rien sur le service public, rien sur l’exclusion, rien sur le réchauffement climatique, rien, rien…) . En revanche, l’on va me faire croire que les privilégiés ce ne sont pas les nantis, ce ne sont pas les patrons, ce ne sont pas les pollueurs. On va me faire croire que les profiteurs, ce sont les artistes, les enseignants… On va me faire croire que tous les maux de la terre viennent des migrants qui fuient la misère et la tyrannie, on va me proposer un ministère de la Remigration (non tu ne rêves pas, on est en France!).
En revanche, si il y a un deuxième tour Macron Mélenchon, je gagne, je gagne beaucoup, je gagne tant.
L’extrême droite est éliminée. Mazeltov ! Et je commence à croire enfin que mon pays n’est pas forcément raciste. Je commence à croire que si elle fait des scores aussi hauts, c’est à cause de l’abstentionnisme. Je commence à croire aussi qu’il serait bon que l’on comptabilise enfin le vote blanc. Bref, je jubile rien qu’à l’idée de voir la tête des fascistes qui perdent. Et puis, je n’aurais pas à entendre ce discours moralisateur : « Il faut faire barrage... ». Si tu veux faire barrage à des idées nauséabondes, si tu veux faire barrage à des gens qui tapent des militants dans des meetings, des gens qui assassinent froidement dans les rues, n’attends pas le deuxième tour et sois cohérent. Sois cohérent, bon sang !
Et puis, si Mélenchon se qualifiait au second tour, cela casserait bien les pieds à Macron aussi qui serait obligé de faire naître un vrai débat d’idées, ce qu’on nous refuse depuis le début de cette campagne, me semble-t-il. On pourrait demander des comptes aussi à la politique faite depuis 5 ans, sur l’école, l’hôpital, la gestion de la crise sanitaire, les bavures, les scandales…
Alors oui, je sais Mélenchon ne sera vraisemblablement pas élu s’il passait au deuxième tour, mais sa qualification permettrait peut-être de reconstruire quelque chose qui semblait définitivement brisé depuis 2017. Serait-ce dès lors un vote utile comme une militante de Poutou me l’a fait remarquer au marché récemment ? Oui, clairement. Je préfère un vote utile à un vote inutile.
Clairement.