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Enseignant-chercheur en droit international de l'environnement ,du désarmement et en relations internationales.Militant.Retraité.

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Billet de blog 29 juillet 2022

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Chap5. Avoir et/ou retrouver son  souffle !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Chap5. Avoir et/ou retrouver son  souffle !

Plan détaillé :

1-L’utopie créatrice

Critique du réalisme
Défense de l’utopie créatrice

Goutte d’eau
Stratégie de l’utopie concrète
Utopie créatrice portée par…

2-L’optimisme, l’espérance

C’est beau la vie
Optimisme, pessimisme
Espoir, espérance
Espérance?
Espérer… encore…
Patience

3-L’humour

L’humour en général
Traits d’humour

4-Sagesse et folie

5-Imagination

6-Maîtriser des peurs

7-La révolte

8-Ethique

9-Résistance

10-La solidarité

11-La fraternité et le « commun »

12-Responsabilité

13-Autonomie

14-Risque
Importance du risque
Se lever !

15-Fidélité

16-Courage
Solitude
Souffrances
Courage et souffrances
Courage : succès et échecs
Courage dans les tempêtes
Courage : formules courtes
Courage : philosophie, organisation du courage

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1-L’utopie créatrice

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Critique du réalisme


Mettre perpétuellement en avant et avoir à la bouche le terrible « soyons réalistes,
restons réalistes » c’est aujourd’hui en fait, malgré soi ou avec soi, être probablement
fermé sur des mécanismes de mort, c’est refuser les paris d’autres possibles, c’est
étouffer l’audace, c’est pactiser avec l’indifférence, être paralysé par la peur de ne
rien pouvoir faire et ne rien faire, c’est enfin et surtout se laisser glisser sur la pente
la plus forte : celle d’un système porteur de souffrances et de drames.
JML

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Des personnes et des peuples sont sacrifiés sur l’autel du réalisme servi par ses
grands prêtres et ses fidèles.
JML

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Est-il « réaliste » de croire que nous pouvons persévérer dans un modèle qui nous a
conduits au bord de la désintégration sociale et du désastre écologique planétaire ?
Nous ne serons jamais capables d’aborder correctement le problème Nord-Sud si
nous ne nous affranchissons pas de l’impératif systémique du « toujours plus » au
profit d’une civilisation plus frugale et conviviale, capable de régler son évolution
selon la norme du « suffisant ». Une société ne peut pas se maintenir sans utopie, au
sens que ce terme a chez Paul Ricœur ou Ernst Bloch.
André Gorz

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Il est fou celui qui regarde le doigt qui lui montre la lune.
Proverbe chinois

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On serine aux gens à longueur de journée que la preuve de l’excellence du
capitalisme est faite, qu’ils ne doivent pas examiner autre chose que ce qui existe :
capitalisme et consommation, l’humanité a atteint sa destination finale. Si vous
proposez autre chose vous êtes au mieux un doux utopiste inoffensif ou au pire un
Pol Pot en herbe. Pas d’avenir véritable, huit clos historique. Contrainte qui paralyse
l’imagination et l’activité politiques ; renforcement de l’apathie et du repli sur la
sphère privée qui consolident à leur tour le blocage. Conditions qui rendent à
nouveau possibles des issues régressives comme le repli sur le nationalisme.
Cornélius Castoriadis

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Défense de l’utopie créatrice


Je crois à l’utopie, non pas celle où l’on s’évade mais celle où l’on se projette avec
une volonté de fer. Tôt ou tard cette force donne son fruit.
Emmanuel Mounier

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De l’utopie il en faut drôlement parce que çà réduit à la cuisson.
Combat non-violent

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L’utopie créatrice n’est pas celle des nuages, c’est celle qui prend les moyens de se
réaliser et cela à travers des moyens écologiques, justes, démocratiques et
pacifiques.
JML

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« Le plus grand dérèglement de l’esprit est de croire les choses parce que l’on veut
qu’elles soient et non parce que l’on a vu qu’elles sont en effet. »écrivait Descartes. Non !…Non ! Et non ! Il faut certes voir et comprendre ce qui est mais, aussi, se demander ce qui devrait être et penser des alternatives. L’utopie créatrice est vitale.

JML

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L’utopie créatrice n’est pas celle des nuages, c’est celle qui prend les moyens de se
réaliser et cela à travers des moyens écologiques, justes, démocratiques et
pacifiques.
Mettre en avant des utopies concrètes qui prennent les moyens de se réaliser. Elles
sont porteuses de vie, la vie les porte, dans leurs diversités elles éclatent ou
apparaissent doucement.

JML

L’utopie des fins « veut ouvrir une lucarne dans le huis clos » écrit René Jean Dupuy (La clôture du système international, puf, 1989,p156), « Cette fonction utopique entretient l’humanité dans sa vocation à créer, dans son ardeur à vouloir atteindre une transcendance. Cet acharnement à rêver d’elle- même, au-delà de sa condition présente, exprime sa conviction d’un droit à la survie. »

Alors en se retournant on retrouve différentes voix qui en appellent à l’utopie. Ainsi Victor Hugo : « l’utopie c’est la vérité de demain »,Lamartine : « les utopies ne sont que des vérités prématurées », Ghandi : « l’utopie çà n’est pas l’irréalisable mais l’irréalisé »,Bakounine, penseur anarchiste :« ceux qui parlent toujours d’impossible n’ont jamais avancé d’un pas »,André Gide : « Combien de jeunes velléités qui se voyaient pleines de vaillance et qui ont été dégonflées tout à coup par ce seul mot d’utopie et la crainte de passer pour chimériques aux yeux des gens qui se veulent censés. Comme si tout grand progrès de l’humanité n’était pas dû à l’utopie créatrice. ». Charles de Gaulle : « Rien de sérieux ne se fait avec des chimères, rien de grand ne se fait sans elles. », André Gorz : « Une société ne peut se maintenir sans utopie au sens que ce terme a chez Paul Ricœur ou Ernst Bloch. », Jacques Duboin, théoricien de l’économie distributive : « L’utopie n’est souvent qu’une vérité non encore admise, car l’inertie intellectuelle rend les intelligences meublées imperméables aux conceptions nouvelles ». Enfin voilà le titre d’un grand ouvrage d’un grand écologiste, René Dumont : « L’utopie ou la mort ! »

Bref : la dimension utopique est indispensable, c’est un fondement de toute prospective. René Jean Dupuis écrivait magnifiquement : « C’est le moment non pas de la simple extrapolation du passé et du présent mais le moment de la rupture, de la distanciation à l’égard du modèle actuel de développement, le moment de la conscience, le moment de la transcendance de l’homme par rapport à sa propre histoire. »

Mais, justement, l’histoire : comment l’oublier ?

 L’utopie des moyens n’est-elle pas celle du refus de certains moyens et la détermination d’autres moyens conformes aux fins proclamées ? En cette seconde décennie du XXIème comment fermer les yeux sur des utopies qui ont fait basculer d’innombrables êtres humains dans des mécanismes implacables et monstrueux ? Au nom de « lendemains radieux » combien de présents massacreurs ? Au nom de l’Homme Nouveau combien de mécanismes broyeurs de boucs émissaires ? Au nom de la paix combien de massacres ?Au nom (demain peut-être ?) de « fascismes verts » combien de gouffres entre l’ écologie et la démocratie alors que, bien au contraire, elles doivent se tenir embrassées ?Au nom de l’écologie combien, aujourd’hui et demain peut-être, d’injustices volontaires et involontaires, alors que ,au contraire, l’écologie et les luttes pour la justice doivent, elles aussi, se tenir embrassées(par exemple à travers la « justice climatique » ) ?

Ainsi l’utopie des fins peut se dégrader et partir dans les abîmes de deux façons. D’abord sa fonction c’est celle d’une ouverture et non pas d’un projet qui se referme sur lui-même, c’est celle d’un élan et non pas d’un horizon définitif.

Mais surtout l’utopie des fins ne peut justifier tous les moyens pour y arriver. C’est là probablement l’une des plus grandes oppositions à travers le temps des théories et des pratiques humaines .Si l’on veut schématiser, n’y a-t-il pas d’une part Machiavel : « la fin justifie les moyens » et, d’autre part, Ghandi : « la fin est dans les moyens comme l’arbre est dans la semence. »cette seconde vision signifiant qu’aucun moyen n’est neutre, La légitimité d’une cause n’impliquent pas la légitimité de tous les moyens pour la faire triompher.les moyens doivent être conformes aux fins que l’on met en avant. Si l’on veut la démocratie ne faut-il pas penser et mettre en œuvre des moyens démocratiques ?Si l’on veut la justice ne faut-il pas penser et mettre en œuvre des moyens justes ?Si l’on veut la paix ne faut-il pas penser et mettre en œuvre des moyens pacifiques ?

Si l’on veut la protection de l’environnement ne faut-il pas penser et mettre en œuvre des moyens écologiques ? Ainsi en matière d’environnement il faut donc identifier des moyens absolument contraires aux fins proposées, et y résister, et proposer des alternatives. Il faut donc soutenir et inventer des moyens particulièrement conformes aux fins proposées. Mais entre ces moyens qui sont clairs, les uns allant dans le sens de la dégradation de l’environnement, les autres dans le sens d’une véritable protection, il y a une place plus ou moins grande pour des moyens plus difficilement identifiables .Il y a même des moyens qui ont des effets qu’on ne pensait pas voir apparaître, ainsi des moyens protecteurs de l’environnement, moyens contre le réchauffement climatique, qui peuvent produire des situations… de déplacés environnementaux.

Bref, l’utopie créatrice est vitale à tous les niveaux géographiques, elle doit être présente au niveau international, mais les moyens pensés et mis en œuvre doivent être conformes aux finalités mises en avant.

JML

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L’utopie ou la mort !
René Dumont

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Ceux qui parlent toujours d’impossible n’ont jamais avancé d’un pas.
Bakounine

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L’utopie c’est la vérité de demain.
Victor Hugo

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Les utopies ne sont que des vérités prématurées
Lamartine
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Tous les hommes disaient que c’était impossible et puis est arrivé un homme qui ne
savait pas que c’était impossible. C’est lui qui a réussi.
Jean Cocteau

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Si une coupe d’eau ne suffit pas à éteindre un incendie il ne faut pas en conclure que
l’eau est impuissante contre le feu.
Meng Tseu

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Ne vous découragez pas, ne renoncez pas.
N’écoutez pas les lâches qui pour trahir plus commodément
Leur devoir vous diront « çà ne sert à rien ».
Riez au nez des sceptiques, des prudents, des malins,
De ceux qui mettent leur vie en conserve et commencent
Leur retraite au biberon.
Acclamez ou dénoncez,
Soyez conquis ou soyez indignés,
Mais jamais neutres, indifférents, passifs, résignés.
Faites quelque chose de votre vie.
Tout amour semé, tôt ou tard, fleurira.
Travaillons !
Raoul Follereau

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L’utopie est une réalité en puissance.
Edouard Herriot

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Combien de jeunes velléités qui se voyaient pleines de vaillance et qu’ont dégonflées
tout à coup ce seul mot d’ « utopie » et la crainte de passer pour chimériques aux
yeux des gens sensés. Comme si tout grand progrès de l’humanité n’était pas dû à
de l’utopie réalisée.
André Gide

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L’utopie n’est souvent qu’une vérité non encore admise, car l’inertie intellectuelle
rend les intelligences meublées imperméables aux conceptions nouvelles.
Jacques Duboin

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Il est bien des choses qui ne paraissent impossibles que tant qu’on ne les a pas
tentées.
André Gide

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A chaque instant le réel est gros d’une infinité de possibles.
Albert Jacquard

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Un puissant vizir voulant récompenser son plus fidèle esclave lui demanda : « Que
veux-tu ? » L’esclave lui répondit : « Je souhaiterais obtenir pour moi et ma famille du
riz en quantité telle que sur un échiquier on dispose un grain sur la première case
puis deux sur la deuxième, quatre sur la troisième et ainsi de suite » Le vizir surpris
par cette humble demande la fit exécuter sur le champ. Il ne s’était pas rendu compte
du chiffre astronomique de grains de riz que cela représentait. Quand il a compris, il a préféré accorder la liberté à l’esclave.
Théodore Monod

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Cette fonction utopique entretient l’humanité dans sa vocation à créer, dans son
ardeur à vouloir atteindre une transcendance. Cet acharnement à rêver d’elle-même,
au-delà de sa condition présente, exprime sa conviction d’un droit à la survie.
René- Jean Dupuy

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L’utopie n’est pas l’irréalisable mais l’irréalisé.
Gandhi

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Rien de sérieux ne se fait avec des chimères
Rien de grand ne se fait sans elles.
Charles de Gaulle

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Goutte d’eau

L’image de la « goutte d’eau dans l’océan » par rapport à telle ou telle action est
assez courante. Selon les cas, elle veut signifier que cette action est dérisoire ou
utile ou à la fois limitée et nécessaire. La « goutte d’eau » a une valeur qui est liée au
moins à quatre points de vue différents qui peuvent se compléter :

- Par rapport au contenu de l’action : elle ne change pas le monde mais peut
changer la vie ou une partie de la vie d’une personne, d’une famille, d’un village, d’un
quartier… En elle-même, elle est essentielle.

-Par rapport aux liens entre le local et l’international : la formule « penser
globalement, agir localement » est parlante. Elle doit sans doute être complétée par
une autre : « penser localement agir globalement ». L’enjeu est de faire évoluer ou
de changer le système à tous les niveaux géographiques. En ce sens, des
alternatives locales peuvent contribuer à imaginer et soutenir des changements plus
vastes. Elles peuvent permettre de ne pas en rester à l’art du possible, de tenter
aussi celui de l’impossible, d’ouvrir des pistes, de corriger plus vite des erreurs.

-Par rapport aux personnes qui agissent : c’est aussi au niveau local qu’une
pratique de la solidarité et de la résistance peut se substituer à une culture de
compétition et de soumission. D’autre part les associations peuvent être les lieux où
s’exerce une démocratie participative. Enfin, par rapport à chacun, chacune de nous
: être c’est, entre autres, agir. « L’action compte double, elle change la situation, elle
me change moi-même »(Alain).

-Par rapport à ceux et celles qui nous ont précédé et ceux et celles qui nous
suivront : penser aussi en termes d’humanité ça n’est pas fuir nos responsabilités
envers les proches, c’est essayer de tenir deux des bouts de la chaîne. En ce sens,
la prise en compte de l’existence et de la qualité de vie des générations futures est
plus ou moins présente dans nos actions d’aujourd’hui, en liens de coeur et d’esprit
avec ceux et celles qui, avant nous, ont essayé de faire avancer libertés, égalités,
solidarités.
Oui, la goutte d’eau est dans l’océan mais l’océan, d’une certaine façon, est déjà là
dans la goutte d’eau.
De la goutte d’eau à la rosée du matin, il n’y a qu’un pas. Rosée du matin, aube
d’humanité, printemps d’espérance… Un jeune poète disait: « dans la rosée du
matin, j’ai cueilli le souffle du monde… ».
JML

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Stratégie de l’utopie concrète

Mettre en avant des utopies concrètes qui prennent les moyens de se réaliser. Elles
sont porteuses de vie, la vie les porte, dans leurs diversités elles éclatent ou
apparaissent doucement.
JML

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Rêve de grandes choses, cela te permettra d’en faire au moins de toutes petites.
Jules Renard

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Quand on rêve tout seul il ne s’agit que d’un rêve.
Quand on rêve ensemble c’est le commencement de la réalité.
Proverbe brésilien

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L’arbre est connu par ses fruits, non par ses racines.
Proverbe d’Espagne

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Pour bâtir haut il faut creuser profond.
Proverbe mongol

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L’utopie des fins ? Sa chance est d’espérer contre tout espoir. Faisceau d’images
motrices le mythe mobilisateur anime des ferveurs au service d’une volonté créatrice.
En rupture avec un monde qu’il rejette mais en travail pour le transformer. Destiné à
alerter l’opinion il semble plus riche d’inquiétudes salutaires que de solutions
précises. Mais il y a ambivalence dans l’utopie. A celle qui désigne des objectifs
jusqu’ici considérés comme inaccessibles, s’oppose l’utopie des moyens. Besogneux
agenceur de structures complexes, celui qu’elle captive construit des modèles dont la
perfection le ravit.
Ces deux démarches paraissent parfois guider les mêmes hommes. Elles sont
pourtant antinomiques. L’utopie des fins risque de se dégrader en utopie des moyens
lorsqu’elle se fixe un modèle préfabriqué et définitif, censé détenir la formule
magique. Son erreur est une rationalisation excessive qui enferme l’homme dans
l’utopie alors que sa fonction est l’ouverture.
René- Jean Dupuy

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La dimension utopique et prophétique demeure indispensable dans toute prospective
réelle qui implique non pas la simple extrapolation du passé et du présent mais le
moment de la rupture, de la distanciation à l’égard du modèle actuel de
développement, le moment de la conscience, le moment de la transcendance de
l’homme par rapport à sa propre histoire.
René-Jean Dupuy

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Une grille d’évaluation d’une institution peut porter sur trois éléments:
– l’utopie créatrice, c’est à dire des idées fortes sur le projet qui situent l’action,
l’informent, le dynamisent.
– la stratégie, c’est à dire l’organisation à long terme des phases de l’action pour
mettre en œuvre l’utopie créatrice en tenant compte des éléments actuels et
prévisibles des situations (but, politiques générales, objectifs).
– la tactique, c’est à dire l’application pratique, détaillée et circonstanciée de la
stratégie (programmation, ressources, méthodes, obstacles).
Michel Seguier

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Utopie créatrice portée par…
Dans la rosée du matin j’ai cueilli le souffle du monde.
Poème anonyme – Revue Antirouille

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Sur la place chauffée au soleil
Une fille s’est mise à danser (…)
Ainsi certains jours paraît
Une flamme à nos yeux
A l’église où j’allais
On l’appelait le Bon Dieu
L’amoureux l’appelle l’amour
Le mendiant la charité
Le soleil l’appelle le jour
Et le brave homme la bonté…
Jacques Brel
---------------------------------------------------
Un jour pourtant
Couleur d’orange
Un jour de palme,
Un jour de feuillages au front
Un jour d’épaule nue
Où les gens s’aimeront
Un jour comme un oiseau
Sur la plus haute branche.
Aragon

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Où je crée je suis vrai.
Rainer Maria Rilke

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Nous avons vu fleurir dans nos déserts
Les fleurs de la tendresse.
Nous avons vu briller sur l’univers
L’aube d’une paix nouvelle.
Nous avons vu les malheureux
Comme au jour de la fête.
Nous avons vu renaître au fond des yeux
L’espérance déjà morte.
Chant

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Donc, je marche vivant dans mon rêve étoilé !
Victor Hugo (Ruy Blas)

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La pensée de la trace se pose, par opposition à la pensée du système, comme une
errance qui oriente. Nous connaissons que la trace est ce qui nous met, nous tous,
en relation. (…)
La trace va dans la terre, qui plus jamais ne sera territoire. La trace c’est manière
opaque d’apprendre la branche et le vent: être soi, dérivé à l’autre. C’est le sable en
vrai désordre de l’utopie.
La pensée de la trace permet d’aller au loin des étranglements de systèmes. Elle
réfute par là tout comble de possession. Elle conteste l’absolu du temps. Elle ouvre
sur ces temps diffractés que les humanités d’aujourd’hui multiplient entre elles, par
conflits et merveilles.
Elle est l’errance violente de la parole qu’on partage.
Edouard Glissant

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Ne sommes nous pas d’autant plus vivants que nous portons en nous ce projet
d’humanité et qu’il nous porte ? Les peuples qui se sont mis se mettent et se
mettront debout: voilà une partie de notre souffle.
JML

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Mon cœur s’élance au rythme des navires qui fendent l’avenir. Et vogue la galère
des foules qui s’insurgent !
Jean Cardonnel

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2-L’optimisme, l’espérance

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C’est beau la vie


Les fleuves coulent, la mer chante, les océans grondent, les marées montent. Qui
suis-je ? Un grain de sable sur une grève immense. Et qui suis-je pour demander
« qui suis-je » ? N’est-ce pas déjà assez d’être ?
Vieux texte indien d’Amérique

----------------------------------------------
Je ne suis pas pessimiste mais clairvoyant. Beaucoup me parent du qualificatif
d’illuminé. Je les en remercie. Il est vrai que je suis ébloui, éclairé, rempli de lumière ;
car je suis fasciné, émerveillé par la Vie, la super vie. Le fait de découvrir, d’ouvrir les
yeux chaque jour avec la fraîcheur d’un enfant me comble d’immensité et de lumière.
Théodore Monod
----------------------------------------------
Quand la vie est un collier
Chaque jour est une perle.
Quand la vie est une cage
Chaque jour est une larme.
Quand la vie est une forêt
Chaque jour est un arbre.
Quand la vie est un arbre
Chaque jour est une branche.
Quand la vie est une branche
Chaque jour est une feuille.
Jacques Prévert

---------------------------------------------------
C’est beau, c’est beau la vie
Tout ce qui tremble et palpite
Tout ce qui vit et se bât…
Louis Aragon

--------------------------------------------
Que seulement
Je fasse de ma vie
Une chose simple et droite
Pareille à une flûte de roseau
Que tu puisses remplir de musique
Tagore

--------------------------------------------------------
Heureux celui qui peut d’une aile vigoureuse
S’élancer vers les champs lumineux et sereins,
Celui dont les pensées, comme des alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes.
Charles Baudelaire

---------------------------------------------------
Derrière la saleté
Il nous faut écouter
L’oiseau au fond des bois
Le murmure de l’été
Le sang qui monte en soi
Les berceuses des mères
Les prières des enfants
Et le bruit de la terre
Qui s’endort doucement.
Jacques Brel

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Optimisme, pessimisme
Il faut avoir le pessimisme de l’intelligence et l’optimisme de la volonté.
Antonio Gramsci

-----------------------------------------------------------------
Ne lave pas la vaisselle que tu feras demain.
Proverbe polonais
-----------------------------------------------------------
Une vertu n’est qu’un vice qui s’élève au lieu de s’abaisser. Et une qualité n’est qu’un
défaut qui sait se rendre utile.
Maurice Maeterlink

-----------------------------------------------------

Le pessimisme est d’humeur, l’optimisme est de volonté.
Alain

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Il faut avoir « le pessimisme de l’intelligence et l’optimisme de la volonté » disait
Gramsci.
– Trois raisons au moins d’avoir « le pessimisme de l’intelligence »:

Première raison :des logiques suicidaires : cette vérité saute aux yeux pourvu qu’on les ouvre. Le système international produit des problèmes, des drames et des menaces qui, dans
leur gravité et leur nombre, sont impressionnants. Qu’il nous suffise de dire que
chaque seconde il y a trois naissances dans le monde, chaque minute neuf millions
de francs de dépenses militaires mondiales. C’est un système condamné et
condamnable.
Deuxième raison : des moyens souvent contraires aux finalités (paix, liberté…) que l’on proclame. Par exemple : encore un massacre et çà ira mieux demain ! Terrible refrain.

