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Billet de blog 31 janvier 2017

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Subvertir la présidentielle : pour une gauche unie aux législatives de juin

Derrière les appels au ralliement, plus ou moins hypocrites, les dilemmes de démocrates sincères face à l’élection présidentielle apparaissent au grand jour. Pour surmonter leurs différends stratégiques, MM. Hamon, Mélenchon et Jadot doivent se tourner vers les législatives.

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Avec la victoire de Benoît Hamon, l’honneur du Parti socialiste est-il repêché des abysses où l’avaient plongé cinq ans d’un libéralisme aveugle et dédaigneux ? Quoi qu’on en pense, les appels à une fusion avec les candidatures de MM. Jadot et Mélenchon (ici, ou encore ) étaient attendus. Au nom d’un front uni face à la droite, les désaccords devraient céder le pas aux convergences, et tout serait pardonné du jour au lendemain. Mais les intéressés eux-mêmes peuvent-ils l’envisager ?

Depuis des mois, la gauche éprouve les plus grandes difficultés à croire en une victoire présidentielle. Les plus pessimistes des soutiens de Jean-Luc Mélenchon voient aujourd’hui le revers de Manuel Valls, tout euphorisant qu’il soit, comme une erreur tactique qu'auraient commise les victimes de la trahison du quinquennat, trop promptes à déposer leur colère dans les urnes. MM. Mélenchon et Hamon mènent leurs campagnes respectives avec intelligence et s’assurent peu à peu la fidélité de leur électorat le plus évident. Au premier les communistes par tradition, les jeunes bourgeois révoltés, les ouvriers les plus imperméables au lepénisme et un précariat à la conscience de classe incertaine. Au second les profs, cadres progressistes et apôtres en tout genre d’une société ouverte. Soit le cœur de cible d’EELV, qui a perdu son pari d’une candidature hollandaise ou vallsiste et peinera à s’en remettre  (à moins que Benoît Hamon ne tente un recentrage risqué pour éviter l’éclatement du PS). Dans ces conditions, les trois candidats auraient beaucoup à perdre dans un accord tardif : d’un côté, le risque est celui de l’ « énième replâtrage d’une gauche plurielle vassalisée par un PS hégémonique », comme l’écrit Noël Mamère ici, de l’autre M. Hamon se rêve en sauveur du PS, au bord de l'éclatement. Car les oracles statistiques lui promettent des scores que, rue de Solférino, on n’espérait sans doute plus (deux chiffres !). 

Ne réduisons pas cette situation inextricable à une querelle d’egos tenant à « aller au bout » : ce serait insulter les trois candidats et leurs équipes. Leurs démarches, comme leurs programmes, présentent de réelles divergences que les campagnes séparées se chargeront de rappeler. Toutes sont tendues vers l’élection présidentielle, le jugement dernier qui, depuis 1965, a presque toujours garanti au vainqueur la majorité nécessaire à ses desseins. Avec l’aide ponctuelle du 49-3, blanc-seing pour les exécutifs les plus brusques. Mais le coup d’Etat permanent se paie par l’hypermédiatisation des candidats : un futur président doit être infaillible, inflexible, irréprochable surtout. Et par son corollaire : le compromis politique est un aveu de faiblesse qui doit rester en coulisse, soustrait au regard des électeurs-adorateurs. Les Français croient – de moins en moins – gouverner à travers leurs représentants, ils ne font que choisir l’un des plats préparés qu’on leur propose. L’Assemblée nationale : un micro-ondes qui se prend pour un haut-parleur.

MM. Jadot, Mélenchon et Hamon s’accordent à reconnaître les dangers d’un tel système et à lui préférer une forme de république parlementaire, où les programmes de gouvernement dépendraient des rapports de force révélés lors des élections, non l’inverse. Si leurs soutiens, alliés pour l’occasion, obtenaient une majorité à l’Assemblée nationale en juin prochain, ils pourraient s’accorder sur leur autodissolution au profit d’une constituante.

 Dans cette lumière, la victoire d’une gauche unie aux législatives annulerait aussitôt le pire des fiascos présidentiels, pour peu que tous les candidats investis s’engagent sur quelques points fondamentaux (abrogation de la Loi travail, investissements pour l’accueil des réfugiés, dénonciation des traités budgétaires européens, et surtout lancement d’un processus constituant). Mieux encore, les trois hommes pourraient s’accorder à subvertir le sens de la présidentielle, envisagée comme une « primaire » dont dépendrait la distribution des investitures pour les législatives entre les différentes formations, selon des modalités prédéfinies, par exemple au prorata des scores des trois candidats au premier tour. Les usines à gaz peuvent, après tout, remplir leurs fonctions.

Certes, les trois formations – quatre avec le PC – ont déjà désigné leurs candidats aux législatives. Pour toutes, un accord relèverait de l’acrobatie stratégique, menaçant tout ensemble la pureté de ligne recherchée par EELV et la France insoumise et l’intégrité du PS chère à Benoît Hamon. Mais ces problèmes importeront-ils encore pour une gauche débarrassée des pièges présidentialistes ?

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