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Billet de blog 28 juin 2012

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L’extradition de Baghdadi Mahmoudi : une raison d’état commune à trois pays

La  crise politique en Tunisie a atteint son paroxysme depuis l’extradition du premier ministre libyen Baghdâdi Mahmoudi et les députés de l’opposition, et même certains députés de la troïka au pouvoir (CPR et Ettakattol), s’apprêtent à déposer vendredi une motion de censure contre le gouvernement islamiste qui a opéré en catimini, dimanche à 5 heures du matin, sans obtenir la signature du Président Marzouki et sans l’assentiment de l’ANC (Assemblée Nationale Constituante).

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La  crise politique en Tunisie a atteint son paroxysme depuis l’extradition du premier ministre libyen Baghdâdi Mahmoudi et les députés de l’opposition, et même certains députés de la troïka au pouvoir (CPR et Ettakattol), s’apprêtent à déposer vendredi une motion de censure contre le gouvernement islamiste qui a opéré en catimini, dimanche à 5 heures du matin, sans obtenir la signature du Président Marzouki et sans l’assentiment de l’ANC (Assemblée Nationale Constituante).

Les ténors du parti Ennahdha- parti au pouvoir-  ont justifié par des arguments cousus de fil blanc le timing par le fait que le président Marzouki  n’était pas joignable étant au sud dans une zone de non couverture GSM et le comble est que M Baghdadi Mahmoudi a été extradé d’un aéroport militaire  qui dépend normalement de Marzouki chef suprême des armées (probablement la seule prérogative qui lui a été laissée par le parti islamiste Ennahdha qui agit en pays conquis en ne respectant ni l’opposition ni ses partenaires ni aucune institution).

Le plus grave est qu’il devient évident que dans les trois pays la  France, la Tunisie et la Libye, tout est affaire  de gros sous.

En France bien sûr où il y a de fortes présomptions de financement occulte de la campagne électorale de l’ex-Président de la République Française Sarkosy.

Je ne m’étalerais pas là-dessus car cela a été traité par d’excellents billets parus sur Médiapart.

En Tunisie, des documents font état d’une transaction portant en contrepartie de cette extradition de :

-       L’octroi par la Libye d’un don de 100 millions de dollars

-       L’octroi d’un crédit d’un montant équivalent sans intérêts

-       La fourniture du gaz à tarif préférentiel

Le comble est que le ministre des finances sur un plateau télé et à une heure de grande écoute  a reconnu explicitement la transaction  ayant même le culot et l’effronterie d’affirmer que la politique n’est pas une question de morale mais d’intérêts!

Cela avait déjà commencé  quand  un  membre du bureau politique du parti islamiste Ennahda, Saïd Ferjani. s’est déplacé personnellement  en France pour essayer  de faire un deal  dans ce sens  (Voir l’article de Médiapart « Chantage d’état autour de fonds secrets  libyens paru le 24 Mai 2012 qui note qu’un leader islamiste tunisien  a rendu visite, le 5 mai, à Paris, à Me Marcel Ceccaldi pour lui proposer une « négociation globale »).

Ce même Saîd Ferjani a reconnu les faits et affirmé aux médias qu’il a agi de son propre chef  (sic !), ce qui prouve  que chez les islamistes d’obédience wahhabite (Arabie Saoudite),  l’argent même sale extorqué par le chantage  n’est pas tabou pourvu qu’il soit blanchi pour devenir halal surtout si on envisage de  renflouer une cagnotte en vue de la prochaine campagne électorale d’Ennahdha cette fois-ci après le financement présumé de la campagne de Sarkosy.

Les  membres du gouvernement tunisien nous prennent pour des idiots quand ils parlent d’indépendance de la justice en Libye ou de garantie d’un procès juste et équitable  quand on connaît l’absence d’institutions à part les comités populaires de Kadhafi. Pour ne prendre que deux exemples qui illustrent le chaos en Libye : les détenteurs du  fils de Kadhafi Séif el Islam refusent de le transférer à la partie censée le juger légalement et des membres du CPI (tribunal International)  sont arrêtés par des  milices pour une raison obscure.

Les militants islamistes d’Ennahdha savent pourtant que des pays comme la France ou l’Angleterre et j’en passe s’ils les avaient extradés vers la Tunisie sous le régime de Ben Ali,  les exilés d’entre eux auraient croupi dans les prisons tunisiennes  après d’ignobles tortures.

En Lybie  enfin, Il n’échappe à personne que la révolution–OTAN-BHL  n’est qu’un coup d’état de palais sous la houlette de l’ami Abdeljalil ex ministre de la justice de Kadhafi et président du CNT, et que les intérêts bien compris énoncés bien avant l’intervention armée des maîtres France-Angleterre-USA  étaient l’ossature du deal pour un nouveau partage des richesses pétrolières et gazières de la Lybie.

Tout le monde sait aussi que Baghdadi Mahmoudi dispose outre des codes des fonds secrets  libyens, des preuves de corruption de la majorité des successeurs de Kadhafi actuellement au pouvoir.

Il y a fort à parier que l’ancien premier ministre de Kadhafi  (dont il ne s’agit pas d’ excuser  les crimes avérés) va subir les pires tortures et sévices qui vont  permettre d’un côté d’avouer à un cercle restreint du CNT tout ce qui est utile aux nouveaux maîtres du pays  et de l’autre d’être empêché d’avouer ce que le commun des mortels ne doit pas savoir sur ces mêmes nouveaux maîtres

Donc l’extradition de Baghdadi Mahmoudi (il est plus approprié de parler de rapt tant les conditions n’ont respecté aucun aspect juridique national ou international)  induisant une omerta et des aveux forcés arrange les gouvernements des trois pays : l’ex gouvernement Sarkosy pour la France et les deux actuels gouvernements « révolutionnaires » de Tunisie et de Libye.

http://blogs.mediapart.fr/blog/abderrazak-lejri

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