Ce jeudi, lors d’une conférence de presse à Strasbourg, Viorel Costache, Rom et président de PRALES, et Gabriela Munteanu Cabon, formateur et traductrice roumaine, ont fait sévèrement le point sur la situation inacceptable des Roms-migrants à Strasbourg. Abordant méticuleusement et avec beaucoup de détails le statut du camp Hoche mis en place par la Mission Roms et pudiquement appelé “espace temporaire d’insertion”, les violences et harcèlements que subissent les familles Roms de la part des agents de la Mission Roms et la police municipale, laissant largement la parole aux familles roms présentes pour décrire leur calvaire quotidien.

Les propos recueillis ce jour ont confirmé, et même au-delà, ce que La Feuille de chou décrit depuis des années de la politique anti-roms de la Ville de Strasbourg, du réél statut du camp Hoche dont nous dénoncions la véritable nature dès mars 2014 dans notre dossier « Espace Hoche », un camp pour Roms, grillagé et surveillé, à Strasbourg, siège de la Cour européenne des Droits de l’Homme alors que les autres medias et associations se taisaient, et plus récemment encore de la brutalité avec laquelle la « mission rom » et la police municipale interviennent sur les terrains.

La conférence de presse s’est déroulée en 2 temps: d’abord, un état des lieux du sort réservés aux Roms-migrants à Strasbourg, puis, le témoignage direct de familles Roms devant la douzaine de personnes présentes dont une bonne part de medias (AFP, DNA, Rue89, Radio Bleue…) qui, pour une fois, s’étaient déplacés en nombre pour révéler en mai 2015 ce qu’ils auraient pu dire depuis longtemps et ainsi éviter des souffrances supplémentaires. Les organisateurs ont regretté l’absence, à cette conférence comme sur le terrain, des associations se prétendant de défense des Roms et plus largement des droits humains, plus occupées à courir après les subventions ou à protéger, par leur silence, le pouvoir local.

On a vu aussi M.-D. Dreyssé, élue et adjointe aux Solidarités, maîtresse d’oeuvre, aux côtés de la Préfecture, du camp Hoche, et première responsable hiérarchique de la Mission Roms, passer devant la porte de la conférence de presse en demandant “Il se passe quoi ici ?” puis longer le trottoir où se trouvaient les familles Roms. Traversant la rue à pied (pour aller attacher son vélo dans le but de s’inviter?) et nous apercevant à la porte, elle est finalement remontée sur son vélo et a filé.
Si de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer les agissements honteux des agents de la Mission Roms ainsi que ceux de la police municipale vis-à-vis des familles, nous tenons à rappeler que ces agents obéissent à des ordres de leur hiérarchie plus ou moins directe et aux élus de la Ville. Même si chaque agent applique selon sa propre interprétation la mission qui lui est confiée, c’est bien en premier lieu au missionnaire qu’il faut demander des comptes et qui aura à en rendre. Depuis 18 mois, plusieurs élus se sont rendus sur le camp Hoche, d’autres ont été avertis, et tous savent pertinemment ce qui s’y passe… Leur silence vaut complicité.

A la porte du lieu de la conf de presse, les femmes et les enfants prennent connaissance du dossier de presse rédigé par G.Munteanu et sourient en se reconnaissant sur les photos.


Cette femme transporte toute la journée son mince matelas de mousse pour éviter que les agents de la Mission Roms et la police lui confisquent.
Le dossier de presse rédigé par G.Munteanu et distribué en version papier aux médias présents :


La conférence de presse
La situation des Roms-migrants à Strasbourg. La véritable nature du camp Hoche.
Extraits de la vidéo ci-dessous:
V. Costache: «”L’espace Hoche”, j’ai pensé que c’était un endroit dans la ville. Non, c’est loin de la ville, c’est à 12-13 km. Où ils les ont mis? La surprise pour moi a été de voir des agents de sécurité qui nous ont demandé de nous identifier et qui nous ont fiché. Excusez-moi mais ça c’est un camp de concentration moderne. C’est un projet d’intégration ça ou d’expulsion ? Ils (les Roms) sont marginalisés de la vie civile: c’est ça l’intégration? Non, ça, c’est de la ségrégation ! (..) Je ne sais pas combien, ils (la Ville) ont dépensé d’argent mais c’est de l’argent jeté par la fenêtre, ça ne sert à rien !»
G. Munteanu Cabon: « La majorité de la nourriture distribuée à Hoche est périmée, il y a eu des intoxications alimentaires. Il y a une invasion de cafards et de bestioles dégueulasses dans les caravanes, ça dure depuis quelques mois. Les caravanes sont vraiment envahies. La mesure qui a été prise sur place est de leur distribuer une espèce de papier collant qui attrape les bestioles. Ils sortent la nuit, les enfants sont piqués, les adultes sont piqués.(…) Les familles ne comprennent pas en quoi c’est un projet d’insertion et poussent un cri d’alarme depuis des mois.» C’est la parole que M.Costache transmet des Roms.
V. Costache: « Pour moi, le terrain de Hoche tel qu’ il est, clôturé, avec des vigiles de sécurité à la porte qui m’ont demandé mes papiers (mais pourquoi doit-on être fiché ? les camps de concentration, je vous rappelle qu’ils étaient fermés, il y a 70 ans…), le camp Hoche aujourd’hui, on peut dire que c’est un petit camp de concentration moderne. Après 70 ans, Strasbourg a fait un petit camp de concentration moderne.»
La suite des vidéos et des transcriptions:
http://la-feuille-de-chou.fr/archives/80368