Troisième raison :Le poids de la fatalité : celle-ci est surtout le résultat de trois facteurs : complexité, technicité, rapidité du système. L’analyse et/ou le sentiment que les marges de
manœuvre diminuent… amènent des personnes à chercher de fausses solutions soit
dans le grand remède-miracle (sommet miracle, homme providentiel, technique
miracle, croissance sacro-sainte, bouc émissaire…), soit dans la fuite en avant, celle
d’une compétition terricide et humanicide.

– Trois raisons au moins de construire « l’optimisme de la volonté » :

Des logiques de société humainement viable sont possibles : il s’agit de résister face
à la confusion entre les moyens et les fins, en particulier il faudrait mettre l’économie
et la science non au service d’elles-mêmes mais au service des êtres humains.

Des moyens conformes aux finalités que l’on proclame : il s’agit à tous les niveaux
géographiques de mettre en œuvre des moyens démocratiques, équitables,
pacifiques, durables.

Les associations, les organisations non-gouvernementales (ONG) sont un des
moyens de changement : face à la fatalité, ne peuvent-elles pas contribuer à
l’émergence d’une citoyenneté mondiale ? Pour cela, ne s’agit-il pas de repenser
souvent leur démocratie interne sous forme plus participative, de développer leur
force de proposition, de se faire reconnaître à tous les niveaux géographiques,
d’organiser des conférences d’ONG capables d’impulser un autre avenir ? Les ONG
ne peuvent-elles pas contribuer à prendre en compte davantage le long terme, à
faire avancer responsabilité, solidarité, autonomie ?
JML

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Efforcez-vous de toujours apprécier le bon côté des gens, d’envisager les situations
difficiles sous leur meilleur jour. Cette approche toute simple est source d’optimisme
et de pensée positive.
Paul Wilson

------------------------------------
L’élève dit : une libellule, ôtez-lui les ailes, c’est un haricot. Le maître répondit : je
crois qu’il vaut mieux dire, un haricot, mettez-lui des ailes c’est une libellule !
Hokusai selon Bernard Bro

-----------------------------------------------------
Entraînez-vous à avoir des pensées positives, efforcez-vous de dire des paroles
positives, vous ne tarderez pas à éprouver des sensations positives.
Paul Wilson

-------------------------------------------------------
Espoir, espérance
L’enfer c’est d’avoir perdu l’espoir.

Joseph Cronin

-------------------------------------------------------
Il faudra bien mille ans
Pour que notre chair commune, nos millions de ventres
Notre douleur béante
Nos révoltes et nos révolutions
Nos morts inutiles,
Nos plans de lutte,
Nos efforts d’un instant après l’autre
Notre patience et nos colères
Nos vies fugitives.
– Je me lève et je te passe la flamme
je pleure de rage et d’espoir –
Nos vies anneau après anneau
Nos vies maille après maille
Nos corps tissés ensemble
Arcs boutés
Accouchent
Du soleil.
Marie-Claude Betbeder

-----------------------------------------------
Le désespoir révèle les limites de l’espoir et l’espoir les limites du désespoir. Mais le
désespoir correspond à la face inerte de la réalité et l’espoir à l’action. Dans ce sens
l’espoir est plus vrai que le désespoir.
Edgar Morin

-----------------------------------------------
La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme.
Albert Camus

-------------------------------------------------
C’est notre espérance. C’est la foi avec laquelle je retourne dans le Sud. Avec cette
foi nous pourrons tailler dans la montagne du désespoir, la stèle de l’espoir. Avec
cette foi, nous pourrons transformer la cacophonie des discordes de notre nation en
une belle symphonie de la fraternité.
Martin Luther King

------------------------------------------------------

Quand nous chanterons le temps des cerises
Et gai rossignol et merle moqueur
Serons tous en fête.
Les belles auront la folie en tête
Et les amoureux du soleil au cœur (…)
Jean-Baptiste Clément, Auguste Renard

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C’est l’espérance folle qui nous console de tomber du nid
Et qui demain prépare nos guitares pour d’autres harmonies
S’élève l’espérance dans le silence lointain de la nuit
Et les matins qui chantent déjà enchantent nos soirs d’aujourd’hui.
Guy Béart

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Lorsque n’existe aucun espoir raisonnablement acceptable l’espérance doit jouer.
C’est au moment où il n’y a plus d’espoir qu’il faut commencer à espérer.
Jacques Ellul

------------------------------------------------------------------
L’espérance sans risque ce n’est pas l’espérance. L’espérance c’est croire en
l’aventure de l’amour, faire confiance aux hommes, faire un saut dans le noir en
s’abandonnant à Dieu.
Helder Camara

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(…) Pendant longtemps on a appris aux hommes à désespérer remarque Ernst
Bloch. Il est temps d’apprendre la dignité et l’espoir. L’existence de chacun est
jalonnée de désirs qu’il ne réalisera jamais, car on arrache sans cesse à l’homme la
croyance en la possibilité de les réaliser. Aussi Bloch fonde-t-il toutes les analyses du
« principe espérance » sur une sorte de phénoménologie des rêves trahis et des
espoirs déçus. Ses interlocuteurs ne sont pas seulement Platon, Kant, Hegel,
Nietzsche, mais l’enfant, l’adolescent, l’adulte, fût-il le plus désespéré. Même les
rêves les plus insensés contiennent une vérité révolutionnaire quand ils protestent
contre l’inhumanité et l’humiliation.
« Le principe espérance » s’identifie à tout ce qui élève l’homme au-dessus de luimême,
dans sa vie comme dans l’histoire.(…) L’obscurité de l’instant vécu s’éclaire si
on la replace dans la trajectoire de l’espérance infinie qui hante les hommes. (…)
Jean-Michel Palmier commentant un ouvrage d’Ernst Bloch
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Espérance?


Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; L’Espoir,
Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
Charles Baudelaire

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Mon cœur lassé de tout, même de l’espérance
N’ira plus de ses vœux importuner le sort.
Lamartine

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L’espérance comme une chauve-souris
S’en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris.
Charles Baudelaire

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Espérer… encore…


L’espoir des hommes c’est leur raison de vivre et de mourir.
André Malraux

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Il faut veiller. Autour de nous c’est la nuit. Le monde peut s’endormir, lassé par le
malheur. Le veilleur est debout : il fait confiance à l’aurore. Il faut veiller : le veilleur a
confiance au nom des autres.

Jacques Leclercq

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Mieux vaut allumer une bougie que de maudire les ténèbres.
Proverbe arabe

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Oublions la peur, quittons notre deuil
Pour danser la fête après la nuit.
Laissons le soleil entrer dans nos vies
Laissons la lumière envahir nos cœurs.
Chant

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Pour préserver l’horizon, non d’un âge d’or, mais d’un monde moins inhumain, Edgar
Morin propose son « Evangile de la perdition ». Ce n’est ni plus ni moins qu’une sorte
de religion – au sens originel du terme : relier. Elle n’aurait plus pour fin le salut mais
la fraternité. Ce serait « une religion qui assumerait l’incertitude », une religion
« ouverte sur l’abîme ». Ayant accepté « la mauvaise nouvelle » de la perdition, nous
serions à même de profiter de la « bonne nouvelle » : nous avons une maison
commune, la planète Terre.
Jean-Marie Colombani

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Chaque homme dans sa nuit s’en va vers sa lumière.
Paul de Tarse

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Vieil homme jamais las de guetter dans l’ombre la lueur de l’espérance.
Charles de Gaulle

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Aimer le monde
Avec les yeux
De ceux qui ne sont pas nés
Encore,
Se savoir victorieux
Alors que tout autour de soi
Est encore si froid, si sombre.
Otto René Castillo

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Nous sommes dans la main de la destinée comme un oiseau dans la main d’un
homme. Tantôt elle nous oublie, elle regarde ailleurs, nous respirons. Et soudain elle
se souvient de nous et elle serre un peu, elle nous étouffe.
Henri de Montherlant

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L’optimisme est une fausse espérance à l’usage des lâches et des imbéciles.
L’espérance est une vertu. La plus haute forme de l’espérance c’est le désespoir
surmonté.
Georges Bernanos

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Humour, courage, espérance… A la fin des années noires, au moment où il fut
emmené brutalement à Drancy, Tristan Bernard eut encore la vaillance de dire à sa
femme son mot le plus beau, le plus noble, le meilleur : « Ne pleure pas. Nous avons
vécu dans l’inquiétude, nous allons vivre dans l’espérance. ».
Hervé Lauwick

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J’ai toujours pensé que l’homme qui espérait dans la condition humaine était un fou,
et que celui qui désespérait des événements était un lâche.
Albert Camus

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On n’éteint jamais le feu d’une étoile même quand l’étoile est morte.
On ne tue jamais le cri de l’espoir même si le vent l’emporte. Il est vivant comme un
soleil
Celui qui nous animait,
Il est plus grand que tous les ciels, que toutes les forêts…
Chant…

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L’espérance est un risque à courir. C’est même le risque des risques. L’espérance
n’est pas une complaisance envers soi-même. Elle est la plus grande et la plus
difficile victoire qu’un homme puisse remporter sur son âme.
Georges Bernanos

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Tant que l’espoir demeure au niveau de l’espérance il n’y a pas lieu de désespérer
puisque rien de ce qui est fini n’est jamais totalement achevé tant que tout n’est pas
totalement terminé.
Pierre Dac

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Il ne faut pas lier un navire à une seule ancre ni la vie à un seul espoir.
Epictète

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Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer.
Devise des Princes d’Orange

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Il n’est pas plus insensé de s’abandonner à un espoir, celui de la survie de
l’humanité, que de le repousser au nom d’un prétendu réalisme qui n’est que le
consentement défaitiste au suicide de l’espèce.
Jean Rostand

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Cette veille de fin des temps peut-elle encore se transformer en une forme d’aube d’humanité ?
JML

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Patience


Patience : passion de l’incertitude.
Betty Rojtman

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La lenteur du temps donne son véritable prix aux choses.
Pierre Jakez Hélias
La patience est l’art d’espérer.
Vauvenargues

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Combien pauvres sont ceux qui n’ont point de patience.
Shakespeare

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Une petite hache coupe un gros arbre.
Proverbe Jamaïcain
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Que devient la patience dans un monde sécularisé, quel sens a-t-elle, vers quoi est-elle
censée conduire ? La plupart des hommes ne le savent pas et c’est sans doute
pourquoi, aussi, ils la refusent en préférant l’immédiateté. Celle-ci revêt ainsi diverses
formes : celle de l’idéologie qui se substitue à la patience de la pensée qui,
lentement, dit le sens sans jamais prétendre le posséder, ou encore celle du culte de
la vitesse et de tous les pièges mortels qui, depuis les divertissements qui privent les
hommes de leur intelligence jusqu’aux plus terribles violences, font oublier le temps.
C’est à dire permettent de vivre sans s’éveiller aux exigences d’une vie humaine
appelée à se construire dans le temps, avec autrui et pour lui aussi.
Car la patience de l’humain, même privée de toute promesse, n’est pas condamnée
à la désespérance, dès lors qu’un homme en attend un autre, dès lors qu’il espère
en lui. C’est parce qu’un adulte a confiance en lui que l’enfant développe ses
potentialités. (…) C’est aussi parce qu’il sait que sa vie compte au regard aimant de
quelques êtres au moins que le vieillard accepte que le temps lui soit désormais
compté.
Catherine Chalier

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Si les hommes perdent le sens de la patience c’est qu’ils ne savent plus vivre au
temps de l’autre.
Catherine Chalier

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Les idées mûrissent comme les fruits et les hommes. Il faut qu’on laisse du temps au
temps. Personne ne passe du jour au lendemain des semailles aux récoltes et
l’échelle de l’Histoire n’est pas celle des gazettes.
François Mitterrand

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La patience est vertu qui donne au temps sa chance pour qu’hommes et choses
mûrissent, elle porte en elle le secret d’une appréciation positive de la passivité : non
comme pur et simple renoncement à agir mais comme consentement à laisser être et
disponibilité envers ce qu’il advient.
Catherine Chalier

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N’est-il pas des limites à la patience ? Ne peut-elle aussi devenir destructrice
lorsqu’elle est imposée à des hommes et à des femmes par des instances
d’oppression ? (…) Cette patience-là ne sourd pas du désir de construire l’humain et
de permettre à chacun de vivre à son rythme, lent ou rapide, mais au contraire d’en
interdire l’avènement et d’éteindre tout sentiment de l’irremplaçable singularité de
chaque vie : elle brise l’homme en s’exerçant à lui faire accepter des formes
dégradantes d’existence.
Catherine Chalier

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La patience n’est pas seulement vertu stratégique de l’attente du moment opportun
mais capacité à supporter le mal avec fermeté, en se battant contre la tristesse
d’âme.
William Baranès

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La patience est duplicité, souffrance qui neutralise le désespoir par son intégration à
l’espérance, sa reconversion dans le temps.
Betty Rojtman

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Si une coupe d’eau ne suffit pas à éteindre un incendie il ne faut pas en conclure que
l’eau est impuissante contre le feu.
Meng Tseu

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Les antidotes de la colère et de la haine sont la patience et la tolérance.
Il faut les cultiver avec enthousiasme.
Le Dalaï-Lama

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Il y a deux péchés capitaux d’où tous les autres dérivent: l’impatience et la paresse.
Ils ont été chassés du Paradis à cause de leur impatience, ils n’y rentrent pas à
cause de leur paresse. Mais peut-être n’y a-t-il qu’un péché capital : l’impatience. Ils
ont été chassés à cause de leur impatience, à cause de leur impatience ils ne
rentrent pas.
Franz Kafka

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Notre patience est une condition d’existence de la liberté de l’autre
Jacques Ellul

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A force de tomber une goutte d’eau creuse le roc.
Théocrite

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Cuire une pierre.
Aristophane

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Patience, patience,
Patience dans l’azur !
Chaque atome de silence
Est la promesse d’un fruit mûr.
Paul Valéry

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La patience moissonne la paix,
et la hâte le regret.
Salomon ibn Gabirol , dit Avicébron

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Patience et longueur de temps
Font plus que force et que rage.
Jean de la Fontaine

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La patience est un pansement pour beaucoup de plaies.
Miguel de Cervantes

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3-L’humour

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L’humour en général


L’humour c’est quelque chose qui met les gens en colère quand on leur dit qu’ils n’en
ont pas…
Ronald Searle

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Où il n’y a pas d’humour il n’y a pas d’humanité.
Eugène Ionesco

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La plus perdue de toutes les journées est celle où l’on n’a pas ri.
Chamfort

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L’ironie rit des choses, l’humour rit avec les choses.
Carlyle

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L’ironie c’est la plaisanterie derrière le sérieux, un moyen de défense aussi bien que
d’attaque. L’humour c’est le sérieux derrière la plaisanterie, c’est un refuge contre les
atteintes du monde.
Kierkegaard

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Gagnez les profondeurs, l’ironie n’y descend pas.
Rainer Maria Rilke

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Il ne suffit pas d’avoir de l’esprit. Il faut en avoir assez pour s’abstenir d’en avoir trop.
André Maurois

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Quand on court après l’esprit on attrape la sottise.
Montesquieu

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La vie sans gaieté est une lampe sans huile.
Walter Scott

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Traits d’humour


Voilà le printemps ! Les gens vont arrêter d’aller se pendre pour aller se noyer.
Frédéric Dard

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Quelle est la différence entre un dollar et un rouble ? Réponse : un dollar.
Boris Vian

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A toutes choses égales il vaut mieux s’enfoncer dans la nuit qu’un clou dans la fesse
droite ou gauche selon le cas ou les circonstances.
Pierre Dac

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(…) Le pire étant de s’enfoncer deux clous dans les deux fesses en pleine nuit.
JML

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Je résiste à tout, sauf à la tentation.
Oscar Wilde

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Celui qui dans la vie est parti de zéro pour n’arriver à rien dans l’existence n’a de
merci à dire à personne.
Pierre Dac

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Le professeur dit à l’étudiant : « vous êtes bête à manger du foin ! ». Celui-ci répondit
: « Je prendrai deux bottes, vous déjeunerez avec moi! ».
Histoire  racontée

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« A toutes choses égales il vaut mieux s’enfoncer dans la nuit qu’un clou dans la fesse
droite ou gauche selon le cas ou les circonstances. »Pierre Dac(…) Le pire étant de s’enfoncer deux clous dans les deux fesses en pleine nuit. JML

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L’ennemi est bête, il croit que c’est nous l’ennemi.

Pierre Desproges

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La transmission des ordres a des courts circuits (histoire reconstituée par JML):

Le commandant au capitaine : comme vous devez le savoir il y aura demain une
éclipse de soleil, ce qui n’arrive pas tous les jours. Vous ferez partir les hommes à
cinq heures en tenue de campagne pour le terrain de manœuvres.
Ils pourront y voir le phénomène et je leur donnerai les explications nécessaires. S’il
pleut il n’y aura rien à voir. Dans ce cas laissez les hommes à leur chambre.

Le capitaine au lieutenant : sur l’ordre du commandant demain à cinq heures il y aura
une éclipse de soleil en tenue de campagne. Le commandant donnera au terrain de
manœuvres les explications nécessaires, ce qui n’arrive pas tous les jours. S’il pleut
il n’y aura rien à voir, mais alors le phénomène aura lieu dans la chambre.

Le lieutenant à l’adjoint : sur ordre du commandant à cinq heures du matin ouverture
de l’éclipse de soleil au terrain de manœuvres. Les hommes en tenue de campagne.
Le capitaine donnera les explications nécessaires sur ce rare phénomène si parfois il
pleuvait, ce qui n’arrive pas tous les jours.

L’adjoint au canonnier : demain le commandant à cinq heures fera éclipser le soleil en tenue de campagne avec les explications nécessaires sur le terrain de manœuvres. Si parfois il pleuvait ce rare phénomène aurait lieu dans la chambre ce qui n’arrive pas tous les jours.

Les « derniers des derniers » entre eux : demain très tôt à cinq heures du matin le soleil
au terrain de manœuvres fera éclipser le capitaine à la chambre. Si parfois il pleuvait
ce rare phénomène aurait lieu en tenue de campagne ce qui n’arrive pas tous les
jours.

 L’auteur de ce blog : Cette histoire gagne à être lue tout fort en changeant de voix à chaque transmission.

