
Combattre le fascisme
La communauté des défenseurs de Poutine est dominée par l’extrême-droite. Celle-ci porte en elle le fascisme comme la nuée porte l’orage. Il ne faut pas attendre que l’orage éclate. Le fascisme doit être écrasé dans l’œuf. Il faut combattre l’extrême-droite pour se débarrasser de tous les germes dont il faut craindre l’éclosion.
La méthode pour le combattre c’est la réalisation de l’unité la plus large contre ce danger. Trotsky écrivait :
« C'est précisément dans ce sens (la recherche de l’unité) que j'écrivais - avec l'intention délibérée de susciter l'effroi sincère ou l'indignation feinte des imbéciles et des charlatans, - que, dans la lutte contre le fascisme, nous étions prêts à conclure des accords pratiques militants avec le diable, avec sa grand-mère, et même avec Noske et Zörgiebel (Les deux sociaux-démocrates qui avaient organisé la répression contre les spartakistes) »
Il faut se souvenir que la principale cause de la prise du pouvoir par Hitler en 1933 a été la division de l’opposition principalement entre les socialistes du SPD et les communistes du KPD. J’ai expliqué tout cela dans un article intitulé : « Staline ouvre la voie à Hitler et à la liquidation des communistes allemands ». Il faut s’unir pour combattre le fascisme et, dès maintenant, combattre l’extrême-droite.
Aujourd'hui, l'unité est possible. La preuve en est que les 8 organisations syndicales françaises (CGE-CGC, UNSA, CFDT, CGT, FO, Solidaires, FSU, CFTC) ont choisi de s'exprimer ensemble en faveur des ukrainiens et d'avoir des actes de solidarité communs pour venir en aide à la résistance ukrainienne contre l'envahisseur (voir la dernière partie de cet article). Au même moment, toute l'extrême-droite soutient Poutine après avoir soutenu El-Assad.
ça a été accepté
Tous les groupes de l’extrême-droite européenne sont derrière Poutine comme ils étaient derrière El Assad. Nous retrouvons notamment :
- En Italie, le groupe néo-fasciste Casa-Pound appuyé par une autre organisation d'extrême-droite : "Forza Nuova" et la Lega italienne.
- En Hongrie, le Fidesz et le parti antisémite Jobbik.
- En Bulgarie, le parti Ataka.
- Au Royaune-Uni l’UKIP (Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni), un parti de la droite nationaliste et xénophobe allié au British National Party (BNP).
- En Pologne, les fascistes du groupe Falanga.
- En Grèce, Aube dorée avec les fascistes de Black Lilly.
- En Allemagne l’AfD (Alternative für Deutschland. Alternative pour l’Allemagne).
- En Autriche, le FPÖ.
- En Belgique le Vlaams Belang (parti flamand d'extrême-droite).
- L’European Solidarity Front qui regroupe diverses organisations fascistes et fascisantes de toute l’Europe (National Rebirth of Poland, Casa Pound, Black Lilly…).
Le ciment de l’extrême-droite est sa totale adhésion à la politique de Poutine. Celui-ci représente dans leur imaginaire collectif une stature peu commune, le modèle du leader fort, déterminé à combattre. Il devient le symbole de l’extrême-droite d’occident qui veut une internationale nationaliste autoritaire. Il défend les valeurs de « l’occident chrétien » en s’opposant à la « dégradation des mœurs » des « pays décadents ».
Il s'agit d'abord d'une fascination pour la violence, pour cette puissance que Poutine veut abattre sur ceux qu’il a décidé de punir sans craindre les jugements du monde. Les poutinolâtres répètent à l’envi leur métaphore de l’ours, animal puissant et gentil, qui devient redoutable contre ceux qui l’ont énervé. Poutine est donc toujours pour eux en état de légitimité. S’il agresse c’est parce qu’il a été provoqué. Il peut raser des villes entières comme Grosny, Alep ou Marioupol. Ses « opérations meurtrières spéciales » sont pleinement justifiées pour punir les populations qui lui résistent. Son ultra-nationalisme de Grand-Russe et sa soif de reconquête du grand Empire des tsars est un exemple pour tous les nostalgiques des guerres d’expansions coloniales ou impérialistes. Poutine est désormais le prototype de l’excellent chef d’état nationaliste et anticommuniste. Nostalgique d’un ordre antérieur où personne ne défiait l’autorité russe, il veut éliminer tous les obstacles à sa soif de reconquête. Il agit au nom d’une « dénazification » qui prolongerait celle qu’il attribue à la dictature stalinienne. Ce sont, en réalité, les peuples de l’URSS, tous tyrannisés par Staline, qui se sont sacrifiés pour gagner cette guerre contre le nazisme. C’est maintenant contre ces mêmes peuples que Poutine se retourne.
