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Billet de blog 9 septembre 2014

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Ryanair by Otelli : Un livre malsain

  Ryanair by Otelli, un livre malsain.Tant de mauvaise foi, tant d'acharnement à " inventer " le métier de pilote de ligne sous les plus médiocres traits est peu digne d'intérêt. Méprisable en revanche est cette manière de traiter des incidents aériens dans l'unique but de montrer qu'ils sont le produit d'une culture d'entreprise, celle de la Cie Ryanair, l'accusant de volontairement jouer avec la sécurité des passagers et des personnels. Ce qui est bien évidemment faux !

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Ryanair by Otelli, un livre malsain.

Tant de mauvaise foi, tant d'acharnement à " inventer " le métier de pilote de ligne sous les plus médiocres traits est peu digne d'intérêt. Méprisable en revanche est cette manière de traiter des incidents aériens dans l'unique but de montrer qu'ils sont le produit d'une culture d'entreprise, celle de la Cie Ryanair, l'accusant de volontairement jouer avec la sécurité des passagers et des personnels. 

Ce qui est bien évidemment faux !

Les éditions Altipresse publient un ouvrage détestable, tant il est inspiré par la culture syndicale française, par le Droit du travail français, par le verbiage bien souvent si médiocre du BEA français. 

L'exemple de l'approche de Memmingen du 23/09/12 m'a paru suffisamment significatif de ce sale état d'esprit qui transpire tout au long du livre d'où est absente la moindre objectivité et où la compétence supposée de l'auteur anonyme fait doute en permanence.

Je continue donc ici mon précédent post dans lequel j'ai voulu établir que l'idée même de conduire une approche à vue main droite ne caractérisait en rien un travail bâclé, un pression de l'entreprise ou une quelconque précipitation de l'équipage.

Bien au contraire la majorité des grandes Cies aériennes encouragent leurs pilotes à exécuter ces approches à vues dans le but de maintenir et de développer leurs " basic skills " dans le domaine du pilotage. De plus une approche à vue,  " un tour de piste " sont des manières en effet d'optimiser le traffic aérien, quand cela est possible. N'oublions pas qu'une des premières missions du contrôle aérien est d'accélérer le traffic en approche, devoir presque " régalien " tant il est vrai qu'accélérer le traffic en permanence minimise aussi le risque pour les autres avions à l'arrivée, de devoir attendre, alors qu'ils n'ont pas des ressources en carburant illimitées.

Demander une approche ILS 24 à Memmingen répondait par ailleurs vu la carte d'approche à une certaine logique : tous les équipages sont familiers des procédures ILS qui les guident sur le plan horizontal et tout aussi bien sur le plan vertical, et ces indications radioélectriques sont de plus parfaitement utiles en approche à vue.

À titre d'exemple le manuel d'opérations d'Air France impose à ses pilotes d'utiliser tous les moyens radios disponibles en approche à vue, comme bien entendu la plupart des Cies aériennes. La piste en service était la 06 du fait du vent (inférieur à 10 kts), mais les avions peuvent accepter du vent arrière jusqu'à 10 kts en général et même jusqu'à 15 kts dans certains cas.


Le contrôleur de Memmingen avait d'ailleurs tout de suite indiqué qu'il acceptait cette procédure et qu'il en informait Munich. 

 Tout se présentait donc très bien pour cette approche en piste 24. C'est la plus confortable pour un pilote puisqu'il y a un ILS, c'est la plus logique sur le plan géographique compte tenu de l'arrivée, et bien entendu de plus elle permet aux pilotes d'arriver directement au parking après l'atterrissage, sans avoir à faire un long roulage par les taxiways. Il est bien évident que le demi-tour sur un piste de 30 m de large est impossible. 

Contrairement à ce qu'écrit stupidement Otelli, et sans le moindre argument valable, l'avion n'était pas sur un profil " trop haut " 

Alors que s'est-il passé ? 

Une communication radio insuffisamment précise avec München Radar va créer la confusion :

  • L'équipage ne semble pas avoir compris ce qu'impliquait la clearance d'approche " standard ILS 24 " , c'est à dire : effectuer la procédure complète (tracé vert )
  • Et le contrôleur ne relève pas que le " read back " de l'équipage ne comporte pas le mot clé "standard".
  • L'avion ne devrait pas tourner à gauche sur le point OGROB, mais c'est néanmoins ce qu'il fait...

Dès lors il lui faut descendre plus bas que le dernier niveau auquel il avait été autorisé c'est à dire le FL 70, mais comme il ne suit pas la procédure standard il ne peut s'affranchir de demander l'autorisation : " standing by for lower "...

Annonce qui fait répondre au contrôleur " please descend according the procedure you are cleared " À mon avis une petite et subtile pique de la part du contrôleur qui voit bien que l'avion ne suit pas la procédure autorisée.
L'incident grave qui suivra trouve ici son origine de fait.

L'équipage est piégé et ne peut descendre conformément à la procédure, puisqu'il ne la suit pas, et perd du temps à argumenter qu'il n'était pas autorisé à une ( quelconque ) procédure... etc ...
Coincé au FL 70, il annonce trente secondes plus tard qu'il a le terrain en vue... le contrôleur, sympa, mais certainement pas dupe suggère alors l'approche à vue en disant " you request visual ? " Laquelle approche à vue accordée permet à l'équipage de descendre librement assurant lui-même son anti-collision avec le relief...
Mais la messe est dite, l'avion est trop haut et trop vite et ne pourra donc plus résorber cet excès d'énergie.

À suivre...  ici.

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