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Autre exemple :

Un premier lecteur « Autant que faire se peut. »

Un second « Autant que peut se faire. »

Un troisième « On peut le faire. »

Un autre « Faites-le. »

Un autre encore « Quoi ? C’est impossible. »

Un dernier« Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait. »

JML

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Les miroirs feraient bien de réfléchir avant de renvoyer les images.
Jean Cocteau

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Jeux thèmes, + cuillères et – queue deux mains
Saint Valentin, Libération

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Il y a deux moments dans la vie d’un homme où il ne devrait pas spéculer : quand il
n’en a pas les moyens et quand il les a.
Mark Twain

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Je vis dans la terreur de ne pas être incompris.
Oscar Wilde

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La civilisation est la création indéfinie de besoins dont on n’a pas besoin.
Mark Twain

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Il vaut mieux prendre ses désirs pour des réalités que son slip pour une tasse à café.
Pierre Dac

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To be or not to be (Shakespeare)
To be is to do (Sartre)
To do is to be (Camus)
Doo be doo be doo (Frank Sinatra)

Un graffiti extraordinaire lu sur un mur…

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4-Sagesse et folie

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Il y a cinq degrés pour arriver à être sage: se taire, écouter, se rappeler, agir, étudier.
Proverbe arabe

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Peu de gens sont assez sages pour préférer le blâme qui leur est utile à la louange
qui les trahit.
François de la Rochefoucauld

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Le sage ne dit pas ce qu’il sait.
Le sot ne sait pas ce qu’il dit.
Proverbe de Turquie

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Nous sommes aux temps des vérités folles, et dans ces temps il n’y a rien d’autre à
faire que de ne pas devenir fou.
Gilbert Keith Chesterton

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Qui vit sans folie n’est pas si sage qu’il croit.
La Rochefoucauld

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Qui ne sait être fou n’est pas sage.
Proverbe de France

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Dieu, envoie-nous des fous,
Qui s’engagent à fond,
Qui oublient, qui aiment autrement qu’en paroles
Qui se donnent pour de vrai et jusqu’au bout.
Il nous faut des fous,
Des déraisonnables,
Des passionnés,
Capables de sauter dans l’insécurité
Il nous faut des fous du présent,
Épris de vie simple,
Amants de la paix,
Purs de compromission,
Décidés à ne jamais trahir,
Méprisant leur propre vie,
Capables d’accepter n’importe quelle tâche,
De partir n’importe où,
À la fois obéissants,
Spontanés et tenaces,
Doux et forts.
Dieu, envoie-nous des fous.
Louis-Joseph Lebret

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La sagesse est comme un immense brasier :
On ne saurait y pénétrer d’aucun côté.
La sagesse est comme une marre d’eau claire et fraîche : on peut y pénétrer de tous
côtés.
Nagarjuna

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Les téméraires croient qu’ils savent, les sages savent qu’ils croient.
Jean Rostand
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Le fou se croit sage et le sage reconnaît lui-même n’être qu’un fou.
Shakespeare

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Nous naissons tous fous, quelques uns le demeurent.
Samuel Beckett

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Les fous font les nœuds et les sages les dénouent.
Proverbe anglais

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Ce qui assura sa félicité ce fut de mourir sage et d’avoir vécu fou.
Cervantes  parlant de Don Quichotte

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L’humanité aura accompli son destin lorsque toute sa folie aura pris la figure de sa
sagesse.
Jean Jaurès

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5-Imagination
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L’imagination est plus importante que le savoir.

Albert Einstein

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Nous sommes faits de la même étoffe que les songes.
Shakespeare

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Manquer d’imagination c’est ne pas imaginer le manque.
Mai 1968, Nanterre

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L’ennui, le contraire du bonheur, c’est l’hiver de l’imagination.
Jean Dutourd

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Un homme légua dix-sept chameaux à ses trois fils. Il avait légué la moitié à l’aîné, le
tiers au cadet et le neuvième au plus jeune. Les trois fils entreprirent de diviser leur
héritage mais ne purent trouver une solution. Dix-sept n’étant divisible ni par deux, ni
par trois, ni par neuf les fils finirent par consulter une vieille femme connue pour sa
sagesse. Après avoir réfléchi elle dit: « Voyez ce qui se passe si vous prenez mon
chameau ».
Les fils se retrouvèrent alors avec dix-huit chameaux. L’aîné prit sa moitié, neuf. Le
cadet prit son tiers, six. Le plus jeune prit son neuvième: deux. Il restait un chameau
qu’ils rendirent à la vieille femme.
William Ury

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Lorsqu’un problème semble impossible à résoudre il faut en changer les termes et
trouver une action concrète portant sur un point limité mais décisif.
Jean Monnet

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Il y avait une fois un disciple d’un philosophe grec à qui son maître ordonna de
donner de l’argent à toute personne qui l’insulterait, et cela trois années durant.
Lorsque cette période d’épreuve toucha à son terme le maître lui dit : « Maintenant tu
peux aller à Athènes apprendre la sagesse ».
Quand le disciple entra dans Athènes, il rencontra un sage assis à la porte qui
insultait tous ceux qui arrivaient dans la ville et tous ceux qui en sortaient.
Il insulte aussi le disciple qui éclata de rire. « Pourquoi ris-tu quand je t’insulte ? »
demanda le sage. « Parce que pendant trois ans j’ai payé pour me faire insulter et toi
maintenant tu me donnes ça pour rien. »
Entre dans la ville, lui fit le sage, elle est toute à toi.
Ainsi ce ne sont pas seulement les épreuves qui ouvrent la « cité de la sagesse » au
disciple. C’est aussi sa capacité de changer de perspective, chaque événement
possède plusieurs facettes.
Le Dalaï-Lama

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Nous tremblons, nous pâlissons et rougissons aux secousses de notre imagination.
Montaigne

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On n’est jamais si heureux et si malheureux qu’on s’imagine.
François de La Rochefoucauld

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Il y a plus de choses au ciel
Et sur la terre, Horacio,
Que n’en peut imaginer notre philosophie.
Shakespeare

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Ne rends pas tes souffrances plus fortes encore,
Ne te charge pas de plaintes !
Plus légère est la douleur si l’imagination
Ne la grossit.
Sénèque

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J’ai tant rêvé
J’ai tant rêvé
Que je ne suis plus d’ici.
Léon Paul Fargue

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Oubliez tout ce que vous avez appris, commencez par rêver.
Slogan mai 1968

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6-Maîtriser des peurs

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Aimer c’est quand on s’appuie l’un sur l’autre et qu’on quitte la peur ensemble.
Entendu

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Personne ne devrait avoir peur de rêver de changer le monde pour le rendre
meilleur.
Nelson Mandela

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Je crois que la peur est une compagne permanente de l’homme mais qu’en même
temps les civilisations doivent continuellement désamorcer, par un effort de création
continue, les peurs successives qui se présentent à elles. (…) Si au XVIème c’est
Dieu ou le diable qui faisaient peur, maintenant c’est l’homme à cause de la science
et de la technique dont on dispose.
Jean Delumeau

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La révolution, la politique peuvent débarrasser l’homme de la peur de vivre mais elles
ne le libèrent pas de la peur de mourir.
Jean-Paul Sartre

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Au fond il n’existe qu’une peur, celle de la mort.
Guy  Delpierre

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Certes des ripostes à l’angoisse du mourir et surtout du mourir jeune peuvent se
concevoir : allongement de la durée de vie, diminution de l’inconfort de la vieillesse,
suppression quasi totale de la souffrance physique, possibilité d’accompagner le
mourant pour qu’il réussisse son difficile travail du trépas, assistance aux endeuillés
pour les aider à mener à bien leur travail de deuil. On peut aussi espérer que la
sagesse devant les risques d’apocalypse nucléaire finira par l’emporter.
Louis-Vincent Thomas

-----------------------------------
Signe de mort la peur est aussi force de vie, elle est sursaut de vie : qu’est-ce que
fuir le danger sinon éviter la mort pour défendre son existence et affirmer sa liberté ?
(…) L’antique conjuration de la peur n’a pas cessé d’habituer l’homme à vivre avec
ses peurs. L’énorme déploiement des dispositifs de défense contre toutes sortes de
menaces a finalement engendré un mode de vie plus familier avec la crainte.
Aujourd’hui, sans doute mieux qu’hier, la peur est partagée, communiquée, libérant
ainsi non point l’homme mais son besoin existentiel de sécurité. Tandis que la peur
est difficilement contrôlable, la sécurité, elle, est facilement organisable. Aussi n’estce
pas un hasard si les sociétés modernes dotées d’organes informatiques, de
cerveaux électroniques, d’yeux magnétiques, modèlent leurs formes de
gouvernement sur des mécanismes sécuritaires. (…) La peur ambiguë étouffe
désormais dans la cité-prison bétonnée d’interdits. La peur, signe de mort, n’est plus
sursaut de vie. La peur maladive tue la peur salutaire. Et la sécurité appelée à
grands cris, est à son tour frappée d’ambiguïté : masque de protection mais aussi
masque de représentation la sécurité maintenant fait peur. (…) La peur nucléaire est
officiellement masquée par la peur de manquer d’énergie et par la peur de faire
encore la guerre. La peur se surmonte-t-elle par d’autres peurs ? Telle est bien en
tous cas la politique de l’Etat, souverain protecteur : cultiver la peur pour administrer
la sécurité.
Olivier Vial
----------------------------------------------
De l’instinct à l’esprit, des réflexes à l’action : tout se dégrade sous l’influence de la
peur.
Guy  Delpierre

---------------------------------------------
S’il y a une solution cela ne sert à rien de s’inquiéter
S’il n’y a pas de solution s’inquiéter est tout aussi inutile.
Le Dalaï-Lama

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L’accomplissement de soi passe par la mobilisation vigilante de toutes les forces
psychiques, mentales et morales de l’homme et par la réconciliation du coeur et de la
raison.
Bruno Bettelheim

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Les tentatives pour conjurer ou combattre la peur sont aussi nombreuses que les
occasions qui la font naître. On peut cependant distinguer cinq manières au moins
de répondre :

la première de ces thérapeutiques, la plus élémentaire et fréquemment
employée, consiste en une dénégation pure et simple de la réalité, de la situation
dangereuse ou réputée telle : on ne sait pas, on ne veut pas savoir, on fait comme si
cela n’existait pas. Fragile rempart qui, tel que, résiste mal à la pesanteur des faits,
l’adaptation est sans doute meilleure lorsque s’élabore un rituel de conjuration qui a
davantage de chances de jouer le rôle protecteur attendu. L’homme invente des
histoires qui achèvent de dissiper ses inquiétudes. Il se rassure en s’entourant d’une
forêts d’illusions : les fables, contes et récits qui relèvent de cette entreprise sont
multiples et divers, le mythe a pour but de sécuriser. (…)

Une deuxième manière de lutter contre la peur se manifeste dans une espèce de fuite en avant : au lieu de s’éloigner des situations dangereuses l’individu les recherche et les privilégie. (…)
Sensiblement différent l’héroïsme est aussi une modalité de la victoire sur le péril et
les sentiments qu’il inspire. Et c’est probablement lorsque la menace est
consciemment perçue et délibérément affrontée que se réalise la plus complète et la
plus noble maîtrise de la peur. (…)

Autre manière : les représentations esthétiques procurent aussi des apaisements. En objectivant leurs effrois dans leurs œuvres les artistes s’efforcent de fixer les vertigineuses angoisses qui les assaillent. Les fêtes et les carnavals participent également, dans une certaine mesure au moins, à cet effort de maîtrise. Les expressions bruyantes de la joie, les divertissements et les autres déguisements donnent le change aux cauchemars et écartent provisoirement la peur. A moins qu’on ne profite de l’occasion de la fête pour justement la mettre en scène et la réduire en spectacle. La peur jouée est à moitié maîtrisée. (…)

Enfin au lieu de fuir ou de travestir la peur, on peut l’utiliser. Et si ses emplois sont divers, les
succès de cette pédagogie-spectacle sont incontestables. Les prophètes et les
prédicateurs de tout temps y ont recouru avec l’efficacité que l’on sait. (…)
Pierre Mannoni

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Comment oublier ces mythes antiques que l’on trouve au début de l’histoire de tous
les peuples ; les mythes de ces dragons qui, à la minute suprême, se changent en
princesse ? Tous les dragons de notre vie sont peut-être des princesses qui
attendent de nous voir beaux et courageux. Toutes les choses terrifiantes ne sont
peut-être que des choses sans secours, qui attendent que nous les secourions.
Rainer Maria Rilke

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Ces peurs qui nous hantent : celles de la rencontre inattendue de l’autre, celles de
notre propre avenir, celles de la mort de ceux que nous aimons, celles de notre
propre mort.
On pourrait rêver d’un monde sans peur. A moins qu’il ne s’agisse plutôt d’assumer
la peur comme une des composantes de l’expérience de la vie. Une bonne part de
l’effort civilisateur n’est-il pas d’établir les hommes dans la sécurité ? Parfois
cependant à un tel degré qu’ils n’osent plus prendre les risques de l’existence et
s’enferment en eux-mêmes à double tour de serrure renforcée.
Cependant il est d’autres cas aujourd’hui où l’organisation est telle que les hommes
sont paralysés par la peur. Ou d’autres cas simplement par la peur d’avoir peur.
Qui nous délivrera de ces cauchemars ? Une fois de plus il faut dire que cette
délivrance et cette libération, en réalité, nous sont remises entre nos mains pour
transformer ce qu’on est parfois tenté d’appeler le destin en quête de notre liberté.
François Biot

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7-La révolte

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Il n’y a d’humanisme que celui des hommes révoltés.
Albert Camus

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L’homme n’est pas entièrement coupable, il n’a pas commencé l’histoire, ni tout à fait
innocent puisqu’il la continue. Ceux qui passent cette limite et affirment son
innocence totale finissent dans la rage de la culpabilité définitive. La révolte nous met
au contraire sur le chemin d’une culpabilité calmée (…).
Jean-Paul Sartre

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Il faut scandaliser et trahir ce monde!
Autrement il s’éteint en se répétant dans son éternité!
Pier Paolo Pasolini

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Qu’est-ce qu’un homme révolté ? Un homme qui dit non. Mais s’il refuse il ne
renonce pas : c’est aussi un homme qui dit oui, dès son premier mouvement.
Albert Camus

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Inventer le monde c’est ne jamais se reposer devant le scandale.
Roberto Matta, devise de la Maison des droits de l’homme de Limoges

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Il faut valoriser la colère inextinguible contre tout ce qui menace la vie, qui l’attaque
et qui la tue. L’amour de la vie et de tout ce qui est vivant fait naître une colère
énorme, qui est, dans son cœur même, la haine de la mort.
Georges Casalis

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La crise est le moyen habituel par lequel, dans l’ordre de la matière, de la biologie ou
de l’histoire, s’opèrent les grands changements et les naissances.
Max Gallo

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Transformer le monde.
Marx

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Changer la vie.
Rimbaud

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C’est nous les Canuts
Nous sommes tous nus (…)
Mais notre règne arrivera
Quand votre règne finira
Nous tisserons le linceul du vieux monde
Car on entend déjà la révolte qui gronde
Aristide Bruant

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Je vais avoir un fils, et ce fils ne sera pas à moi,
Mais il sera le fils de l’humanité tout entière.
Et il n’écoutera pas les slogans des grands potentats.
Et au moment du choix,
Quand il sera appelé par les puissants,
Il se retournera vers son peuple et prendra place à sa table,
Il mangera de son pain et boira de son vin.(…)
Mon fils, à côté des autres fils, fauchera les campagnes
En séparant les épis des broussailles épineuses.
Mon fils, à côté d’autres fils, fera la récolte
Et ils sèmeront à nouveau dans la terre blanche et féconde.
Poème anonyme écrit dans une prison chilienne

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Il n’y a plus beaucoup de chances de salut pour l’humanité sinon par la multiplication
de mon indignation et de ma révolte.
Pierre Boujut

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Ce n’est pas que je ne sois jamais en colère mais je ne donne pas libre cours à ma
colère. En la contrôlant on peut obtenir une grande force.
Gandhi
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La conscience n’est pas une donnée mais une tâche.
Jean Lacroix

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La conscience morale ne peut naître qu’avec l’émergence du sentiment de
culpabilité.
Vladimir Jankélévitch

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Ou tu rampes pour amasser, stocker, profiter, ou tu te mets debout, tu marches, tu
t’insurges pour faire naître et incarner une vision d’humanité cordiale. Ou tu es
visionnaire, poète, ou tu es calculateur.
Jean Cardonnel

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(…) Il faut recoller l’espace, remodeler la terre, pour taire ces Somalies du monde,
pour le rire des enfants de la terre.
Mon âme se voile devant tant de haine distillée, tant d’amour perdu et je cherche
comme un berger les lueurs d’une espérance que l’aube ne trahira pas. Ici et
maintenant, la main tendue vers l’autre monde, j’attends la renaissance sous les toits
de la terre mère.
Chaque jour, mon cœur brûle devant tant de spectacles et mes yeux s’éteignent de
leurs larmes innocentes. Et ma révolte contenue explose pour des horizons
meilleurs.
Ben Kamara

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Vous qui sur terre vivez dans la douleur,
Il faut réveiller toutes les forces
De votre être.
L’obéissance pour l’homme
Est le fléau majeur.
Qui n’aimerait une bonne fois
Devenir son propre maître ?
Bertolt Brecht

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Le monde ne saura sauvé, s’il peut l’être, que par des insoumis. Sans eux c’en est
fait de notre civilisation, de notre culture, de ce que nous aimions et qui donnait à
notre présence sur terre une justification secrète.
André Gide

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C’est la révolte même, la révolte seule qui est créatrice de lumière.
André Gide

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Quand on ne bouge pas on ne sent pas ses chaînes.
Rosa Luxembourg

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Ce n’est pas la révolte en elle-même qui est noble mais ce qu’elle exige.
Albert Camus

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Le révolté, au sens étymologique, fait volte-face. Il marchait sous les fouets du
maître. Le voilà qui fait face. Il oppose ce qui est préférable à ce qui ne l’est pas.
Toute valeur n’entraîne pas la révolte, mais tout mouvement de révolte invoque
tacitement une valeur.
Albert Camus

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Je me révolte donc nous sommes.
Albert Camus
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8-L’éthique
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Créon :
Pourquoi as-tu tenté d’enterrer ton frère ?
Antigone :
Je le devais
Créon :
Je te l’avais interdit.
Antigone :
Je le devais tout de même.
Jean Anouilh

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De la faillite des systèmes, des moralismes, des autorités sédentaires surgit
l’impératif de l’immédiat : d’un acte éthique qui prend essor dans l’éphémère, le
provisoire, la succession des ruptures intégrées par l’être en mouvement…
D’où vient l’usage renouvelé d’un mot que l’on croyait vieilli? S’agit-il d’une mode
lancée par le prince ou s’agit-il d’une pratique discrète qui n’avait jamais cessé ?
Faut-il voir là une échappée de l’action sur le discours, une façon de noyer les
problèmes ? Les licenciements, l’échec des jeunes, le sida et le racisme, les
manipulations génétiques ne se prêtent-ils pas à l’édification des morales guides des
partis et du législateur ? Ou bien, à l’écart de cette exploitation, l’individu serait-il mu
par quelque impératif du seul ressort de sa conscience ?
Jacques Beauchard

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L’éthique est un ensemble de normes acceptées par le groupe social, non écrites et
seulement sanctionnées par la réprobation sociale.
La morale est un ensemble de normes acceptées et sanctionnées par une société
déterminée.
Madeleine Grawitz

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« L’éthique problématique » essaie d’insérer le jeu de l’homme dans le jeu du
monde. Attentive aux perspectives historiques et politiques, elle s’efforce à la fois de
poser la question « que faire ? » et de lui ouvrir l’horizon d’une réponse, tant
théorique que pratique, d’une réponse questionnante. Guarda e passa ! Qui semble
être le mot final de cette éthique, veut dire plus que « regarde » et « passe » ; il
signifie : pense, bâtis et produis, combats, en un mot joue, en marche vers une
problématique sérénité et, si possible, vers la sagesse même.
Kostas Axelos

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Pour Axelos loin de se confondre avec la morale, l’éthique désigne le lieu où
s’accomplissent et meurent toutes les grandes décisions de l’existence. Héraclite en
donnait la dimension lorsque, dans son dénuement extrême, à des étrangers qui le
contemplaient se chauffant près d’un four à pain, il s’écriait :
« Là aussi se tiennent les dieux ! ».
L’éthique s’enracine dans toutes les grandes puissances originelles de la vie et du
monde, le jeu de la terre, la poésie, la philosophie, la science. Elle s’affirme
aujourd’hui comme la contestation désespérée que la vraie vie est absente et que
rien ne semble annoncer l’aube d’un monde nouveau.
(…) Rendre problématique l’éthique, ce n’est ni la nier ni la remplacer par une
nouvelle tout aussi illusoire, c’est l’ouvrir aux possibilités qui demeurent encore
cachées : celles du jeu, du jeu de la vie et de la mort, de la joie et de la détresse, de
la tristesse et des rêves qui s’inscrivent dans la chair du monde. « Tout prête à rire,
mais personne ne rit. Peut-être parce que tout le monde est ridicule. ».(…) Ce livre –
»Pour une éthique problématique »- ne s’achève ni dans la résignation ni dans le
pathos, mais dans une sorte de sérénité aussi grecque qu’Axelos.
Jean-Michel Palmier commentant un livre de Kostas Axelos

