
25 juillet 2020. L’île Maurice se réveille avec une marée noire sur ses côtes, dû au naufrage du vraquier japonais Wakashio. Plus de 1000 tonnes de carburant toxique se déverse dans les eaux et sur la côte. Alors même que les autorités déclarèrent immédiatement un état d’urgence environnemental et lancèrent un appel à l’aide international, de manière opportune l’opposition s’empara de la situation afin d’accuser le gouvernement, associé a des campagnes savamment menés sur les réseaux sociaux et plus particulièrement Facebook.
A l’instar du mouvement des gilets jaunes en France, tout un ensemble de complotistes et d’opportunistes se sont ainsi agrégés. L’une de ses pages, « Astère Chacha », a été fondé par un homme d’affaire, Rigg Needroo, diffusant aussi la propagande pro-Poutine. De même la page « Sel Solution Revolution » diffuse des informations locales en s’assurant de ne jamais les vérifier. Ces pages réunissent plusieurs dizaines de milliers de personnes, pour un pays, pour une population totale d’1,2 million d’habitants. La page « Sel Solution Revolution » regroupe plus de 85 000 membres. Proportionnellement, c’est comme s’il y avait en France un groupe Facebook de 4,75 millions de membres. Mais en y regardant de plus près, parmi les inscrits, un nombre de faux comptes en charge de diffuser les fausses informations est présent.
La récente augmentation des prix ressentie partout dans le monde est aussi l’occasion rêvée pour ses pages d’accuser les autorités. La page « La Kwizin News 3.0 » s’en était fait une de ses spécialités en faisant monter la colère sur les réseaux sociaux, mais aussi dans la rue.
Ces fausses informations sont dangereuses et néfastes pour nos démocraties. Elles visent à nuire à certains afin de favoriser d'autres, et il n’est pas rare de trouver derrière ces pages des personnes liées aux partis d’oppositions - un peu comme Florian Philippot en France . Un nom revient régulièrement à Maurice, Roshi Badain, du Parti Réformiste.
Ceux qui diffusent les fake news et les pages qui les propagent volontairement sont souvent persuadés d'être suffisamment experts et sous-estiment l'ampleur de l’impact négatif qu’elles ont. Les internautes font malheureusement preuve de sur-confiance concernant les fake news. Dans un monde surchargé d’informations, les fake news jouent un rôle néfaste en accentuant des tensions, et en jouant sur les frustrations comme nous pouvons le voir avec la page « Mauritius Meme Page » ou encore sur la page « Astère CHACHA », avec un document concernant le nouveau stade de Côte d’or et la liste des nouveaux directeurs. Aucune de ces pseudo-informations ne sont sourcées et vérifiées correctement, ou ne sont contextualisés.
La gravité de la situation liée aux fake news s’est révélée le 22 avril 2022. Dans la soirée, l’île Maurice fait face à une violente fronde des habitants de plusieurs endroits à cause de la hausse des prix du carburant et des denrées alimentaires de première nécessité.
La page « La KwiZin news 3.0 », depuis retiré par Facebook à cause des appels à la violence, a indiqué, avec plusieurs publications, aux internautes ce qu’il fallait faire. Les publications diffamatoires, vulgaires, nuisibles et portant préjudice à certaines personnes ont été publiées pour aggraver la situation. Des appels à la violence contre les forces de l’ordre sont venus de cette page, suscitant l’indignation, y compris de ceux qui étaient abonnés, mais surtout de Facebook, qui, face aux signalements, a décidé de la supprimer la page. Malheureusement, cela n’a pas empêché des violences et de débordements dans les rues, faisant craindre un épisode similaire à ce qu’ont connu les Etats-Unis le 6 janvier 2021, sous l’impulsion du mouvement complotiste QAnon. Normalement, le but d’une publication est d’informer ou de dénoncer les injustices et non pour faire sensation et d’inciter à la violence. Or dans ces pages, les articles ou les photos en question étaient malveillantes et prônaient la violence.
L’exemple mauricien incite à s’interroger encore une fois sur le rôle des fake news et de leur influence.
Quels sont les moyens dont on dispose pour réagir et se protéger des fake news ?
Pour y répondre, pour vous aider à y répondre, il existe plusieurs outils. Mais avant tout, il y a le bon sens ! Il faut se poser les questions suivantes :
- Qui a écrit cet article ?
- Qui a filmé ?
- Qui a enregistré ?
- Qui a dessiné ?
- Ou encore qui a photographié ?
Une information vraie provient généralement d'un auteur qui s'identifie clairement au début ou à la fin de l'article ou de la vidéo comme nous pouvons le constater sur la page du journal « 5plus ».
Autres questions :
- Qui est cet auteur ?
- Est-ce un expert ?
- Un inconnu ?
- Quelle est sa légitimité à délivrer cette information ?
- Est-ce qu’éventuellement, ils citent des sources vérifiables ?
Autres interrogations légitimes :
- où est publiée l'information ?
- Sur quel site ?
- L'éditeur, est-il un particulier ?
- Une association ou une entreprise ?
- Et ce site est-il une vitrine officielle, un blog ou un réseau social ?
- L’objectif du site, est-il de vendre ?
- D'informer ?
- De militer ?
- De faire le buzz ?
Autrement dit, demandez-vous sur quelle assiette on vous présente ce que vous devez avaler.
Mais aussi, de quelle nature est l'information qu'on vous propose ?
Nous pouvons également échanger avec nos amis, notre famille et nos collègues qui sont une bonne façon de mettre la main sur les fake news.
Évoquer une fake news, même pour en dénoncer le mécanisme fait-il aussi le jeu de cette infox qui se retrouve une fois de plus cité. Malheureusement elles finissent quand même par circuler. Du coup, la clé pour éviter la propagation des fake news, c'est donc de prendre le temps de vérifier l'information qu'on reçoit avant de la partager. Tout simplement.