Los pobres en la fuente, Francisco de Goya, source Wikipédia©
Note de l’auteur (ce message s’adresse à mon père, mon oncle et mon grand-père) : Dans un but pédagogique, j’ai du abaisser temporairement mon niveau de maîtrise de la langue afin d’être accessible aux plus grand nombre. Nutrisco et extinguo
6 jours à peine et déjà le constat est univoque : Les pauvres, c’est chiant. Ça geint, ça pleure1, ça jacte, c’est jamais content et ça pullule2. Oui de partout, ça se multiplie, de partout ça pousse comme du chiendent et plus vite que le chiffre d’affaire de Bernard3. Ça s’étale sur tout l’espace public disponible4, alors qu’avec cet espace, on aurait pu faire des routes5 ou des parkings, pour faire gagner du temps à tous, pauvres y compris. Mais les pauvres, le temps, ils en ont plein, alors le faire perdre, ils s’en foutent. Au contraire, c’est un genre de jeu vicieux qui les occupe6, et quand ils s’en servent de ce temps, ils nous fatiguent, nous remplissent les oreilles de sons de casseroles, certainement volées, car oui, les pauvres n’ont aucun égard, pas même pour les autres pauvres.
Comprenez, volez les riches, ils voudraient bien, mais on est quand même bien à l’abri derrière nos barricades. De vraies barricades hein, pas deux poubelles et trois caddies. Non, des legit, des bien propres, avec des barbelés, des mercenaires, des systèmes de vidéo-surveillance, des bunkers7, des lobbys en premières lignes pour faire des tours de magies, des politiciens bleus ou rouges qu’on assignent dans nos équipes8 et puis des pauvres, qui pensent pouvoir devenir riches et qui malmènent, tourmentent, brutalisent leurs cortex rachitiques pour contrer les autres pauvres.
À n’en plus douter, les pauvres, c’est aussi très con. Ça parle de concepts flous comme la liberté, l’égalité, la fraternité, comprenez : assister, veiller, sauver. Oui parce que la France sans les riches, c’est comme une voiture dans une voiture : ça marche beaucoup moins bien après. Mais le reconnaître, pensez-vous, ils sont bien trop occupés à rêvasser aux BM et aux villas de rappeurs qu’ils n’auront jamais et aux breuvages bohémiens typiques de la pensée pauvre, piña colada, whiskey coca et autre mojito9. Ah mes aïeux ! Qu’adviendrait-il de cette France décadente à l’aiguille démagnétisée si nous ne nous efforcions de soutenir son échine, de redorer son blason, de juguler ses dépenses, de neutraliser ses agitateurs et d’endiguer l’hémorragie symbolique, qui mène les dissidents à envisager Potemkine ?
Les pauvres, plus ça rêvasse, moins ça interagit, moins c’est conscient, et plus ça tire-aux-flans. Ça n’investit rien dans rien, ça dépense, ça flambe, ça dissipe, ça gaspille. Ça croit que des chaussures de sport chères c’est chic, c’est luxe, mais les pauvres ne dupent que ceux qui sont pauvres comme eux et qui ne connaissent rien. Leur sens du goût les trahit10 constamment. Et puis, comble du délire, les pauvres, ça vote mal11. Pauvres fous qu’ils sont, croient-ils vraiment que voter comme nous peut les aider ? Mais de quelle genre de stratégie s’agit-il ? Est-ce que je vote pour l’enragé en espérant qu’il défende mon porte-feuille d’actions diversifiées, ou qu’il rétrograde ma tranche d’imposition ? Soyons sérieux, les pauvres, ça fait rire les enfants mais ça reste une énigme logique.
Et puis les pauvres, ça pollue, c’est bien connu12. Ça fait des bornes et des bornes en voiture et pour se venger de ne pas « pouvoir faire autrement », ça continue de faire des bornes même quand le job est fini : courses, PMU, foot le dimanche, pizzeria bon marché, centre-ville (j’ai d’ailleurs pu observer qu’à la vue des badauds moyens qui dilapident leurs maigres économies dans des sacs à mains chers et mal cousus, les pauvres engraissent une jalousie tenace qui leur sert de carburant). Tout ça c’est en charrette que ça se fait, en bagnole comme ils disent. Des bien moches en plus, toutes cabossées, toutes sales, avec de la fumée noire qui crachote à chaque poussée. Peuvent pas se payer du matos décent, qui fait pas peur aux enfants ? Ah...oui...non, ils peuvent pas, c’est vrai…bon ben, ils pourront peut-être un jour que Elon décidera de faire des vélos-motos-écolos avec des porte-bébés, des porte-mamies et autres porte-tontons bien cuits13.
