
Le 11 juillet 1789, Louis XVI renvoyait son ministre Necker, trois jours plus tard débutait la Révolution. De même le 25 juillet 1830, les Ordonnances de Saint-Cloud faisaient volées en éclat le consensus politique né de la Restauration et ce fût alors les Trois Glorieuses. Enfin en 1848, le refus de Guizot du suffrage universel direct a entraîné Louis Philippe dans sa chute.
Un passage en force sur "la mère de toutes les réformes" pourrait bien être l'étincelle qui embrasera le pays.
Un President élu sans légitimité politique
J'ai déjà écrit un article sur le sujet, aussi je vous y renvoie, mais en résumé, c'est au parlement d'inspirer la politique gouvernementale et Emmanuel Macron n'a pas derrière lui la majorité des députés. De plus, il a refusé le débat durant toute la campagne, utilisant la guerre en Ukraine comme pretexte pour s'extraire du débat public, excepté pendant l'entre de tour, où il a évoqué la possibilité d'un référendum. Une position depuis enterrée par Mme Borne.
Un President sans allié à l'Assemblée Nationale
L'élection d'Eric Ciotti à la tête de LR a sonné le glas d'un éventuel accord entre la majorité présidentielle et LR.
Pour autant, "Les Republicains" ne voteront pas non plus une motion de censure avec la NUPES et le RN. Ils ne le font jamais, car ils ne souhaitent pas de nouvelles élections législatives qui leur feraient perdre encore des députés.
En fait Eric Ciotti est habilement en train de pousser Emmanuel Macron à la faute. Élisabeth Borne, le premier ministre s'est déclarée prête à recourir au 49.3. Tous les ingrédients sont donc réunis pour que le gouvernement réussisse l'exploit de mettre le pays à feu et à sang à peine un an après cette réélection par défaut.
Le 49.3 de trop
Du côté du gouvernement, on assure que le 49.3 est démocratique, car "c'est dans la constitution".
La formule a de quoi laisser pantois, d'une part la constitution de la Vème République n'a jamais fait l'unanimité et était dénoncée par François Mitterrand comme "le coup d'Etat permanent", mais même les plus fervents gaullistes envisageaient le 49.3 que comme un outil exceptionnel et en aucun cas comme une nouvelle procédure ordinaire pour l'adoption des réformes. Une pratique du pouvoir revendiquée par le gouvernement, d'ailleurs les ministres ont même offert à Mme Borne un maillot floqué 49.3.
Le 49.3 est un peu comme une sorte de lit de justice sous l'Ancien Régime. Il entretient la frustration démocratique. Son recours permanent pour faire passer les reformes macronistes n'a aucun équivalent dans tout l'Occident. Son utilisation systèmatique est complètement irresponsable et conduira le pays au chaos.
Tous les syndicats contre la réforme
Ce n'est pas non plus du côté du dialogue social et des syndicats que le gouvernement puisera une légitimité ou trouvera des soutiens.
Même la CFDT, embarrassée lors de la dernière réforme, est désormais bien décidé à résister jusqu'au bout. Elle offre ainsi un front syndical uni contre la réforme.
Un contexte révolutionnaire
La crise de l'énergie, l'inflation galopante, les boulangeries en difficulté... Il ne suffirait que d'une étincelle et le gouvernement arrive avec un lance-flammes. 1788 vient de s'achever, je vous souhaite à tous une bonne année !