Les poutinolâtres
Les poutinolâtres sont les admirateurs sans limite d’un tyran. Ils boivent ses paroles comme si elles venaient d’un Dieu. Ils n’émettront jamais aucune critique contre lui. Ils n’ont plus aucun discernement personnel et répandent la divine propagande sans compter. Ils lui sont entièrement soumis et préoccupés de satisfaire ses désirs : prédominance de la culture slave, récupération des territoires perdus, domination de la Russie... Ils reprennent la théorie nazie en remplaçant seulement les aryens par les slaves tout en parlant – comble de contradiction – de « dénazification ».
Les défenseurs de Poutine ne se contentent pas, en général, de justifier et d’approuver sa politique. Ils le vénèrent et le glorifient. Ils se plient en quatre pour répéter et justifier les énormes mensonges de Poutine : « C’est Lénine qui a inventé l’Ukraine », « Les américains avaient promis que l’OTAN ne s’étendrait pas à l’Est » … Ils n’hésitent pas à se rouler dans la fange pour inventer les pires sornettes qui pourraient justifier ces mensonges (Voir notamment à ce sujet mon article "Les poutinolâtres en remettent une couche"). La fin justifie les pires moyens s’il s’agit de confirmer les propos de leur Dieu. Ils sont prêts à mentir et à falsifier à leur tour en déployant pour cela des records de fourberies en tout genre. Chez eux, perfidie, ruse, trahison et tromperie deviennent des qualités quand il s’agit de servir Poutine. Staline n’est-il pas l’un des grands hommes qui ont façonné l’histoire de la Russie ? C’est assurément l’avis de Poutine et tous les poutinolâtres lui emboitent le pas. Ils marchent à la même cadence et jouent la même partition. Hitler et les américains sont assurément de grands massacreurs mais Staline est l’ange purificateur qui les a combattus. Tout est à l’avenant. Aucune nuance critique ne trouve place dans leurs discours sur leur héros.
Les défenseurs d’Asselineau à la rescousse
Force est de constater que l’extrême-droite française ne se limite pas aux défenseurs de Zemmour et Le Pen. D’autres groupes de poutinolâtres sont venus s’y amalgamer avec, en premier lieu, les défenseurs d’Asselineau. Les masques sont tombés en ce qui concerne la politique de l’UPR. Cette organisation n’affiche plus la politique qui lui avait permis de présenter Asselineau comme candidat aux élections présidentielles de 2017. De plus, la politique interne de l’UPR a été contestée par tous les cadres. Ils étaient traités par Asselineau comme Poutine traite les autres oligarques. La défection des cadres a été suivie par la désertion d’au moins les trois quarts des militants de l’UPR. Les vieux slogans sont abandonnés. Ils ne servaient qu’à bluffer pour ratisser large. Il n’est plus question de rassembler sans clivage gauche-droite. Le soutien aux pires dictateurs, El Assad et Poutine, en est une preuve flagrante. Il n’est plus question non plus de ne pas se prononcer sur les questions clivantes. A propos de l’épidémie du COVID, Asselineau a émis des avis catégoriques et tranchés sur toutes les formes de prévention et de traitement. Il s’est campé comme le plus éminent spécialiste de la question. Il ne reste rien non plus des discours sur le CNR (Comité National de la Résistance). Aujourd’hui, si un CNR devait se reconstituer ce serait non seulement malgré Asselineau mais ce serait même contre Asselineau. Il est d’ores et déjà acquis que toutes les organisations syndicales sont contre lui puisqu’elles se sont prononcées pour le soutien à la résistance ukrainienne contre l’invasion de la Russie. Asselineau montre maintenant son vrai visage. La cohérence est totale avec ses anciennes amitiés comme Longuet et Pasqua. L’UPR est désormais clairement une organisation d’extrême-droite.
Les néostaliniens rejoignent l’extrême-droite
Une autre composante vient s’amalgamer à cette coalition de l’extrême-droite. Il s’agit des néostaliniens c’est-à-dire de ces nouveaux admirateurs de Staline qui sont à ce sujet en totale harmonie avec Poutine.
