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Billet de blog 28 novembre 2011

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Richard Scott (1914-2011) : journaliste libre et talentueux

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Photo : Don McPhee / The Guardian

Richard Scott était une figure respectée du journalisme au Royaume-Uni et un membre éminent de ce qui est devenu le Guardian Media Group. Journaliste d’abord et avant tout, Richard Scott a aussi longtemps présidé le conseil d’administration du quotidien britannique. Il est mort le 11 novembre, il avait 97 ans. Petit-fils du célèbre C.P. Scott, fondateur du Manchester Guardian en 1929, Richard commença sa carrière de journaliste en 1947.

Un parcours professionnel peut, de toute évidence commencer sous le sceau de l’ironie du sort, puisqu’il entama sa carrière au service étranger du journal, après avoir côtoyé, pendant ses études à Cambridge, Guy Burgess, agent double britannique qui passa à l’Est, en 1951, avec Anthony Blunt. Conscient que le chapeau qu’on lui offrait était peut-être trop grand pour lui, il ne tarda pas à montrer son talent et son indépendance. En effet, lorsque le conflit de Suez éclata en 1956, Scott partit couvrir l’événement pour le Manchester Guardian.

Ses articles eurent un tel impact qu’ils furent fréquemment cités par le BBC World Service, puis par la BBC. Cette conjugaison de talent et de notoriété irrita au plus haut point le premier ministre conservateur de l’époque, Anthony Eden, qui tenta de faire censurer les reportages que la BBC relayait. Non seulement la BBC demeura sourde aux pressions, mais maintint sa confiance totale à Scott, tout comme le fit son employeur le Manchester Guardian. Une situation qui laisse songeur et admiratif, de ce côté-ci de la Manche. Au Guardian et à la BBC il n’y a ni valet ni laquais. La même année, Scott devint président du Trust, l’organisme indépendant qui dirige le quotidien, ainsi que l'Observer maintenant.

Sous sa houlette, le Manchester Guardian devint le Guardian en 1959, puis quitta Manchester pour Londres à partir de 1961. La passion du journalisme était telle chez Scott qu’il quitta Londres pour devenir le correspondant du Guardian à Washington, fonction qu’il partagea avec Alistair Cooke, dans une parfaite harmonie, jusqu’au début des années 1970. Il prit sa retraite en 1974 et revint à la tête du Trust. Entretemps Richard Scott dut faire de nombreux allers-retours vers le Royaume-Uni, pendant la période 1964-1966, pour empêcher son cousin Laurence Scott, également membre du Trust, de mener à bien une OPA sur le Times qui devait conduire à une fusion entre les deux journaux.

Cet acte de résistance lui valut un profond respect et une sincère admiration de la part de la rédaction et fit de lui le garant et le symbole de l’indépendance du Guardian. L’auteur de The Guardian: Biography of a Newspaper, David Ayerst a résumé le caractère de Richard Scott ainsi : a judge summing up to a jury of readers, not a judge trying a case alone and delivering judgment, un juge résumant l’actualité à un jury de lecteurs, mais pas un juge qui traitait une affaire seul et délivrait sa sentence. Richard Scott avait choisi la France pour sa retraite, où il cultiva sa vigne d’abord à Limoux dans l’Aude puis à Lagrasse dans les Corbières.

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