A Londres le procès en cours des écoutes téléphoniques aux dépens d’acteurs et de parents de victimes, organisées par le couple infernal, Andy Coulson et Rebekah Brookes, du groupe News International du tristement célèbre Rupert Murdoch, apporte son lot régulier de petits détails et d’informations plus accablantes les unes que les autres sur la pratique de ce que les deux sus nommés considéraient comme du journalisme. Mais jeudi 12 décembre, en répondant aux questions de l’avocat général, Andy Coulson a suscité l’embarras du tribunal et provoqué l’hilarité parmi les journalistes et dans le public.
En effet, Coulson a été invité à confirmer les informations que Clive Goodman, spécialiste de Buckingham Palace pour feu The News of the World, hebdomadaire à scandales que Murdoch a sabordé pendant la tempête engendrée par la découverte du phone-hacking, a transmises à l'époque. Les faits remontent aux jours qui ont précédé le second mariage du prince Charles avec Camilla Parker-Bowles, le 9 avril 2005. Goodman voulait monnayer, auprès de Coulson, une information qu’il avait tirée des coulisses de Buckingham Palace. Selon le même Goodman, sa gracieuse majesté, comme en témoigne la photo de David Hartley, aurait fait part aux autorités policières de sa très vive irritation face au comportement des policiers chargés de la sécurité à Buckingham.
En effet, crime de lèse-majesté évident et accablant, ces derniers auraient très régulièrement et généreusement puisé dans les bols et ramequins royaux qui contenaient les amuse-gueule destinés aux invités des réceptions préalables au remariage du princier rejeton. Pire même, et l’on voit là que le bobby moyen n’est plus ce qu’il était et que tout se perd dans le royaume y compris les bonnes manières, les mêmes auraient eu l’outrecuidance de se servir dans les récipients disposés le long des couloirs qui conduisent aux appartements privés du souverain. Car, détail pittoresque, la reine est très friande de noix de cajou, de mélange de Bombay et d’amandes, et elle avait constaté que le niveau des amuse-gueule baissait, tout simplement parce qu’elle avait fait des marques sur les parois des ramequins. C’est Andrew Edis, l’avocat général, qui a eu la redoutable tâche de rapporter ces propos par le biais du courriel de Goodman pour obtenir des aveux de Coulson.
Le fou rire a été d’une telle ampleur qu’il a fallu, selon le Guardian, procéder à une interruption de séance. Ce procès des écoutes téléphoniques a mis en lumière des faits et des agissements gravissimes et dangereux pour la démocratie. Mais cet épisode du plus haut burlesque a également mis en exergue l’avarice de la reine qui semble légendaire d’après le Guardian toujours — les défenseurs de la monarchie pourront toujours dire qu’elle utilise ainsi avec parcimonie les deniers publics qui lui sont alloués… — et donne à penser que depuis 2005, vu de Buckingham, rien ne semble plus grave et tragique que la disparition de cacahuètes…

Trois des victimes potentielles de vols d'amuse-gueule
© Alastair Grant / AP