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Nous refusons la démarche qui utilise l’éthique comme un pion avancé de la morale,
comme une tête chercheuse qui rabattrait les conduites sur un système de valeurs
(…). La pratique d’une éthique autonome et critique laisse à la conscience de chacun
de décider pour lui soit de ses choix moraux, soit de sa position sans morale.
Jacques Robin

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La morale juge l’action des hommes et des sociétés à l’aune d’un système de valeurs
transcendantes. L’éthique jauge les conduites des hommes et des sociétés. C’est
une attitude posant des questions et non normative (…). L’éthique ne prétend à aucune
vérité absolue et en ce sens elle est amorale.
Jacques Robin

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Plus d’un moraliste cherche à exercer, aux dépens de l’humanité, sa puissance.
Nietzsche

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La morale est une, universelle, applicable à tous et à chacun, surplombante et
généralisable. La morale est jacobine, l’éthique quant à elle jaillit du bas, elle est
locale et spontanée, elle sert de ciment ; momentanée, elle est irruptive et
imprévisible. L’éthique de l’instant !
Michel Maffesoli

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Au passage une énigme, un appel nous oblige à être, à nous prononcer, il faut oser
dire je, malgré tout, malgré l’impuissance, le dérisoire, l’insuffisance, l’idée du geste
perdu, peut-être inutile, il faut oser répondre, faire corps dans un acte et se laisser
aller à exister un instant seul face à soi et à l’autre, sans l’appui des appareils, sans
bruit. Dans l’instant éthique de l’urgence, la présence de soi au monde se met en jeu,
fait trace, surgit dans l’événement, ou plutôt prend position dans le fait divers, le
détail, il faut agir au plus vite, librement, en toute indépendance vis à vis des bonnes
mœurs, voire de l’institution alors trop pesante : question d’élan, vital !
Jacques Beauchard

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Avec les membres du Comité international de bioéthique toutes les croyances
religieuses, toutes les convictions philosophiques, toutes les cultures sont
représentées. Pour certains l’individu est au centre de tout. Pour d’autres les valeurs
collectives sont premières. Pour d’autres enfin, l’homme n’est qu’une des
expressions de la vaste cosmogonie du vivant. Malgré cela nous recherchons tous
des valeurs communes: la dignité de l’homme et la nécessité absolue de la respecter
me paraît être le principe-clé de l’éthique.
Noëlle Lenoir

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La vraie politique est au service du prochain, au service de la communauté, au
service des générations futures. Son fondement est éthique.
Vaclav Havel

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9-Résistance

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Je suis tombé par terre
C’est la faute à Voltaire,
Le nez dans le ruisseau
C’est la faute à…
Victor Hugo (Les Misérables, Gavroche)

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Résister c’est aussi, c’est d’abord peut-être un état d’esprit. Une certaine manière de
ne pas se soumettre : de ne pas entrer dans le jeu de l’ennemi. Oui, refuser d’être
assujetti à un ordre dont on ne veut à aucun prix, voilà la pierre de touche de la
résistance, celle dont sortiront un jour révolte, insurrection, émeute. A la vérité l’esprit
qui dit non est comme ces diables à ressort qu’on enfonce au fond des boites : à un
moment donné toujours ils ressortent, ils reviennent vous tirer la langue. Parce qu’on
ne met pas un feu follet en prison.
Gérald Cahen

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Très tôt la société nous apprend à ne pas résister, à nous soumettre aux normes
qu’elle nous impose. Ainsi Durkheim, pour qui la contrainte est le fait social par
excellence, voit dans la discipline et dans l’éducation morale la meilleure manière
d’assurer l’harmonie collective. Certes. Mais c’est faire bon marché des conflits de
pouvoir. Et c’est considérer surtout que les finalités d’une société sont celles de
chacune des parties qui la composent. Rien de moins sûr…
Sophie Jankélévitch

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Le silence des pantoufles est plus dangereux que le bruit des bottes.
Martin Niemoller

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Il est des mots dont la graphie semble incarner mystérieusement le sens. Ainsi du
beau verbe résister avec ses deux r, ses deux e, ses deux s qui entourent
symétriquement son i, comme s’il s’agissait de le préserver, de le garder
précieusement en vie. Car résister, c’est d’abord cela : c’est maintenir intacte la
flamme fragile, éphémère de l’existence : tenir, survivre.

Gérard Cahen

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Est-ce à dire qu’on résisterait comme on respire : spontanément, par pur réflexe, et
parce que la vie, selon le mot de Bichat, « est l’ensemble des fonctions qui résistent
à la mort » ? Il est vrai que l’on a parfois pas le choix, qu’en certains cas on se bat,
en effet, le dos au mur. Mais même si l’instinct de conservation nous y pousse, il y a
plus ici qu’une simple parade vitale. D’abord parce qu’on peut se tromper, on peut se
croire, à tort, menacé. Après tout les imbéciles aussi résistent. Ensuite la variété des
manières de résister est telle qu’elle relève, à l’évidence, d’un libre choix. Enfin et
surtout, vient un moment où il ne s’agit plus seulement de défendre sa vie, mais
aussi les valeurs sans lesquelles celle-ci n’a plus de sens. Au prix d’un paradoxe
alors, puisque cela peut nous conduire à réviser l’ordre des priorités, à remettre en
jeu, s’il le faut, notre propre existence.
Pour mieux résister à la mort, on est prêt à la rencontrer, à l’épouser.
Gérard Cahen

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Dans la vie de chaque homme vient un moment où pour dire simplement : ceci est
noir et ceci est blanc il faut payer très cher. Ce peut être le prix de la vie. A ce
moment le problème principal n’est pas de connaître le prix à payer mais de savoir si
le blanc est blanc et si le noir est noir. Pour cela il faut garder une conscience.
Adam Michnik

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Devant la conquête et la colonisation de nombreux Mayas se suicidèrent prenant
ainsi « le maquis de l’âme » dans une manifestation ultime de refus qui en laissait
entrevoir bien d’autres. Les chefs mayas laissaient à leurs descendants ce message
: « nous reviendrons ».
Michel Boccara

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Tu te plains
D’une forte houle ?
Voilà pourquoi nous voulons
Le courage
De ceux qui n’acceptent pas
Seulement
Ce qui se voit
Le calme est soumission
Abattement,
Mort.
La vie
Est au cœur du tourbillon
Où le vent cingle
Où chaque cellule
Tremble et croit
En l’impossible
Les rebelles eux
Sont les seules vigies
Du changement
Que la condition
Humaine
Exige
Federico Mayor

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Un appel au sursaut afin de trouer l’épais brouillard qui, aujourd’hui, voile l’espérance.
Dire non pour inventer tous ensemble notre oui.
Edwy Plenel

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Ce ne sont pas tant les fusils britanniques qui sont responsables de notre sujétion
que notre coopération volontaire.
Gandhi

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Je désirerais seulement qu’on me fît comprendre comment il se peut que tant
d’hommes, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois tout d’un tyran seul,
qui n’a puissance que celle qu’on lui donne.
Etienne de la Boétie
La désobéissance civile est le droit imprescriptible de tout citoyen. Il ne saurait y
renoncer sans cesser d’être un homme.
Gandhi

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Il n’y a pas de tyrans, il n’y a que des esclaves.
Etienne de la Boétie

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Heureusement il y a ces résistants, cette poignée de veilleurs qui en éveillent
d’autres.
Le grain semé s’est multiplié
Théodore Monod

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Résister aux casseurs d’horizons !

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On pourrait ajouter aux personnes rencontrées par le Petit Prince d’Antoine de Saint- Exupéry … un casseur d’horizons :

« Qu’est-ce que vous faites ? » demanda le Petit Prince,

« Dès que je vois des ailes qui poussent je les rogne, je les casse, je les coupe. »

« Vous aimez çà ? » demanda le Petit Prince d’un air effrayé,

« Oh oui j’aime çà, je n’en décolle plus ! » répondit le rogneur d’ailes.

« Moi, dit le Petit Prince, j’aime l’horizon. J’aime marcher doucement vers une fontaine. »

 Conte proposé par l’auteur de ce blog avec ce commentaire :

Ainsi la pente la plus forte c’est celle qui nous amène à ne pas marcher vers des fontaines, c’est celle de la résignation devant les rapports de forces alors que ceux-ci peuvent changer, alors qu’à chaque instant, le réel contient plus de possibles que l’on ne croit. Manquer de souffle, être étouffé(e) par l’impératif du réalisme, laisser la place à des sortes d’experts de rétrécissements d’horizons, et finalement de ne pas être à la hauteur des défis.

Simone de Beauvoir écrivait: « Il est peu de vertus plus tristes que la résignation. Elle transforme en fantasmes, en rêveries contingentes, des projets qui s’étaient d’abord constitués comme volonté et comme liberté. » Jean-Paul Sartre écrivait de même: “L’important n’est pas ce qu’on fait de nous mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu’on a fait de nous. »

JML

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Quelles sont les définitions des résistances ?

Le texte qui suit est  l’un des sept articles de l’auteur de ce blog  sur « Les résistances ».

Arriver à cerner les définitions des résistances ne permet-il pas de mieux se situer par rapport à telle ou telle résistance ?  

  Nous proposons de les déterminer à partir de deux critères qui devraient éclairer chaque définition.

Quelles parts ont les volontés dans ces résistances ?

Comment ces résistances s’inscrivent-elles dans le temps ?

Les volontés et le temps permettent, semble-t-il, de dégager quatre définitions correspondant à quatre séries de situations.

Des résistances  proches et déjà au-delà de mécanismes naturels de défense.(A)

Des résistances quotidiennes par rapport à soi-même et à d’autres.(B)

Des résistances, témoignages d’actes culturels.(C)

Des résistances de veilleurs, un état d’esprit face à tout ce qui détruit le vivant.(D)

A- Beaucoup de résistances  proches et déjà au-delà de mécanismes naturels de défense.

Dans ces résistances les volontés ont malgré tout une certaine présence mais très variable et le déroulement du phénomène est souvent rapide. Quels sont les éléments qui constituent ces résistances ? Nous en proposerons deux.

1-En premier lieu certaines résistances correspondent à des mécanismes naturels de défense. Il s’agit de réactions immédiates, rapides, elles sont involontaires face à ce que l’on pourrait appeler un stimulus. Ce mécanisme va se déclencher avant toute réflexion donc, a priori, indépendamment de la volonté .C’est un réflexe inné, défensif que l’on trouve chez les êtres humains, les animaux, les végétaux. On parle de réflexe vital, d’instinct de conservation, par exemple face au froid, au réchauffement, à une douleur…

2 -En second lieu ces résistances ne sont-elles pas, pourtant, ici et là, déjà plus qu’une défense naturelle ? Trois raisons au moins vont dans ce sens et font dire à certains qu’il y a « une impossibilité de donner une définition purement naturaliste de la résistance de l’organisme. » (« Une devise pour l’organisme » par Anne-Marie Moulin, dans l’ouvrage « Résister » déjà cité). D’abord même quand on résiste ainsi on peut avoir des marges de manœuvres, certains choix possibles. Par exemple on peut apprivoiser certaines peurs, il y a donc de l’inné mais aussi de l’acquis c'est-à-dire de l’idéologique, de l’éducatif, du social, de l’économique, par exemple face à ce que l’on appelle des « maladies de l’hiver » certes les stratégies de défense de notre corps sont là mais existent également des façons d’aider notre organisme à se défendre, on peut stimuler des défenses immunitaires par des plantes médicinales, par des vitamines. Ensuite les mécanismes de défense sont inégaux selon les personnes, certaines sont par exemple plus frileuses que d’autres, et des inégalités existent également selon les groupes, par exemple les maladies cardiaques chez les femmes sont, dit-on, sous-diagnostiquées parce qu’elles peuvent former des caillots sanguins plus silencieux .Enfin il peut arriver que des mécanismes de défense soient synonymes d’erreurs, par exemple face à des menaces que l’on croyait exister mais qui étaient des peurs sans objet.

B- Les innombrables résistances quotidiennes par rapport à soi-même et à d’autres.

Dans ces résistances les volontés sont présentes, elles sont très variables dans leur durée.

1-Des résistances à soi-même varient selon ses choix de vie, son tempérament, sa santé, son entourage et selon les circonstances. Ainsi face au sommeil, à des fatigues, des efforts, des maladies, face à des situations et des décisions qui nous contrarient…On le sait aussi des résistances, des forces peuvent « nous manquer, nous abandonner. ».

2-Et puis dans nos rapports avec les autres, on peut vivre des résistances dans des lieux quotidiens, autrement dit dans la famille, l’éducation de ses enfants et petits enfants, dans ses amitiés, sa profession, dans l’administration, les moyens financiers, le commerce, les transports, les voyages, les spectacles…Dans l’administration on ne résiste pas toujours au rire quand elle vous écrit « Votre dossier est vide de toutes pièces manquantes » ou bien « Vous pouvez payer en plusieurs fois à condition de tout régler d’un coup » ou bien « Comme chaque année nous avons égaré votre dossier. »

3-Il arrive aussi que l’on abandonne des résistances par lassitude, par peurs de complications ou de conflits qui s’enveniment, par lâcheté dans la fuite, ou par volonté de ne plus recevoir de coups et de trouver un peu de calme voire une certaine sérénité.

C- De nombreuses résistances, témoignages d’actes culturels.

Elles représentent un ensemble de volontés et se construisent dans le temps. Quels sont les éléments qui constituent ces résistances ? On peut en recenser au moins cinq.

1--En premier lieu l’acte culturel repose sur un socle, celui de valeurs, c'est-à-dire ce à quoi l’on croit. Ces valeurs les plus connues, qui ont vu le jour grâce à de nombreuses résistances à travers le temps, sont celles de la culture humaniste, elles correspondent également à la devise de la République française : liberté, égalité, fraternité .Ces valeurs se sont traduites peu à peu par les droits de quatre générations, les deux premières sont reconnues au niveau international par les deux Pactes internationaux des droits de l’homme, les droits-libertés c'est-à-dire les droits civils et politiques (qui sont les droits de), les droits-égalités c'est-à-dire les droits économiques sociaux et culturels (qui sont les droits à).La troisième, celle des droits-solidarités, qui sont les droits au développement, à l’environnement et à la paix, voit le jour, on va, trop lentement, vers la consécration d’un Pacte international du droit à l’environnement, la paix attend toujours son Pacte, des textes existent sur le droit au développement durable. Une quatrième génération de droits est en gestation, celle des droits des êtres humains par rapport à la techno science, par exemple relatifs à la bioéthique et au clonage, ou bien , mais on en est encore très très loin,un droit à l’interdiction des recherches sur les armes de destruction massive.

Ajoutons que des personnes, des communautés, des organisations, des mouvements, de façon modérée ou radicale, ne veulent pas adhérer à ces valeurs et, par exemple, se prononcent pour un repli sur soi, une fermeture voire une haine de l’étranger et sont porteurs d’injustices, d’atteintes aux libertés.

Camus écrivait « Le révolté oppose ce qui est préférable à ce qui ne l’est pas. Toute valeur n’entraine pas la révolte, mais tout mouvement de révolte invoque tacitement une valeur. »

2-En second lieu ce sont donc les atteintes à une ou plusieurs de ces valeurs qui donnent le jour à des résistances. « Indignez-vous ! » proclamait Stéphane Hessel .En effet l’indignation est le terreau de la résistance. Elle apparait dans les domaines qui correspondent à l’ensemble des activités humaines. Il s’agit des atteintes à la démocratie (liberté), à la justice (égalité), à la paix et à l’environnement (fraternité). En témoignant de son engagement dans la résistance Edgar Morin affirmait : « Je faisais quelque chose qui me semblait juste et bien. » Adam Michnik, ancien militant de l’opposition polonaise, écrivait : « Dans la vie de chaque homme vient un moment où pour dire simplement ceci est noir ceci est blanc il faut payer très cher. Ce peut être le prix de la vie. A ce moment le problème n’est pas de connaitre le prix à payer mais de savoir si le blanc est blanc et si le noir est noir. Pour cela il faut garder une conscience. » Donc l’indignation est synonyme du « trop c’est trop », de l’écœurement, de l’inacceptable. Cette révolte et cette colère apparaissent le plus souvent face aux injustices. Jean Carbonnier, auteur d’un ouvrage juridique célèbre (Flexible droit, LGDJ, 1969), constatait que « La découverte de la justice est tantôt illumination à l’horizon lointain, tantôt éclair qui déchire la conscience. » Ainsi, de façon lente ou brutale, on entre en résistance.

3- En troisième lieu cette indignation se traduit concrètement  par un refus, un non.

Plutarque, philosophe et biographe de la Rome antique, cité par Montaigne puis de nos jours par exemple par Edwy Plenel (« Dire non », éditions Don Quichotte, 2014) affirmait : « Les habitants d’un pays étaient tombés en esclavage pour ne pas savoir prononcer une seule syllabe : non. »Voilà qui peut rappeler cette pensée du philosophe Alain : « Penser c’est dire non. Remarquez que le signe du oui est d’un homme qui s’endort ; au contraire le réveil secoue la tête et dit non(…) » (Alain, Propos sur les pouvoirs, « L’homme devant l’apparence »,19 janvier 1924, n° 139). On refuse de « s’adapter» au scandaleux, à l’intolérable, à l’inhumain. Ce refus peut se manifester en paroles et il peut prendre corps en actes. N’écoutez pas seulement ce qu’ils disent, regardez surtout ce qu’ils font.

4-En quatrième  lieu cette indignation  peut aussi prendre souvent la dimension du « nous » qui devient essentielle. Le fondateur de Mediapart lançait un « appel au sursaut » : « Dire non pour inventer tous ensemble notre oui. » ( Edwy Plenel « Dire nous », éditions Don Quichotte) 2016).On s’indigne au nom du bien commun, au nom de l’intérêt collectif, au nom de l’idée d’humanité.

5-Enfin en cinquième lieu cette indignation peut aussi s’accompagner d’une capacité de proposition, d’une utopie créatrice c'est-à-dire prenant les moyens de se réaliser à travers des alternatives. René Jean Dupuy, juriste internationaliste, écrivait : « La dimension utopique et prophétique demeure indispensable dans toute prospective réelle qui implique non pas la simple extrapolation du passé et du présent mais le moment de la rupture, le moment de la conscience, le moment de la transcendance de l’homme par rapport à sa propre histoire. » (René Jean Dupuy, La clôture du système international. La cité terrestre », puf, 1989).

D- Des résistances de veilleurs, un état d’esprit face à tout ce qui détruit le vivant.

A vrai dire la distinction entre l’acte culturel et l’état d’esprit n’est pas toujours  tranchée. On peut passer de l’un à l’autre dans sa vie ou dans une collectivité, selon le souffle que l’on a et selon les circonstances.

Dans l’état d’esprit de la résistance les volontés sont omni présentes et le temps est plus ou moins habité par des refus. Deux éléments constituent probablement cet esprit de résistance.

1-En premier lieu : les résistant(e)s deviennent peu à peu des veilleur(e)s. Pour elles, pour eux « résister c’est exister, exister c’est résister.». L’esprit de résistance se traduit par des critiques et des insoumissions dans un ou plusieurs domaines. Le veilleur veille au nom des autres et avec les autres, mais aussi quelquefois contre eux ou sans eux. Il a une volonté particulière, celle de détecter le plus tôt possible des atteintes à des valeurs. Le veilleur sait que nos chemins de bonnes intentions peuvent être pavés de nos renoncements successifs. Il sait que plus on attend pour résister, plus il va être difficile de le faire parce que les atteintes aux valeurs deviennent plus nombreuses et plus dures à combattre et parce que les volontés d’entrer en résistance peuvent se perdent dans le sable.

2 -En deuxième lieu cet état d’esprit est d’autant plus porteur qu’il embrasse un ensemble d’indignations face aux atteintes qui détruisent les êtres humains et l’ensemble du vivant. L’amour de la vie et de tout ce qui est vivant fait naitre une colère qui devient inextinguible, c'est-à-dire qu’on ne peut plus l’arrêter face à ce qui menace, attaque ou tue la vie. Dans son cœur, son esprit et sa vie on crie du fond de son être « Liberté ! Justice ! Paix ! Vive le vivant ! ».

Indignation, révolte, rupture, résistance ne se dévorent pas mais ont faim ensemble, elles se complètent, elles s’inclinent les unes vers les autres.

Ainsi, vous l’avez compris, il n’y a pas de cloisons étanches entre ces quatre séries de situations de résistances. Par exemple les deux premières, celles des réflexes et celles quotidiennes envers soi et d’autres, peuvent être présentes dans l’engagement d’un acte culturel. Et par exemple on peut dans un acte culturel être habité peu à peu par un esprit de résistance plus général.

