
L’association Le sas-culture, qui fête ses dix ans, s’est localisée depuis peu en Charente-Maritime et développe actuellement trois nouveaux projets photographiques. L’un en urbanisme, autour d’Hortense Soichet, s’intéresse au patrimoine domestique rochefortais, selon une double approche artistique et de recherche en sciences sociales. Un deuxième projet s’attache au passé industriel du territoire, avec une entreprise centenaire de Saint-Jean d’Angély, la carrosserie Saint-Aubert, dont les archives comportent un corpus photographique sensible et original. Enfin, le troisième projet met en place une résidence d’artiste. Une première pour Le sas-culture, qui a choisi d’inviter Julie Boileau.
Le principe de la résidence
Cette modalité se différencie des deux autres formes classiques de travail avec un artiste. La commande, comme dans le cas du projet avec Hortense Soichet, mobilise un artiste au regard de sa démarche spécifique, afin d’apporter un éclairage singulier et nouveau à un questionnement posé par le commanditaire. A l’inverse, l’élaboration d’une exposition thématique s’intéresse aux œuvres déjà existantes, pour les mettre en relation et les faire circuler, en approfondir les interprétations possibles. C’est par exemple le travail en cours sur la documentation de l’entreprise angérienne, où un regard esthétique et culturel vient se substituer à leur usage initial, uniquement professionnel.
La résidence instaure quant à elle une autre relation, beaucoup plus libre, qui s’apparente à un temps de recherche. Il s’agit de réunir pour l’artiste invité des conditions propices à la création, qui lui donnent l’occasion d’explorer des facettes de sa démarche que son activité au quotidien lui permet seulement d’esquisser. La résidence du Sas-culture prend ainsi la forme d’un atelier temporaire installé à Port des Barques, qui est aussi un lieu d’échange privilégié pour l’artiste. La direction artistique apporte en effet un premier regard sur les créations en cours, engage le dialogue sur les différentes pistes à l’étude, accompagne l’artiste dans l’explicitation du discours qui opèrera la médiation entre l’œuvre et son spectateur.
L’originalité de la résidence du Sas-culture est qu’elle s’étend sur deux ans, l’été 2021 intervenant à mi parcours. Durant l’année écoulée, après une première session de travail en août, l’objet de la résidence s’est stabilisé autour du titre « Des rives atlantiques ». L’intention est d’apporter une lecture du lien entre ces deux espaces littoraux si éloignés, que sont la Guyane et la Charente-Maritime. Parce que Julie Boileau, originaire de Port des Barques, habite depuis deux ans à Cayenne. Elle y a même fondé l’École d’art de Guyane ou elle exerce comme professeur de photographie. Et bien que ses créations personnelles se consacrent principalement au paysage naturel des forêts, depuis près d’une quinzaine d’années, ses inspirations ne sont pas complètement dissociables de l’environnement des marais et de l’estuaire où elle a longtemps vécu. Cette relation subtile qui n’a rien d’évident, mérite grandement d’être méditée.

Une relation privilégiée avec Le sas-culture
L’invitation du Sas-culture adressée à Julie Boileau n’a rien d’un hasard, elle s’inscrit dans le prolongement d’une longue collaboration initiée, en 2013, par la commande d’une série de portraits dans le cadre du Débat national sur la transition énergétique, lors d’une action culturelle à l’Assemblée nationale. Son projet, intitulé Visages citoyens, a été le point de départ d’un atelier d’étudiants en photographie de l’Ecole d’art de Condé à Paris. Puis il s’est prolongé deux ans plus tard par une exposition collective intitulée « Le portrait, le paysage et le citoyen », organisée à La Rochelle dans le cadre de la COP21. Son diptyque y tient une place centrale. Il fut par la suite longtemps exposé dans le 8e arrondissement de Paris à l’Union sociale pour l’habitat. Julie Boileau est également la scénographe de l’exposition « Un été à Montreuil » présenté à la galerie Le sas de Montreuil. Organisée en partenariat avec la municipalité, selon une démarche participative, elle présentait le regard estival des habitants de la ville. Pour sa première résidence, Le Sas-culture a tenu à conjuguer la continuité de son activité parisienne sur la décennie passée, et l'inscription résolue dans son nouveau territoire rochefortais.