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Billet de blog 23 juillet 2019

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le syndrome des asperges d'appareil

Guillaume Larrivé, haut fonctionnaire et député des LR, n’y va pas de main morte s’agissant de Greta Thunberg,

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la jeune égérie de la cause climatique auprès de la jeunesse mondiale, dont il appelle à boycotter la venue au Palais Bourbon (où elle sera notamment accompagnée par la climatologue française Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue et membre du GIEC depuis 2015, en qualifiant la jeune fille âgée de seize ans de « gourou apocalyptique ».

Est-ce parce qu’il est fils d’un colonel d’artillerie qu’il tire ainsi à boulets rouges sur la jeune Suédoise qui, aux dires de la droite française, serait une « activiste sous emprise » ?

Mais de quelle emprise parle-t-on ? La seule emprise que connaît cette jeune femme est le syndrome d’Asperger dont elle est victime. Cette forme d’autisme, qui a pour particularité de n’être la cause d’aucune déficience intellectuelle ni de difficulté langagière, se caractérise en général par une difficulté à se sociabiliser et à interagir avec autrui, une difficulté qui, dans le cas de la jeune Suédoise, connu pour avoir mondialisé la grève de l’école auprès de la jeunesse pour faire prendre conscience de l’urgence climatique, semble avoir été allègrement surmontée quand on observe le chemin qu’elle a parcouru et le monde qu’elle a réussi à fédérer autour d’elle.

De toute évidence, chez Greta Thunberg, le syndrome d’Asperger se caractérise par une conscience aiguë d’enjeux dont l’imminence qui semble échapper à une grande partie des (supposés) responsables politiques formant les classes dirigeantes des pays du monde entier, à commencer par les pays d’Europe.

Car les propos qu’elle tient, loin d’être ceux d’une « gourou apocalyptique », comme le prétend Guillaume Larrivé, ou d’une « activiste sous emprise », pour reprendre la formule de ses détracteurs, membres de la droite française en pleine décomposition, les propos qu’elle tient témoignent au contraire d’un rare discernement pour une adolescente, ainsi ce qu’elle a déclaré à la tribune de la COP24 :

« Ce que nous espérons atteindre par cette conférence est de comprendre que nous sommes en face d’une menace existentielle. Ceci est la crise la plus grave que l'humanité ait jamais subie. Nous devons en prendre conscience tout d’abord et faire aussi vite que possible quelque chose pour arrêter les émissions et essayer de sauver ce que nous pouvons. »

Et encore :

 « Notre biosphère est sacrifiée pour que les riches des pays comme le mien puissent vivre dans le luxe. Ce sont les souffrances du plus grand nombre qui paient pour le luxe du plus petit nombre. Et si les solutions au sein du système sont impossibles à trouver, nous devrions peut-être changer le système lui-même. »

Il est toujours remarquable de constater à quel point la clairvoyance de certains mobilise toujours la résistance d’autres, pour ne pas dire leur obscurantisme, des autres qui s’emploient à freiner la diffusion des lumières, comme l’Église qui, au XVIe siècle, s’était farouchement opposée à la théorie héliocentrique de Galilée en menaçant ce dernier de bûcher s’il n’abjurait pas. Ce que Galilée fut forcé de faire. Mais la vérité finit toujours par advenir, et la théorie de Galilée finit par s’imposer à la face du monde de même que le soleil se lève invariablement à l’est pour se coucher à l’ouest.

Ainsi, l’essayiste Laurent Alexandre, chirurgien-urologue de son état, qui, en mars 2019, affirmait sans vergogne dans le Figaro  que le syndrome d’Asperger de Greta Thunberg était instrumentalisé pour rendre cette dernière inattaquable et que la jeune Suédoise ne serait en vérité qu’un « coup de marketing ». Figure de proue d’une jeunesse mondiale consciente que son avenir s’obscurcit dangereusement, Greta Thunberg est devenue  la cible de tous les climatosceptiques et autres conspirationnistes, tous adeptes de la technique éprouvée consistant à accuser son chien d’avoir la rage quand on veut le noyer.

Même Pascal Bruckner y va de sa pique personnelle, qui parle d’une « dangereuse propagande de l’infantilisme climatique ». C’est sûr, mieux vaut avoir la tête dans la lune, Lune de fiel ou pas.  Ce qui est certain, au vu de l’entropie climatique et de l’emballement du dérèglement climatique en cours, c’est que la planète Terre risque de connaître des lendemains qui auront plus le goût du fiel que du miel et que les noces de la Terre avec l’espèce humaine ne vont pas faire de vieux os au rythme où les choses dégénèrent ici bas.

Il y a le syndrome d’Asperger de Greta Thunberg d’un côté, et de l’autre, le syndrome des Asparagugus, soit le syndrome des asperges d’appareil, les apparatchiks bon chic bon genre qui ne voient pas plus loin que leurs bésicles ou que leur petit intérêt particulier, leur petit pouvoir, leur petit siège de député, leur petit maroquin de ministre, et pour qui le péril climatique reste une idée vague, une idée si vague qu’ils prennent ce vague-là pour l’idée même du péril climatique.

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