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Billet de blog 19 octobre 2011

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Michel Onfray en intellectuel de gauche papillonnant

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Il est un philosophe qui se pique de radicalité politique mais qui, au gré des aléas de la gauche radicale, ne sait plus où donner de la tête : Michel Onfray a cru en Olivier Besancenot jusqu'à l'affaire de la candidate voilée. Sa philosophie politique libertaire ne l'a pas aidé à démêler l'écheveau de mystification politique qui a été à l'oeuvre à cette occasion. Mais l'indulgence est de mise, tellement de militants du NPA se sont eux-mêmes retrouvés à embrouiller leur dialectique féministe-laïque ! On croyait, à l'entendre (1), que Mélenchon, le républicain au carré sur la laïcité et la défense des services publics, était devenu sa maîtresse référence. Eh bien, non, le candidat du Front de Gauche "alterne avec talent la défense brillante de justes propositions et l'accumulation de bêtises en soutenant Fidel Castro, la politique chinoise au Tibet ou la vertu guillotineuse de Robespierre" comme nous lisons dans la tribune que vient de publier Le Monde. Tribune où nous découvrons montebourgien notre philosophe hédoniste avec, notons-le bien tout de même, une constance antilibérale, bien mise en évidence par le titre de cet écrit, Avec François Hollande, les vaches libérales seront bien gardées !, qui pourrait atténuer l'impression délétère que ce cheminement politique s'apparente à un piètre déplacement toujours plus à droite dans l'échiquier politique de la gauche par affadissement d'un esprit critique, il y a peu, si flamboyant..

L'éloge d'Arnaud Montebourg auquel s'essaye bancalement, à cette occasion, Michel Onfray, joint à la rudesse (ajustée, elle) des critiques adressées aux duellistes/duettistes de la primaire, nous oblige à constater tristement que la rigueur conceptuelle et argumentative du philosophe n'est plus de mise. Au point qu'il nous semble, à la réflexion, que chacune de ses interventions sur le champ politique ajoute une pierre à ce qui s'avère être un véritable chemin de croix analytique. Qu'on en juge déjà par ce qu'il écrit sur Arnaud Montebourg :

"Reste l'espoir soulevé par Arnaud Montebourg, qui a permis d'entendre une vraie voix de gauche au sein même du Parti socialiste. Il a souhaité gauchiser son parti" [c'est nous qui soulignons]

L'espoir, que dis-je, la réalité d'une vraie voix de gauche, Montebourg ? Michel Onfray a-t-il cessé de suivre l'actualité au point d'ignorer que ledit Arnaud Montebourg, loin de garder le cap d'une supposée radicalité et de sa proclamée équidistance envers les deux repoussoirs sociaux-libéraux de la primaire, a tout bonnement rallié en rase campagne celui pour lequel notre philosophe libertaire a la dent la plus dure ? (2) On reste confondu par la désinvolture bien peu philosophique, encore moins libertaire, avec laquelle est déniée purement et simplement la réalité d'un véritable alignement politique sur ce que le PS compte de plus inféodé au capitalisme : "responsable mais pas coupable, concède Michel Onfray, Arnaud Montebourg a signalé son choix personnel et précisé qu'il n'en faisait pas une invitation à l'imiter". Quelle sobriété analytique et quelle déconnexion avec la "vérité" d'un Montebourg déclarant avec un zèle servile, le soir du résultat du second tour de la primaire, que le PS avait acquis "un leader incontesté" en la personne de François Hollande, au terme d'un "extraordinaire processus de rénovation du parti". (François Hollande: «C'est le rêve français que je veux réenchanter»). Au préalable le même personnage supposé incarner l'espoir d'une vraie gauche avait ostensiblement trinqué devant les caméras avec "son" candidat "à sa victoire" ! (3)

Comment Michel Onfray peut-il donc se laisser aller, au vu de ces péripéties toutes chaudes, à l'énormité de créditer le député de Saöne-et-Loire de suivre "une ligne claire depuis son refus de Maastricht" quand personne n'ignore, par ailleurs, que, suite à un positionnement contraire, non au Traité de Maastricht fondant l'Union Européenne ... en 1992, mais au traité établissant une Constitution pour l'Europe (TCE) en 2005 (4), il a fait, en tant que son porte-parole, la campagne présidentielle de la ouiouiste Ségolène Royal. Dirigeante socialiste pour laquelle Michel Onfray s'est pourtant montré d'une brutale causticité (5). "Une ligne claire" celle de Montebourg ? Au seul énoncé d'un programme dont l'histoire nous avertit que, chez les socialistes, surtout depuis leur socialibéralisation, il n'a d'autre sens que favoriser des jeux politiciens compatibles avec la primauté accordé au marché capitaliste ? Ce que le héros de Onfray s'est empressé de faire en quelques jours seulement !

Que penser enfin de l'espoir mis, en conclusion de la tribune, dans la possibilité qu' Arnaud Montebourg recoure au modèle de la stratégie "unitaire" de Mitterrand dans les années 70 pour faire l'unité... de la gauche antilibérale ?! Maastricht, TCE, Ségolène Royal, Hollande et in fine Mitterrand, c'est la "ligne claire" de la démonstration politique de Michel Onfray qui se fait des plus sinueuses jusqu'à en devenir dérisoirement inconsistante.

Sous les dehors condescendants du philosophe-sait tout qui se mêle de tout, Michel Onfray se prend les pieds dans la complexité réellement existante de la politique et, tout à ses virevoltements approximatifs, il en vient à oublier l'obligation pour un philosophe s'essayant à interpréter ce monde gris peuplé de Hollande, Sarkozy, Aubry, Copé, Royal...et Montebourg, de conserver clarté et rigueur dans l'approche des faits. Condition minimale pour, en toute modestie, être sérieux et, par là, espérer être pris au sérieux.

(1) Michel ONFRAY soutient Mélenchon & le projet politique du PG

(2) Nous rappelons ici, à propos d'Arnaud Montebourg, ce que nous avons été amené à dire dans notre texte sur les complaisances de Jean-Luc Mélenchon envers celui-ci : Montebourg, Vergès... ou Mélenchon en amant transi de l'unité à gauche (autour de lui !) et Mélenchon et Montebourg, dérapage mal contrôlé

(3) Vidéo. A Ris-Orangis, Hollande et Montebourg trinquent à la victoire

Un texte éclairant sur le parcours de Montebourg : Montebourg, l’homme qui ne s’aime toujours pas !

(4) Primaire PS : Arnaud Montebourg et le traité de Maastricht

(5) "Cette fausse héritière de Mai, véritable fille du pompidolisme ou du giscardisme formaté par Science Po et l’Ecole Nationale d’Administration, n’a pas d’idées, pas de programme. Son fantasme autoritaire et disciplinaire est mal dissimulé par le sourire et les tailleurs de sa féminitude." (Présidentielle 2007 : Michel Onfray à propos de Ségolène Royal qui le déçoit) On comprendra à la lecture de cet article qu'il convient d' ajouter Ségolène Royal à la liste des "politiques" en qui Michel Onfray a cru avant de les crucifier par déception !

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A lire

Michel Onfray dérape !

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