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Jean Baubérot-Vincent (ce double nom est le résultat d'ajouter le nom de mon épouse au mien, puisqu'elle a fortement contribué à faire de moi ce que je suis). Professeur émérite de la chaire « Histoire et sociologie de la laïcité » à l’Ecole pratique des Hautes Etudes. Auteur, notamment, de deux "Que sais-je?" (Histoire de la laïcité en France, Les laïcités dans le monde), de Laïcités sans frontières (avec M. Milot, le Seuil), de Les 7 laïcités françaises et La Loi de 1905 n'aura pas lieu (FMSH)

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Billet de blog 22 janvier 2015

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Jean Baubérot-Vincent (ce double nom est le résultat d'ajouter le nom de mon épouse au mien, puisqu'elle a fortement contribué à faire de moi ce que je suis). Professeur émérite de la chaire « Histoire et sociologie de la laïcité » à l’Ecole pratique des Hautes Etudes. Auteur, notamment, de deux "Que sais-je?" (Histoire de la laïcité en France, Les laïcités dans le monde), de Laïcités sans frontières (avec M. Milot, le Seuil), de Les 7 laïcités françaises et La Loi de 1905 n'aura pas lieu (FMSH)

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Voltaire... vous avez dit Voltaire

Une très courte Note, vu mes problèmes de vision. Mais j’apprends que le Traité sur la tolérance écrit par Voltaire, en 1762, quand il prend (assez tardivement !) la défense des protestants persécutés (ce qui est alors, depuis plusieurs décennies incongru, dans le contexte européen de progression de la tolérance) est en rupture de stock. Les enseignants, notamment, se précipiteraient pour l’acheter et en faire l’objet d’une leçon auprès de leurs élèves.

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Jean Baubérot-Vincent (ce double nom est le résultat d'ajouter le nom de mon épouse au mien, puisqu'elle a fortement contribué à faire de moi ce que je suis). Professeur émérite de la chaire « Histoire et sociologie de la laïcité » à l’Ecole pratique des Hautes Etudes. Auteur, notamment, de deux "Que sais-je?" (Histoire de la laïcité en France, Les laïcités dans le monde), de Laïcités sans frontières (avec M. Milot, le Seuil), de Les 7 laïcités françaises et La Loi de 1905 n'aura pas lieu (FMSH)

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Une très courte Note, vu mes problèmes de vision. Mais j’apprends que le Traité sur la tolérance écrit par Voltaire, en 1762, quand il prend (assez tardivement !) la défense des protestants persécutés (ce qui est alors, depuis plusieurs décennies incongru, dans le contexte européen de progression de la tolérance) est en rupture de stock. Les enseignants, notamment, se précipiteraient pour l’acheter et en faire l’objet d’une leçon auprès de leurs élèves.

Or, l'optique de Voltaire, quand il défend Calas, est essentiellement gallicane. Il ne prône en rien la séparation de la religion et de l’Etat (au contraire, il est dans l’optique du prince "despote éclairé"). Le Conseil d'Etat, lors du centenaire de la séparation, a indiqué que la loi de 1905 se situait, elle, dans la filiation de John Locke (Un siècle de laïcité, La Documentation française, p. 393) et de sa Lettre sur la tolérance de 1686-1689 (qui est, effectivement, dans une optique de séparation Eglise-Etat et considère l’Eglise comme une association). A consulter également sur ce sujet l’article d’Isabelle Agier-Cabannes dans Cosmopolitique (16, 2007, p. 133-144). Il faudrait  former les enseignants de façon à ce qu’ils sachent que les historiens d’aujourd’hui insistent sur les « transferts culturels » : chaque nation moderne s’est construite grâce à un ensemble d’influences réciproques avec les autres nations. Et la loi de 1905, en son Article 4 notamment (stratégiquement le plus essentiel), bénéficie de certaines expériences anglo-saxonnes antérieures (1).  Mais cela, on a l’impression que la tendance dominante de l’institution Education nationale a beaucoup de difficulté à l'entendre et à le transmettre, enfermée qu'elle est souvent dans une culture étroitement nationale. Alors, on est vraiment mal barré!

Pour faire vite, je me permets de renvoyer à mes propres travaux, j'ai tenté d'élucider les différences entre Locke et Voltaire (et les Lumières françaises) dans mon « Que sais-je? » sur Les laïcités dans le monde  (PUF, p. 20-28 de la 4ème édition) et, de façon plus approfondie dans Laïcités sans frontières (avec M. Milot, Seuil, p. 46-72), réfutant notamment le faux stéréotype selon lequel Locke refuserait la tolérance aux catholiques. Quant aux athées, Voltaire les exclut (dans le fameux Traité) de façon nettement plus virulente (il préfère les « superstitieux ») que Locke (alors qu’il écrit près de 75 ans plus tard). Cela n’empêche pas d’apprécier Voltaire, à condition de ne pas le canoniser !

[1] Cf. mon Histoire de la laïcité en France (PUF, « Que sais-je ? », p. 76ss. De la 6ème édition)

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