Michel Pinault (avatar)

Michel Pinault

Historien, membre du Groupe d'histoire sociale (GHS), recherches sur l'histoire des sciences et des milieux scientifiques.

Abonné·e de Mediapart

169 Billets

0 Édition

Billet de blog 14 avril 2022

Michel Pinault (avatar)

Michel Pinault

Historien, membre du Groupe d'histoire sociale (GHS), recherches sur l'histoire des sciences et des milieux scientifiques.

Abonné·e de Mediapart

Abstention ou« faire barrage » ? Les électeurs vont devoir assumer un choix

En laissant penser qu’une simple abstention est une réponse suffisante face à au danger Le Pen, Jean-Luc Mélenchon prend un risque avec la démocratie.

Michel Pinault (avatar)

Michel Pinault

Historien, membre du Groupe d'histoire sociale (GHS), recherches sur l'histoire des sciences et des milieux scientifiques.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

                    Abstention ou« faire barrage » à l’extrême droite ?
Jean-Luc Mélenchon ne tranche pas... Aux électeurs d'assumer un choix

               Abstention pour envoyer dos à dos Le Pen et Macron ou vote Macron pour « faire barrage » à l’extrême droite ?
               Le débat fait rage dans le for intérieur de bien des électeurs. En fait, le doute n’existe pas, pour la plupart d’entre nous, électeurs de gauche, électeurs de Jean-Luc Mélenchon au premier tour, mais la question est : « comment se résoudre à voter pour Macron ? », celui-là même qui a tracé le chemin qui a conduit au résultat du 10 avril et qui est le premier responsable de la déroute démocratique actuelle ?

               Il y a donc débat en chacun de nous mais un débat qui reste purement théorique, rhétorique, qui ne devrait en réalité pas empêcher 100% des électeurs de l’Union populaire de se résoudre à faire leur « devoir » pour mettre dans l’urne le seul bulletin qui peut contribuer à barrer le chemin du pouvoir à l’extrême droite.

               Sinon, c’est que le danger n’est pas compris, c’est qu’on met Le Pen à l’extrême droite dans les mots mais sans « comprendre » ce que cela signifie.

               Jean-Luc Mélenchon camoufle derrière une formule magique – « Vous ne devez pas donner une voix à madame Le Pen » – l’incertitude qu’il laisse traîner à ce sujet. Qu’a-t-il dit, en effet, sur le motif de cet « interdit » ? Uniquement ceci, dans sa lettre à ses électeurs : « Marine Le Pen ajoute au projet de maltraitance sociale qu’elle partage avec Emmanuel Macron un ferment dangereux d’exclusion ethnique et religieuse. » Et c’est tout ! Non, que ce soit inexact, et il aurait pu être encore plus affirmatif : « apartheid » serait plus juste ; « chasse aux Arabes », même ; match retour de la guerre d’Algérie, etc. Rappeler que Le Pen c’est le F-Haine est sans doute rappeler que le principal élément qui rallie un quart des électeurs au vote Le Pen c’est le racisme, la xénophobie, et aussi le chauvinisme. Mais cela ne peut rester le seul argument !

                Pourquoi Jean-Luc Mélenchon ne dit-il pas un mot d’un autre danger dans sa lettre à ses électeurs, celui de la mise à bas de la République, de l’État-de-Droit, des libertés fondamentales en France !!!!
                Pourquoi ne pas dire un mot de ce motif essentiel, principal, de s’opposer aux objectifs de Le Pen lors du vote de dimanche prochain ? Pourquoi réduire ainsi les raisons de s’opposer par tous les moyens à notre disposition, le 27 avril, à la possibilité d’une arrivée au pouvoir de Le Pen ? (Je ne dis pas que JLM n'en a jamais parlé, je dis qu'il n'en dit rien au moment de dire l'enjeu du vote au second tour.)
                En laissant cet aspect dans l’ombre et en laissant penser qu’une simple abstention est une réponse suffisante face à ce danger, Jean-Luc Mélenchon prend un risque avec la démocratie (risque qui n’existait pas lorsqu’en 2017 il a choisi la même orientation). Pourtant, dans son discours du soir du premier tour, il a bien eu ces mots : « Jamais nous ne perdrons notre confiance dans la démocratie. Donc vous ne devez pas donner une voix à madame Le Pen » ; mais il n’a pas expliqué le lien qu'il met entre ces deux phrases, il a dit cela, comme « en passant », sans insister. Il a même mis en garde ses électeurs, dans son discours du 10 avril, contre le risque de « commettre des erreurs qui seraient définitivement irréparables » ; mais toujours sans expliquer, sans dire en quoi consisteraient ces erreurs et en quoi elles seraient irréparables....
             Du coup, aujourd’hui, seule une minorité des électeurs de l’Union populaire semble se préparer à « faire barrage » à Le Pen dans 10 jours. C’est grave… C’est dangereux, c’est irresponsable.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.