“Je sais à ce moment-là que ce n’est pas un simple attentat, déjà tragique, mais un acte de guerre.” déclare le 13 novembre 2025 François Hollande dans un échange avec les lecteurs du Monde. Au préalable et pour couper court à toute complaisance envers les actes de terrorisme du commando armé et instrumentalisé par l’Etat islamique, autoproclamé ainsi par Daesch, mon billet ne soutient en aucun cas ces actes barbares aux motivations religieuses obscurantistes. Il est nécessaire de le préciser car aucun média, en ce jour de commémoration nationale, ne rappelle les causes historiques de cet attentat et toute version différente vous situe, à tort, dans l'apologie du terrorisme. En septembre 2014, suite au déploiement de l’Etat Islamique en Syrie depuis l’Irak, l’armée française s’engage dans l’opération Chammal au Levant, sur le territoire Syrien, pour appuyer la coalition militaire dirigée par les États-Unis comprenant principalement l'Arabie saoudite, la Jordanie, le Qatar, Bahreïn et les Émirats arabes unis.
Dans son rapport du 16/07/2025, le Colonel Maxime Schaffhauser, du Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA), précise le niveau important de l’engagement de la France à partir de 2014. Il s’agit d’un déploiement progressif d’avions de chasse Mirage 2000D et Rafale, des drones MQ-9, des avions de transport, ainsi que, plus ponctuellement, des avions de ravitaillement en vol et des E-3F AWACS (Système de détection et de commandement aéroporté) pour assurer la couverture aérienne. Une opération d’envergure par conséquent. Selon le Colonel Schaffhauser “la France a décidé de s’engager aux côtés de la coalition internationale dirigée par les États-Unis dans l’objectif de réduire l’État islamique, limiter sa capacité de projection de nuisance, diminuer son empreinte territoriale et soutenir les forces locales”.
En réponse à l’action de la coalition sur le terrain et dans le cadre d’une réplique de guerre asymétrique, Daesh active, équipe et finance une cellule terroriste franco-belge, constituée autour d'Abdelhamid Abaaoud et dirigée depuis Raqqa: attentats déjoués à Verviers en janvier 2015, la tentative d'attentat du train Thalys le 21 août 2015. Jusqu’aux massacres du 13 novembre 2015 en France. Notre pays n’est pas le seul touché, il y a eu des fusillades à Copenhague, en Tunisie (61 victimes).
Gérard Chaliand, géopolitologue de référence aujourd’hui décédé, a couvert sur le terrain de très nombreux conflits dans près de soixante pays. Il a abondamment traité du thème de guerre asymétrique ou irrégulière qui est l’arme du plus faible militairement au plus fort représenté par les puissances occidentales. Les attentats du 13 novembre 2015 entrent dans ce cadre. Chaliand précise dans un entretien sur France Culture avec Régis Debray la genèse du conflit au Levant qui a fait des victimes collatérales sur notre sol. Dans un article de Libération il déclare “Avec les islamistes, il n’y a rien à négocier. S’ils poursuivent un but, c’est l’écrasement de l’autre. Utopiquement, il cherche une victoire complète, inatteignable.”
Un système médiatique qui repose, en partie, sur l’émotion
Comme pour le 11 septembre 2001 avec les attentats initiés par Ben Laden, notamment à New York et au Pentagone, les massacres de Madrid du 11 mars 2004 qui firent 192 morts, ceux du métro de Londres le 7 juillet 2005 (56 morts) correspondent directement avec l’engagement des Etats-Unis, de l’Espagne et du Royaume-ni sur des théâtres d’opérations militaires. Les islamistes ont parfaitement compris les ressorts médiatiques des sociétés occidentales. Ils savent que les massacres de civils sont de grosses caisses de résonance mondiale de leurs actions car ils sont repris par un flot d’atroces images en boucle qui marquent profondément les esprits et obligent les armées occidentales à se repositionner.
Il est essentiel d'informer sur ces évènements tragiques, bien entendu, mais susciter en continu la désolation et l’angoisse parmi les citoyens sans en éclairer les causes profondes est profondément contre-productif et déstabilisateur. En cette période de montée des extrême-droites, les émotions négatives des peuples sont orientées par la droite et les partis identitaires contre des étrangers qui ne soutiennent pas le terrorisme dans leur grande majorité. C’est la fonction séculaire du bouc émissaire, coupable de tous les maux et paratonnerre des peurs, frustrations, ressentiment et déclassement.