Dieudo, je suis fan de ton humour, bien souvent en riant aux éclats, mais aussi avec des réserves qui font l’objet de cette missive et que je détaillerai plus avant. Je suis tout autant admiratif de l’énergie inébranlable que tu mets dans ton combat pour la paix et la compréhension des êtres et des peuples (même si c’est moins visible dans certain cas que dans d’autres), et je me pose toujours, aujourd’hui comme hier, la question de savoir si tu es d’une quelconque façon que ce soit, antisémite ou pas.
Et ce pas du tout en fonction de ce que les autorités françaises et l’arsenal juridique national considèrent aujourd’hui comme une infraction éventuelle, mais selon la propre conception que je peux me faire du racisme, hors de toute contrainte légale.
C’est ici une question de liberté de pensée, d’opinion, et rien ne peut a priori la circonvenir (du moins je l’espère).
Ce qui me préoccupe, c’est de sonder ton âme pour essayer de savoir ce à quoi on pourrait s’attendre si tu étais dans une position de décisionnaire politique ou/bien de conseiller, d’autorité morale d’alliés qui seraient en position d’exercer une influence quelconque sur la destinée de la communauté nationale et plus si affinités.
Pour cela je ne me soucis en aucun cas de ce que trop de responsables ou quidam ont pris pour habitude et même nécessité furieuse et compulsive de présenter comme des appels à la haine, et ce dans tes sketches, dans tes interventions hors cadre de la scène (notamment sur le plan politique), dans l’objet de tes rencontres, ou encore dans tes supposées accointances.
Dès lors que ton art principal est de provoquer, de flirter avec les limites de l’absurde, de la bétise et de la cruauté humaine, d’échanger sans tabous ni infréquentables, le tout pour éveiller ou pour réveiller les consciences, rien ne me choque a priori.
Ou plutôt, si à quelques reprises j’ai pu être choqué à la première écoute ou à la première lecture, ou quand j’ai vu la tête du client à qui tu t’adressais, à chaque fois que j’ai pris du recul, que je suis revenu sur le sujet, j’ai compris le contrepoint exact auquel renvoyait ton audace et ta charge de hussard (une vilénie, un travers de ta cible qui méritait d’être dénoncée en tant que telle ou en regard des pratiques d’une autre communauté, relayé par l’arbitrage nécessaire pour parvenir à une compréhension mutuelle et universelle) et en conséquence, d’approuver alors la légitimité et la force de l’attaque.
Pour prendre un exemple entre mille, quand tu as parlé dans un de tes sketchs de « ces juifs négriers reconvertis dans la finance internationale » j’ai eu du mal, et d’ailleurs la justice ne t’a pas loupé sur le coup.
Je t’avoue que j’ai mis du temps à surnager, t’y voyant apparemment rejeter à tort l’opprobre et l’horreur de cette infamie en principal voire en totalité à l’encontre de cette seule communauté.
Sauf qu’il n’y a pas qu’eux qui en ont croqué, les façades somptueuses des demeures longeant les quais de Bordeaux ou de Nantes témoignent bel et bien de la présence majoritaire de patronymes « de souche » parmi les propriétaires s’étant constitué ce patrimoine sur la sueur et la soumission de tes aïeux africains.
Mais j’ai ensuite eu l’occasion de découvrir l’existence d’un documentaire sur la genèse de ton projet de film sur l’esclavage, et la censure exercée ici en France pour t’empêcher de le financer.
Et in fine j’ai compris que tout d’abord tu t’attaquais bien à CES juifs, ceux d’entre eux qui en ont croqué, et non tous, encore heureux d’ailleurs (vu la rentabilité du métier, aucun ne se seraient sinon amusés à épouser d’autres desseins, visant par exemple à penser la théorie de la relativité ou à venir divertir le public sur scène en tandem avec toi), ensuite et surtout que le problème c’était que les institutions et/ou personnalités de cette communauté qui sont parvenus à te censurer avaient quant à elles pour seul dessein de masquer leurs propres turpitudes passées sans se préoccuper une seule seconde de la défense et de l’honneur de toute leur communauté ethnico-confessionnelle.
Pour ne rien te cacher, rien ne me choque jamais dans l’absolu car dans ma philosophie axiomique, le pire est dans le meilleur et le meilleur est dans le pire, que ce soit au niveau de chaque individu, de celui de chaque peuple ou communauté humaine tout comme de la communauté humaine toute entière.
C’est là où l’on trouve les pires travers que se distinguent aussi surement les plus grandes vertus et vice versa.
