mservos (avatar)

mservos

Journaliste en contrat pro

Abonné·e de Mediapart

5 Billets

0 Édition

Billet de blog 18 décembre 2016

mservos (avatar)

mservos

Journaliste en contrat pro

Abonné·e de Mediapart

"Politique" est un gros mot

Dans la bouche et dans l'esprit de beaucoup de jeunes de ma génération, le mot "politique" est un gros mot. Pourquoi ?

mservos (avatar)

mservos

Journaliste en contrat pro

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
© CC Flickr

Ces jeunes qui considèrent que le mot « politique », c’est un caleçon retourné. 

Je ne sais pas si je suis le fruit d’une génération « x », « y » ou « z », et cela importe peu. Je sais en revanche, que j’ai entre 18 et 30 ans, et que je fais partie de ces jeunes désabusés, et dont beaucoup ne vont pas aller voter. Ces jeunes qui considèrent que la politique est un caleçon retourné. 

Tous les cinq ans, on fait croire qu’il est propre, mais bon, « ça fait cinq ans qu’il est pas passé à la machine ! ». Pourtant ce dont ma génération a envie, ce n'est pas d’un caleçon propre, non. C’est d’un nouveau caleçon. Un tout neuf. Qui n’ait pas la même couleur, ni la même matière, encore moins la même odeur… C’est impossible, dites-vous ?

L'idée que l'on se fait de la politique

Impossible n'est pas Français. Changer l'idée que l'on se fait de la politique n'est pas impossible. À moi, on m’a toujours dit que « rien n’est impossible à ceux qui tentent ». Que nos élites politiques s'auto appliquent ce principe ne me semble pas être une attente exhorbitante. Après tout, ce ne sont pas les élites politiques elles-mêmes qui me contrediraient, n’est-ce pas ? Quand on a le culot de proposer - je ne sais pas moi, c’est un exemple - de débarrasser la France d’une mesure que l’on a soi-même appliqué à plusieurs reprises en l'espace de deux ans, c’est que l’on croit dur comme fer que "rien n’est impossible à celui qui tente" ! Soit notre ancien Premier Ministre prend les français pour des billes, soit il croit lui aussi, que rien n'est impossible ! 

Maintenant que cela est entendu, revenons au fait principal : malgré tout, il n’est pas impossible de renouveler l'idée que l'on se fait de la politique.

Mais il n'y a pas de place pour la jeunesse 

Toutefois, même avec toute la bonne volonté du monde, on ne peut faire du neuf avec du vieux. Et s’il n’est pas impossible de renouveler l'idée que l'on se fait de la politique, il ne devrait pas non plus être impossible, de renouveller la classe politique. À l'inverse de ce que pensent certains, ce renouvellement est loin d’être « en marche » ! Pourquoi ? Ce semblant-de-balbutiement-de-début-de-réponse peut éclairer notre affaire : sans doute parce que la vieille politique ne veut pas laisser de place à sa jeunesse. Et je sais ce que vous allez me répondre, « quid de Macron ? ». Si par jeunesse vous pensez que je vise notre ancien ministre de l'Économie, détrompez-vous. Macron est un pur produit de la vieille politique, formaté au rocardisme, arrosé par les financiers, il a grandi et s'est forgé aux côtés de ceux qui tiennent les rênes du pouvoir, de loin mais avec assurance (je ne citerais personne, pas même un grand patron des patrons, non). Macron est simplement l’exemple que l’on peut s’infiltrer pour tenter de… ne pas changer le système de l’intérieur. Puisque finalement, autrement que par des considérations « ni de droite, ni de gauche », Macron est bien l’exécutant de la même politique que ses congénères. Mais, pourquoi ?

Du "léchage de bottes" en règle 

Simplement parce que, plus on grimpe les échelons, plus une sorte de rouleau compresseur imaginaire s’applique à lisser totalement les caractéristiques et traits de personnalité, les ambitions secrètes, et même la sacro-sainte "bonne volonté". Une fois arrivé à votre étage, vous entrez parfaitement dans le moule. C’est une règle, qui repose sur le schéma suivant « si vous n’êtes pas récupéré, alors vous serez rejeté ». 

Illustration 2
© CC Flickr Jason Nelms

Et c’est là que le bât blesse. Depuis plusieurs années j’observe certains de mes amis s’impliquer pour leur avenir et celui de leur pays. L’un s’encarte à droite, l’autre à gauche. L’un va tracter sur les marchés le samedi matin, l’autre tient les feuilles d’un candidat aux régionales quand celui-ci n’a pas de pupitre (c’est une image). L’illusion est totale : le jeune encarté se sent plus impliqué que jamais, il se sent pousser des ailes. Avant qu’on ne les lui coupe au décolage... Quasi systématiquement, j’ai observé que, plus mes amis étaient impliqués, plus s’installait une relation avec leurs ascendants politiques, basée sur… la « lèche ». La lèche, cette technique qui consiste à « faire de la lèche » à une personne d’influence située au dessus hiérarchiquement – souvent un responsable local du parti, d’abord, puis un "plus haut gradé" ensuite – dans le but d’obtenir de grimper quelques échelons. Une connaissance, récemment « décartée » m’a dit un jour : « j’ai rapidement été dégouté quand j’ai compris que les personnes hauts placées n’étaient pas celles qui avaient les idées les plus pertinentes, les plus innovantes, mais celles qui étaient de plus gros lèches-culs ». Voilà. La messes est dite. Et ce discours là, il est récurent. Le "dégout" s'empare des jeunes, la vie de la cité elle, reste entre les mains des mêmes personnes, assises sur leur pouvoir comme sur un coffre-fort. C’est ainsi que de jeunes gens pourvus de toutes les qualités et pleins de bonne volonté, s'en vont vers d'autres cieux. Sidérés de voir ce qu’ils ont vu, ils deviennent de passifs observateurs et commentateurs du dimanche, qui n’iront sans doute, pas voter.

Alors oui, la politique est un gros mot pour les 18-30 ans. Mais ce dégout des jeunes pour la politique n'est pas irréversible. Si le caleçon retourné ne leur convient pour l’instant pas, il faut quand même agir. Il faut se boucher le nez, et aller voter. 

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.