Révolution écologique pour le vivant (avatar)

Révolution écologique pour le vivant

Abonné·e de Mediapart

2 Billets

0 Édition

Billet de blog 22 avril 2023

Révolution écologique pour le vivant (avatar)

Révolution écologique pour le vivant

Abonné·e de Mediapart

L’écologie a disparu des discours politiques : sans changement, la catastrophe est imminente

Lundi dernier, en pleine crise écologique et sociale, le président de la République donnait une allocution télévisée. Un discours déconnecté de la réalité, en particulier sur la question écologique, balayée en 3 phrases et une série de contrevérités. En cette Journée de la Terre, nous, coordinateurs de la Révolution Écologique pour le Vivant (REV), souhaitons réagir aux propos indignes du chef de l’État et plus largement à l’absence d’intérêt de la politique pour une cause fondamentale.

Révolution écologique pour le vivant (avatar)

Révolution écologique pour le vivant

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

35 secondes, c’est le temps qu’aura pris Emmanuel Macron, lundi, pour aborder l’écologie, à l’intérieur d’un discours à contre-courant des urgences politiques qui s’imposent. Certes, l’allocution présidentielle se tenait quelques jours après l’inscription de la loi sur les retraites dans un contexte de contestation populaire sans précédent. Elle avait donc d’abord vocation à traiter de la question sociale. Mais l’écologie, malheureusement réduite au seul enjeu climatique par le président, est un sujet global de société, qui interroge notamment notre façon de considérer le vivant et notre rapport au travail. La synthèse du rapport du GIEC et le dernier rapport de l’IPBES alertent à nouveau les autorités sur les catastrophes qui continueront inévitablement de se produire sans un réel changement de stratégie politique.

Bien loin de ces préoccupations humanistes et scientifiques, Emmanuel Macron utilise le sujet écologique comme un simple argument économique pour servir un discours digne d’un chef d’entreprise. « Notre nouvelle économie plus verte, respectueuse de nos terres et de nos paysages », dit-il, « n’est pas un rêve mais une réalité qui nous permet de créer des emplois et de tenir nos engagements pour le climat ».

Tout, dans cette phrase, est faux.

Rien n’est nouveau dans le modèle économique dont se targue le chef de l’État, éternel défenseur du bon vieux capitalisme et de sa forme actuelle, le néolibéralisme. Et ce n’est pas en la teintant de vert que la finance deviendra plus écologique. Par ailleurs, à aucun moment la politique du gouvernement ne respecte les terres ou le paysage, si seulement l’expression choisie signifiait quelque chose. L’exploitation des ressources de la planète et des êtres vivants jusqu’à l’épuisement, sans aucune considération morale et avec comme seul objectif le profit, autrement dit le modèle de la croissance, détruit tout sur son passage.

L’artificialisation des sols, la déforestation, la perte de la biodiversité et l’assèchement des nappes phréatiques sont autant de conséquences de cette « économie verte », et non vertueuse, au service des multinationales. Pour ce qui est de la création d’emplois, c’est bien le contraire qui se produit jusqu’à présent. Au lieu d’en créer, l’inaction écologique de l’exécutif les précarise tout en maltraitant les travailleurs, à commencer par les agriculteurs. Ce sont les premiers à pâtir du manque d’eau, des effets sanitaires des pesticides, de la mainmise de l’agro-industrie ou encore du dérèglement climatique. À ce sujet, lorsque Emmanuel Macron dit « tenir » ses engagements, c’est encore un mensonge. Jamais la France n’est parvenue à respecter les objectifs, pourtant modestes, fixés lors de la COP21. Pire : selon Greenpeace, le président aurait même réussi à aggraver le retard français.

Emmanuel Macron conclut sa séquence en annonçant que « la planification écologique sera dévoilée d’ici l’été », avec au programme « un nouveau modèle productif et écologique dans l’agriculture, le bâtiment, l’économie circulaire, les transports, l’énergie et les technologies ». S’il est toujours heureux d’apprendre que des mesures écologiques vont être annoncées, le bilan des 6 dernières années nous fait redouter le pire. Et le seul fait d’avoir attendu près d’un mandat et demi pour déployer une « planification écologique » prête à sourire. Enfin, associer le productivisme à la notion d’écologie dans la même phrase est antinomique. Mais surtout, cela montre bien la déconnexion totale du chef de l’État concernant la réalité écologique.

Pas un seul mot n’a été prononcé sur la biodiversité, grande perdante du modèle capitaliste. Les chiffres sont pourtant sans équivoque : en 50 ans, près de 70% des vertébrés ont disparu, selon un rapport de WWF France en 2022. L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) révèle quant à elle que 28% des espèces animales et végétales étudiées en 2022 sont menacées d’extinction. Et le bilan s’aggrave d’année en année, pendant que les autorités s’entêtent à poursuivre une politique qui pille et exploite les êtres vivants.

Comme si cela ne suffisait pas pour mépriser la cause écologiste, Emmanuel Macron poursuit son discours sur « l’ordre républicain » et l’annonce de la création de 200 brigades de gendarmerie. L’allocution a lieu 3 semaines après une répression policière inédite sur des militants écologistes à Sainte-Soline, sans aucun mot à l’égard des victimes.

Pendant ce temps, de nombreux projets de déforestation massive sont étrangement autorisés par les autorités en France, notamment la destruction de 70 hectares de forêt primaire en Guyane par un proche d’Emmanuel Macron, menaçant 47 espèces animales et un village autochtone1. De son côté, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, veut empêcher l’interdiction d’un herbicide, contre l’avis de l’ANSES.

Outre l’allocution vide du chef de l’État, outre les mesures gouvernementales dénuées de sens, nous constatons une autre disparition inquiétante : l’écologie a également quitté la majeure partie des prises de parole des élus. Pour beaucoup, ce n’est plus un sujet. Pourtant, l’heure est bien trop grave pour faire l’impasse sur cette question.

Nous n’attendons plus rien de l’exécutif. Oui, la réussite de son économie verte est un rêve, car l’écologie essentielle1, par définition, est celle de la coopération. Le modèle de la compétition ne peut qu’aggraver les crises en cours et à venir. Ce modèle est voué à l’échec de l’humanité. Seule une écologie radicale et anticapitaliste, ancrée dans le réel, sauvera le vivant. Nous appelons donc à un changement de président et de gouvernement, seule chance offerte à la survie de tous. Les politiques doivent cesser de se taire sur un sujet aussi capital.

Victor Pailhac et Azelma Sigaux, coordinateurs de la Révolution Écologique pour le Vivant (REV).

1 L’écologie essentielle prône la fin de l’exploitation du vivant et accorde une valeur intrinsèque à tous les êtres vivants.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.