Celui-ci explique lui-même son admiration pour Staline en même temps que sa haine contre Lénine dans son discours du 21 février 2022. J’ai expliqué tout cela dans un autre article. Je reprends seulement l’essentiel ici. Pour Poutine, si des républiques se sont détachées de la Russie c’est entièrement de la faute à Lénine et aux bolchéviks. D’après lui, ce sont les bolchéviks qui ont inventé cette idée d’Ukraine indépendante qui n’avait pas lieu d’exister. Pourquoi ne pas dire, pendant qu’il y est, que ce sont les bolcheviks qui ont inventé la langue ukrainienne. Voici ce qu’il dit (01mn55s) :
« Tout d’abord, l’Ukraine moderne a été créée entièrement, de toute pièce, par la Russie des bolcheviks, par la Russie communiste. Ce processus a commencé pratiquement tout de suite après la révolution de 1917. D’ailleurs Lénine et ses compagnons l’ont fait de manière assez brutale vis-à-vis de la Russie c’est-à-dire qu’ils ont séparé de la Russie, ils ont coupé une partie des territoires historiquement russes et des millions de personnes qui vivaient sur ce territoire n’ont pas pu exprimer leur avis. »
Poutine considère par contre qu’une merveilleuse solution a été apportée par la terreur de Staline. Voilà enfin un remède aux dérives de ce pauvre Lénine ! (9mn02s) :
« Ensuite, il y a eu l’époque de la terreur de Staline : la nationalisation, le système planifié de l’économie. Tout cela a mené au fait que les principes qui ont été déclarés de cette construction étatique n’ont pas pu fonctionner (Il s’agit des principes de Lénine). C’est-à-dire que ces républiques n’ont pas pu avoir de vraies volontés. En pratique, on a créé un système très centralisé donc c’était un Etat unitaire. Staline a pratiquement réalisé sa vision et non pas la vision de Lénine de construction de l’Etat. »
Le gouvernement mis en place par Staline n’avait aucun rapport avec ce que Lénine avait voulu. Nous sommes bien évidemment d’accord avec lui. En conséquence, les principes de Lénine n’ont pas été appliqués sous Staline « Tout cela a mené au fait que les principes qui ont été déclarés de cette construction étatique n’ont pas pu fonctionner ». Car, en fait, avec Staline « on a créé un système très centralisé donc c’était un Etat unitaire ». En conséquence, du point de vue de Poutine, tout allait bien. Les républiques fédérées existaient sur le papier mais en fait elles n’avaient plus aucune existence puisque, dans tous les cas, toute l’URSS obéissait à la dictature stalinienne comme s’il s’agissait d’un seul pays. Celui qui osait broncher se faisait fusiller. Contrairement à Lénine, Staline a donc toute la sympathie de Poutine. Cela se comprend car Staline était lui-même un nationaliste. Lénine en avait fait la remarque. Dans un texte qu’il dicte le 30 et 31 décembre 1922, il qualifie en effet Staline en des termes peu flatteurs :
« Géorgien qui accuse dédaigneusement les autres de “social-nationalisme” alors qu’il est lui-même non seulement un véritable et authentique “social-nationaliste”, mais un grossier argousin grand-russe ».
Il reste que, pour Poutine, autre « grossier argousin grand-russe », Staline a commis une grave erreur : il ne suffisait pas de supprimer dans les faits les républiques fédérées. Pour Poutine, Staline aurait dû aussi les supprimer sur le papier, dans les textes constitutifs de l’URSS (9mn45s).
« Mais, on n’a pas fait de modification à la constitution et les principes qui ont été déclarés par Lénine n’ont pas été formellement démentis (Poutine aurait voulu que ces principes disparaissent des textes constitutifs de l’URSS). Mais, de toute façon, c’était un régime totalitaire. Ça fonctionnait de toute façon et de l’extérieur on avait une bonne image d’un pays démocratique »
En effet, grâce à la propagande des partis staliniens en France et ailleurs « de l’extérieur on avait une bonne image d’un pays démocratique ». Voilà un exemple apprécié par Poutine : une grosse dictature qui a une réputation de démocratie à l’extérieur. Il n’a pas un mot de compassion pour les innombrables victimes de Staline lequel avait en effet construit une URSS où plus personne ne pouvait protester. Rappelons que pendant « la grande terreur », qui a duré environ 500 jours en 1937-38, il a fait fusiller en moyenne 1 500 personnes par jour et il en a déporté 1 600 autres. Voilà bien pour Poutine un personnage formidable qui savait comment avoir une URSS parfaitement homogène.

Les néostaliniens de France et d’ailleurs sont nostalgiques de cette époque où le PCF pouvait dominer l’opinion publique et faire des pires mensonges les pures vérités staliniennes. Avec 800 000 adhérents et 28,6% des suffrages aux élections en 1946, il pouvait faire croire aux pires accusations des procès de Moscou malgré les preuves des falsifications apportées lors de l’enquête de la commission Dewey. Aujourd’hui les néostaliniens disposent d’une maison d’édition financée par Poutine pour réintroduire toutes ces falsifications. J’ai eu l’occasion de dire quelques mots de l’infâme Aymeric Monville qui est responsable de cette maison d’édition.