JML

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10- Solidarité

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Etre une conscience c’est s’éclater vers le monde.
Jean-Paul Sartre

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Passer de la question du souci de soi à celle du destin de tous.
Jean Cardonnel

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Agis donc de telle sorte que tu traites l’humanité, aussi bien dans ta personne que
dans la personne de tout autre, toujours en même temps comme une fin et jamais
simplement comme un moyen.
Emmanuel Kant

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N’importe quelle gifle donnée à n’importe quel homme en n’importe quelle partie du
monde, chacun doit la ressentir comme s’il l’avait reçue sur sa propre joue.
Che Guevara

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« Là où croît le risque croît aussi ce que sauve ». Nous savons désormais que dans
la recherche éperdue et démente du salut il n’y a point de salut. Mais enfants perdus
de la Terre que nous sommes nous pouvons sauver la solidarité terrestre.
Edgar Morin

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Il faut qu’une conscience écologique de la solidarité se substitue à la culture de la
compétition et de l’agression qui régit actuellement les rapports mondiaux.
Edgar Morin

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Je suis tombé par terre
C’est la faute à Voltaire
Le nez dans le ruisseau
C’est la faute à…
Victor Hugo (Gavroche)

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J’ai frappé
A la porte
J’ai frappé
A ton cœur
Pour avoir un bon lit
Pour avoir un bon feu
Pourquoi me repousser ?
Ouvre moi
Mon frère.

René Philombe
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Me voilà ici, le ventre vide, comme un enfant assassiné sous les balles torrides des
déserts asséchés, le ciel dans les bras, chez l’occident, j’ai roulé la terre et tamisé les
eaux, pour le sourire de mon enfant.
Là-bas, sous les horizons du Nord, j’ai rencontré le rire d’un bel enfant, son visage
était radieux, il ressemble à mon enfant, mon enfant a faim.
On dit que l’espace est coupé, que l’espace est déchiré, que des droits existent pour
une partie du monde et que, finalement, le Sud est une misère à cacher, une
souillure à voiler. Mais savent-ils que le Nord n’est pas le Nord et que ce Sud est un
mot, que partout on meurt, le rire cassé, qu’un cimetière du Sud et les tombes
maquillées de fleurs sont les larmes des mères, les maux de mes filles.
Ben Kamara

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« Docteur, dit Rambert, je ne pars pas et je veux rester avec vous. »(…)
Rieux répondit qu’il n’y avait pas de honte à préférer le bonheur.
« Oui, dit Rambert, mais il peut y avoir honte à être heureux tout seul. (…) J’ai
toujours su que j’étais étranger à cette ville et que je n’avais rien à faire avec vous.
Mais maintenant que j’ai vu ce que j’ai vu, je sais que je suis d’ici, que je le veuille ou
non. Cette histoire nous concerne tous. ».
Albert Camus

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Qui maintenant pleure quelque part dans le monde
Sans raison pleure dans le monde,
Pleure sur moi.
Qui maintenant rit quelque part dans la nuit,
Sans raison rit dans la nuit,
Rit de moi.
Qui maintenant marche quelque part dans le monde,
Sans raison marche dans le monde,
Vient vers moi.
Qui maintenant meurt quelque part dans le monde,
Sans raison meurt dans le monde,
Me regarde.
Rainer Maria Rilke

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Un acte de résistance ? Dans « Elephant man » la victime poursuivie se dresse
soudain et crie : « mais enfin, je suis un homme! »
Un acte de solidarité ? Dans « Le Kid » le vagabond s’élance sur tous les toits du
monde pour retrouver l’enfant perdu, rien ne lui semble impossible.
Les cœurs des personnes et des peuples peuvent battre plus fort, ils appellent aux
sociétés de libertés, d’égalités, de solidarités, aux sociétés de tendresse.
JML

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L’héroïsme ce n’est pas de se tenir debout à tout prix. L’héroïsme c’est d’accepter de
tomber en solidarité avec tous ceux qui paient leur tribut à la fragilité humaine.
Léonardo Boff

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« Nul homme n’est une île, un tout en soi; chaque homme est partie du continent,
partie du large; si une parcelle de terre est emportée par les flots, pour l’Europe c’est
une perte égale à celle d’un promontoire, autant qu’à celle d’un manoir de tes amis
ou du tien. La mort de tout homme me diminue parce que je suis membre du genre
humain. Aussi n’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : il sonne pour toi. »
John Donne

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Je crois aux hommes,
Solidaires dans l’aventure de l’existence,
Je crois à l’amour
Qui brise la solitude, change les destins et qualifie la vie,
Je crois à tous ces témoins de l’humanité
Qui sont tournés vers l’avenir
Et qui luttent contre les forces de mort. (…)
Des parents… de « Naissances en fêtes »

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 (Des personnes disparues ? Ou un dieu ? Ou Dieu ? Ou… ?)

Au soir de sa vie un homme se retourne et voit ses pas sur le sable, ils sont entourés d’autres pas, quelquefois nombreux, mais de temps en temps il constate que ses pas sont seuls sur la plage de sa vie.

Il se dit tristement « j’étais seul, personne n’était là pour m’accompagner. » Il entend alors une voix qui lui dit « va voir tes pas !».

Il approche et découvre que, lorsqu’ils étaient seuls, les pas étaient plus profonds. Il entend alors la voix lui dire : « tu ne le savais pas mais j’étais là et je te portais ».

Il pleura d’émotion et de reconnaissance.

Histoire qui viendrait du  Brésil ,  reprise sous différentes formes  et reconstruite  ici par l’auteur du blog.

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11-La fraternité et le « commun »

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L’esprit de fraternité, consacré par la DUDH, porté par « les êtres humains doués de raison et de conscience », doit souffler sur notre terre à travers les temps, il peut briser des solitudes, changer des destins, qualifier des vies. Il doit faire, de tous envers tous, des tisseurs et des passeurs de fraternités.

JML

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Vouloir vivre dans la fraternité n’est-ce pas aussi s’attaquer
radicalement aux structures d’injustice ?
JML

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La fraternité est-elle trans générationnelle ? Ethiquement il faut qu’elle le soit, c’est un devoir moral, politiquement il faut lui donner sa place, c’est une valeur essentielle, juridiquement il faut la construire, c’est un principe porteur. ( Le Conseil constitutionnel reconnaît d’ailleurs la valeur constitutionnelle du principe de fraternité dans sa décision du 6 juillet 2018).

JML

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Ne sommes-nous pas fraternisés par le commun, en particulier les périls les fragilités et les projets communs ?

Etre frères n’est-ce pas se rassembler contre des périls communs ? Ils s’appellent et s’appelleront très certainement débâcle écologique, armes de destruction massive, inégalités criantes, toute-puissance de la techno science et des marchés financiers. C’est être frères contre les périls communs eux-mêmes, c’est l’attitude non violente fondée sur le respect des personnes et les dénonciations les remises en cause de mécanismes antifraternels.

D’autre part ce sont aussi les douleurs de la vie(la fraternité de la douleur) qui peuvent nous relier en étant à l'écoute des fragilités, celles des autres et les nôtres. Vont dans ce sens des religions, des cultures, des œuvres d’art, qui nous disent « çà n’est pas un fardeau que tu portes c’est ton frère. » Enfants en détresse sur notre terre : un sur deux aujourd’hui et combien demain ?

 Et puis ne sommes-nous pas aussi fraternisés par les projets communs ? Etre frères c’est se rassembler à travers le temps pour préserver le bien commun et pour construire du commun c’est à dire relier, dans l’espace et dans le temps, le proche et le lointain ? Ces projets ne sont-ils pas témoignages de fraternités d’espérance s’ils répondent aux urgences et s’ils construisent des politiques à long terme ?

JML

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Petit conte

  Un enseignant demande un jour à ses étudiants « Quand peut-on dire que la nuit s’achève et que le jour se lève ? »

Quatre étudiants répondent tour à tour : « lorsqu’on y voit plus clair autour de soi et en soi, lorsqu’on a diplômes, métier, argent, et surtout santé, amour, amitié, lorsque dans la rosée du matin on cueille le souffle du monde, lorsque les enfants souffrent moins et que toutes les personnes et les animaux seront réunis au paradis s’il existe. » « Oui, dit l’enseignant, mais encore ? »

Une petite voix se risque : « Je crois que la nuit s’achève et que le jour se lève lorsque l’on distingue un être humain d’un arbre, un arbre d’un canon, un canon d’une charrue, une charrue d’un morceau de pain. » « Oui, dit l’enseignant, mais essayez d’aller plus loin. »

Quatre étudiants répondent tour à tour : « Le jour se lève quand on ne distingue plus l’arbre malade de celui qui va bien parce que tous respirent, lorsqu’on ne distingue plus un canon d’une charrue parce que tous les canons ont été transformés en charrues, lorsqu’on ne distingue plus les pauvres des riches parce que tous ont assez de pain, lorsqu’on ne distingue plus ceux qui commandent de ceux qui sont commandés parce que tous décident. »

Ainsi, dit l’enseignant, « se connaitre, être, avoir, aimer, moins souffrir, construire un monde écologique, pacifique, juste et démocratique, tout cela et bien des choses encore font que la nuit s’achève et que le jour se lève.

Peut-être pourrait-on ajouter que la nuit s’achève et que le jour se lève lorsque l’on peut voir dans le visage de chaque être humain celui d’un frère et d’une sœur. Alors la nuit s’achève, l’aube apparait, une aube d’humanité. »

JML
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12-Responsabilité

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Nous sommes tous responsables de tout devant tous et moi plus que tous les autres.
Dostoïevski

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Vous connaissez cette phrase de Dostoïevski : « Nous sommes tous responsables
de tout devant tous et moi plus que tous les autres. ». Non pas à cause de telle ou
telle culpabilité effectivement mienne, à cause des fautes que j’aurais commises,
mais parce que je suis responsable d’une responsabilité totale, qui répond de tous
les autres et de tout chez les autres, même de leur responsabilité.
Emmanuel Levinas

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Je crois que nous naissons innocents et que nous avons à nous rendre
responsables, que nous ne pouvons jamais prévoir toutes les conséquences de nos
actes mais qu’il y a toujours, malgré tout, quelque chose à tenter, quelque entreprise
commune à engager.
Françis  Jeanson

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Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé.
Antoine de Saint-Exupéry

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Dès lors que l’on ne croit plus en Dieu ni en la survie dans l’au-delà, c’est l’Homme
qui devient responsable de tout ce qui vit, de tout ce qui, dans la douleur, est voué à
souffrir de la vie.
Nietzsche

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Nous avons atteint l’âge d’homme, ce qui signifie que nous sommes responsables de
nous-mêmes à un point jamais égalé dans l’histoire des sociétés modernes. Cette
augmentation de la responsabilité nous rend, dans son mouvement même, plus
vulnérables, car elle suppose d’accroître la capacité de chacun à agir à partir de son
autorité privée et de son jugement personnel sans lesquels on bascule dans
l’impuissance et la souffrance psychique.
Alain Ehrenberg

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Respecter les générations futures c’est construire une société humainement
soutenable en particulier appliquer le principe de précaution en maîtrisant la
techno science et redéfinir le droit de la responsabilité en tenant compte de la valeur
même des biens naturels en dehors de tout usage socio-économique immédiat.
Voulons-nous demain des petits enfants sujets de leurs propres vies ou objets de la
vie de quelques générations qui n’auront pas su prendre aujourd’hui leurs
responsabilités ?
JML

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Agis de telle sorte que les effets de ton action soient compatibles avec la
permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre.
Hans Jonas

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Respecter les générations futures c’est construire une société humainement
soutenable en particulier appliquer le principe de précaution en maîtrisant la
techno science et redéfinir le droit de la responsabilité en tenant compte de la valeur
même des biens naturels en dehors de tout usage socio-économique immédiat.
Voulons-nous demain des petits enfants sujets de leurs propres vies ou objets de la
vie de quelques générations qui n’auront pas su prendre aujourd’hui leurs
responsabilités ?

JML

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Peur et responsabilité chez Hans Jonas :

Il s’agit donc de la pensée de Hans Jonas (1903-1993) ( « Le Principe responsabilité : une éthique pour la civilisation technologique ». Parution allemande en 1979, traduction française chez Flammarion, Champs, 1990 ). Et avec une traduction et une présentation de Jean Greisch , aux éditions Le Cerf, 1990.)Voir aussi sur Hans Jonas l’article de Jean Greisch, » L’amour du monde et le principe responsabilité », dans l’ouvrage précité « La responsabilité. », Editions Autrement ,. Série Morales n°14, janvier 1994.

Soulignons trois idées fortes :

1- La civilisation technologique menace l’humanité, une éthique nouvelle doit voir le jour.

  Jean Rostand écrivait « Tous les espoirs sont permis à l’homme même celui de disparaitre ». Jonas pense que doit être détruite toute technologie qui comporte le risque de détruire l’humanité .C’est l’humanité qui est l’objet de la responsabilité.

 « Nulle éthique antérieure n’avait à prendre en considération la condition globale de la vie humaine et l’avenir lointain et l’existence de l’espèce elle-même […]. Personne n’était tenu responsable pour les effets ultérieurs non voulus de son acte bien intentionné, bien réfléchi, et bien exécuté. […] Tout cela s’est transformé de manière décisive. La technique moderne a introduit des actions d’un ordre de grandeur tellement nouveau, avec des objets tellement inédits, et des conséquences tellement inédites, que le cadre de l’éthique antérieure ne peut plus les contenir. »

 2-La peur doit pousser à agir, la responsabilité est le principe vital .

 Hans Jonas insiste sur la peur qui favorise la responsabilité. Non pas la peur paralysante mais celle qui pousse à agir. On mesure et on connait les risques, la peur devient alors une force. C’est « l’heuristique de la peur. »

La responsabilité est une vertu mais c’est surtout un principe. C’est le fondement d’une nouvelle conception éthique .

Le problème le plus crucial pour la civilisation technologique, c’est de savoir comment agir sans compromettre « la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre. »

 « Agis de façon que les effets de ton action ne soient pas destructeurs pour la possibilité future d’une telle vie »

 3- La responsabilité nous engage vis-à-vis de tout homme, de tout lointain dans le temps et également de l’ensemble de l’environnement .

 La responsabilité n’intéresse plus aujourd’hui le seul prochain immédiat, mais tout prochain et même tout objet : elle embrasse « l’environnement », entendu comme la totalité de ce qui est.

On retrouve ce point commun avec d’autres philosophies qui est relatif à la fragilité, la vulnérabilité. Autrui me regarde, il m’assigne à responsabilité.

L’humanité est fragile, vulnérable, nous sommes responsables de son futur.

« Le fait que depuis peu la responsabilité s’étende au-delà jusque à l’état de la biosphère et de la survie future de l’espèce humaine, est simplement donné avec l’extension du pouvoir sur ces choses, qui est en premier lieu un pouvoir de destruction. Le pouvoir et le danger dévoilent une obligation qui, par la solidarité avec le reste, une solidarité soustraite au choix, s’étend de l’être propre à l’être en général, sans même un consentement particulier. »

Notre responsabilité est engagée vis à vie des générations passées, présentes, futures et par rapport à l’ensemble du vivant.

Synthèse de la pensée de Hans Jonas par JML

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Article de JML

Un panorama  de quelques pensées dans leurs  rapports avec la nature, la liberté et la responsabilité.

- Pour ce qui est des rapports avec la nature

soit l’environnement n’est pas présent dans ces œuvres mais tel ou tel élément peut nous interroger sur lui, ainsi la question de savoir si nous avons un libre arbitre ou si nous sommes déterminés,

soit l’environnement est évoqué directement sous la forme de nos rapports avec la nature, on retrouve ici la responsabilité.

Donc ces pensées peuvent éclairer divers aspects et préparer le terrain à d’autres qui rencontreront l’environnement plus directement , en particulier bien sûr lorsque la débâcle écologique apparaitra et se déchainera de 1850 à nos jours.

- Pour ce qui est de la liberté et de la responsabilité

Pour les plus nombreux la liberté existe. Et la responsabilité repose sur la liberté.

Pour d’autres le déterminisme est omniprésent, la liberté et la responsabilité n’existent pas.

Pour d’autres enfin on est responsable avant d’être libre. « Je dois démesurément à l'autre c'est à dire à mon frère.»

 -Nous avons conscience que  résumer une œuvre ou même un ouvrage de ces pensées complexes et gigantesques a quelque chose non seulement de réducteur mais aussi d’incertain voire d’injuste.

Pourtant dans le cadre de cette volonté de synthèse nous pensons que ces très petits résumés peuvent souligner quelques idées fortes pour mieux situer ces pensées par rapport aux questions abordées et donc contribuer à nous éclairer. Certains passages significatifs seront cités, là aussi avec à la fois un certain arbitraire mais un éclairage de lignes le plus souvent lumineuses.

Partons de l’Antiquité jusqu’au XIXè (A) pour arriver au XXè siècle (B).

 Nous soulignerons simplement ici quelques idées importantes relatives à nos rapports avec la nature mais surtout relatives à la liberté, à la responsabilité.

A- Les responsabilités selon des philosophes  de l’Antiquité au XIXème.

1-Aristote (-367 à -347) (Ethique à Nicomaque) est l’un des auteurs à l’origine de la responsabilité. Celle-ci va avoir pour fonction de réparer une injustice, elle repose sur le libre arbitre où l’individu est libre et sur la volonté qui est à l’opposé de la contrainte.

2-Thomas d’Aquin (1224-1274) (La Somme théologique) pense qu’il y a un lien entre libre arbitre, responsabilité juridique (fondée sur le droit naturel)  et responsabilité morale (fondée sur la loi naturelle qui a pour origine la loi divine) Il faut prendre en compte l’influence des facteurs de la société sur le libre arbitre.

3-Michel de Montaigne (1533-1592) (Les Essais ) dans le courant humaniste met en avant l’esprit critique et l’amour de la connaissance. Il défend la liberté et la responsabilité individuelles.

4-Etienne de La Boétie (1530-1563) (Discours de la servitude volontaire) met en avant l’idée selon laquelle les sujets ont le droit et le devoir de juger le Prince et il existe une responsabilité du peuple dans le maintien du tyran au pouvoir.

Si l’on ne soutient plus les dictateurs leurs pouvoirs s’effondrent. « Si on ne donne rien, si on ne leur obéit point, sans combattre, sans frapper, ils demeurent nus et défaits, ils ne sont plus rien, sinon que, comme la racine, n’ayant plus d’aliment, la branche devient sèche et morte. » Il faut donc retirer son appui au tyran : « Soyez résolus de ne plus servir et vous voilà libres. Je ne veux pas que vous le poussiez ou l’ébranliez mais seulement que vous ne le souteniez plus et vous le verrez comme un grand colosse à qui se dérobe sa base, de son poids même, fondre en bas et se rompre. » Ainsi il y a bien sûr la capacité de violence des régimes autoritaires mais il y a aussi et surtout la capacité de soumission des opprimés qui sont prisonniers de leurs peurs. Cet auteur de ce grand ouvrage est l’un des inspirateurs des théories et des pratiques de la non-violence qui ont vu le jour par la suite et qui répondent présentes aux responsabilités individuelles et collectives mises en œuvre souvent dans le cadre de la protection de l’environnement.

5-René Descartes (1596-1650) (Les Méditations métaphysiques) affirmait que tout repose sur la raison, les erreurs sont des mauvais usages de la raison. La responsabilité repose sur le libre arbitre et sur la volonté.

Descartes est aussi un des défenseurs d’une  possession de la nature : « […] connaissant la force et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent […] nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature. Ce qui n’est pas seulement à désirer pour l’invention d’une infinité d’artifices qui feraient qu’on jouirait sans aucune peine des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s’y trouvent, mais principalement aussi pour la conservation de la santé, laquelle est sans doute le premier bien et le fondement de tous les autres biens de cette vie […].»(Discours de la méthode, 1637, 6e partie, classique Larousse)

Dénonçant ce déferlement de violence de l’homme contre le vivant, Claude Lévi-Strauss écrira beaucoup plus tard en 1973:

« On a commencé par couper l’homme de la nature, et par le constituer en règne souverain ; on a cru effacer ainsi son caractère le plus irrécusable, à savoir qu’il est d’abord un être vivant. Et en restant aveugle à cette propriété commune, on a donné le champ libre à tous les abus […]. » (Anthropologie structurale, Plon, 1973, p. 53)

6-Blaise Pascal (1623-1662) (Pensées). La conscience nous libère de notre condition finie, elle fonde la dignité humaine, elle est source de liberté par le pouvoir qu’elle nous donne sur la nature. Avec la conscience apparait la loi morale et ses interdits. Si j’agis consciemment je suis responsable de ce que je fais.

