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Billet de blog 15 décembre 2010

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L'information doit être payante, certes...

On pourrait espérer que quelques médias plus engagés (ou plus curieux) que les autres s'interrogent de temps en temps de façon critique sur l'ordre linguistique mondial. Ce serait mal connaître les processus de circulation de l'information. C'est pourquoi en tant que militants espérantistes nous éprouvons une certaine satisfaction, en même temps que des regrets, à l'idée qu'un mécène aide à la diffusion de nos idées au moyen de la publicité...

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On pourrait espérer que quelques médias plus engagés (ou plus curieux) que les autres s'interrogent de temps en temps de façon critique sur l'ordre linguistique mondial. Ce serait mal connaître les processus de circulation de l'information. C'est pourquoi en tant que militants espérantistes nous éprouvons une certaine satisfaction, en même temps que des regrets, à l'idée qu'un mécène aide à la diffusion de nos idées au moyen de la publicité...

Depuis maintenant sept ans, M Etsuo Miyoshi consacre une partie de ses revenus (sans conteste fort élevés) à faire paraître dans les grands quotidiens européens des pleines pages de publicité en faveur de la langue équitable "espéranto". Aujourd'hui, en pages 16 et 17 du "Monde" (à l'occasion de l'anniversaire de LL Zamenhof), on pouvait lire un plaidoyer en faveur de la langue construite auxiliaire "espéranto".

Signe des temps: l'idée qui enthousiasmait tant de gens dans l'entre-deux guerres, l'idée qui progressait grâce au volontarisme de nombreux militants associatifs, potitiques, syndicalistes... a progressivement perdu du terrain après la Libération de 1944.

Il faut dire que les héros de la Victoire n'étaient pas seulement le Général De Gaulle ou le Maréchal Leclerc, mais aussi les G.I's distribuant généreusement bas nylon, chewing-gums ou cigarettes... Puis vint le Plan Marshall, et enfin la guerre froide, ainsi qu'un embryon d'Europe.

Il fallait à cette future Europe un moyen de communiquer.

Il était hors de question d'utiliser l'allemand, langue des ex-nazis... L'Italie et l'Espagne étaient des pays de peu d'importance, presque des "sous-développés". Le reste de l'Europe appartenait au bloc communiste. C'est donc l'anglais, langue des vainqueurs, qu'on introduisit progressivement dans les établissements secondaires. Aurait-on pu faire autrement? Probablement, mais les innovations sociales ne viennent jamais "d'en haut", elles doivent toujours être arrachées aux dominants par les dominés...Or l'espéranto est en grande partie un outil d'émancipation sociale... et en ce qui concerne les classes bourgeoises, elles parviennent à s'accommoder assez bien de la tutelle anglophone. Et naturellement, elles proclament qu'hors l'anglais, point de salut, tout en moquant ceux qui ne parviennent pas à se servir de l'idiome dominant.

Pourtant, cinq décennies après cette intronisation de la langue anglaise comme moyen privilégié (et perçu comme ultra moderne) de communication, les résultats restent assez médiocres.

Certes, le consensus semble presque total autour de l'anglais comme "lingva franca", mais les voix ne sont pas rares qui s'élèvent contre la pauvreté du "globish", et les échecs de nos compatriotes à le maîtriser (échecs, qui, on doit le dire et le faire savoir, se produisent en tout aussi grand nombre en Italie, au Portugal, au Japon, en Chine etc...)...

En ce qui concerne l'ordre linguistique, quels moyens ont donc les espérantistes pour compenser la "pensée unique" dominante ? Très peu. Leur enthousiasme et leur bonne volonté. C'est beaucoup, mais c'est insuffisant pour obtenir des résultats rapides.

Nous sommes donc reconnaissants à M Etsuo Miyoshi de mettre son argent au service d'un idéal humaniste, généreux et réaliste...

Par contre, nous ne sommes pas reconnaissants à la presse de ne pas aller creuser la question de l'ordre linguistique, dont certains pensent (et moi avec eux) que cet ordre linguistique est l'auxiliaire d'un ordre idéologique, social et économique. Sur cette question, la presse dans son ensemble pratique un silence assourdissant, et, sporadiquement, traite l'espéranto comme une charmante et sympathique curiosité sans importance réelle. Quel aveuglement!!! Aveuglement "de classe"??? Allez donc savoir...

Un lecteur doit payer pour obtenir l'information, c'est la garantie d'une information indépendante... mais est-il normal que des mécènes doivent payer pour faire passer un peu d'information honnête sur un sujet d'intérêt général? A mon avis, non, ce n'est pas "normal". C'est pourtant dans ce monde-là que nous vivons, et il faut bien "faire avec"...

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