Stéphane RICHARD, PDG d’Orange, vient d’être mis en examen, dans le cadre de « l’affaire TAPIE » pour « escroquerie en bande organisée ».
Cet ancien Directeur de cabinet de Jean-Louis BORLOO, puis, surtout, de Christine LAGARDE a véhémentement protesté contre la motivation de sa mise en examen en considérant que : « le chef de mise en examen qui lui a été notifié est infamant et grotesque ».
Cette réaction est très intéressante, en ce sens qu’elle signifie que ce Monsieur a, au moins, la conscience que certains comportements, si la justice les confirmait, sont infamants. Savoir si sa mise en examen est grotesque est une toute autre affaire et l’emploi de ce mot affaiblit considérablement la force de l’autre partie de sa protestation.
Grotesque, il a dit grotesque … à quelle acception de ce mot voulait-il faire allusion ? Pour tenter de comprendre j’ai cherché les synonymes de « grotesque » et j’ai trouvé :
- aberrant : en contradiction avec la raison, peut-être … mais uniquement à la condition de croire encore qu’un fonctionnaire ne peut pas être inspiré par autre chose que la défense de l’intérêt général,
- bizarre : oui, voire un haut fonctionnaire, enfant chéri de la République, poursuivi pour s’être, peut-être, associé à des malfaiteurs … c’est « bizarre »,
- comique : je dois être privé du sens de l’humour nécessaire, car ça ne me semble vraiment pas drôle du tout,
- incroyable : là le recours au mot « grotesque » m’apparaît parfaitement justifié. Comment peut-on croire, en effet, qu’un homme comme ça se soit prêté à des opérations que sa morale aurait réprouvées ? Oui, c’est incroyable !
Mais, au-delà de tout qualificatif choisi par le « mis en examen », quelle tristesse ! Pour l’instant seuls deux membres de « l’association de malfaiteurs » ont été dénoncés par une mise en examen.
Le premier était un Président de cour d’appel en retraite. Un homme qui aurait pu passer sa confortable retraite en aidant bénévolement de pauvres gens à défendre leurs modestes intérêts dans le maquis des procédures judiciaires. Encore eut-il fallu qu’il soit dénué de tout appât du gain, alors que participer à un « tribunal arbitral » concernant Bernard TAPIE pouvait lui rapporter vingt cinq années de SMIC net en quelques semaines de travail.
Le second est donc ce petit-fils de berger cévenol qui n’imaginait sûrement pas que son petit-fils fréquenterait le gratin de la société et s’efforcerait vraiment de devenir un richard, en minuscule et non un RICHARD, pauvre mais dont le nom méritait la majuscule.
Mais une association de deux membres, même si, selon la célèbre réplique de PAGNOL : « Ils ne sont qu’un mais ils ont le col et la cravate », c’est peu. Il manque quelques autres membres, dont certains pourraient avoir occupé des postes encore plus importants.
Nous le sentions, nous le dénoncions … mais nous n’avions pas la crédibilité des Juges d’instruction, notre République a bien failli sombrer dans les fosses marines.
Combien de temps nous prendra le rétablissement d’une haute valeur morale publique ? Est-ce même récupérable sans passer par des drames ?
Jean-Paul Bourgès 13 juin 2013