Lucas Alves Murillo
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Billet de blog 29 déc. 2022

Lucas Alves Murillo
Historien de formation. Collabore avec RetroNews, le site de presse de la Bibliothèque nationale de France. Spécialiste de l'histoire du sport et des sportifs, des mondes arabes et de l'Espagne contemporaine.
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Pelé, l'adieu au mythe

Aujourd'hui s'est éteint le joueur dont la simple évocation semble être synonyme du sport par lequel et pour lequel il fut mythe. Edson Arantes do Nascimento, dit Pelé, s'en est allé à l'âge de 82 ans, en mourant dans son pays, celui motivant tous les fantasmes footballistiques : le Brésil. Quel est ce visage, appartenant à un joueur aussi abstrait que dantesque, qui parsèment les esprits ?

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Un sourire, un maillot, un nom ou encore un vague souvenir d'images en noir et blanc. Pelé est à la fois tout ceci et bien plus encore. Le Roi, O Rei, comme il était surnommé, jouissait justement d’une légitimité intouchable, d’un titre honorifique qui faisait de lui le souverain merveilleux du football. Celui d’un autre temps, certes.

Oui, chacun ici, en France et ailleurs, en lisant ces lignes ou en lisant celles d’un des nombreux éditos qui fleurissent déjà, peut se dire une chose : il connaissait Pelé, du moins son nom, et tout l’imaginaire qui accompagne celui-ci par extension. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que le peu d’êtres humains ignorant son existence auront le temps et tout le loisir d’en entendre parler.

Les médias du monde entier relaieront la chose, et parleront de football comme ils en parlent tous les quatre ans. Cette mort est le point d’arrivée d’un paradigme enclenché par la dernière Coupe du monde - qui s’est déroulé au Qatar et à une période de l’année inhabituelle -, qui, malgré sa finale rocambolesque, ne disposera jamais d’un arbre assez grand pour cacher ou faire oublier toutes les critiques et autres polémiques autour de son organisation.

Illustration 1
Un sourire éternel

Pelé s’est est allé, et ce joueur a réussi l’exploit d’appartenir à la Mémoire, avant de tout à fait rentrer dans l’Histoire par sa disparition. N’est-ce pas le plus grand des exploits, au-delà des nombreuses victoires ? Tout artiste rêve de marquer son époque, au moins de son vivant, si ce n’est après sa mort, mais combien ose penser qu’appartenir à la mémoire collective — mondiale en l'occurence ici — est une possibilité envisageable ? Un simple rêve, dont on n'ose point rêver. L'auriverde, vainqueur de trois Coupes du monde, appartient à cette catégorie rare.

Cette mémoire nous interroge sur notre rapport au mythe. Ce dernier est issu d’une construction, qu’elle soit mémorielle, sociale, politique, ou les trois à la fois. En s’en allant, Pelé nous rappelle que les âges d’or n’existent que dans nos songes. Ses exploits ne peuvent cacher certains des vices — dénoncés aujourd'hui, comme hier — dont était déjà victime le football des années 1950 et 1960, ou encore le racisme endémique d’une société brésilienne qui fit de lui le premier homme noir à être ministre dans son pays.

Ses chevauchées se dispersent dans les souvenirs de tout à chacun, comme les témoins d'une époque fantasmée, d'un football imaginaire, que l'on dit pourtant connaître.

Le mythe s’est éteint, tout en étant parfaitement vivant, voire plus vivant que jamais à partir d'aujourd'hui. Après Diego, le football mondial peut largement pleurer Edson, et tout ce qu’il représente d’irréel. Adeus.

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