La City dans le viseur du gouvernement britannique
Barclays est au coeur d'un scandale pour avoir tenté de manipuler le Libor et l'Euribor.
Le gouvernement britannique a annoncé samedi que le fonctionnement du taux interbancaire Libor allait être passé au crible par une instance indépendante, à la suite du scandale qui secoue la Barclays, dont le patron va devoir s'expliquer devant des députés. Barclays, une des quatre grandes banques du pays, a écopé cette semaine d'amendes record des deux côtés de l'Atlantique pour avoir tenté de manipuler le Libor, taux interbancaire de référence sur le marché londonien, et l'Euribor, taux de référence du marché monétaire en zone euro. Ces taux définissent le prix auquel les banques se prêtent de l'argent, mais aussi indirectement ceux des crédits aux ménages et aux entreprises.
"Nous devons réfléchir à ce qu'il convient de faire pour que le Libor fasse l'objet d'une réglementation adéquate à l'avenir", a expliqué le secrétaire d'État au Trésor, Mark Hoban, sur la BBC. Une étude indépendante va être menée pour examiner le fonctionnement actuel du Libor, améliorer la réglementation et réfléchir à d'éventuelles sanctions pénales pour punir les auteurs de manipulations, a précisé le secrétaire d'État, sans révéler quelle instance ou personnalité allait la conduire. Les conclusions de cet examen, attendues d'ici à la fin de l'été, permettront de faire "les changements nécessaires" au niveau législatif "pour que les gens aient confiance dans le Libor et soient sûrs qu'il y ait des sanctions pénales si des traders essaient de manipuler le Libor à l'avenir", a ajouté Mark Hoban.
Appels à démission
Le patron de Barclays est par ailleurs convoqué mercredi devant une commission parlementaire britannique pour s'expliquer sur cette affaire. "C'est l'arnaque la plus dommageable dont j'aie jamais entendu parler", a déploré samedi Andrew Tyrie, le président de la commission du Trésor qui doit entendre M. Diamond. "La réputation du secteur financier britannique a été sérieusement ternie", et la confiance du public dans les banques "encore plus érodée". Les appels à la démission du patron de Barclays se sont multipliés depuis que ce nouveau scandale a éclaté. Le très riche Américain, surnommé "le banquier aux 100 millions de livres", est considéré au Royaume-Uni comme le symbole des dérives de la finance. Il a alimenté la polémique en affirmant l'an dernier que "le temps des remords pour les banquiers était révolu", ou en obtenant des bonus jugés faramineux.
Le ministre britannique de la Justice, Ken Clarke, a estimé samedi que les banquiers qui ont commis des délits financiers devaient en répondre devant des tribunaux. "Des investigations doivent bien sûr encore être menées, mais une fois que ces enquêtes seront terminées, si des délits ont été commis, leurs auteurs devront être traduits en justice", a-t-il expliqué sur la BBC. "Nous ne traitons pas comme il convient les délits financiers au plan judiciaire dans ce pays", a-t-il ajouté. "Je pense qu'il est plus facile de s'en tirer quand on commet un délit financier plutôt que n'importe quel autre délit."
Le leader de l'opposition travailliste, Ed Miliband, dénonçant la "corruption institutionnalisée" qui mine le secteur financier, a réclamé qu'une commission d'enquête publique se penche pendant douze mois sur "ce qui se passe dans les recoins obscurs des banques". "Il y a des gens qui sont envoyés en prison pour avoir volé 50 livres de marchandises dans un supermarché. Mais rien ne se passe si quelqu'un gagne des dizaines de millions de livres de manière manifestement irrégulière", a-t-il souligné. Le gouvernement a rejeté pour l'instant l'idée d'une commission d'enquête publique sur le modèle de la commission Leveson, qui a été chargée de se pencher sur les pratiques des médias après le scandale des écoutes au sein du tabloïd News of the World.