… Mais elle a aussi permis de faire surgir dans le débat public une question primordiale, celle de la place du travail dans notre société.
Pour beaucoup de communistes désespérés de ne pas avoir vu cette question mise en avant par les médias lors des présidentielles, c’est un véritable soulagement tant elle est importante et fondamentale. Et comme j’ai pu le dire sur Tweeter de manière un peu spontanée, les gens sensés ont bien compris ce qu’a voulu dire Roussel sur la place à redonner au travail dans notre pays. Au-delà des polémiques, il est bien triste de voir qu’il serait interdit de rêver d’une société du travail et de la bonne paye pour tous. C’est en tout cas parce que nous croyons encore à ce rêve que nombre de militant renouvellent leur adhésion chaque année au parti communiste.
Alors que cette polémique a même pris des proportions nationales l’an dernier, je pense à deux ouvrages totalement en lien avec cette question du travail. Ces livres ce sont « Jean Jaurès, les convictions et le courage » de Carole Delga, et « Je vous écris du front de la Somme » de François Ruffin. Je vous invite bien évidemment à les lire si ce n’est déjà fait tant ils sont d’actualité et traitent, chacun à leur façon, de cette question fondamentale du travail et de son rapport à la politique.
Le livre de la Présidente d’Occitanie suit pas à pas la vie de Jean Jaurès et les grands combats qu’il a mené, pour la paix, la justice sociale et la République. Il permet tout particulièrement de mettre le doigt sur la clairvoyance qu’avait le député du Tarn à appréhender les débats entre gauches révolutionnaires et réformistes.
J’en ai retenu pour ma part qu’il ne faut probablement pas opposer l’idéal révolutionnaire, ce grand soir qui permettra de libérer une fois pour toutes le monde du travail du joug capitaliste, et ce réformisme qui permet malgré tous des avancées notables pour améliorer la situation des travailleurs au quotidien. Et Fabien Roussel ne dit rien d’autre lorsqu’il explique qu’il n’est pas contre les primes parfois obtenues de haute lutte par les travailleurs. « La vie est dure et les fins de mois difficiles, quand on peut arracher une prime même de 100 euros, on prend ! Mais n’est-ce pas le plus beau des idéaux que de se fixer comme horizon d’éradiquer le chômage et de garantir un emploi, une formation, un salaire à chacun de nos concitoyens ? »
L’état de catastrophe démocratique dans lequel se trouve notre pays aujourd’hui nécessite bien des convictions et du courage, et notamment pour remettre ce sujet du travail au cœur du débat public. Ce sont d’ailleurs ses convictions et son courage qui permettent à Fabien Roussel de redonner un grand bol d’air frais à la gauche depuis quelques temps. Un espoir se lève bien au-delà des rangs des militants communistes, et c’est tant mieux !
Dans la période, Roussel n’a pas été le seul à aborder cette question du travail. Dans son dernier livre, François Ruffin met le doigt exactement là où ça fait mal. « Je ne peux pas voter à gauche : je suis pour le travail ! », « le sens de mon orientation plutôt de droite : mettre le travail au centre de la structure sociale » …
Ruffin a cette façon bien à lui de raconter son histoire, celle de cette France qui s’est scindée en deux, la France du « Travail » et celle « des assistés, des cas soc’ ». Géographiquement, il a raison, cela correspond aussi au découpage rural et urbain du pays. Aujourd’hui, cette France rurale qui bosse, qui galère souvent pour remplir son frigo, son réservoir ou partir en vacances, est de plus en plus attirée par le vote rassemblement national. C’est un fait. Le front de la Somme a craqué, celui du Tarn et Garonne aussi ! Nous avons désormais un maire RN à Moissac et une députée RN sur la 2ème circonscription. Les questions du Travail et de l’assistanat ont été au centre des préoccupations des électeurs, mais seulement nous, la gauche, la NUPES, étions ailleurs…
Le porte-parole de Roussel, Ian Brossat, partage tout à fait le constat sur les législatives : « les résultats sont très bons dans les métropoles, c’est très bien, il ne s’agit pas de baisser la garde là-dessus. Mais ils sont moins bons dans la France périphérique, où le Rassemblement national fait des scores conséquents ». Il rejoint ainsi en partie l’alerte du député insoumis d’Amiens, sur la faiblesse de la gauche dans les zones rurales.
Dans son livre, François Ruffin l’affirme : « Nous, le peuple de France, avons besoin d’un dessein commun », « passer du vivre-ensemble au faire-ensemble ». Pour lui, ce dessein commun est devant nous comme une montagne à gravir : l’impératif écologique. « Voilà l’immense défi que tous, tous ensemble, nous avons à affronter ». En comparant notre époque à celle des États-Unis lançant leur effort de guerre en 1941, il explique que c’est « à notre tour de canaliser toutes les énergies du pays, tous les capitaux, tous les savoir-faire, toute la main-d’œuvre, vers un but : une économie de guerre climatique ».
Et que veut dire Roussel lorsqu’il parle de « millions d’emplois à créer pour changer notre modèle de société et enrayer la catastrophe climatique devant nous » ? Mais devrions-nous encore une fois faire confiance au « marché », à sa fameuse « main invisible » ?
Le capital n’a qu’un objectif, celui de faire du profit sur le dos du travail, le dessein lui importe peu ! Il se fiche bien que nous courions à la catastrophe. En 1945, il se fichait pas mal que nombre de français ne pouvaient pas se soigner. C’est pour cela que les communistes ont tenu à accompagner le grand dessein national de reconstruction du pays et des jours heureux, d’une loi qui aura marqué l’histoire à jamais avec la création de la sécurité sociale. Aujourd’hui, répondre à l’impératif écologique, créer ces millions d’emplois dans l’énergie, les transports, les services publics, la rénovation… va nécessiter de mettre à l’abri les travailleurs et la population en général, des logiques prédatrices du capital. La création d’une sécurité de l’emploi et de la formation sera une révolution nécessaire pour permettre de répondre à l’urgence climatique, construire ce dessein commun et redonner cet espoir d’émancipation par le travail à toutes et tous.
* Pour en savoir plus sur la sécurité de l'emploi et de la formation: cliquez ici

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