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On peut voyager pour la former, la penser éternelle ou mythique, courir après ou en trouver une seconde. La jeunesse, même si elle se contente de débuter notre vie d’humain, sera toujours au centre des conversations et des attentes. Elle est celle que l’on est en train de traverser, que l’on a vécue, que l’on a perdue, ce bon vieux temps où l’on faisait les 400 coups, la vie devant soi, si peu de responsabilités, tant de rêves. La jeunesse n’a ni frontière juridique, ni ligne de départ, ni fin précise. Que l’on se sente jeune malgré son âge, que l'on prenne un coup de vieux ou que l’on trompe la médecine, nous avalons à chaque seconde des clichés sur son compte.
La jeunesse est associée à certaines images liées à la puissance d’agir, à la capacité à se révolter, à transformer le monde. C’est une représentation sociale, une mythologie : celle de la désinvolture, du no future et des fantasmes. Un imaginaire partagé du temps. Une énergie collective pour changer les choses ou les maintenir en place. C’est comme ça, on peut difficilement passer à côté des lieux communs et des injonctions qui la traversent.
Parce que parler de la jeunesse renvoie trop souvent à la façon dont nos sociétés, capitalistes et mondialisées, investissent notre perception du corps afin d’y installer des frontières entre jeunes et vieux, entre capables et incapables, entre obsédés et frigides, entre une jeunesse réaliste qui se prépare à l’âge adulte et une jeunesse perdue qui se complait dans ses révoltes, nous avons tenté de prendre ces mythes à rebrousse poil et les confronter à la réalité.

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Bien sûr, les mythes sont coriaces. Il faudrait que la jeunesse soit fougue, puissance d'agir, défi au temps, capacité à se révolter. La jeunesse est mythifiée à travers tant de films, tant de romans, tant de poésies et tant de peintures. Ces mythes nous racontent parfois des vérités alors nous ne les avons pas ignorées. Mais nous avons aussi investi des territoires qui prennent soin de présenter la jeunesse dans sa pluralité : jeunesses et jeunes au pluriel plutôt que jeunesse au singulier.
Les contributions de ce numéro 2 évitent de suivre les lignes tracées par l’imaginaire parfois manichéen des institutions et des siècles, un imaginaire de cassures et de séparations qui ne représente pas toujours ce que sont les jeunes d’aujourd’hui.
Les contributions très éclectiques de ce numéro ont su à travers des formes variées — poésie, essai, reportage, fiction — convoquer ces lignes de force et évoquer la façon dont les jeunesses détournent voire estompent ces lignes.

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Ce numéro s’articule en trois chapitres, trois tendances, trois ressentis, qui dessinent les lames de fond traversant les contributions : les mythes, les mondes, les places. Les mythes surplombants de la jeunesse avec leurs vieilles histoires et leurs éternelles injonctions. Les mondes que les jeunes rencontrent, racontent, traversent et construisent par le feu de l’insouciance ou le fer de la lutte. Les places : celles qui nous voient naître, celles auxquelles on est assigné.e, les territoires et habitations qu’on occupe, nos manières d’explorer les espaces terrestres, nocturnes ou numériques.
Du bâti urbain aux stations de haute montagne, des voitures individuelles aux bus intercommunaux, de l’intimité de la chambre et du cabinet de psychanalyse à la sphère publique des réseaux : ce sont ces chemins que la jeunesse emprunte.
Les fous et les folles, les queer, les geeks, les meufs du coin et les gars de là bas, celles qui jettent un regard dans la foule pour être vues, ceux qui partent pour mieux revenir, celleux qui bricolent des images, ceux qui crachent dans le bus et celles qui craquent devant leur psy, celleux qui ne veulent pas quitter leur cambrousse et celles qui ne veulent pas sortir de leur chambre. Ceux qui ne deviennent jamais adultes.

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Nous avons voulu rendre hommage à ces jeunesses, à mille lieux de la jeunesse idéale, qui tracent pourtant une cartographie de nos façons d’habiter la terre, de nos puissances d’agir et de nos inerties.
Et surtout parce que nous voulons que vous vous sentiez jeunes pour toujours, nous avons déplacé les périodes et les lieux, les luttes et les insouciances, les histoires et les images, et croyez-nous : la jeunesse est partout ! Elle crépite ou sommeille en chacun d’entre nous, nous ravive ou nous brûle : elle existe plus comme une qualité, un caractère ou la couleur d’un œil que comme un chiffre ou une période. Il faut juste l’avoir vécue pour la réactiver ou pour qu’un jour, bon gré mal gré, elle se meuve à travers nous. Une minute passée avec elle nous permet de la trimballer toute une vie et d’en parler des décennies. Tomber sur l’appel à contribution d’une revue et relancer la machine, y penser à chaque instant, s’asseoir devant son ordinateur et recracher des éclats de jeunesse pour se soulager ou les poser délicatement quelque part pour les donner aux autres.
Telle était notre envie, à l’image de Polymorphe corp. qui accueille des artistes, des artisans, des conteurs et des conteuses d'histoires, d'accueillir les témoignages, tantôt attachants, tantôt révoltants, tantôt violents, de la jeunesse des humains qui nous entourent.
Nous avons désormais une seule certitude : personne ne sort tout à fait intact·e d’une discussion avec sa jeunesse. Que vous en partagiez les histoires ou que vous vous laissiez emporter par les récits de celles des autres, vous allez embarquer pour un voyage aux confins des souvenirs et de leur éternel retour.
Alors comme disent celles et ceux qui restent à quai : “Roulez jeunesse !”
Bony Ska, Lucas Fritz et Xavier Prieur (avec l'appui de l'équipe éditoriale de la revue Polymorphes)
Édito de la revue Polymorphes consacrée aux jeunesses que vous pouvez acheter en pré-vente ici :
Pré-vente REVUE POLYMORPHES numéro JEUNESSES

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Polymorphe corp a été créée en 2018 et agit pour la valorisation de son territoire rural et en faveur de la création artistique. L’association y développe des activités culturelles, accueille et accompagne des artistes émergents et promeut un mode de vie respectueux de l’environnement.
Pour Polymorphe, la campagne est le terrain idéal pour relever les défis environnementaux et sociétaux qui s'imposent. En effet, elle nous permet de repenser nos fonctionnements - mode de production et de consommation plus responsables, préservation de la nature, développement de compétences manuelles et artisanales - et notre rapport au temps et à l'espace.
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