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Billet de blog 7 décembre 2023

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Politique : l'ayatollah Mélenchon lance des fatwas

En désignant une journaliste de LCI à la vindicte publique après s’être livré à une attaque antisémite contre la Présidente de l’Assemblée nationale, le leader des Insoumis a franchi une étape dans la dérive populiste, celle où il attise la violence pouvant aller jusqu’à l’agression. Le moment est venu de le débrancher.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Pour avoir conduit une interview serrée de Manuel Bompart - son protégé pour ne pas dire sa marionnette - en le poussant dans ses retranchements sur les positions de LFI par rapport à la guerre au Proche-Orient, Ruth Elkrief a reçu un « scud » - sous la forme d’un tweet - de la part de Jean-Luc Mélenchon. « C’est une manipulatrice. Si on n’insulte pas les musulmans, cette fanatique s’indigne » a-t-il tonné.

Spécialiste depuis des années des dérapages ou plus exactement des provocations car il est trop intelligent pour ne pas maitriser sa parole, le leader maximo des Insoumis nous convie, depuis le début de la guerre au Proche-Orient, à un festival d’ignominies.

Après son refus de désigner le Hamas comme organisation terroriste, considérant qu’il s’agit d’un groupe de résistants, son obstination à minimiser les actes de ses combattants, sa justification de la prise d’otages, il s’en est pris à des personnalités dont il ne peut ignorer qu’elles sont de confession juive. Ce fut d’abord la Présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet dont il dit, alors qu’elle est en déplacement en Israël, « qu’elle campe à Tel-Aviv pour encourager le massacre des Palestiniens » et ensuite, cette sortie sur la journaliste de TF1/LCI. Du pur antisémitisme.

Questionné sur ces dérives du leader d’extrême gauche, le Président du Sénat s’est exclamé à son adresse « Ferme ta gueule » et a précisé que le gourou des Insoumis « est sorti de l’arc républicain ». Et voilà que le débat dévie, dans les médias, sur le thème : « un président du Sénat ne devrait jamais dire ça ».

Ce n’est évidemment pas le sujet. Comme le dit le proverbe chinois, « quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt ». Le sujet, ce sont les délires et la dérive de Mélenchon. Gérard Larcher a raison de dire cela et il pourrait même aller plus loin.

A force de flirter avec l’islamisme, Jean-Luc Mélenchon en attrape les pires travers. Il se prend pour un ayatollah et lance des fatwas.

Ces sorties contre la Présidente de l’Assemblée nationale et la journaliste ne sont, en effet, rien d’autres que des appels au meurtre - une sorte de contrat comme on dit dans les milieux mafieux – lancés sur leur tête, comme la fatwa qui pèse sur celle de l’écrivain Salman Rushdie depuis 1989 en raison de son livre sur les Versets sataniques.

Ni Ruth Elkrief, ni le groupe TF1/LCI, ni le ministère de l’intérieur ne s’y sont trompés : depuis le 4 décembre, la journaliste est sous protection policière. La présidente de l’Assemblée nationale a vu, pour sa part, sa sécurité renforcée par rapport à celle dont elle bénéficie du fait de ses fonctions. D’autres personnalités politiques, artistiques, médiatiques de confession juive ayant pris des positions contre le Hamas sont menacées et sous protection policière.

C’est là que l’expression de Jean-Luc Mélenchon est insupportable. Tout le monde sait que, dans le contexte proche-oriental actuel, les tensions communautaires ont atteint un haut degré d’exacerbation.

Ses propos sont de nature à pousser au passage à l’acte de personnes radicalisées – fichées S ou non – car le seuil de déclenchement a considérablement baissé. On l’a vu avec l’attentat sur le pont Bir-Hakeim dont l’auteur a avoué aux enquêteurs qu’il s’était décidé à agir à la seule vue du drapeau israélien sur la Tour Eiffel….

Il ne faut jamais oublier que les journalistes de Charlie Hebdo qui ont survécu à l’attentat de 2015 et ceux qui ont les rejoints vivent depuis – ainsi que leur famille – sous protection policière et travaillent dans des locaux hyper sécurisés, à une adresse tenue secrète.

Les provocations de Mélenchon sont un vrai risque pour la démocratie et la liberté d’expression.

Voilà pourquoi, comme le dit Gérard Larcher, il faut faire taire Jean-Luc Mélenchon, il faut même le débrancher ou, à tout le moins, lui montrer qu’il ne peut pas impunément franchir les bornes.

Et si on lui appliquait la méthode retenue contre Eric Zemmour ?

Le héraut de la droite extrême passe beaucoup de temps dans les tribunaux où il est traîné pour des accusations d’incitation à la haine, d’antisémitisme, d’homophobie, de révisionnisme, etc. en raison de propos qu’il tient ou a tenu en tant que chroniqueur sur Cnews ou plus récemment lors de la campagne pour les présidentielles. Il est souvent condamné mais parfois – la justice est une loterie – relaxé. A chacun de ses dérapages, il y a toujours une association, un avocat, une instance de défense des droits de l’Homme, chien de garde de la loi et du politiquement correct pour déposer plainte et cela est parfaitement justifié.

Jean-Luc Mélenchon semble bénéficier d’une sorte d’impunité. Les instances droit-de-l’hommiste ne protestent jamais contre ses outrances. Sont-elles hémiplégiques de la pensée, sourdes de l’oreille gauche ou enfermées dans une idéologie qui les empêchent de voir la réalité ? Il serait temps de se réveiller et de prendre conscience qu’un responsable politique réalisant de confortables scores à l’élection présidentielle qui affirme que « la police tue », menace des journalistes, désigne à des radicalisés la présidence de l’Assemblée nationale est aussi dangereux pour la démocratie qu’un extrémiste de droite.

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