E Durkheim, contre le socialisme, pour le solidarisme.
E Durkheim a bien écrit un ouvrage intitulé "Le socialisme" (1928) mais il s'agit d'abord d'une critique du socialisme et du communisme et pour le reste d'une défense globale (avec des exceptions) de l'école saint-simonnienne.
- La critique marxiste de St Simon.
Pour lui, la direction de la société devait être assumée conjointement par la science, concrètement représentée par les hommes d'études, et par l'industrie en la personne des fabricants, négociants et banquiers, il est vrai transformés en une espèce de fonctionnaires, d'hommes de confiance de la société. A travers Saint Simon Durkheim défendait rien moins qu'une oligarchie technico-financière.
- Intégration et solidarité ou lutte des classes.
E Durkheim refuse la lutte des classes qu'il voit à l'époque dans le réel de la société française et pas dans un imaginaire . Cette lutte des classes est perçue comme une menace c'est bien pourquoi il plaide pour une société d'intégration. Le lien est à faire entre ce contexte, sa perception et sa théorie sociologique. La société d'intégration s'oppose surtout aux exclusions de l'emploi (chômage) et du logement mais pas aux questions de salaire, d'intensification du travail. On parlerait plus aujourd'hui de cohésion sociale et de justice sociale en ajoutant cependant l'idée que les riches sont trop riches.
Pour construire une "société d'intégration" E Durkheim défend la solidarité contre l'individualisme et le concurrentialisme de Spencer. Le solidarisme de Durkheim est donc de facture conservatrice tout à la fois contre la droite pro Spencer et contre la gauche socialiste. Durkheim n'est pas Jaurès plus à gauche que lui.
La préface de Pierre Birbaum au livre d'E Durkheim (Ed PUF Quadridge) sur "Le socialisme" est fort instructive. Le préfacier confirme : "Durkheim affirme son attachement aux notions de consensus, d'intégration et d'ordre." "Comme Mauss il refuse le recours aux "isme". Karl Mannheim le qualifiera de "positiviste bourgeois" dans la mesure ou il veut ne regarder que l'état réel sans imagination projetée sur l'avenir. La lutte des classes qu'il voit ne mène nulle part que vers plus de désordre. Durkheim est bien loin de Jaurès.
- Aujourd'hui le solidarisme perdure avec un néosolidarisme.
Aujourd'hui, Durkheim, Bouglé, Bourgeois et d'autres (Mauss) sont la matrice théorique du néosolidarisme du PS. Aile gauche du bloc bourgeois, sans perspective de changement systémique contre le capitalisme.
Le terme "néo" indique l'ajout d'un keynésiannisme (pas toujours) et de l'ESS soit l'économie sociale et solidaire qui est en principe a-capitaliste.
Les sociétés coopératives ne sont pas les sociétés anonymes faisant appel public à l'épargne. Mais l'ESS n'est pas par elle-même anticapitaliste. Tout dépend du contexte. Le capitalisme dominant accepte des sociétés acapitalistes à ses marges, pour peu qu'elles s'intégrent dans un univers marchand.
Christian DELARUE
Citation : Un socialiste est plus que jamais un charlatan social qui veut, à l’aide d’un tas de panacées et avec toutes sortes de rapiéçages, supprimer les misères sociales, sans faire le moindre tort au capital et au profit.
Friedrich Engels