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Nicole Péruisset-Fache

Professeure agrégée honoraire, Docteure de l'Université de Rouen, Qualifiée aux fonctions de maître de conférences, Chercheure en sciences humaines indépendante, poète à ses heures

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Billet de blog 7 juillet 2022

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Le monde sans toi

En ton absence, tous les lieux où nous étions passés me parlaient de toi, le souvenir de toi les hantait tous, et je t’y revoyais à divers moments de notre passé que j’avais cru d’amour fou, d’amour éternel, comme tu l’avais promis. Autrefois, je savais que j’allais te revoir bientôt et te parler de ces moments, ils devenaient merveilleux.

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Le monde sans toi
En ton absence, tous les lieux où nous étions passés me parlaient de toi, le souvenir de toi les hantait tous, et je t’y revoyais à divers moments de notre passé que j’avais cru d’amour fou, d’amour éternel, comme tu l’avais promis. Autrefois, je savais que j’allais te revoir bientôt et te parler de ces moments, ils devenaient merveilleux. 
Le monde n’avait de sens pour moi que parce que tu existais quelque part, parce que j’allais te revoir à notre maison. Les endroits où nous avions marché ensemble n’étaient sublimes que parce que tu y avais laissé la mémoire de ton passage, de ton enfance, de notre amour, et qu’ils annonçaient nos retrouvailles du soir, proches. 
La couleur de la mer sous le soleil et le vent de l’été ne réjouissait mes yeux que parce que nous l’avions admirée ensemble, corps contre corps, main dans la main, sourire contre sourire. Nous nous étions si souvent baignés ensemble, nous en avions si souvent reçu les embruns, nous y avions si souvent respiré l’air du large l’un avec l’autre, si souvent tenu nos rendez-vous amoureux. 
Au printemps, le chant des oiseaux ne faisait bondir mon cœur que parce que nous les avions écoutés ensemble en silence. 
La forêt somptueuse du mois de juillet ne m’emplissait l’âme de  joie que parce que nous l’avions parcourue du pas de nos chevaux très aimés, botte à botte, éperons contre éperons cliquetants, en tenant les rênes d’une main et de l’autre la main de l’Aimé(e), échangeant des regards pleins de douceur.
Nos chevaux sont morts depuis longtemps et tu as tourné la page, oubliant tes serments et toutes mes offrandes de chaque jour au dieu que je voyais en toi.
Après ton départ, les lieux que je traverse à présent n’ont plus été que des chemins de l’enfer où je vivais, sans espoir, sans tendresse, sans Celui que tu étais et que tu choisis un jour de ne plus être.
Je viens de tourner la page. Tu es tellement bouffi d’orgueil déplacé ! La lettre de toi à ta Dulcinée, grandiloquente, fleur bleue, niaise, que je viens de découvrir, la photo qui l'accompagnait de cette blondasse des bas-fonds aux cheveux peroxydés en tapis brosse, au quadruple menton, à la peau grasse, m’ont fait d’abord pleurer de honte, puis éclater de rire.
A jamais, le rire assassin a remplacé mon chagrin, le dieu que j'aimais à la folie a chu de son piédestal et gît sur le sol en mille morceaux, tu n’es qu’un vieillard ridicule qui se fait mener par le bout du nez.
                                             6-7  juillet 2022           Aimée Saint-Laurent © 

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