A l’image de Poutine, les néostaliniens défendent le capitalisme. Il ne faut voir là aucune contradiction. Il est parfaitement logique de défendre à la fois Staline et le capitalisme. Staline lui-même avait abandonné ouvertement la lutte pour la révolution socialiste. Il l’avait déclaré sans ambages dès mai 1935, au journaliste américain Roy Howard, qui était célèbre à l’époque. Voici textuellement ce que fut leur échange à ce sujet :
« Qu’en est-il, a demandé M. Roy Howard à Staline, de vos plans et de vos intentions de révolution mondiale ? » — « Nous n’avons jamais eu de semblables desseins. » — « Mais pourtant... » — « C’est le fruit d’un malentendu. » — « Un tragique malentendu ? » — « Non, comique ou plutôt tragi-comique. »
A l’image de Poutine, les néostaliniens sont en plus anticommunistes. Là encore, il ne faut voir aucune contradiction. Staline avait exterminé pratiquement tous les bolchéviks. Je n’ai dénombré que neuf survivants. Les néostaliniens, exactement comme Poutine, défendent non seulement le capitalisme de Russie mais aussi les visées de conquêtes impérialistes de Poutine notamment en direction de l’Ukraine. Cela n’a évidemment rien à voir avec le communisme.
Pourtant ces néostaliniens, qui sont souvent membres du PRCF, se disent parfois « communistes ». Ils n’ont que faire de Marx, de Lénine et de la révolution socialiste. Ils sont autant communistes que l’étaient Jacques Doriot ou Simon Sabiani. Bref ! Ils sont d’extrême-droite même si parfois ils ne le savent pas sans doute puisqu’ils ne se sont pas posés sérieusement la question.
La coalition de l’extrême-droite
Partisans de Le Pen, de Zemmour, d’Asselineau ou du PRCF, ils s’abreuvent tous aux mêmes sources. Ils citent fréquemment les sites web des amis d’André Chanclu et de Frédéric Chatillon que ce soient « Réseau Voltaire » ou « Egalité & Réconciliation ». Ajoutons-y maintenant « Le Saker francophone », « Réseau International » et « Les Crises ». Sur ce dernier site, Olivier Berruyer tente à nouveau de dépasser Thierry Meyssan en tant qu’auteur complotiste-alternatif. Nous nous souvenons qu’il s’était fait le champion de la contestation à propos des attentats du 11 septembre mais que, pour regagner l’accès aux plateaux de la télé, il avait ensuite renié toutes ses critiques. Ajoutons encore à notre liste « TV Libertés » lancée le 30 janvier 2014 par Martial Bild, ancien cadre du Front national. Elle est maintenant dirigée par Philippe Milliau, ancien dirigeant du mouvement d'extrême-droite « Bloc identitaire ». Signalons pour finir l’ancien communiste belge Michel Collon qui, après avoir été animateur d’un « Comité Joseph Staline », a rejoint lui aussi les néostaliniens. Sur son site web « Investig’Action », il s’exhibe avec ses nouveaux amis : Erwan Castel, Jacques Baud ou Christelle Néant.
Il s’agit bien d’une coalition de l’extrême-droite avec, pour l’essentiel, une même orientation politique qui se décline sous des apparences différentes et avec quelques nuances dans diverses organisations. Il est fréquent et normal que, sur les forums des réseaux sociaux, des adhérents de ces divers groupes copinent entre eux ouvertement et forment un front commun pour interdire l’expression des adversaires de Poutine.
Et maintenant la censure
AgoraVox se trouve peut-être au premier rang des sites qui abritent des intervenants de tous ces courants poutinistes et, en effet, nous en voyons quelques uns qui s'invitent entre eux à participer le soir à des séances de tchatches.

Au premier rang se trouvent les deux individus que j'ai signalé par ailleurs comme des champions de la diffamation. Ils sont manifestement couverts par la direction d'AgoraVox. Or, cette même direction a censuré plusieurs fois le présent article. Quel courant cette direction tient-elle donc à défendre parmi les quatre dont je parle ici ? S'agit-il des défenseurs de Zemmour, des défenseurs de Le Pen, des défenseurs d'Asselineau ou des crypto-staliniens ? Il faut sans doute chercher d'autres indices pour répondre à cette question mais il est certain que ce site n'est plus pleinement un site de "journalisme citoyen". C'est cependant un site qu'il faut tenter de sauver. C'est ce que je tente avec le projet "amélioravox".