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Billet de blog 21 mars 2023

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Occupation des universités : être avec elles et avec eux

Une fois de plus le président de l’université de Strasbourg a envoyé les CRS pour empêcher l’occupation d’un bâtiment. Les étudiantes et les étudiants mobilisé·es montrent aux personnels des universités la voie d’un engagement authentique qui seul pourra mettre un coup d'arrêt à la destruction de nos vies et de nos libertés. Publication d’une lettre et d’une vidéo.

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La lettre reproduite ci-dessous est un courriel envoyé sur les listes de mobilisation de l’Université de Strasbourg pour rendre compte de l’intervention des CRS. Elle contient le lien vers une vidéo.

Une AG des personnels s’est tenue ce 21 mars. Elle a adopté à l’unanimité les deux motions suivantes :

L’AG des personnels de l’université de Strasbourg rappelle l’attachement indéfectible de notre communauté aux franchises universitaires. Elle dénonce l’intervention des forces de l’ordre le 20 mars à 22h30 au bâtiment de l’Escarpe pour évacuer une cinquantaine d’étudiant·es pacifiques. Elle constate que les seuls dégâts occasionnés ont été ceux des CRS qui ont fait voler en éclat les portes d’entrée du bâtiment. Elle demande instamment à Michel Deneken de mettre fin à sa politique d’entorse systématique aux franchises universitaires, de cesser de faire intervenir les forces de l’ordre sur nos campus et de garantir les libertés d’expression et de réunion des étudiants comme des personnels.

L’AG des personnels de l’université de Strasbourg appelle l’ensemble des collègues à cesser de basculer en distanciel les cours et les examens, ce qui n’a aucune valeur réglementaire et constitue un frein à la mobilisation en cours.

Le congrès de l’Université de Strasbourg (rassemblement de tous les conseils centraux) devait se tenir ce jour à 14h. Il a été envahi par les étudiant·es et des personnels et n'a pas pu se tenir.

Illustration 1
Congrès envahi par des étudiant·es et des personnels, 21 mars 2023, Strasbourg © Pascal Maillard

Bonsoir tout le monde,

Alerté de l’occupation du bâtiment de l’Escarpe, je me suis rendu à 19h30 avec une autre camarade du Snesup, dans l’amphi où se trouvaient les étudiant·es mobilisé·es, avec comme objectif de les sécuriser le mieux possible en cas d’évacuation, en tentant aussi un travail de médiation avec la direction et les forces de l’ordre, pour éviter toute forme de violence.

Un échange rapide avec la DGS nous laissait comprendre à 20h15 que la doctrine de l’université n’avait pas changé : intervention de forces de l’ordre dès qu’il y a occupation. J’ai insisté sur le caractère pacifique de l’occupation et sur la jeunesse des étudiant·es. Pas de violence policière si évacuation ! Très occupés par les manifestations en ville, les CRS ont tardé à arriver.

L’évacuation a commencé à 22h30 et a duré 20 mn. Il a fallu 7 longues minutes pour que les CRS parviennent à défoncer les deux portes à coups de masse et de bélier. 7 mn pendant lesquelles une cinquantaine d'étudiant·es faisant la tortue au milieu du hall, scandaient « Nous aussi on va passer en force ». Voir cette vidéo :

Intervention des CRS à l'Université de Strasbourg le 20 mars 2023 © Polared

S’il n’y a pas eu de gaz ni de coups de matraque, ça reste très violent comme opération, pas seulement symboliquement, mais aussi par le nombre impressionnant de CRS, par la disproportion des moyens, par l’effraction dans le bâtiment. A la différence des évacuations précédentes il était strictement impossible de suivre les CRS à l’intérieur du bâtiment. Je me suis fait refouler à deux reprises : une fois à l’entrée du bâtiment, un fois du parking du Portique où je filmais. Le périmètre de sécurisation était très large. J’ai eu beau faire état de mes responsabilités et mandats, on m’a interdit la présence sur mon lieu de travail. 

Il faut revoir notre stratégie d’accompagnement et de protection des étudiant·es : il ne sert plus à rien de rester à l’extérieur pour faire de la médiation, il faut être avec elles et avec eux. Nous leur devons protection et solidarité. En fait, j’ai compris ce soir, définitivement, que ma place n’était pas à l’extérieur. J’avais même honte d’être à l’extérieur. Il faut des personnels à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur, pas seulement pour accompagner et protéger, prévenir les violences de la police, mais pour être vraiment AVEC. Sans quoi il n’y a plus de communauté universitaire.

Il n’y a pas de communauté universitaire sans une solidarité pleine et entière entre personnels et étudiant·es.

Il y a un congrès demain. Si les élus pouvaient demander au président de cesser enfin de faire détruire les portes de nos bâtiments pour évacuer de force des étudiant·es pacifiques et traumatisé·es, ce serait un grand progrès pour la démocratie universitaire, nos libertés et ce qui nous reste d'humanité ! Ce sera certainement sans effet. Il changera peut-être d’avis le jour où il y aura autant de personnels que d’étudiants à évacuer.

On se retrouve toutes et tous en AG ce mardi à 12h amphi 4 du Le Bel. Nous avons des décisions collectives à prendre.

Bien à vous,

Pascal

Illustration 3
Evacuation des étudiant·es Strasbourg 20 mars 2023
Illustration 4

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