Il n’y a plus de saison, décidément. Autrefois, l’été était synonyme d’insouciance, de relâchement, en un mot, de vacances. L’actualité se mettait entre parenthèses, les journaux et les magazines faisaient leur Une sur le soleil avec un jour ses bienfaits et le lendemain ses dangers, la meilleure manière de bronzer, les amours de vacances, les premiers émois des adolescents, la plage et les parasols. La guerre en maillot de bain faisait rage entre juilletistes et aoûtiens qui se retrouvaient dans le fameux chassé-croisé de fin juillet-début août, coincés dans des bouchons que Bison Futé s’épuisait à quantifier. Les éditorialistes se répandaient sur cette France des 35 h et prédisaient une rentrée forcément chaude « sur le front social ». Bref, c’était « la Douce France » et la « Nationale 7 » de Charles Trenet…
Rien de tel cette année. D’abord, il n’y aura pas de rentrée puisqu’il n’y a pas eu de sortie, l’actualité n’ayant pas fait relâche. Les journaux, les magazines, les TV d’info en continue et les réseaux sociaux se sont enflammé – c’est le cas de le dire – pour les mégas incendies de forêt, les canicules à répétition, le dérèglement climatique, les orages violents, la sécheresse, les pénuries à venir de gaz et de pétrole, le prix de l’essence, l’inflation et la guerre en Ukraine qui a remplacé le Covid comme fil rouge de l’actualité. La vie de tous et de chacun a été ponctuée par les alertes météo, un jour à la canicule, le lendemain aux précipitations intenses. Ah, ces images de camping dévastés et de campeurs hagards, aventuriers de la caravane perdue..
Mais cet été de toutes les catastrophes a été aussi un été meurtrier pour les écologistes qui ont révélé leur vrai visage, celui de Fouquier-Tinville de l’environnement. Pour eux, les Français sont coupables de tous les heurts et malheurs climatiques. Ils les accusent de prendre leur voiture, de voyager en avion, d’avoir des piscines, de manger de la viande, de s’amuser en jet-ski, de faire des barbecues, de mettre en marche leur climatisation en été et leur chauffage en hiver et même de prendre des douches…, bref de vivre.
Ce sont des ayatollahs de l’écologie qui ont une approche accusatoire du réchauffement de la terre et de ses conséquences dramatiques.
Ils n’ont pas compris que face à ces redoutables défis dont tout le monde a aujourd’hui conscience – que le dernier climato-septique lève le doigt -, l’enjeu est de responsabiliser les acteurs de la vie. Entreprises, pauvres, riches, politiques du monde entier doivent modifier leur mode de vie, de production, de comportement. La mondialisation qui a éloigné d’un continent à l’autre la production de la consommation reliées par des millions de conteneurs qui polluent les mers, défigurent nos ports et aéroports et font la fortune de quelques armateurs n’est plus acceptable dans cette organisation.
L’écologie politique sera crédible et constituera une alternative lorsqu’elle aura compris la différence entre culpabilisation et responsabilisation. Au fond, ils donnent raison à Emmanuel Macron lorsqu’il ironise « sur les nostalgiques de la lampe à huile et de la communauté Amish ». Et ils ne doivent pas s’étonner de faire moins de 5% à l’élection présidentielle.
Il semble d’ailleurs qu’ils aient décidé de continuer à foncer dans le mur en klaxonnant. Dans une récente tribune, une centaine de représentants écologistes ont annoncé leur intention de refonder le parti écologiste et surtout de bâtir un projet fondé sur la décroissance.
Qu’est-ce que la décroissance ? C’est le terme politiquement correct pour désigner la « récession organisée ». Il faut réduire la production économique pour sauver la planète. Soit, mais une croissance négative – autre terme pour désigner la décroissance -, cela signifie moins d’activité, moins d’emplois, moins de revenu, etc. Et qui paiera les pots cassés de cette paupérisation collective, si ce n’est les classes populaires et moyennes ?
En matière énergétique, ils veulent – louable objectif – sortir des énergies carbonées pour basculer vers le tout électrique en particulier dans le domaine des transports, notamment automobile. Il faudra donc produire un maximum d’électricité pour assurer cette transition. Mais les écologistes veulent sortir au plus vite du nucléaire pour développer l’éolien et le solaire. Ignorent-ils que ces énergies sont intermittentes et ne sauraient répondre aux besoins de la population et de l’économie ? Ils veulent mettre des éoliennes partout, sauf dans leur potager parce qu’une éolienne, c’est moche et ça fait du bruit. Ignorent-ils qu’après avoir annoncé une sortie précipitée du nucléaire, l’Allemagne a dû réactiver ses centrales à charbon qui seront prolongées au moins jusqu’en 2030 ?
Les températures excessives de l’été n’ont pas réussi à Julien Bayou. Le leader d’EELV est parti en guerre contre les piscines et les jets privés accusées, pour les premières de prélèvement excessif sur l’eau, ressource devenant rare, et pour les seconds de polluer l’atmosphère au seul profit et plaisir de quelques milliardaires.
Dans le genre populiste, démagogique et café du commerce, on atteint des sommets.
Il y a en France, environ 3 millions de piscines, ce qui rapporté aux quelques 40 millions de foyers est peu. Chacune de ces piscines consomme 15m3 d’eau par an en moyenne quand un Français en consomme en moyenne 40 m3 par an. Et que dire de la consommation d’eau dans l’agriculture, l’industrie, les collectivités qui se chiffrent en milliards de m3. Au total, la consommation d’eau des piscines privées représente 0,12% de la consommation globale. Mais, on estime qu’1 milliard de m3 d’eau est perdu chaque année dans les canalisations en raison de leur vétusté, ce qui représente la consommation annuelle de 18,5 millions de Français.
M Bayou serait plus inspiré de proposer un plan d’investissement pour moderniser le réseau de canalisation et arrêter ce gaspillage. Mais ce serait évidemment moins médiatique et moins porteur de buzz que de pointer les piscines des particuliers, ce qui a un vague parfum de lutte des classes…
Quant aux jets-privés, ils représentent 2% des émissions de gaz à effet de serre de toute l’aviation civile, laquelle ne représente que 15% des émissions de l’ensemble des transports.
Il est clair que notre modèle de croissance, fondé sur la production en montée permanente, le productivisme et la consommation à outrance doit être interrogé et remis en cause. Mais, l’enjeu est de concilier écologie et économie. La fin de l’abondance annoncée par le Président de la République, ce n’est pas le retour au temps des cavernes, c’est une utilisation sobre et rationalisée des ressources de la planète.
On a envie de dire aux écologistes : taisez-vous et réfléchissez à un projet écologique, de mutation stratégique de notre modèle économique et vous serez crédibles, écoutés de l’opinion, vous franchirez le plafond de verre qui sépare les militants des politiques.