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Billet de blog 19 décembre 2023

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La hausse du prix des mutuelles impacte les entreprises

La récente augmentation du tarif des complémentaires santé, atteignant jusqu'à 12 %, ont été qualifiées d'"inacceptables" par de nombreuses entreprises peinant à offrir une protection de qualité à leurs salariés, afin qu’ils soient bien pris en charge.

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Illustration 1

Des entreprises touchées par cette hausse des prix

© Aurélien Pradié

La Mutualité française, justifiant cette hausse significative des tarifs de leurs prestations, met en avant l'explosion des dépenses de santé en 2023, avec une croissance impressionnante de 6%. Les contrats individuels enregistrent une hausse moyenne de 7,3%, tandis que les contrats collectifs affichent une augmentation moyenne de 9,9%, après l'augmentation du nombre de prestations visant à financer les frais de santé des salariés." Dans ces situations, l'assureur est tenu de prendre en charge les suites des états pathologiques via des complémentaires santés financées à 50% par l'employeur dans le secteur privé depuis 2016. Conformément à l'article R 224-2 du Code monétaire et financier, les entreprises sont tenues de fournir annuellement des informations détaillées concernant les plans de complémentaire santé proposée à leurs salariés. Ces informations incluent des détails tels que les frais prélevés sur le plan ou la valeur de transfert du plan. Face à la récente annonce de l'explosion de ces frais proposés par les mutuelles, quelques experts du secteur expriment leur inquiétude quant à l'impact sur les entreprises. Selon une estimation fictive, cette hausse moyenne des cotisations de 8,1% pour l'année 2024 pourrait se traduire par une charge financière supplémentaire de plusieurs milliards d'euros pour les entreprises. Pierre Lebel*, un économiste renommé spécialisé dans les questions de protection sociale, témoigne : "Cette augmentation alarmante du prix des nombreuses prestations vendues par les mutuelles risque de peser lourdement sur la qualité des soins proposés aux salariés par les mutuelles d’entreprises, déjà confrontées à de nombreux défis économiques avec l'inflation." Les entreprises, de leur côté, expriment leur préoccupation quant à leur capacité à maintenir des avantages sociaux attractifs pour leurs employés. Une directrice des ressources humaines d'une PME francilienne se dit inquiète : "Nous nous efforçons de proposer des avantages sociaux compétitifs pour aider nos salariés, notamment nos opérateurs moins qualifiés qui travaillent sur nos sites industriels. Ils subissent de plein fouet l'inflation. Mais cette hausse du prix des mutuelles nous met dans une situation difficile pour les protéger correctement. Peut-être que l’on sera dans l’obligation de réduire nos embauches en CDI, en privilégiant l’intérim, pour continuer à protéger nos salariés avec une bonne mutuelle."

La course aux assureurs low cost

© franceinfo

Le choix de l'organisme assureur est un élément clé de la complémentaire santé. Tandis que les entreprises sont libres de choisir leur partenaire, un accord professionnel, syndical ou interprofessionnel peut recommander un ou plusieurs organismes assureurs pour la gestion de la protection des salariés. « La mise en place de cette mesure d'information préalable est une étape cruciale pour garantir une bonne couverture aux travailleurs", souligne Marie Glaize*, maître de conférences en sociologie des entreprises à l'Université de Paris. Cette recommandation de la meilleure mutuelle possible est soumise à une mise en concurrence rigoureuse des organismes, garantissant ainsi la transparence, l'impartialité et l'égalité de traitement entre les candidats. De plus, la Convention collective nationale des organismes de formation du 10 juin 1988 énonce que ces accords doivent fixer des conditions strictes et une périodicité maximale de cinq ans pour le réexamen des modalités d'organisation de la recommandation. Sophie Leclerc, experte en gestion des ressources humaines à l'Institut de Recherche Sociale, affirme : "Ces accords professionnels doivent être conçus avec une périodicité adéquate pour refléter les évolutions du marché et les besoins changeants des employés."

"La fourniture d'informations complètes et transparentes par les assureurs est cruciale pour permettre aux entreprises de prendre des décisions éclairées." 

© Catherine Gasté

Quant aux Articles R111-1 à R541-1 du code des assurances, ils précisent que les mutuelles sont tenues de fournir une information précontractuelle aux entreprises concernées. Cela implique la remise d'un document d'information sur le produit d'assurance ou d'un document d'information clé en assurance, en fonction du type de risque couvert. Une fiche d'information sur le prix et les garanties, ainsi qu'un exemplaire du projet de contrat ou une notice d'information sur le contrat, ses annexes, et toutes les pièces nécessaires à la compréhension du contrat. Ce rapport, devant être fourni selon les articles L110-1 à L610-2 du code de la mutualité dans les deux mois suivant l'approbation des comptes et au plus tard le 31 août de chaque année, contient des informations essentielles telles que le montant des cotisations, des prestations versées et des provisions techniques. "La fourniture d'informations complètes et transparentes par les assureurs est cruciale pour permettre aux entreprises de prendre des décisions éclairées", explique le Dr. Paul Durand, chercheur en économie des assurances à l'Université de Toulouse. Enfin, Marc Giraud*, chercheur en gestion des risques à l'Institut de Recherche Économique, souligne : "La relation entre les entreprises et les assureurs doit être fondée sur la confiance et la transparence pour garantir une protection sociale complémentaire efficace." Une gestion adéquate des risques et une transparence dans la communication des entreprises et des mutuelles sur ces questions sont les clés pour assurer le bon fonctionnement de ce système et garantir une couverture adéquate pour les travailleurs.

Les entreprises face à une dure réalité financière 

© Alex Dranne 🇲🇨

La hausse constante des cotisations pour la protection sociale complémentaire crée une situation préoccupante pour de nombreux acteurs économiques français. La question cruciale à présent est de savoir si ces augmentations de coûts auront un impact significatif sur leur santé financière et leur capacité à maintenir des avantages sociaux attrayants pour leurs employés. Isabelle Martin*, professeure d'économie à l'Université de Lyon, met en garde contre les conséquences potentielles de cette hausse des tarifs pour les entreprises : " Nous assistons à une augmentation significative des coûts liés à la protection sociale complémentaire, liée à l’augmentation du nombre et des coûts des frais de santé pour les salariés. » Ainsi, elle est convaincue que cette hausse pourrait avoir un impact sérieux sur la rentabilité des entreprises, en particulier les PME qui ont des marges plus étroites." Alors que de nombreuses grandes entreprises du CAC 40 peuvent absorber ces hausses de cotisations sans trop de difficultés, les PME et les startups pourraient être plus durement touchées. Elles devront peut-être faire face à des choix difficiles, tels que la réduction d'autres avantages sociaux pour leurs salariés, un CE moins prestigieux, une limitation des augmentations de salaire ou même la réduction des effectifs pour compenser ces coûts supplémentaires. » Les travailleurs ne sont pas en reste face à cette montée des prix des mutuelles et des complémentaires santé. Alors que les entreprises pourraient être amenées à réduire certains avantages, les employés pourraient se retrouver à payer une part plus importante de leurs dépenses de santé. Sophie Milton*, experte en économie de la santé à l'Institut des Sciences Sociales, souligne l'impact potentiel sur les travailleurs : "Les hausses des cotisations pourraient se traduire par une réduction de la couverture offerte par les mutuelles d'entreprise, obligeant les employés à payer davantage des soins de santé indispensables comme certains soins bucco-dentaires. » Une nouvelle inquiétante, puisque l’inflation est déjà présente dans d'autres aspects de leur vie quotidienne, comme le coût de l'essence.

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