Les pauvres enfin, ça pue, ça ne respecte rien, ça fume, ça bavarde politique et ça titube. Ça se bat pour du football14, ça joue au « qui qui est plus pauvre que moi ? », ça tombe dans le panneau quand on leur dit « faites nous confiance, on sait », ça s’occupe mal, ça lit pas, ça saute pas sur les occasions qu’on leur offre15, ça refait le monde autour d’un picon, ça croit qu’on les entend, qu’on les comprend quand on hoche la tête et qu’on augmente de trois euros leur paye annuelle, alors qu’on gagne juste du temps. Pour piller ce gros caillou en un temps record, heureusement qu’on a la patience et l’intelligence, autrement il aurait fallu tous les tuer. Mais les pauvres, c’est aussi pratique. Ça cotise ou du moins ça consomme, parfois ça « travaille », mais surtout ça survit. Peu importe : en deux mots, les pauvres, ça rapporte.
L’autre avantage des pauvres c’est que quand c’est bien pauvre, ça se tait. Comprenez, les heures de bus ou de métro ou de tram, toutes ces merveilles technologiques mises à leur disposition16, ça fatigue, alors les très pauvres, ils parlent pas. Et puis, être très pauvre, c’est vraiment moche, ça dégoûte, alors quand ils le sont, ils feignent, ils serrent la main qu’on leur tend « non merci, j’ai déjà mangé », ils font des simagrées quand on leur présente le chapeau rempli qui sort de la messe « c’est gentil mais je n’en ai pas besoin ». Pauvres diables, idiots finis, du berceau à la fosse commune.
À tous les pauvres qui se reconnaîtront, ou sans doute pas car les pauvres, ça voit mal avec leur vision dégradée par leurs longues heures de lèche-vitrines, j’en appelle à votre fond d’humanité : laissez-nous rétablir l’ordre social, pour le bien commun, pour les jours heureux qui viendront, pour la gloire d’un pays qui vous supporte. Mettez-vous sur le bas-côté quand on passe, baissez bas vos mirettes et surtout, ne répondez pas quand on vous parle : sachez qu’on le fait uniquement par charité ou par curiosité, mais jamais avec l’envie ou le projet d’un échange coutumier. Sachez enfin que si vous continuez à subir sans trop de vagues, on sera assez riches pour équiper nos 4x4 de systèmes hyper-sophistiqués qui nous permettront de (peut-être) vous éviter sur les routes de l’effondrement.
1https://www.youtube.com/watch?v=Lt8x83j-MFE
2https://www.insee.fr/fr/statistiques/5759045
3https://www.lvmh.fr/actionnaires/profil/indicateurs-financiers/#groupe
4https://www.lemonde.fr/sport/article/2023/05/11/paris-2024-le-crous-informe-les-etudiants-franciliens-qu-ils-devront-liberer-leurs-logements-pour-les-jo_6172955_3242.html
5https://www.ecologie.gouv.fr/grands-projets-routiers
6https://www.tf1info.fr/politique/video-ce-ne-sont-pas-les-francais-qui-travaillent-gabriel-attal-tacle-les-manifestants-qui-perturbent-les-deplacements-des-ministres-2255259.html
7https://www.theguardian.com/news/2022/sep/04/super-rich-prepper-bunkers-apocalypse-survival-richest-rushkoff
8https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Si%C3%A8cle
9En français dans le texte
10https://www.radiofrance.fr/franceculture/pierre-bourdieu-d-ou-viennent-nos-jugements-de-gout-1767543
11https://archive.org/details/SergeHalimiPourquoiLesPauvresVotentADroite/mode/2up?view=theater
12https://reporterre.net/Edouard-Morena-Les-ultrariches-ont-la-mainmise-sur-les-politiques-climatiques
13https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/05/15/sommet-choose-france-13-milliards-d-euros-d-investissements-etrangers-attendus_6173362_3234.html
14En français dans le texte
15https://www.lemonde.fr/sport/article/2023/05/16/jo-de-paris-2024-a-parite-de-pouvoir-d-achat-les-prix-des-billets-sont-inferieurs-a-ceux-des-editions-precedentes_6173617_3242.html
16https://theconversation.com/developper-le-reseau-de-transports-en-commun-beneficie-t-il-vraiment-aux-plus-pauvres-198261