7-Baruch Spinoza (1632-1677) ( Ethique) répond à Descartes que le libre arbitre n’existe pas. Notre raison et notre volonté sont déterminées par les lois qui commandent la nature. Dès lors dans ce déterminisme le principe de responsabilité des individus, lui non plus, n’existe pas.

L’accès à une certaine liberté repose sur la connaissance rationnelle qui permet d’éclairer l’être humain sur les « enchaînements de causes » des phénomènes du monde.

8- Charles-Louis de Secondat de Montesquieu (1689-1755) (Pensées diverses).

Nous ne proposons pas ici ses théories célèbres sur la séparation des pouvoirs mais uniquement cette pensée forte de citoyen du monde qu’il était : «  Si je savais quelque chose qui me fût utile et qui fût préjudiciable à ma famille, je la rejetterais de mon esprit. Si je savais quelque chose utile à ma famille, et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l'oublier. Si je savais quelque chose d’utile à ma patrie et préjudiciable à l'Europe, ou bien qui fût utile à l'Europe et préjudiciable au genre humain, je la regarderais comme un crime. "

Dit autrement : le village, la ville, la région c’est mon terroir, le pays c’est ma patrie, le continent c’est ma matrie, la planète c’est mon foyer d’humanité. Entre ces différents territoires, ces lieux de vie il est essentiel de construire des harmonies fondées sur quelques principes autour du respect de l’humain et du vivant.

9-Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) (Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes ) . L’homme est capable du meilleur comme du pire, d’où sa responsabilité particulière vis-à-vis des autres et de la nature.

L’opposition entre Voltaire et Rousseau par rapport au tremblement de terre de Lisbonne de 1755 est significative. Alors que Voltaire met en avant le caractère naturel de cette catastrophe, Rousseau dénonce la responsabilité humaine « Convenez que la nature n’avait point rassemblé là 20.000 maisons de six à sept étages et que si les habitants de cette grande ville eussent été dispersés plus également et plus légèrement logés le dégât eût été beaucoup moindre et peut-être nul » (Lettre sur la providence, 18 août 1756).

Comme on peut l’observer en 2000, soit 244 ans plus tard, le représentant (Salvano Briceno) de « la décennie internationale des Nations unies (1990-2000) ne nous dit pas autre chose lorsqu’il affirme que « c’est la vulnérabilité sociale et humaine qui transforme un phénomène naturel en catastrophe. » (Julien Bétaille préface du colloque international sur « Les catastrophes écologiques et le droit : échecs du droit, appels au droit, » sous la direction de Jean-Marc Lavieille, Julien Bétaille et Michel Prieur, éditions Bruylant, 2012.)

10-Emmanuel Kant (1724-1804) (Critique de la raison pratique) (Fondements de la métaphysique des mœurs). L’homme appartient au règne de la nature  donc ses actions sont déterminées et il appartient aussi au monde de la raison et de la volonté, or la liberté de la volonté est autonome, elle est sa propre loi.

La raison pratique c’est la faculté de se représenter la loi morale.

« Si donc il doit y avoir un principe pratique suprême, et au regard de la volonté humaine un impératif catégorique, il faut qu'il soit tel que, par la représentation de ce qui, étant une fin en soi, est nécessairement une fin pour tout homme, il constitue un principe objectif de la volonté, que par conséquent il puisse servir de loi pratique universelle. Voici le fondement de ce principe : la nature raisonnable existe comme fin en soi. L'homme se représente nécessairement ainsi sa propre existence ; c'est donc en ce sens un principe subjectif d'actions humaines.
Mais tout autre être raisonnable se présente également ainsi son existence, en conséquence du même principe rationnel qui vaut aussi pour moi ; c'est donc en même temps un principe objectif dont doivent pouvoir être déduites, comme d'un principe pratique suprême, toutes les lois de la volonté. L'impératif sera donc celui-ci :

"Agis de telle sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen. »

La dignité humaine est donc une valeur absolue et universelle.

 11-Karl Marx (1818-1883) (L’idéologie allemande). Le passage est connu « çà n’est pas la conscience qui détermine l’existence, c’est l’existence qui détermine la conscience ; dans le premier cas on part de l’individu vivant (lui-même) ; dans le second cas on part des individus vivants réels et on considère la conscience comme leur conscience.»

La dénonciation du capitalisme est centrale dans sa pensée, mais ne se fonde donc pas sur des règles morales, ce qui ne veut pas dire que certains auteurs ne voient pas dans les écrits de Marx une normativité éthique fondée en particulier sur la valeur de la justice.

Enfin Marx pense que  les contradictions du capitalisme peuvent porter atteinte à la nature mais il n’est pas question  de remettre en cause  la science et de la technique qui  sont en elles-mêmes porteuses de   progrès.

D’autres affirmeront par la suite que la techno science peut contribuer certes à des libérations (par exemple de maladies) mais peut être porteuse aussi d’aliénations (ainsi par exemple les recherches et les productions d’armes de destruction massive).

12-Friedrich Nietzsche (1844-1900) (Généalogie de la morale.) (Crépuscule des idoles) Contrairement par exemple à Pascal , qui croyait que la conscience nous libère de notre condition finie, Nietzsche pense que la conscience est une ruse théologique qui nous écrase. Il critique  la responsabilité morale. La société par le dressage impose le devoir, et c’est l’aptitude à répondre de soi (définition classique de la responsabilité) qui fonde la morale laquelle se traduit par l’assujettissement, on a inventé la faute pour punir.

Le « Crépuscule des idoles »  affirme que l’une des erreurs est celle du libre arbitre.

 «  Il ne nous reste aujourd’hui plus aucune espèce de compassion avec l’idée du “libre arbitre” : nous savons trop bien ce que c’est le tour de force théologique le plus mal famé qu’il y ait, pour rendre l’humanité “responsable”, à la façon des théologiens, ce qui veut dire : pour rendre l’humanité dépendante des théologiens... Je ne fais que donner ici la psychologie de cette tendance à vouloir rendre responsable.

Partout où l’on cherche des responsabilités, c’est généralement l’instinct de punir et de juger qui est à l’œuvre. On a dégagé le devenir de son innocence lorsque l’on ramène un état de fait quelconque à la volonté, à des intentions, à des actes de responsabilité : la doctrine de la volonté a été principalement inventée à fin de punir, c’est-à-dire avec l’intention de trouver coupable. Toute l’ancienne psychologie, la psychologie de la volonté n’existe que par le fait que ses inventeurs, les prêtres, chefs des communautés anciennes, voulurent se créer le droit d’infliger une peine - ou plutôt qu’ils voulurent créer ce droit pour Dieu... Les hommes ont été considérés comme “libres” pour pouvoir être jugés et punis, -pour pouvoir être coupables : par conséquent toute action devait être regardée comme voulue, l’origine de toute action comme se trouvant dans la conscience. »

La liberté repose sur l’idée de spontanéité : la conscience sous des impératifs moraux ne fait qu’étouffer cette spontanéité. 

B- Les responsabilités selon des auteurs  du XXème.

 1-Max Weber (1864-1920)  (Le savant et le politique)

« Toute activité orientée selon l’éthique peut être subordonnée à deux maximes totalement différentes et irréductiblement opposées : l’éthique de la responsabilité ou l’éthique de la conviction […]. »

Ainsi il y a une opposition entre l’attitude de celui qui agit selon l’éthique de conviction  qui veut respecter des principes  et l’attitude de celui qui agit selon l’éthique de responsabilité qui veut voir avant tout les effets de nos actes.

Ainsi le politique est un homme d’action qui se positionne à partir de ses valeurs alors que le savant veut démontrer la vérité à partir des faits scientifiquement reconnus, Ainsi d’un côté l’action, d’un autre côté la recherche,

L’éthique de conviction correspond à celui qui obéit à des valeurs sans se préoccuper de leur mise en œuvre, on évoquerait aujourd’hui par exemple des valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité.

L’éthique de responsabilité  correspond au fait de se demander comment on  doit répondre à telle ou telle situation, on se demanderait aujourd’hui par exemple créer les conditions d’une fraternité transgénérationnelle permettant en particulier aux générations futures de vivre dans un monde viable.

Si l’opposition est considérée par beaucoup comme radicale, certains par la suite évoqueront ces deux éthiques conçues comme complémentaires, on veut alors viser le respect de valeurs et les effets de leur mise en œuvre.

2-Sigmund Freud (1856-1939) (L’Avenir d’une illusion) (Malaise dans la civilisation).La découverte de l’inconscient remet en question la maitrise su sujet sur lui-même tant du point de vue de ses pensées que de ses actes. Nos désirs sont commandés par des pulsions inconscientes et involontaires. « Le moi n’est plus maitre dans sa maison. » Mais alors suis-je responsable de mes actes si je ne suis plus libre ?

L’inconscience ne peut servir de prétexte pour fuir ses responsabilités. Freud pense d’ailleurs que chacun est responsable de parvenir à un maximum de conscience, "là où le ça était, je dois advenir". Cette  conquête de la conscience sur l'inconscient devient un devoir vis-à-vis de soi-même.
A cela ajoutons deux remarques.

D’abord le code pénal limite la responsabilité des personnes atteintes par un trouble psychique. Ainsi il n'y a ni crime ni délit lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l'action.

Ensuite la position de Freud a été critiquée par différents auteurs, par exemple le psychanalyste Lacan pensait qu’en dehors des maladies mentales « De notre position de sujet nous sommes toujours responsable. » Par exemple le philosophe Alain qualifiait la position de Freud d’erreur mais aussi de faute parce qu’il pensait qu’elle débouche sur la fatalité, or l’inconscient nous laisse des choix.

3-Hannah Arendt  (1906-1975) (Rapport sur la banalité du mal) (La responsabilité collective) (Les origines du totalitarisme).Cette politologue affirme que le processus d’obéissance est fondamental dans le totalitarisme, même le haut-fonctionnaire est préoccupé d’obéir aux ordres, « je n’ai fait qu’obéir aux ordres » diront de nombreux dignitaires nazis pour leur défense.
Le procureur du Tribunal de Nuremberg répondra en disant magnifiquement et tragiquement : « Vient un moment où il faut désobéir aux ordres et obéir à sa conscience ».On est au cœur d’une des questions relatives à la responsabilité.

Comment voit-elle la responsabilité collective ?

« Il existe une responsabilité pour des choses que nous n’avons pas commises, mais dont on peut néanmoins être tenu pour responsable. Mais être ou se sentir coupable pour des choses qui se sont produites sans que nous y prenions une part active, est impossible. C’est là un point important qui mérite d’être clairement et vigoureusement souligné à un moment où tant de bons libéraux blancs avouent leurs sentiments de culpabilité face au problème noir. [...]
Chaque gouvernement assume la responsabilité des actes et des méfaits de ses prédécesseurs, et chaque nation assume la responsabilité des actes et des méfaits du passé. [...] En ce sens on nous tient toujours pour responsable des péchés de nos pères, de même que nous récoltons les lauriers dus à leur mérite, mais nous ne sommes évidemment pas coupables de leurs forfaits, ni moralement ni juridiquement, pas plus que nous ne pouvons imputer leurs actions à nos propres mérites. [...]
Nous ne pouvons échapper à cette responsabilité politique et purement collective qu’en quittant la communauté, et puisqu’aucun individu ne peut vivre sans appartenir à une communauté quelconque, cela signifierait simplement passer d’une communauté à l’autre et donc une sorte de responsabilité à une autre. [...] Cette responsabilité d’actes que nous n’avons pas commis, cette façon d’endosser les conséquences d’actes dont nous sommes entièrement innocents, est le prix à payer parce que nous ne vivons pas seuls, mais parmi d’autres hommes, et que la faculté d’agir, qui est après tout la faculté politique par excellence, ne peut s’accomplir que dans l’une des nombreuses et diverses formes de la communauté humaine. » ( La responsabilité collective  in Ontologie et Politique, édit. Tierce, 1989, pp. 175 à 184.)

4-Raymond Aron (1905-1983)  (Introduction à la philosophie de l’histoire)

Responsabilité morale, responsabilité juridique, responsabilité historique comportent une partie commune : l'établissement des causes. La différence fondamentale concerne l'ordre des causes : le moraliste vise les intentions, l'historien les actes, le juriste confronte intentions et actes, et les mesure aux concepts juridiques.

Au regard de l'historien en tant que telles la guerre et la révolution sont des faits, d'une fréquence variable selon les siècles, observés dans toutes les cultures et toutes les époques.

5-Jean-Paul Sartre (1905-1980) (l’existentialisme est un humanisme) (Situations III)

La liberté se réalise dans l'engagement qui permet la rupture, mais cet engagement n'engage pas que moi :

« L’homme sera d’abord ce qu’il aura projeté d’être (...) l’homme est responsable de ce qu’il est. Ainsi, la première démarche de l’existentialisme est de mettre tout homme en possession de ce qu’il est et de faire reposer sur lui la responsabilité totale de son existence. Et quand nous disons que l’homme est responsable de lui-même, nous ne voulons pas dire que l’homme est responsable de sa stricte individualité, mais qu’il est responsable de tous les hommes (...). « Quand nous disons que l’homme se choisit, nous entendons que chacun d’entre nous se choisit, mais par là nous voulons dire aussi qu’en se choisissant, il choisit tous les hommes. En effet, il n’est pas un de nos actes qui, en créant l’homme que nous voulons être, ne crée en même temps une image de l’homme tel que nous estimons qu’il doit être. (...) Ainsi, notre responsabilité est beaucoup plus grande que nous ne pourrions le supposer, car elle engage l’humanité toute entière. (...) Ainsi je suis responsable pour moi-même et pour tous, et je crée une certaine image de l’homme que je choisis; en me choisissant, je choisis l’homme. »

Quant à l'inconscient il sert parfois d’excuse mais il n'est pas recevable. "On ne fait pas toujours ce que l'on veut, mais on est toujours responsable de ce que l'on fait". Pour Sartre au contraire, l'inconscient sert parfois d'excuse, de l'ordre de la mauvaise foi, mais n'est jamais une excuse recevable.

Jean-Paul Sartre après 1945 écrit : « Quand nous disons que l’homme est responsable de lui-même, nous ne voulons pas dire que l’homme est responsable de sa stricte individualité, mais qu’il est responsable de tous les hommes. »(…)

« Il fallait bien qu’un jour l’humanité fût mise en possession de sa mort. »

« Cette bombe qui peut tuer cent mille hommes d’un coup et qui demain, en tuera deux millions nous met tout à coup face à nos responsabilités. A la prochaine la Terre peut sauter, cette fin absurde laisserait en suspend pour toujours les problèmes qui font depuis dix mille ans nos soucis. Ainsi au moment où finit cette guerre, la boucle est bouclée, en chacun de nous l’humanité découvre sa mort possible, assume sa vie et sa mort. »

 6-Simone de Beauvoir (1908-1986) (Le Deuxième Sexe) met en avant la responsabilité de l’écrivain engagé. Elle analyse les phénomènes de domination des hommes.

Les femmes mais aussi les hommes sont placés devant leurs responsabilités dans l’émancipation des femmes sur « les chemins de la liberté »

 7-Albert Camus (1913-1960) (L’homme révolté). « L’homme n’est pas entièrement coupable, il n’a pas commencé l’histoire ; ni tout à fait innocent puisqu’il la continue. »

La révolte qui nait à l’intérieur de l’absurde donne à l’homme la possibilité d’assumer la responsabilité de ses actes et du monde qui l’entoure. « Je me révolte donc nous  sommes . » « La vertu de l’homme est de se maintenir en face de tout ce qui le nie. »

Dans ses engagements il dénonce le totalitarisme de l’Union soviétique, la colonisation. Il dénoncera "les marchands de mort" que sont à ses yeux les fabricants d'armes.

Dans l’éditorial du journal Combat le 8 août 1945, deux jours après le lancement de la bombe atomique sur Hiroshima, il écrit (…) Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l'utilisation intelligente des conquêtes scientifiques.(…)Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la raison. "

 8-Paul Ricœur (1913-2005) (Soi-même comme un autre) (Le concept de responsabilité: Essai d'analyse sémantique). Il distingue la morale fondée sur des normes, des obligations, et l’éthique fondée sur des actions estimées bonnes. L’éthique est au centre de la vie « avec et pour l’autre », c’est « l’aveu partagé de la fragilité et finalement de la mortalité ». 

Juridiquement on doit réparer une faute ou subir une sanction à la suite d’une action, mais se développe aussi la responsabilité sans faute, la responsabilité pour autrui.Chacun serait responsable d’autres personnes dont il a la charge ou la garde en raison de leur vulnérabilité. L’homme est responsable du vulnérable, du fragile, du faible . L’éthique médicale particulièrement est liée à la sollicitude, à la spontanéité bienveillante. "L’estime de l’autre comme soi-même correspond à l’estime de soi-même comme un autre. "

9-Emmanuel Lévinas (1906-1995) (Totalité et infini) (Soi-même comme un autre). Il distingue l’éthique c'est-à-dire « ce qui est estimé bon » de la morale « qui s’impose comme obligation. »

.Il s’agit de dire « l’humain de l’homme » donc de proposer une éthique de l’éthique. Rencontrer l’autre c’est avoir une idée de l’infini La responsabilité pose la primauté d’autrui, la figure d’autrui est synonyme de fragilité, elle en appelle à ma sollicitude, elle fonde ma liberté. Dès que son visage apparait il m’oblige, cette responsabilité s’impose à moi.

L’éthique n’est pas la recherche du perfectionnement personnel mais la responsabilité à l’égard d’autrui. Autrui c’est d’abord un visage, il exige sollicitude, l’homme doit accepter d’être « le gardien de son frère. »La question essentielle est « Qu'as-tu fait de ton frère? ».La réponse doit être donnée dans le face à face et aussi dans la cité des citoyens.

Levinas emprunte aux Frères Karamazov de Dostoïevski la « devise » : « Nous sommes tous coupables de tout et de tous devant tous, et moi plus que les autres. ». « Vous connaissez , écrit-il, cette phrase de Dostoïevski : "Nous sommes tous responsables de tout devant tous et moi plus que tous les autres.". Non pas à cause de telle ou telle culpabilité effectivement mienne, à cause des fautes que j'aurais commises, mais parce que je suis responsable d'une responsabilité totale, qui répond de tous les autres et de tout chez les autres, même de leur responsabilité.»

10- Voici donc la pensée de Hans Jonas (1903-1993) ( « Le Principe responsabilité : une éthique pour la civilisation technologique ». Parution allemande en 1979, traduction française chez Flammarion, Champs, 1990 ). Et avec une traduction et une présentation de Jean Greisch , aux éditions Le Cerf, 1990.)

Voir aussi sur Hans Jonas l’article de Jean Greisch, » L’amour du monde et le principe responsabilité », dans l’ouvrage précité « La responsabilité. », Editions Autrement ,. Série Morales n°14, janvier 1994

« Le principe responsabilité » de Hans Jonas en 1979 marque la pensée environnementale, cet ouvrage contribue à fonder une "éthique pour la civilisation technologique".

Cette philosophie s’exprime en quelques idées essentielles.

  -  La civilisation technologique menace l’humanité, une éthique nouvelle doit voir le jour.

  Jean Rostand écrivait « Tous les espoirs sont permis à l’homme même celui de disparaitre ». Jonas pense que doit être détruite toute technologie qui comporte le risque de détruire l’humanité .C’est l’humanité qui est l’objet de la responsabilité.

 « Nulle éthique antérieure n’avait à prendre en considération la condition globale de la vie humaine et l’avenir lointain et l’existence de l’espèce elle-même […]. Personne n’était tenu responsable pour les effets ultérieurs non voulus de son acte bien intentionné, bien réfléchi, et bien exécuté. […] Tout cela s’est transformé de manière décisive. La technique moderne a introduit des actions d’un ordre de grandeur tellement nouveau, avec des objets tellement inédits, et des conséquences tellement inédites, que le cadre de l’éthique antérieure ne peut plus les contenir. »        

 -La peur doit pousser  à agir, la responsabilité est  le  principe vital .

Hans Jonas insiste sur la peur qui favorise la responsabilité. Non pas la peur paralysante mais celle qui pousse à agir. On mesure et on connait les risques, la peur devient alors une force.

La responsabilité est une vertu mais c’est surtout un principe. C’est le fondement d’une nouvelle conception éthique .

Le problème le plus crucial pour la civilisation technologique, c’est de savoir comment agir sans compromettre « la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre. »

 « Agis de façon que les effets de ton action ne soient pas destructeurs pour la possibilité future d’une telle vie »

-   La responsabilité nous engage vis-à-vis de tout homme, de tout lointain dans le temps et également   de l’ensemble de   l’environnement . 

La responsabilité n’intéresse plus aujourd’hui le seul prochain immédiat, mais tout prochain et même tout objet : elle embrasse « l’environnement », entendu comme la totalité de ce qui est.

On retrouve ce point commun avec d’autres philosophies qui est relatif à la fragilité, la vulnérabilité. Autrui me regarde, il m’assigne à responsabilité.

