Non messieurs Le Guen, Collomb et consorts, vous n’êtes pas des socialistes réformateurs, ce que vous revendiquez. Professionnels de la politique, gavés au cumul des mandats, vous n’êtes rien d’autre que la conservation d’un système qui vous nourrit.
Et on le voit bien dans votre billet dans Libération du 28 novembre. Les formulations que vous énoncez, les propositions que vous faites, ne sont en rien le produit des vos réflexions et analyses personnelles. Elles ne sont que la reprise comportementaliste de ce que vous entendez dans la bouche de vos amis du Medef.
Vous dites sans rire que votre « réformisme est issu de l’écoute quotidienne des Français ». Et, au prétexte que ces français demandent du travail, vous osez écrire ces mots terribles : « Il faut en finir avec ce système dual qui sacrifie des millions de personnes sur l’autel des garanties accordées aux bénéficiaires d’un statut stable ».
Qu’est ce à dire ? Qu’il faut opposer entre eux les travailleurs ? Ceux qui sont au chômage et ceux qui ont un travail ? Que doit on comprendre ? Que c’est un peu moins de garanties d’un coté qui résoudra la questions de l’autre ?
Mais depuis des années qu’on détricote le travail, le chômage a-t-il diminué. ?
Depuis des années qu’on fragilise le travail aux profit de la « flexibilité », depuis des années que les CDD sont de plus en plus nombreux (80% des embauches aujourd’hui), le chômage a-t-il diminué ?
Depuis Hollande et ses aides aux entreprises, ces dernières embauchent elles davantage ?
Vous n’êtes pas des réformateurs messieurs. Car quelles réformes proposez vous ?
On attendait d’hommes se revendiquant de la gauche une critique sur l’économie de marché. Elle serait bienvenue. Non, on trouve sous votre plume une réforme du « marché » mais c’est du « marché du travail » qu’il s’agit. Et celle-ci, on l’a déjà deviné, ne se traduit pas par plus de protection du travailleur, mais par : « des engagements sur les baisses de charges ». On dirait du Gattaz.
A vos yeux comme aux siens le problème de l’entreprise c’est le travailleur. C’est le « prix » du travail », qui ne saurait dans votre pensée être considéré comme un investissement.
A vos yeux, ce n’est jamais celui du management. Alors qu’une étude, relayée par Jérôme Barthélémy professeur à l’ESSEC, montre que la qualité du management en France explique une partie du décrochage de la compétitivité. (Bloom, Genakos, Sadun et Van Reenen, Academy of Management Perspectives, février 2012).
Ce n’est jamais non plus le patron et son coût. (Retraite chapeau, salaire exorbitant dans les grands groupes).
A vos yeux, c’est le système du travail qui doit être mis en cause. Pas le système économique néoclassique qui nous impose ses règles frelatées. Allez donc lire « L’imposture économique » de Steve Keen (Editions de l’Atelier).
Il y a bien entendu des dogmes à gauche. Vous le dites. Il faudrait les abandonner, c’est certain. Mais pour vous il faut les « réorganiser ». « Nous prônons la réorganisation des pratiques, des structures et des dogmes de la gauche française » Aveu sublime !
Vous pointez encore que, en France : « les dépenses publiques et les dépenses sociales sont les plus élevées au monde ».
Sans vous questionner un instant sur ce que représentent ces dépenses, ni poser une seule fois la question de la réduction des moyens de l’Etat au cours des quarante dernières années, ni le ‘’comment’’ de la chose.
Allez lire Piketty sur ce qu’il dit du poids de la dette, de la manière de la réduire, de l’injustice fiscale, de la rente. Vous y trouverez peut être matière à « réorganisation ». Et retrouverez, il est possible de rêver, cette place à gauche que vous n’occupez plus.