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Billet de blog 20 avril 2022

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Macron, en se bouchant le nez

Il y a mille raisons d'exprimer la détestation qu'a inspiré la politique de Macron...mais le ressentiment, aussi justifié soit-il ne peut dominer la raison politique. L’arrivée au pouvoir de l'extrême droite aurait des conséquences dramatiques et incalculables. Il faut donc - hélas- voter Macron, en se bouchant le nez

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Suffrage universel dédié à Ledru-Rollin, Frédéric Sorrieu, 1850

Ayant consacré une grande partie de ma vie à observer, analyser, filmer et commenter la vie politique en France et y passant aujourd’hui une grande partie de mon temps, avant le premier tour, je me suis autorisé à écrire à mes ami. e. s  français. es pour les encourager à voter Mélenchon, considérant que le candidat de La France Insoumise était le barrage le plus sûr contre l’extrême droite et cela, quelles que soient les réserves que l’on peut avoir sur l’homme et sa ligne politique. Il s’en est fallu de peu pour qu’il offre enfin une véritable alternative à la politique antisociale et discriminatoire qui règne depuis des décennies sur l’hexagone et qu’il écarte la tragique perspective d’une victoire de l’extrême droite. La déception de ses partisans n’en est que plus forte.

Au soir du 1er tour, Mélenchon a fait ce qu’il devait en décrétant par quatre fois que « pas une voix ne devait aller à Madame Le Pen » et en soulignant par la suite que les deux candidats restants en lice ne se valaient pas, insistant sur le danger que représente la candidate d’extrême droite. Il ne pouvait sans doute en faire plus face à son électorat composite qu’il doit préserver en vue des législatives. Un électorat dont on sait qu’il est la clef du second tour et qui a majoritairement l’intention de privilégier le vote blanc ou l’abstention. Ce qui incontestablement favorise Marine Le Pen. Les deux finalistes ont tenté de séduire l’électorat de gauche par des propositions sociales et écologiques qui n’entrent pas dans leurs projets politiques. Ils ne sont pas crédibles, mais le choix qui est posé aux électrices et aux électeurs de gauche ne porte plus sur un programme. Mais sur une seule question inhérente au système électoral présidentiel : comment éviter le pire quand une candidature d’extrême droite est en capacité de s’assurer le pouvoir ?

Comment ne pas partager la rage et le désespoir de celles et ceux qui devront, une fois encore, « voter contre » et glisser dans l’urne un bulletin au nom de celui qui a mené une politique antisociale qui a peu de précédents ? Celui-là qui par son arrogance et son mépris de classe s’est coupé des pans entiers de la société française. Le même qui, malgré des propos conciliants au début de son quinquennat, a ensuite favorisé les tenants de la laïcité d’exclusion. Cela fait beaucoup pour un seul homme qui est désormais le candidat « le moins pire ». Il n’est pas étonnant que beaucoup songent à se réfugier dans l’abstention ou le vote blanc. Mais le ressentiment aussi justifié soit il — et il l’est mille fois — ne peut se substituer à la politique. Et il ne s’agit pas de morale, mais d’éviter le drame majeur que représenterait la victoire de l’extrême droite. Le racisme, les atteintes aux libertés, l’inégalité comme ressort : les abstentionnistes et les partisans du vote blanc mesurent-ils réellement ce risque ?

En Italie, en 1976, alors que le Parti Communiste menaçait de détrôner une démocratie chrétienne corrompue par 30 ans de pouvoir, Indro Montanelli, intellectuel de droite (et ancien fasciste) critique vis-à-vis de la DC, déclara que pour éviter « la menace communiste », il fallait voter démocrate — chrétien « en se bouchant le nez ». Et bien en retournant le contexte, pour éviter la menace Le Pen, la gauche ne peut que voter Macron « en se bouchant le nez ». Ce danger-là écarté, des législatives rarement aussi cruciales seront l’occasion de vrais choix

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