Par exemple c’est pour moi (et cela n’engage que moi) chez les rosbeefs que l’on trouve le moins de savoir vivre, et c’est pourtant un anglais, Kipling, qui a écrit cet hymne à la fraternité sans égal qu’est Tu seras un homme mon fils.
Chez les juifs, sans tourner autour du pot, comme certain ont de très grandes vertus, on en trouve d’autres avec les pires tares qui soient. A l’échelle de l’ensemble de la communauté humaine, rien n’est donc plus logique pour moi qu’on y trouve parmi les plus grandes personnalités et parmi les pires crapules, sans pour autant qu’on ne trouve de talent ou de vice nulle part.
Force est alors de reconnaitre pour moi que si tu rencontres un mur vis-à-vis de cette communauté et a fortiori vis-à-vis d'une frange particulière de celle-ci, c’est qu’elle ne manque pas de vices à cacher à proportion des vertus qui la distingue par d’autres égards.
Et par-delà si tu tapes sur tous avec une égale férocité, rien ne me surprend moins que ce soit vis-à-vis de cette communauté que tu rencontres la plus grande répulsion tout comme ce soit vis-à-vis d’elle que tu ais le plus d’occasions de nous faire rire.
Jusqu’ici donc il y a une totale cohérence dans ton art et je ne te reconnaîtrais plus ni ne m’en satisferais, si tu venais tout à coup à les ménager plus que d’autres.
Pour autant et c’est là que commence ma véritable interrogation, dès lors même que tu soulignes et/ou stigmatises très souvent l’hypersensibilité, la spécificité de cette communauté, la responsabilité qui t’incombe est d’en tenir compte en toutes circonstances.
Car si ton but est la paix, l’anti communautarisme, elle ne souffre d’exceptions ni de possibles laissés pour compte.
Or, et c’est là où des fois mon rire parfois s’atténue, c’est que si je te vois très bien et très souvent taper sur les travers de ceux qui prétendent fielleusement représenter l’ensemble de la communauté juive, si je salue et encourage mille fois ta volonté de démontrer l’imposture du sionisme et la séquestration qu’il opère sur la société, notamment au moyen du chantage à l’antisémitisme, je ne te vois que trop rarement distinguer avec autant de verve ceux et celles qui luttent dans le même sens que toi au sein même de cette communauté et en dehors.
Et surtout quand bien même les exemples manqueraient, car c’est chez eux parmi tous les autres qu’il est le plus difficile de s’afficher auprès de la « bête immonde » ou de se dédouaner entièrement des prétendues turpitudes de leur propre communauté, ton devoir est aussi de révéler ce qui peut permettre de nous rapprocher, de faire d’autant plus d’efforts ici pour mettre en lumière toute possibilité de réconciliation et de compréhension.
Mon sentiment intime en l’état, c’est que tu ne leur laisses que trop peu de répit, de pas assez de portes de sortie, et j’en viens à craindre parfois qu’ils soient au final les seuls dindons de la farce.
Si tu prônes la paix, et sur cela je n’ai aucun doute, tout comme j’ai la conviction de l’absence chez toi de toute velléité de violence de quelque nature que ce soit, le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est avec eux que cette paix sera la plus difficile à trouver.
Et comme tu es un humoriste mais aussi un homme engagé, le triomphe des idées que tu portes pourrait peut-être mener, si mal manié ou mal orienté par je ne sais quelle circonstance ou facteur que je ne maitrise en l’état, à ce que rien ne leur soit alors épargné, quelques soient leurs fautes ou absence de fautes passées.
Comme les gens bien sous tous rapports chez les juifs ne manquent pas, essaye peut être avec plus de vigueur encore de t’en rapprocher.
Et si ce n’est pas possible, donne peut être tout au moins toujours plus d'arguments à tes alliés, à ceux qui t’apprécient et te soutiennent, afin de pouvoir mettre en lumière ce qui rapproche de la paix, car comment veux-tu sinon que tout un chacun puisse te dé diaboliser quand il n’y a que trop peu de « munitions » pour désarmer le sentiment de haine et d’adversité.
C’est à chacun de se libérer en son âme et conscience sans qu’il n’y ait d’exclusive dans l’origine de la communauté, soit.
Mais dès lors que l’on ménage moins certain que d’autres ou que leur chemin pour se libérer serait plus escarpé, il est un devoir de leur en faciliter par tout moyen utile l’accès. Sans quoi il n’y a pas de vraie fraternité.