Entretien avec Marie Piqué, Vice-présidente de la Région Occitanie en charge des solidarités, des services publics et de la vie associative.
L’accès à un logement est de plus en plus difficile pour nombre de nos concitoyens. Quel est votre regard sur la situation ?
Marie Piqué : Nous sommes à un tournant face à la crise du logement que le pays traverse. En ce qui nous concerne en Occitanie, plus de 180 000 ménages sont désormais en attente d’un logement. Pour les élus des collectivités territoriales, il s’agit d’une préoccupation permanente. Il est urgent de poser les jalons d’un grand débat national sur cette question de l’habitat et du droit au logement, en y associant le plus grand nombre d’acteurs concernés. Le désengagement financier de l’Etat et les décisions politiques des dernières années ont mis un coup d’arrêt à la dynamique de construction.
Aujourd’hui il y a besoin de redéfinir collectivement les objectifs que l’on veut se donner et les moyens que l’on veut y attribuer. Aucune collectivité n’a les moyens de substituer aux aides à la pierre qui ont été supprimées par l’Etat. Pour autant, au regard des enjeux importants auxquels nos territoires vont devoir faire face dans les années à venir, en matière d’aménagement du territoire comme de réponse aux enjeux climatique, il faut peut-être réfléchir à une organisation plus pertinente du financement de l’habitat public aujourd’hui. Donner les moyens aux collectivités locales de mener les grands projets nécessaires de construction et de réhabilitation, pourrait s’avérer une idée pertinente. Les collectivités locales ont l’expertise et une connaissance fine des territoires qui permettrait d’appréhender au mieux les besoins.
Pourtant le conseil régional d’Occitanie intervient déjà sur le logement ?
M.P : Concrètement, la Région Occitanie participe chaque année de manière volontariste à hauteur de plusieurs millions d’euros pour accompagner la construction de logements sociaux. Cela permet certes, de soutenir des projets de construction ou de réhabilitation portés par des bailleurs locaux, mais à une échelle qui ne permet pas de répondre à la demande massive de logements que connaît notre région. Nos aides à la construction ou à la réhabilitation sont également conditionnées afin de répondre aux enjeux territoriaux, énergétiques et d’accessibilité aux personnes en situation de handicap. Nous allons entamer une série de concertations avec les acteurs du secteur afin de voir comment faire évoluer ces aides régionales, pour qu’elles soient le plus utiles et efficaces possible.
Au-delà de la construction, le manque de terrain disponible s’invite dans de nombreux débat. C’est un sujet qui préoccupe aussi le conseil régional ?
M.P : C’est un sujet au cœur de l’actualité régionale, en raison de la révision du schéma régional d’aménagement et de développement durable que nous impose la loi Climat et Résilience de 2021. Celui-ci fixe la stratégie, les objectifs et les règles de nombreux domaines liés à l'aménagement du territoire, dont la protection et la restauration de la biodiversité ou encore l’artificialisation des sols. Ce dernier point en particulier, avec l’enjeu de la Zéro Artificialisation Nette, nous amène à réviser le schéma régional afin de travailler en concertation avec les territoires, communes et départements vers l’objectif de réduire de 50% le rythme d’artificialisation et de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030. Enfin le sujet de la réhabilitation des friches fait également partie de nos discussions.
Au cœur de toute cette réflexion, se pose de manière très forte la question du foncier. A juste titre, les bailleurs ont plusieurs fois exprimé leurs inquiétudes sur ce sujet et notamment l’enjeu de la priorisation de terrains leur permettant d’engager des projets publics de construction de logements neufs, dans le contexte actuel de tensions fortes en termes d’accès au foncier.
Dans les territoires ruraux la question de la rénovation est aussi très prégnante.
M.P : Nous devons également être attentifs aux inquiétudes exprimées par les communes et les communautés de communes sur les questions concernant le logement privé, et d’autant plus dans les territoires ruraux. De nombreuses villes voient croître le nombre de logements insalubres avec toutes les difficultés que cela peut poser. Il y a un enjeu aujourd’hui de permettre le retour d’habitants dans les centres-villes, et dans des logements décents. La région a mis en place un service public régional de la rénovation énergétique, Rénov’Occitanie, il en existe un au niveau de l’Etat également, et il s’agit aujourd’hui de voir comment nous pouvons permettre au plus grand nombre de propriétaires de s’emparer de ces aides.