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Billet de blog 30 octobre 2011

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Une heure pour rien

           J'aime les transports en communs. Outre la plaisir que j'y trouve à observer mes contemporains, je goûte particulièrement la sensation délicieuse de n'avoir rien à faire. Du départ à l'arrivée, je me retrouve dans cet espace intermédiaire où toutes les obligations contemporaines qui nous écrasent du matin au soir, entre vie professionnelle, vie familiale et engagements divers n'ont plus cours.

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J'aime les transports en communs. Outre la plaisir que j'y trouve à observer mes contemporains, je goûte particulièrement la sensation délicieuse de n'avoir rien à faire. Du départ à l'arrivée, je me retrouve dans cet espace intermédiaire où toutes les obligations contemporaines qui nous écrasent du matin au soir, entre vie professionnelle, vie familiale et engagements divers n'ont plus cours. Temps de rien, temps de tout : c'est dans la vacance de l'âme que l'on se sent vraiment vivant.

Alors ce soir, pour une petite heure, et parce que les grands penseurs qui nous gouvernent se sentent le droit d'arrêter le temps, j'ai mon heure de vacance.

Mais qu'est-ce que je vais en faire ?

J'étais occupée à rédiger un texte un peu plus sérieux quand je me suis avisée de ce cadeau : tout à l'heure, je remettrai les aiguilles des horloges de la maison à la place qu'elles occupent maintenant. Alors, j'ai pris le train du rien, de ce petit billet de rien du tout, pour goûter un peu du temps.

Il nous reste ça, le temps.

Ils ne vont pas nous le prendre, quand même ?

Si, je crois que si.

Ou, plus exactement, nous acceptons de plus en plus de nous en laisser déposséder.

Un exemple, les vacances.

J'ai connu le temps où les familles, même pas particulièrement aisées, partaient un mois en vacances. Qui se permet cela actuellement ?

Un exemple, le travail.

J'ai connu le temps où il faisait bon prendre des cafés au travail, temps où tout était prétexte à faire « un pot ». Qui ose maintenant s'opposer aux directives interdisant ces moments conviviaux qui font tellement de bien, y compris à l'entreprise ?

Un exemple, la lecture.

Apparemment, de moins en moins de personnes seraient capables de lire entièrement un livre. Ou alors, même quand elles en sont capables, elles ne trouvent plus que c'est nécessaire, et pensent qu'il est préférable de surfer sur le net. Même des chercheurs en sciences humaines (cf le premier chapitre de « Internet rend-il bête ? » de Nicholas Carr, chez Robert Laffont, 2011) peuvent avoir l'impression que lire un livre en entier est une perte de temps... La longueur de certains articles peut d'ailleurs être reprochée à leurs auteurs.

Et je me souviendrai toujours de cet éditeur qui racontait avoir reçu un excellent premier roman, riche, original, bien écrit. Mais de mille pages. Il a exigé de l'auteur que celui-ci réduise de moitié son ouvrage, pour des raisons éditoriales : un gros livre se vendrait moins.

Oui, mais si cela avait été « Guerre et paix » ?

Voilà, je vous ai fait perdre votre temps, et j'en suis désolée. J'ai perdu le mien, aussi.

Mais que c'est bon !

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