En cette rentrée, l’école primaire fait l’objet d’une attention toute particulière ; et à juste titre car elle aurait dû être depuis longtemps privilégiée s’il y avait une volonté politique prioritaire que chaque élève réussisse au mieux sa scolarité obligatoire.
Cela n’a pas été le cas, et depuis longtemps. La situation s’est même nettement dégradée à partir notamment de 2008 et de la politique initiée par Xavier Darcos. Les sondages annuels effectués par le CSA à la demande du SNUipp montrent d’ailleurs que cela commence à être clairement perçu par les Français. Alors qu’ils n’étaient en août 2008 que 37% à estimer que « les mesures prises par le gouvernement pour l’école maternelle et élémentaire » allaient « plutôt dans le mauvais sens », ils sont désormais 50% à le penser ( 16% ne se prononçant pas ). Et en août 2011, « la réduction de l’échec scolaire » est jugée comme « allant plutôt dans le mauvais sens » par 61% des Français ainsi que « la formation des enseignants » ( par 59% ).
Et cela ne s’arrange pas en cette rentrée scolaire, bien au contraire. Alors que l’on sait maintenant ( grâce aux comparaisons internationales ) que le taux d’encadrement des élèves de l’enseignement primaire français est nettement inférieur à celui de la moyenne des pays de l’OCDE ( celui des élèves de l’ensemble du secondaire français étant tout juste égal à la moyenne de ces mêmes pays de l’OCDE ), on constate que c’est encore le primaire qui fait surtout les frais de la politique de non remplacement de un sur deux des fonctionnaires partant à la retraite ( politique pourtant clairement rejetée par 82% des Français, selon le sondage du CSA ) : 9000 enseignants en moins dans le primaire, 4800 dans le secondaire ( surtout dans les collèges, car les lycées doivent en principe rester ‘’à moyens constants’’ durant la période de leurs réformes ). C’est surtout l’école obligatoire qui trinque…
Plus significatif encore, cela commence à se savoir que le coût moyen de l’élève du primaire français est actuellement inférieur de 15% à celui de la moyenne des pays de l’OCDE, alors que le coût moyen de l’élève de lycée français est – lui - supérieur de 15% à celui de la moyenne des pays de l’OCDE. Certes les choix budgétaires ne font pas tout, mais ils sont significatifs de toute une politique et ils y participent activement.
In fine, comme l’ont déjà dit les sociologues Christian Baudelot et Roger Establet dès 1989 ( mais c’est plus que jamais d’actualité ) quand cessera–t-on de « compter sur la hausse du plafond pour relever le plancher » ? Et, bien sûr, d’avoir les résultats particulièrement inégalitaires qui vont avec une politique scolaire prioritairement orientée vers un ‘’élitisme dit républicain’’ ( selon les tests internationaux ‘’PISA’’’ la France est parmi les tout premiers pays où les écarts de résultats scolaires des élèves sont le plus fonction de leurs origines socio-culturelles ).
En un mot, il faut « refonder l’Ecole » - comme le dit Martine Aubry – et à partir du primaire. Il faut redresser l’Ecole sur ce qui devrait être sa base fondamentale, sur ses « fondements » : à savoir l’Ecole obligatoire, celle de tous, que l’on doit à tous et à chacun, et privilégier avant tout la maternelle et l’école élémentaire, en particulier la période sensible des apprentissages premiers où beaucoup se joue.
Un certain nombre de mesures qui figurent dans le programme du parti socialiste élaboré sous la houlette de Martine Aubry ( je peux personnellement en témoigner car je l’ai rencontrée alors deux fois pour ce qui concerne le domaine scolaire ) vont tout à fait dans ce sens. On peut en citer quelques extraits significatifs :« Rendre la scolarité obligatoire dès 3 ans ». « L’école primaire, une priorité absolue » […] c’est donc là qu’il faut concentrer les moyens, en particulier sur le premier cycle des apprentissages […] ; cela nécessite un engagement particulier : refonte des programmes et de leurs évaluations, classes à effectifs restreints là où c’est nécessaire, renfort éventuel d’un deuxième professeur dans certaines classes pour personnaliser l’enseignement… ».
La « Lettre aux Français » qui situe les engagements prioritaires de Martine Aubry , va bien sûr tout à fait dans ce sens : « mon plan pour l’école, dit-elle, se concentrera sur les cycles décisifs. J’accorderai une priorité à l’école primaire […]. La lutte contre l’échec au collège mobilisera aussi le gouvernement ». Et c’est d’abord à partir de là ( mais dans un cadre plus global ) , qu’il faut comprendre sa proposition phare, la « refondation » de l’Ecole : « Je souhaite refonder notre système éducatif, aujourd’hui en crise. Je proposerai dès 2012, après un débat national, une loi cadre qui définira les orientations fixées à notre école et le nouveau pacte éducatif entre la nation et l’ensemble des professionnels de l’éducation ».
LE SE-UNSA, l’un des principaux syndicats d’enseignants, se prononce lui aussi pour une « refondation de l’Ecole républicaine » dans sa conférence de presse de rentrée : « il faut tout à la fois faire cesser l’hémorragie des emplois et refonder l’Ecole de la République ».
Billet de blog 31 août 2011
Refonder l'Ecole à partir du primaire
En cette rentrée, l’école primaire fait l’objet d’une attention toute particulière ; et à juste titre car elle aurait dû être depuis longtemps privilégiée s’il y avait une volonté politique prioritaire que chaque élève réussisse au mieux sa scolarité obligatoire.
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