Agrandissement : Illustration 1
Et voilà donc que l'on n'aurait plus le droit de manifester ! Après avoir, d'une façon éhontée, minimisé à l'extrême l'ampleur de la manifestation de mardi 14 juin, voilà que la tête de l’État veut maintenant nous interdire de manifester ! A nous, les français ! Pas de chance, malgré les coupes sombres opérées dans les programmes d'histoire, le « Ah, ça ira, ça ira... » reste encore dans de nombreuses cervelles. Et si, en France, tout finit par des chansons, parfois, c'est aussi par elles que ça commence.
Et je pense ne pas être la seule à être profondément scandalisée de ce projet de l’exécutif de nous interdire d'exprimer collectivement notre mécontentement.
En plus, je trouve que c'est tellement bête ! Nos dirigeants semblent penser que gouverner c'est manipuler l'opinion par de la propagande, pour faire le contraire de ce pourquoi on a été élu, et le contraire de ce que l'on dit. Et si l'opinion se rebiffe, on menace...
Ainsi, l'action législative actuelle tend à changer les lois pour servir les patrons, les grands groupes internationaux et la finance (en d'autres temps, on aurait dit le Capital) en prétendant que c'est dans l'intérêt des citoyens. Or gouverner c'est toujours chercher un équilibre entre des forces contraires, ce n'est pas aller toujours dans le même sens sans tenir compte d'une partie (et pas la moindre...) de la population tout en faisant taire cette dernière par tous les moyens de la communication politique. On ne peut pas prendre des décisions pour les 1% tout en parvenant à faire croire aux 99% que l'on sert leurs intérêts. En tout cas, ce mensonge inqualifiable aurait pu durer un peu. Mais pas longtemps, et surtout pas avec l'ampleur qu'il revêt désormais.
Maintenant, c'est fait, plus grand-monde n'est dupe. Et quand on est sorti de la manipulation ou de l'emprise, on n'y revient pas. On est même, souvent, plutôt fâché de s'être laissé avoir... Le peuple exprime son opposition d'autant plus fortement qu'il a ouvert les yeux : prétendre que faciliter le licenciement endigue le chômage est une jolie formule, mais c'est une contre-vérité qu'un chômeur potentiel ne peut plus avaler. En revanche, ceux qui ont l'habitude de manipuler l'opinion d'autrui, n'imaginent pas que ce type de pouvoir a une limite. Ils l'apprennent souvent, tard, à leurs dépends.
Pourtant, à force d'ignorer la voix du peuple, n'ont-ils pas peur, ces gens-là, que celui-ci ne se mette à hurler ? Il faut du temps pour réveiller le courroux populaire. Mais celui-ci fonctionne comme une avalanche : quand c'est parti, cela ne s'arrête pas. Nos apprentis sorciers feraient bien de réaliser que le refus de la loi contre le travail se maintient malgré le tournoi de foot. C'est un élément important à prendre en compte, qui traduit bien qu'il ne s'agit pas d'une « humeur » passagère d'un peuple de râleurs, mais du signe que le gouvernement est allé trop loin. D'ailleurs, les sondages traduisent bien cette défiance fondamentale des citoyens pour l'équipe dirigeante.
Peut-être même qu'elles pourraient, enfin, nos « élites » se demander si le peuple n'a pas raison, et si notre pays, au cas où rentrerait dans le corpus législatif ce si évident recul des acquis sociaux, pourrait se relèver d'une telle attaque contre son histoire et contre ce qui le constitue : une constitution protectrice des droits de chaque citoyen et défendant les valeurs fondamentales que sont la liberté, l'égalité et la fraternité. Où sont-elles ces valeurs, dans ce projet de loi ?
Avant les élections, comme certains, je ne pensais pas que notre Président mènerait une politique vraiment de gauche. En effet, tout en protestant contre les traités européens d'essence libérale, il faisait partie de ceux qui ne s'y étaient guère opposés lors des scrutins, permettant par là le vote de ces traités, tout en disant « Je suis contre mais on ne peut pas empêcher cette évolution », ce qui est l'inverse de ce que l'on attend d'un élu de l'opposition. Et l'état dans lequel était le PS après toutes les années où il avait occupé la fonction de premier secrétaire me conduisait à ne pas surestimer ses capacités de dirigeant. Mais je savais qu'il aurait des conseillers. Las, ses conseillers ne semblent pas vraiment à gauche. Ni certains de ses ministres... Ou alors le poids des puissances d'argent sur l'Europe et sur l’État est encore plus grand que ce que je pensais ( voir ici et ici )
On peut se poser la question, avec les grèves et les manifestations qui se produisent depuis des mois, les sondages sans équivoque, le fait que la mobilisation ne diminue pas malgré l'EURO et la propagande : qu'attend le gouvernement pour réaliser qu'il doit gouverner avec les citoyens et non pas contre eux ?
Si la manifestation reste interdite, il semble qu'il pourra en coûter 11 euros à chaque contrevenant. La liberté n'a pas de prix, mais, là, franchement, ce n'est pas cher ( le vrai problème risque concerner les organisateurs de la manifestation ). Si des menaces plus musclées se faisaient jour du côté du pouvoir (c'est un peu le chemin que cela semble prendre, ces derniers temps) il nous reste l'arme du boycott. Je sais que l'appel au boycott est interdit, aussi, je n'appelle pas à boycotter, je dis juste que je sélectionnerai mes achats, et ce, avec grand plaisir, en préférant me passer des produits de grande marque. Le boycott, c'est, contrairement à la grève, un outil qui nous fait faire des économies...
Les syndicats se sont unis pour répondre au ministre de l'intérieur : ils refusent la proposition de Bernard Cazeneuve de laisser mettre les manifestants dans une souricière nettement plus dangereuse qu'un cortège qui se déplace "Interdiction de manifester : le gouvernement joue avec le feu" . Puisse le gouvernement gagner en sagesse et réfléchir aux conséquences de ses décisions !