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Billet de blog 28 décembre 2019

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Algérie : La junte opte pour les baltajjyias pour couvrir la politique du pire

Face à la détermination du peuple pour instaurer un état civil, la junte s'est résolue à lâcher ses baltajjyas pour couvrir sa politique du pire de légalité, qui leur garantira de rester agrippés au robinet de la rente sans lâcher prise et continuer à s’en servir dans l’impunité totale.

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La junte opte pour les baltajjyias pour couvrir la politique du pire

-Youcef Benzatat-

Face à la détermination du peuple pour instaurer un état de droit, synonyme de poursuites judicaires à l’encontre des membres corrompus de la junte et pour l’instauration d’un état civil, qui les privera du contrôle de la rente, ces derniers se sentant menacés se sont résolus à lâcher leurs baltajjyas pour couvrir leur politique du pire, qui leur garantira de rester agrippés au robinet de la rente sans lâcher prise et de s’en servir dans l’impunité totale.

Les baltajjyas sont ces citoyens démunis de toute éducation et de moyens de subsistance et dont le parcours de vie les a emmenés vers les chemins de la délinquance et la criminalité de tout genre. Ce sont de véritables crapules qui vivent en dehors des sentiers communs de la société. Des marginaux qui sont connus et fichés par la police et la gendarmerie. Ils sont des centaines de milliers en nombre, semant l’insécurité et la terreur dans les villes et les villages. Leur vie se résume à un vat et viens perpétuel entre une liberté sous contrôle et l’incarcération dans les prisons. Cette vulnérabilité fait d’eux des proies faciles pour être recrutés par la junte, endoctrinés et lâchés contre les manifestants, encadrés par les services de sécurité infiltrés parmi eux, en contrepartie d’une rémunération financière et un allègement, voire l’effacement, de leurs peines.

La politique du pire dans laquelle la junte s’est engagée pour contrer la résistance du peuple consiste à casser la doctrine pacifiste (silmya) de la révolution, en injectant les baltajjyas pour semer la peur et la terreur au sein des manifestants en provoquant des heurts violents, pour transformer les marches pacifiques en violences et troubles à l’ordre public. Le but recherché est de dissuader les manifestants d’abandonner leur combat politique pacifique, soit par le renoncement à participer aux prochaines manifestations des mardis et vendredi, soit de les inciter à réagir à la violence par la violence.

Dans les deux cas la junte s’en sort vainqueur, soit par l’affaiblissement de la mobilisation populaire, qui verra un grand nombre de Hirakistes abandonner les marches par peur de la violence, soit par l’exacerbation de celle-ci, qui légitimera le recours à l’état d’exception tant souhaité par la junte.

La raison qui les empêche de recourir directement à une répression totale pour mettre fin à la révolution et mener avec efficacité leur politique du pire, au lieu de passer par la provocation des conditions de sa légalité, est dictée par la pression de l’opinion nationale et internationale, ainsi que par leurs partenaires internationaux dans la gestion de la rente.

Pour toutes ces raisons de recherche de la légalité, ils n’ont pas hésité un instant, depuis le début du Hirak, le 22 février de cette année, à recourir aux méthodes les plus Goebbelsiennes de manipulation et de propagande, qui consistent à répéter inlassablement le mensonge de plus en plus grossièrement jusqu’à ce qu’il finisse par apparaître vrai.

La traque et l’incarcération du clan adverse à cette junte au pouvoir fut présentée comme une lutte implacable contre la corruption. Même si tout le monde ne voit qu’aucun de ses membres n’a été inquiété par cette traque.

Le soutient de la junte au Hirak martelé à chaque discours par l’homme fort de cette junte, alors que tout le monde constate l’empêchement des personnes à accéder aux centres-villes pour rejoindre les manifestants et l’arrestation et l’incarcération des figures emblématiques de la révolution.

L’annonce de la participation électorale aux présidentielles du 12 décembre qualifiée de vote massif de près de 50 % de votants, alors que tout le monde avait constaté que les bureaux de vote étaient déserts et que les estimations ne dépassaient guère les 8 % de votants, relevant du reste pour l’essentiel des agents des services de sécurité et des soldats de l’armée nationale mobilisés et déplacés pour la circonstance.

Même les funérailles de celui qui incarnait cette junte ont été organisés et présentées par les médias publics et privés, à la solde de la junte, sur la base d’un grossier mensonge. Près d’un millier de bus avaient transportés de l’intérieur du pays des dizaines de milliers de personnes vulnérables pour venir constituer devant les caméras une impression de foule accompagnant le cortège mortuaire, en contrepartie d’une modeste somme d’argent. Le pire est que les propagandistes ne s’étaient même pas préoccupés à organiser leur retour dans leurs villes et villages. Pour la plupart, qui n’avaient jamais mis les pieds à Alger, se sont retrouver abandonnés à eux-mêmes, errant dans les différentes banlieues d’Alger, hagards et sans aucun repère pour s’orienter devant une population médusée.

Pour donner également une impression de foule massée aux portes du cimetière d’El Alia où la dépouille devrait être enterrés, des milliers de jeunes soldats de l’armée nationale ont été mobilisés et transportés à cet endroit.

Et pour rendre le mensonge encore plus grossier, les techniciens des laboratoires de la fabrication de l’image en ont rajouté une couche, en retouchant après coup les images filmées pour grossir encore l’image de la foule et donner une impression au spectateur d’une immense foule accompagnant le cortège funéraire jusqu’à la mise à terre du défunt.

L’objectif était de rehausser le sentiment d’adhésion du peuple aux actions menés par cet homme et la junte qu’il représentait devant l’opinion nationale et internationale, sachant que les images de cet enterrement avaient fait le tour du monde.

Toute cette stratégie goebbelsienne n’a rien pu faire devant la détermination du peuple à vouloir abolir la dictature de cette junte militaire, pour instaurer un état civil, démocratique et social. Au contraire, celle-ci ne fait que se renforcer de jour en jour et rien ne semble venir l’arrêter. Le recours aux baltajjyas traduit chez les membres de cette junte un échec total de leur tentative de goebbelisation de leur contre révolution et les plonge dans un désarroi et une panique insoutenable, faisant craindre le basculement de la société dans la violence et la répression.

Tel un animal blessé, la junte semble s’enfermer de plus en plus dans le choix de la politique du pire au risque d’user de tous les moyens pour se maintenir aux commandes de la gestion de la rente et de se préserver d’éventuelles poursuites pour dilapidation des richesses nationales et de trahison de la volonté du peuple à vouloir s’affranchir de la servitude et du sous-développement, par une justice indépendante émanent de la souveraineté populaire.

Le Hirak sait ce qu’il lui reste à faire : continuer à exercer une pression constante sur la junte, en maintenant les manifestations à leur rythme habituels, sans tomber dans le piège de la violence souhaitée par celle-ci. Démasquer et dénoncer inlassablement la stratégie de goebbelisation de la contre révolution par la junte et en particulier celle de l’introduction des baltajjyas, comme l’avaient fait des hirakistes pendant le 45° vendredi, après leurs entrées en scène massives et très violentes et comme l’avait suggéré le sociologue Lahouari Addi, en filmant leurs actions sur le terrain et en les diffusant sur les réseaux sociaux pour les identifier et les confondre devant leurs familles et leur entourage.

Y.B.

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