L’humanité est fragile, vulnérable, nous sommes responsables de son futur.

« Le fait que depuis peu la responsabilité s’étende au-delà jusque à l’état de la biosphère et de la survie future de l’espèce humaine, est simplement donné avec l’extension du pouvoir sur ces choses, qui est en premier lieu un pouvoir de destruction. Le pouvoir et le danger dévoilent une obligation qui, par la solidarité avec le reste, une solidarité soustraite au choix, s’étend de l’être propre à l’être en général, sans même un consentement particulier. »

Notre responsabilité est engagée vis à vie des générations passées, présentes, futures et par rapport à l’ensemble du vivant.

La philosophie de Hans Jonas est proche, globalement ou sur certains points, de celles de certains auteurs que nous allons maintenant évoquer… et réciproquement leurs pensées sont souvent proches, globalement ou sur certains points , de celle de l’auteur du « Principe responsabilité.»

11- Les responsabilités selon des auteurs contemporains qui remettent en cause le système productiviste

 Nous constatons que des philosophes, des économistes, des sociologues, des anthropologues et d’autres auteurs analysent de façon radicale le système qu’ils qualifient selon les cas de capitaliste, de néo libéral, de technoscientiste, ou de productiviste, système qui a étendu son emprise sur la Terre.

Chaque auteur le fait dans la cadre de sa pensée générale et en insistant sur tel et tel élément mais ce point commun saute aux yeux pourvu qu’on les ouvre.

  Nombreux ont été ces auteurs, parmi beaucoup d’autres : Claude Levi Strauss, Jacques Ellul, Ivan Illich, Guy Debord , Bernard Charbonneau, Edgar Morin, Herbert Marcuse, André Gorz, Cornelius Castoriadis , François Partant, René Dumont, Théodore Monod, Jean Rostand, Kostas Axelos,  Paul Virilio, Serge Latouche…

(Edgar Morin et Serge Latouche sont toujours vivants au moment où nous écrivons ces lignes, le 10 octobre 2020)

- Un choix vital face au système mondial : la détermination de limites des activités humaines

 Deux idées fortes, entre autres, sont présentes dans leurs écrits :

d’une part le système productiviste est lancé dans une course en avant autodestructrice, il faut donc être en rupture globale avec ce système,

d’autre part une croissance illimitée sur une planète limitée nous amène vers une gigantesque collision entre l’environnement et les activités humaines, il faut donc « retrouver le sens de la limite » (expression de l’introduction de l’ouvrage « Radicalité,20 penseurs vraiment critiques »collection Frankenstein,2013).

 - Les logiques autodestructrices  de la fuite en avant

Ces logiques s’appellent : la recherche effrénée du profit, la course à la marchandisation du monde, la course à la mort sous la forme de certaines productions humanicides et terricides, la croissance sacro-sainte, la vitesse facteur de répartition de richesses et de pouvoirs, la dictature du court terme, le vertige de la puissance, la compétition élevée au rang d’impératif naturel de nos sociétés, l’accélération d’un système porteur d’une crise du temps.

Et puis, à travers une explosion démographique mondiale qui continue, cette fuite en avant est aussi celle d’une machine à gagner fonctionnant comme une lame qui met d’un côté ceux et celles dont les besoins fondamentaux sont plus ou moins satisfaits et de l’autre ceux et celles, de très loin les plus nombreux, dont les besoins fondamentaux restent criants.

 - Les dénis, les mensonges et les silences accompagnant cette fuite en avant

Il n’est pas étonnant que cette fuite en avant s’accompagne de nombreux dénis personnels et collectifs de la réalité : on pense que la catastrophe ne se produira pas ou qu’on y échappera. (Jean-Pierre Dupuy, Pour un catastrophisme éclairé, Le Seuil, 2002.)

Il n’est pas étonnant non plus que cette fuite en avant s’accompagne de silences et de mensonges sur les effets, sur les causes de telle ou telle catastrophe écologique, ou même sur l’existence de certaines d’entre elles que l’on espère garder dans les secrets de la planète et qui peuvent constituer autant de bombes à retardement.

  - Pour une pédagogie de compréhension et de dénonciation des impasses

Face à cette fuite en avant doivent exister des limites nécessaires, voila donc une pédagogie des impasses.

Jacques Ellul demandait avec force : Qu’est-ce qu’une société qui ne se donne plus de limites ? (J. Ellul, Le Bluff technologique, Hachette, 1988)

Ivan Illich insistait sur le fait que la crise obligera l’homme à « choisir entre la croissance indéfinie et l’acceptation de bornes multidimensionnelles. »

Cornelius Castoriadis en appelait à nous défaire des « fantasmes de l’expansion illimitée.» ( voir C. Castoriadis, La Montée de l’insignifiance, les carrefours du labyrinthe (IV), Seuil, 1996 ;

Edgar Morin en appelle « à fédérer les voies de la réforme de l’éducation, de l’écologie, de la politique, de l’économie. Une utopie concrète à l’horizon de nos actions s’impose comme une urgence indispensable. » (La Voie.Pour l’avenir de l’humanité. Pluriel ?2016)

Voir également : André Gorz, Écologica , Galilée, 2008 ; Serge Latouche, Survivre au développement, Mille et une nuits, 2004 ; et ceux plus haut cités, tous des défricheurs de la pensée.

On peut bien sûr constater que ces auteurs à travers leurs critiques radicales du système productiviste se tournent aussi vers des alternatives. Penser et mettre en œuvre ces alternatives voilà qui se rattache à de nouvelles politiques écologiquement  socialement  démocratiquement pacifiquement  responsables.

JML

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13-Autonomie

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L’interdépendance est et doit être, tout autant que l’autonomie, l’idéal de l’homme.
Gandhi

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De nombreuses théories se sont élaborées dans le domaine de l’autonomie.

Il y a ainsi le discours psychologique : Françoise Dolto a beaucoup fait pour accréditer le
bien fondé de cette éducation précoce à l’autonomie, cela à condition que l’enfant
trouve la sécurité de la présence de ses parents au moment où il en a besoin et à
condition que les apprentissages à l’autonomie soient respectueux du degré de
développement de l’enfant tant au plan physique que psychique et intellectuel.

Il y a aussi le discours psycho-politique : Gérard Mendel pense que l’enfant est un
être colonisé par les adultes, il s’agit donc de le décoloniser. (…) La libération de
l’enfant pour une véritable autonomie est à la fois psychologique et politique : réagir
contre l’autorité affective de l’adulte et se constituer en classe d’âge qui a des
intérêts, des problèmes, des objectifs similaires. (…)

Ces théories et d’autres (…) se présentent sous la forme d’une utopie. Elles
indiquent une direction éducative, elles critiquent des pratiques de soumission
exagérée, elles cherchent à inventer des manières nouvelles d’être avec les enfants.
(…) Cette utopie de l’autonomie est une manière de rechercher des liens entre
amour et liberté dans la forme très spécifique de l’amour parental.
Albert Donval
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L’autonomie de l’individu et du groupe est bien l’une des exigences de la démocratie,
pourvu qu’ils acceptent d’entrer dans la dynamique sociale. L’individualisme, pour ne
pas être mutilant, suppose un rapport souple, si modeste soit-il, non seulement au
milieu social mais à la société dans son ensemble. L’individu autonome, dans son
engagement même, doit constamment s’informer et aiguiser son esprit critique à
l’égard des normes sociales et des valeurs éthiques qui, du dehors, pèseraient sur sa
liberté de jugement personnel.
Jacques Robin

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C’est en privilégiant les comportements de coopération que les humains élargissent
leur autonomie, et une démocratie renouvelée sera à la fois la garantie et l’arbitre de
ces solidarités.
Jacques Robin

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L’autonomie dans la pensée c’est l’interrogation illimitée.
Cornélius Castoriadis

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14-Risque

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Importance du risque


C’est dans l’incertitude et le risque qu’il faut assumer nos actes.
Simone de Beauvoir

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Ontologiquement le risque est notre statut.
Francis Jeanson

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Risque et prudence sont en perpétuelle dialectique, un homme qui se doit d’être à la
fois courageux et sensé ne peut les séparer.
Denise Brihat

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Les notables voudraient nous faire gober qu’on peut changer sans risque, autant dire
sans changement.
Jean Cardonnel

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La plupart des hommes ont un moment dans leur vie où ils peuvent faire de grandes
choses, c’est celui où rien ne leur semble impossible.
Stendhal

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Une âme morte est une âme complètement habituée.
Miguel de Unamuno

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Dans les chemins que nul n’a foulés risque tes pas…
Murs de mai 1968

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Faire un pas de plus vers l’autre, prendre le risque de cheminer longtemps pour que
la paix advienne. « Si quelqu’un te force à faire mille pas, fais en deux mille avec
lui ».
André Laudouze

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Le monde ne vaut que par les ultras et ne dure que par les modérés.
Paul Valéry

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Là où croit le risque grandit aussi ce qui sauve.
Friedrich Hölderlin

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Le bonheur qui ne rend pas heureux, qui exclut le risque, ce n’est pas le bonheur.
Pimentez-le donc de contradictions, de conflits, de luttes pour qu’il dilate, ouvre.
Alors il est béatitude.
Jean Cardonnel

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Lâchez tout
Lâchez votre femme, votre maîtresse
Lâchez vos espérances et vos craintes
Semez vos enfants au coin d’un bois
Lâchez la proie pour l’ombre
Lâchez au besoin une vie aisée
Ce qu’on vous donne pour une situation d’avenir
Partez sur les routes.
André Breton

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Qui vit sans folie n’est pas si sage qu’il croit.
François de la Rochefoucauld

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Se lever !
La lutte elle-même vers les sommets
Suffit à remplir un cœur d’homme
Il faut imaginer Sisyphe heureux
Albert Camus

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Réveillez-vous il y a des terres en friches !
Réveillez-vous il y a votre visage à irriguer.
Jacques Bertin

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Au lieu de se demander « qu’est-ce que je risque si j’y vais ? » pourquoi ne pas nous
demander ici et là : » si je n’y vais pas qu’est-ce qu’il(s) risque(nt) ? »
JML

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(…) Les autres peuvent bien être sages vous m’avez dit qu’il fallait être fou.
D’autres croient à l’ordre, vous m’avez dit de croire à l’amour.
D’autres pensent qu’il faut conserver, vous m’avez dit de donner.
D’autres s’installent vous m’avez dit de marcher et finalement de risquer ma vie,
Seigneur, en comptant sur votre amour.
P. Joly

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Il y a des tas de gens qu’on a formés à l’unique principe de n’être jamais là où
s’échangent des coups.
Se tenir hors du coup signifie que… je n’ai pas lieu. Me maintenir hors des coups
c’est être hors du coup. Intervenir veut dire aller parmi les autres, au milieu des
conflits. Mais nous retrouvons l’interrogation viscérale qui nous revient au bout du
gouffre où nous entraîne l’amour fou des autres, le goût terrible de solidarité
mondiale : que va-t-il m’arriver à moi ?
Me voilà retourné comme une crêpe par cette question : si je ne m’y risque pas là où
çà chauffe que va-t-il lui arriver à lui ?
Jean Cardonnel

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De l’audace encore de l’audace et toujours de l’audace !
Danton

(…)Audace pour un idéal : oui, mais à travers des moyens démocratiques,
pacifiques, durables, équitables.
JML

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Je ne connais rien ni personne qui ne soit menacé de rangement. J’adore déranger.
Qui vient au monde pour ne rien troubler n’a aucun danger… de venir au monde. Je
reste où les autres m’ont mis avec l’impardonnable complicité de mon goût de ne pas
bouger. Déranger fait toujours venir au monde.
Jean Cardonnel
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Pourquoi la lampe s’est-elle éteinte ?
Je l’entourai de mon manteau pour la mettre à l’abri du vent.
Pourquoi la fleur s’est-elle fanée ?
Je la pressai contre mon coeur avec inquiétude et amour.
Pourquoi la rivière s’est-elle tarie ?
Je mis une digue en travers d’elle afin qu’elle me servit à moi seul.
Rabindranath Tagore

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Ne pas être un tiède.
Péguy

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S’endormir maintenant
Et se réveiller dans cent ans
Mon bien-aimé…
Non, je ne suis pas un déserteur
Du reste mon siècle ne me fait pas peur
Mon siècle misérable, scandaleux
Mon siècle courageux, grand
Et héroïque.
Je n’ai jamais regretté d’être venu
Trop tôt au monde
Je suis du vingtième siècle
Il me suffit d’être là où je suis
Parmi les nôtres
Et de me battre pour un monde
Nouveau.
Nazim Hikmet

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Se réveiller c’est se mettre à la recherche du monde.
Alain

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15-Fidélité
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Il n’est de fidélité sans échange. La fidélité suppose deux termes, deux individus, ou
un individu et une société, une invitation. Sur l’île déserte, pas de fidélité.
Ce pacte dont les règles changent selon les époques, les lieux et les domaines, est
constitutif de l’organisation humaine et sociale. Une ligne brisée, un parcours à
obstacles. Il faut avancer, combattre, vaincre et revenir. Mais ce parcours suppose
un but à atteindre ; pas de fidélité, que ce soit dans un couple, une croyance, une
vocation, sans horizon, sans mémoire.
L’espion, l’amant, le croyant, le traducteur, l’exilé se trouvent confrontés aux même
questions : comment conjuguer la fidélité à soi-même et aux autres ?
Pour être fidèle, combien de trahisons ?
Cécile Wajsbrot

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Le fanatique, lui n’est déjà plus dans la question de la fidélité, il est dans le
comblement – initial ou final – du manque. Il a résolu la question en la supprimant ;
car la fidélité suppose l’expérience toujours ouverte de la faillite et du manque.
Daniel Sibony

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La fidélité dans la sottise est une sottise de plus.
 Vladimir Jankélévitch
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La fidélité est-elle ou n’est-elle pas louable ? C’est « selon », autrement dit : cela
dépend des valeurs auxquelles on est fidèle.
Fidèle à quoi ?…Personne ne dira que le ressentiment soit une vertu, bien qu’il reste
fidèle à sa haine ou à ses colères : la bonne mémoire de l’affront est une mauvaise
fidélité. S’agissant de fidélité, l’épithète n’est-elle pas tout ? Et il y a encore une
fidélité aux petites choses qui est mesquinerie et tenace mémoire des vétilles,
rabâchage et entêtement…
La vertu que nous voulons n’est donc pas toute fidélité, mais seulement bonne
fidélité et grande fidélité.
Vladimir Jankélévitch

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16-Courage

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Solitude


La solitude est à l’esprit ce que la diète est au corps, mortelle lorsqu’elle est trop
longue, quoique nécessaire.
Vauvenargues

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Dans la solitude il faut agir comme si on était vu du monde entier et quand on est vu
du monde entier agir comme si on était seul.
Louis Lavelle

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Comment notre condition ne serait-elle pas difficile ? Il est clair que la solitude n’est
pas une chose qu’il nous est loisible de prendre ou de laisser. Nous sommes
solitude. Nous pouvons, il est vrai, nous donner le change et faire comme si cela
n’était pas. Mais c’est tout. (…) Nous devons accepter notre existence aussi
complètement qu’il est possible. Le seul courage qui nous est demandé est de faire
face à l’étrange, au merveilleux, à l’inexplicable que nous rencontrons.
Rainer Maria Rilke

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Les mots ne pèsent rien, surtout ceux qu’on prononce au hasard, sans même s’en
rendre compte, pour combler l’absence, tisser un lien superflu entre les êtres
qu’accablent une lassitude lourde, une torpeur peut-être entrecoupée de visions
fugitives, de musiques anciennes…
François Thibaux

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La solitude est une : elle est par essence grande et lourde à porter. (…) Une seule
chose est nécessaire : aller en soi-même et ne rencontrer durant des heures
personne, c’est à cela qu’il faut parvenir.
Rainer Maria Rilke

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Un seul être vous manque et tout est dépeuplé.
Lamartine

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Solitude, solitude… Je ne vis pas comme ils vivent, je ne crois pas comme ils croient,
je n’aime pas comme ils aiment, mais je mourrai comme ils meurent…
Marguerite Yourcenar

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L’oiseau apprivoisé était dans une cage ; l’oiseau sauvage était dans la forêt.
Le sort les fit se rencontrer. L’oiseau sauvage crie : Oh ! Mon amour, volons vers les
bois.
L’oiseau apprivoisé murmure : viens ici, vivons ensemble dans la cage.
Parmi ces barreaux y aurait-il place pour étendre mes ailes ? dit le libre oiseau.
Hélas ! s’écrie le prisonnier, je ne saurais où me poser dans le ciel.
Tagore

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Mes larmes coulent sur la terre meurtrie
Mon âme a faim,
Faim d’amour, faim d’amitié, faim de présence.
Comment boucher le trou de mon cœur ?
Mes larmes ne me servent plus, comment pleurer ?
Mon cœur ne bat plus, comment pourrai-je partager
Mon amour avec toutes ces roses des champs ?
Je suis envahi de vide, que me manque-t-il ?
Un brin d’amour, un brin de présence,
Alors mon cœur battra, mes larmes sécheront.
Votre amour est mon air.
Comment pourrai-je vivre sans air ?
J’ai besoin de vous.
Etienne. (« Je t’écris pour la vie » texte à Oradour-sur-Glane)

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Souffrances


Faire souffrir est la seule façon de se tromper.
Albert Camus
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La souffrance n’est qu’un espoir malmené, qu’en pensez-vous ?
Julien Galland

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Les maux désespérés ne sont guéris que par de désespérés remèdes ou pas du
tout.
Shakespeare

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Poète : c’est ainsi que font les grands poètes !
Ils laissent s’égayer ceux qui vivent un temps,
Mais les festins humains qu’ils servent à leur fête
Ressemblent, la plupart, à ceux des pélicans ;
Quand ils parlent, ainsi, d’espérance trompée
De tristesse et d’oubli, d’amour et de malheur,
Ce n’est pas un concert à dilater le coeur.
Leurs déclamations sont… comme des épées :
Elles tracent dans l’air un cercle éblouissant
Mais il y pend, toujours, quelque goutte de sang.
Alfred de Musset

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Devant toute souffrance humaine, selon que tu le penses, emploie toi non seulement
à la soulager sans retard mais encore à détruire ses causes. Emploie toi non
seulement à détruire ses causes mais encore à la soulager sans retard. Nul n’est
sérieusement ni bon ni juste ni vrai, tant qu’il n’est résolu selon ses moyens, à se
consacrer d’un cœur égal à l’une comme à l’autre de ces deux tâches.
Elles ne peuvent se séparer sans se renier.
Compagnons d’Emmaus

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Les poètes descendent dans la rue car ils souffrent un peu plus que les autres.
Charles Trenet

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Un feu qui brûle en éteint un autre; une douleur est amoindrie par la vivacité d’une
autre douleur.

 Shakespeare

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(…) La souffrance des hommes est unique. Nul ne peut en parler pour son voisin. La
souffrance fait de chaque homme une île. Lorsque l’on voit souffrir un être aimé, le
plus poignant est de constater sa propre impuissance à pressentir ce qu’il éprouve, à
pénétrer dans l’horrible peine qui l’étreint. L’amour permet de partager la joie, mais
celui qui souffre devient un étranger, emmuré dans sa douleur dont il ne peut
communiquer l’épreuve à personne.(…)
Jean- Robert Armogathe

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A l’heure si sombre encore de la civilisation où nous sommes le misérable s’appelle
l’homme : il gémit sous tous les climats, il agonise dans toutes les langues.
Victor Hugo

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Il pleure dans mon cœur
Comme il pleut sur la ville.
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon cœur ?
Verlaine

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Comme l’homme est dur malgré ses cris de pitié, comme la douleur des autres lui
semble légère, quand la sienne n’y est pas mêlée !
Roland Dorgelès
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Eveiller en nous la capacité de colère, mais les colères de l’amour pour soulager les
souffrances et en détruire les causes.
Abbé Pierre

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Ce qu’il y a de plus vivant dans l’univers c’est la souffrance, puisqu’elle est ce qui
résiste le plus à imaginer son terme.
Jean Rostand

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La pire souffrance est dans la solitude qui l’accompagne.
André Malraux

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La douleur est le poison de la beauté.
Shakespeare

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Nous souffrons tous d’une intraitable mélancolie.
Ernst Jünger

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La mélancolie sociale.
Raoul  Vaneigem

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Elle n’était jamais née réellement. Voilà ce qu’elle avait.
Samuel Beckett

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Je peux croire que tout n’est qu’illusion, vide. Cependant je n’arrive pas à me
convaincre que la douleur n’est pas.
Eugène Ionesco

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J’habite une blessure sacrée.
J’habite des ancêtres imaginaires.
J’habite un vouloir obscur.
Aimé Césaire

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On fait le délicat dans les jours de bonheur.
Eschyle
Quand séchera la rivière de mon enfance,
il ne restera que la souffrance.
Quand la sécheresse touchera les ruisseaux
Limpides
de mon être,
Mon âme perdra sa force.
Je partirai alors vers de lointains pâturages,
Là où la haine n’a pas d’abri où reposer.
Là-bas je dresserai une tente, tout près de la
Forêt.
Chaque après-midi je me coucherai dans l’herbe.
Et dans le silence des jours, pure vérité de mon
Angoisse
La plus profonde,
Aux jours de printemps, je cueillerai des fleurs
Pour mon jardin de nostalgie.
J’examinerai ainsi la souvenance
D’un sombre passé.
Tito de Alencar
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Rien n’est jamais acquis à l’homme ni sa force
Ni sa faiblesse, ni son cœur, et quand il croit
Ouvrir ses bras son ombre est celle d’une croix,
Et quand il croit serrer son bonheur il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce
Il n’y a pas d’amour heureux.
Louis Aragon

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Nos tristesses, par bonheur, se portent quelquefois ombrage.
Jean Rostand

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Courage et souffrances

Le chemin de la joie ne passe pas à côté de la souffrance.
Karl Barth

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A raconter ses maux, souvent on les soulage.
Pierre Corneille

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La parole supplée à l’insuffisance des remèdes et guérit la plupart de nos maux.
Cioran

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Parler de taureaux n’est pas la même chose que d’être dans l’arène.
Proverbe espagnol

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La douleur est une plaie par où l’homme se vide de la terre pour faire entrer en lui le
ciel ou l’enfer.
Gustave Thibon

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Ceux qui sèment dans les larmes moissonneront dans la joie.
Psaume

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Quand le mal a toutes les audaces le bien doit avoir tous les courages.
Beaumarchais

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C’est notre défi à tous : affronter en même temps la souffrance du monde et son
immédiate banalisation. Comme l’image est étrange! A la fois elle nous réveille et elle
nous endort. La refuser serait tomber dans l’illusion d’une authenticité absolue rêvant
de passer outre aux nécessaires médiations ; s’y abandonner, prendre des reflets
pour la réalité même serait trahir l’incarnation.
Michel Crépu

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Rieux se dressa d’un coup. Il regardait Paneloux avec toute la force et la passion
dont il était capable et secouait la tête.
« Non, mon père, dit-il. Je me fais une autre idée de l’amour. Et je refuserai jusqu’à la
mort d’aimer cette création où des enfants sont torturés. »
Camus

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Le chrétien croit que ce Dieu inaccessible, incompréhensible, hors de nos sens et de
nos imaginations, a pris corps humain, qu’il a sué de peur et d’angoisse, qu’il est
mort pendu à un gibet.
Il croit que tous les persécutés, tous les affamés, les pestiférés se dressent avec ce
Mort-là dans un même matin de gloire.
Michel de Castillo

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Le vent se lève, il faut tenter de vivre.
Paul Valéry

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Chaque religion a sa manière de comprendre le sens et le but de la souffrance
humaine, toutes proposent des stratégies de réponse fondées sur des convictions
profondément enfouies.
Dans le bouddhisme et le modèle hindou la souffrance est le résultat de nos actions
négatives passées et elle catalyse la quête de la libération spirituelle. Dans la
tradition judéo-chrétienne l’univers a été créé par un Dieu juste et bon et, même si
les voies du Seigneur semblent mystérieuses et impénétrables, la foi et la confiance
dans le plan divin permettent de mieux tolérer la souffrance (…)
Dans cette quête de sens, la tradition religieuse peut certes offrir un secours valable,
mais ceux qui ne souscrivent à aucune vision religieuse du monde peuvent aussi, sur
la foi d’une réflexion attentive, trouver signification et valeur à leur souffrance. Malgré
la répugnance universelle qu’elle inspire notre souffrance peut fortifier et approfondir
une expérience de la vie. Martin Luther King disait : « ce qui ne me détruit pas me
rend plus fort ». S’il est naturel de reculer devant la souffrance elle peut aussi nous
mettre au défi et parfois faire ressortir le meilleur de nous-mêmes (…) Souffrir peut
aguerrir et renforcer. Ou encore, à l’inverse, la valeur de la souffrance peut être
d’adoucir, de rendre plus sensible, plus délicat. La vulnérabilité que l’on éprouve
alors peut favoriser l’ouverture vers les autres et approfondir la relation avec les
autres. C’est ainsi que le poète William Wordsworth a pu écrire : « une détresse
profonde a humanisé mon âme ».
Howard  Cutler

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La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil
René Char

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C’est par l’épreuve que nous apprenons.
Eschyle

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Rien n’est meilleur pour sécher ses larmes que de regarder une étoile.
Entendu

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Un seul remède si l’on peut en user : aimer plus fort que l’on ne souffre.
Jean Rostand

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Courage : succès et échecs


Que l’échec soit notre professeur, pas notre censeur !
Ariane Mnouchkine

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(…) Si tu peux rencontrer triomphe après défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front (…)
Tu seras un homme, mon fils.
Rudyard  Kipling

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Il est peu et de réussites faciles et d’échecs définitifs.
Marcel Proust

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Quel homme vécut jamais une réussite achevée ?
Charles de Gaulle

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Toute réussite déguise une abdication
Simone de Beauvoir

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Tu as vécu sans rencontrer l’adversité ? Personne ne saura ce dont tu étais capable
! Toi-même tu n’en sauras rien. L’épreuve est nécessaire à la connaissance de soi.
C’est l’expérience qui nous fait prendre la mesure de nos propres forces. L’homme
de bien ne doit craindre ni la souffrance ni la peine. Il ne doit pas se plaindre de sa
destinée et, quoi qu’il advienne, il en prendra son parti et tournera toute aventure à
son avantage. Ce qui compte ce n’est pas ce qu’on endure c’est la manière de
l’endurer.
Sénèque

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Pour bien juger du courage d’un homme il faut savoir où sont ses craintes.
Jean Rostand

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Une fois pour toutes tu ne dois pas t’inquiéter de tes succès et de tes échecs. Ton
devoir est de travailler chaque jour tranquillement, d’accepter les échecs qui sont
inévitables et de laisser aux autres le soin de compter les applaudissements.
Tchekhov
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Le sentiment de notre propre échec est le commencement de l’unique succès
possible. Où donc est le succès des satisfaits? Ce sont eux les grands ratés et de là
vient leur obsession du succès.
Jean Sales

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De la distraction au suicide il y a cent moyens de fuir une épreuve.
Le Senne

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J’ignore ce que peut-être l’échec pour une abeille. Je sais que pour un homme c’est
de ne point parvenir à s’humaniser en se rendant communicable aux autres hommes.
Francis Jeanson

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C’est un grand réconfort, Seigneur
Que de savoir
Que tu ne demandes pas le succès
Que tu n’exiges pas la réussite…
Mais ce que tu exiges
C’est de ne pas nous épargner,
De nous donner au maximum
Sans autosuffisance,
Sans vanité,
Sans orgueil. (…)
Helder Camara

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Au fond le plus grand signe d’échec véritable est l’obsession du succès c’est à dire la
recherche perpétuelle d’une compensation au sentiment intime d’avoir manqué sa
vie. Si on ne se laisse pas obséder par le succès on s’aperçoit soudain qu’on avait
visé l’accidentel et négligé l’essentiel. Quand on l’a compris au lieu de compenser le
doute de soi-même par la quête obsessionnelle de triomphes toujours insuffisants on
pratique le « refus de parvenir » et l’on s’efforce d’atteindre, par delà tous les
triomphes, à la véritable réussite de soi.
Emmanuel Mounier

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Frappe frappe à la racine cet égoïsme dans mon coeur
Donne moi la force de supporter légèrement mes chagrins et mes joies
Donne moi la force de rendre mon amour abondant en services
Donne moi la force de ne jamais désavouer le pauvre
Ni plier le genou devant le pouvoir injuste…
Tagore

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Le retour à soi se moque des victoires du paraître.
Raoul Vaneigem

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Ou bien l’on passe son temps à réussir ou bien on passe son temps à faire ce que
l’on a à faire.
Jacques Ellul

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Courage dans les tempêtes

Au plus fort de l’orage il y a toujours un oiseau pour nous rassurer. C’est l’oiseau
inconnu. Il chante avant de s’envoler.
René Char

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Seul, battu des flots qui toujours se reforment
Il s’en va dans l’abîme, il s’en va dans la nuit
Dur labeur, tout est noir rien ne luit.
Victor Hugo

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Quand sur la route, mon frère, tu trébuches sur la pierre
qui devient en grossissant une montagne et que tu t’arrêtes épuisé…, cherche,
cherche bien : il existe un sentier. Quand tu l’as trouvé et que malgré le danger, tu as
pu franchir la montagne, tu peux te retourner, mon frère, regarde derrière toi : la
montagne est devenue une pierre.
Revue Emmaus

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Au plus fort de mes tempêtes
Lorsque le ciel est au plus bas
Et les vents désorientés,
Il m’arrive de crier:
« Qu’est-ce que tu fais ?…
Tu vois bien que je suis
En train de mourir ! »
Il m’arrive même de penser
Que tu dors,
Que tu m’as oublié.
Et quand ma vie menace de chavirer,
Là, je t’entends me chuchoter:
« Pourquoi avoir peur ? »
La tempête est toujours là,
Mais je sais,
Au fond de moi,
Que jamais je ne sombrerai.
Eric Julien

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 Le chat et le puits. Un fermier voulait condamner son puits. Son chat étant tombé dedans, il décide aussi de s’en débarrasser.

Avec son voisin ils commencent à boucher le puits, le chat miaule à chaque pelletée de terre puis il se tait.

Les deux hommes se penchent et voient que le chat se secouait à chaque pelletée, arrivant assez haut il bondit et partit cahin-caha.

Ainsi dans nos vies des évènements peuvent nous « tomber sur le dos », le courage nous attend.

 Conte anonyme entendu à la radio  et reconstitué, voir aussi Internet.

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Un homme qui traversait un champ se trouve nez à nez avec un tigre. Il s’enfuit, le
tigre à ses basques. Arrivé au bord d’une falaise il s’accroche à une liane et se
balance. Le tigre le flairait d’en haut. Terrorisé l’homme baissa les yeux : tout en bas
un autre tigre attendait. Deux souris se mirent à ronger la liane. L’homme aperçut
une framboise. Se tenant d’une main à la liane il cueillit la framboise de l’autre.
Qu’elle était succulente !
Parole Zen

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L’homme oriente sa voile, appuie sur le gouvernail, avançant contre le vent par la
force même du vent.
Alain

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Vous allez voir combien nous sommes et comptons.
Vous allez voir combien nous sommes et serons.
Nous sommes l’argent pur de la planète,
Le véritable minerai de l’homme.
Nous incarnons la mer qui ne cesse jamais,
Le rempart de l’espoir.
Une minute d’ombre ne nous rend point aveugles
Et aucune agonie ne nous fera mourir.
Pablo Neruda

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Au soir de sa vie il se retourna et sur le sable derrière lui il vit les traces des pas de
deux personnes côte à côte. Mais de temps à autre il y avait les pas d’une seule
personne. Il se dit: j’étais seul, personne n’était là pour m’aider. Il s’approcha du
sable et vit que les pas étaient uniques mais plus profonds. Il entendit en son cœur
une voix qui lui dit: « Tu te croyais seul mais je te portais sur mon dos ». Il pleura
d’émotion et de reconnaissance.
Histoire venant peut-être du Brésil, entendue et reconstituée par l’auteur du blog

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Comment oublier ces mythes antiques que l’on trouve au début de l’histoire de tous
les peuples : les mythes de ces dragons qui à la minute suprême se changent en
princesses ? Tous les dragons de notre vie sont peut-être des princesses qui
attendent de nous voir beaux et courageux. Toutes les choses terrifiantes ne sont
peut-être que des choses sans secours qui attendent que nous les secourions.
Rainer Maria Rilke
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Nous n’appartenons à personne sinon au point d’or de cette lampe inconnue de
nous, inaccessible à nous qui tient éveillés le courage et le silence.
René Char

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La nuit n’est jamais complète
Il y a toujours, puisque je le dis,
Puisque je l’affirme,
Au bout du chagrin une fenêtre ouverte
Une fenêtre éclairée,
Il y a toujours un rêve qui veille,
Désir à combler, faim à satisfaire,
Un cœur généreux,
Une main tendue, une main ouverte,
Des yeux attentifs,
Une vie, la vie à se partager.
Paul Eluard

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Accueillez avec confiance vos grandes tristesses,
Ces aubes nouvelles où l’inconnu nous visite.
Rainer Maria Rilke

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Mes frères
Les malades
Nous guérirons.
Les souffrances et les tourments vont s’apaiser.
Le calme va venir ainsi qu’un soir d’été
Doux et tiède au travers
Des branchages lourds et verts.
Nazim Hikmet

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Le brin de paille se figure que c’est contre lui que la mer s’agite.
Proverbe Persan

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Son cœur était une goutte d’eau de lumière qui se battait avec le flot et remontait,
obstinément, à contre-courant, le fleuve vagabond de la nuit.
Nikos Kazantzaki

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Courage : formules courtes


Il faut commencer par le commencement.
Et le commencement de tout est le courage.
Vladimir Jankélévitch

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Il est bon de suivre sa pente pourvu que ce soit en montant.
André Gide

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Le vent n’abat que les dos ronds et les poitrines creuses.
Texte perdu dans la mémoire d’écolier de l’auteur du blog

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La vertu est le courage du bien.
Le Senne

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Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve.
Friedrich Hölderin

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C’est la nuit qu’il est beau de croire à la lumière!
Edmond Rostand
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Courage : philosophie, organisation du courage


Il ne faut pas de courage pour naître ni pour être.
Il en faut parfois pour continuer d’être, ou pour cesser d’être.
Commencer de résister ne va pas de soi. Résister c’est agir « au risque de » ou
« malgré », malgré la peur, l’inertie le désir peut-être, l’obéissance parfois. Face à la
menace, au danger ou aux faits eux-mêmes : la mort d’un proche, sa propre mort, la
maladie, la barbarie…, il faut se tenir, entreprendre des ruptures, renouveler des
contacts, pour ne pas se « lâcher ».
De la nature exacte de l’épreuve à surmonter, naît la qualité propre du courage : ce
qu’il est, son contenu, son sens… « En connaissance de causes ». Car la lutte est
une chose, son sens en est une autre, et l’on peut vite se laisser captiver par
l’esthétique du courage, ébloui au point parfois d’oublier que le beau n’est pas le
bien.
Oser déplaire, s’extirper de la grégaire complicité des rumeurs, des idées reçues,
refuser les mimétismes, car le courage s’oppose au dogme.
Pierre-Michel Klein

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Le courage est une chose qui s’organise, qui vit et qui meurt, qu’il faut entretenir
comme les fusils.
André Malraux

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Plains toi mais pas trop quand ta force s’amenuise
Tombe mais relève toi aussitôt,
Pleure un peu mais n’oublie pas de rire.
Heinrich Lhotzky

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Le grand courage c’est encore de tenir les yeux ouverts sur la lumière comme sur la
mort. Au reste, comment dire le lien qui mène de cet amour dévorant de la vie à ce
désespoir secret… Ce qui compte c’est d’être vrai et alors tout s’y inscrit, l’humanité
et la simplicité.
Albert Camus

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Avoir la force d’accepter avec sérénité les choses qui ne peuvent changer. Avoir le
courage de changer les choses qui doivent être changées. Et par dessus tout avoir la
sagesse de discerner les unes des autres !
Sénèque
Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir,
Si tu peux être amant sans être fou d’amour,
Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre
Et, te sentant haï, sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre,
Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les Rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frères,
Sans qu’aucun d’eux soit tout pour toi,
Si tu sais méditer, observer et connaître,
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser, sans n’être qu’un penseur,
Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu peux être bon, si tu sais être sage,
Sans être moral ni pédant,
Si tu peux rencontrer triomphe après défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,
Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut bien mieux que les Rois et la Gloire,
Tu seras un Homme, mon Fils.
Rudyard Kipling
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A cet instant subtil où l’homme se retourne sur sa vie, Sisyphe, revenant vers son
rocher, contemple cette suite d’actions sans liens qui devient son destin, créé par lui,
uni sous le regard de sa mémoire et bientôt scellé par sa mort. Ainsi, persuadé de
l’origine tout humaine de tout ce qui est humain, aveugle qui désire voir et qui sait
que la nuit n’a pas de fin, il est toujours en marche. Le rocher roule encore. Je laisse
Sisyphe au bas de la montagne ! On retrouve toujours son fardeau. Mais Sisyphe
enseigne la fidélité supérieure qui nie les dieux et soulève les rochers. Lui aussi juge
que tout est bien. Cet univers désormais sans maître ne lui paraît ni stérile ni futile.
Chacun des grains de cette pierre, chaque éclat minéral de cette montagne pleine de
nuit, à lui seul forme un monde. La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir
un cœur d’homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux.
Albert Camus

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La façon dont on se tire des combats et des épreuves de la vie définit la valeur d’un
homme.
Malwida  von  Meysenbug

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Il y a deux façons de se sortir des situations difficiles : les changer ou bien changer la
façon de les voir. Or changer de regard sur les choses est une source d’expérience
et de sagesse.
Paul Wilson

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On ne comprendra pas notre idéal ? Qu’importe !
Les quolibets pleuvront, lâches et dénigrants ?
Courage amis ! La lutte n’est jamais trop forte,
Le rêve n’est jamais trop grand !
Car la plus douce et la plus noble récompense
Lorsqu’à se battre un contre cent on s’est usé,
C’est de relire au fond de notre coeur brisé
Ces mots qu’en lettres d’or grava la conscience:
« Je ne t’ai jamais méprisé ».
Raoul Follereau

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Donne-nous seigneur, la force d’accepter avec sérénité les choses qui ne peuvent
changer. Donne-nous le courage de changer les choses qui doivent être changées.
Et donne-nous par dessus tout la sagesse de discerner les unes des autres !
Prière

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Quand le mal a toutes les audaces
le bien doit avoir tous les courages.
Beaumarchais

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Le vrai courageux n’attend pas des situations hors du commun pour manifester son
courage. Le « courage de tous les jours » est son régime de vie.
François Vaillant

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Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Noires comme un puits où l’on se noie,
Je rends grâce aux dieux quels qu’ils soient,
Pour mon âme invincible et fière, ( …)
Aussi étroit soit le chemin,
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maitre de mon destin
Je suis le maitre de mon âme

Poème de William Ernest  Henley,

dit souvent dans sa prison par Nelson Mandela

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Ne pas céder face à la pluie
Ne pas céder face au vent
Ne pas céder non plus face à la neige ou à la chaleur de l’été
Avec un corps solide
Sans avidité
Sans perdre son tempérament
Cultivant une joie tranquille
Chaque jour quatre bols de riz complet
Du miso et un peu de légumes à manger
Dans toutes les choses
Sans y mettre ses émotions
Voir, écouter et comprendre
Et sans oublier
Dans l’ombre des bois de pin des champs
Vivre dans une cabane au toit de chaume
S’il y a un enfant malade à l’Est
Y aller et le veiller
S’il y a une mère fatiguée à l’Ouest
Y aller et porter sa gerbe de riz
S’il y a quelqu’un proche de la mort au Sud
Y aller et lui dire qu’il n’y a pas besoin d’être effrayé
S’il y a une dispute ou un litige au Nord
Leur dire de ne pas perdre leur temps en actes inutiles
En cas de sécheresse, verser ses larmes de sympathie
Lors d’un été froid, errer bouleversé
Appelé un bon à rien par tout le monde
Sans être complimenté
Ni rendu responsable
Une telle personne
Je voudrais devenir
Kenji Miyazawa

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Le courage c’est de ne pas laisser aux mains de la force la solution des conflits que la raison
peut résoudre.
Le courage, courage de toutes les heures, c’est de supporter sans fléchir les épreuves de tout
ordre, physiques et morales, que prodigue la vie.
Le courage c’est de ne pas livrer sa volonté au hasard des impressions ou des forces, c’est de
garder dans les lassitudes inévitables l’habitude du travail et de l’action.
Le courage, dans le désordre infini de la vie qui nous sollicite de toutes parts, c’est de choisir
un métier et de le bien faire.
Le courage c’est d’être tout ensemble et quel que soit le métier un praticien et un philosophe.
Le courage c’est de comprendre sa propre vie, de la préciser, de l’approfondir, de la
coordonner cependant à la vie générale.
Le courage c’est de dominer ses propres fautes, d’en souffrir mais de n’en plus être accablé et
de continuer son chemin.
Le courage c’est d’aimer la vie et de regarder la mort d’un regard tranquille, c’est d’aller à
l’idéal et de comprendre le réel, c’est d’agir et de se donner aux grandes causes sans savoir
quelle récompense réserve à notre effort l’univers profond, ni s’il lui réserve une récompense.
Jean Jaurès

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.